Vu la requête, enregistrée le 14 avril 2006, complétée par un mémoire enregistré le 6 octobre 2006, présentée pour M. Vincent X, Mlle Emilie X, M. et Mme Guy Y, élisant domicile ..., et M. Jean-Louis Z, élisant domicile ..., par Me Kroell, avocat ; M. Vincent X, Mlle Emilie X, M. et Mme Guy Y et M. Jean-Louis Z demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0301276-0301683 en date du 30 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné le Centre hospitalier universitaire de Nancy à leur verser des indemnités, qu'ils estiment insuffisantes, en réparation des divers préjudices qu'ils ont subis suite au décès le 20 juillet 1999 de leur mère, fille ou compagne, Mme Josiane Y ;
2°) de condamner le Centre hospitalier universitaire de Nancy à payer, en réparation des divers préjudices qu'ils ont subis suite au décès le 20 juillet 1999 de Mme Josiane Y, à :
- M. Vincent X une somme de 116 142,39 € ;
- Mlle Emilie X une somme de 121 762,89 € ;
- M. et Mme Guy Y une somme de 131 745,75 € ;
- M. Jean-Louis Z une somme de 65 185 € ;
3°) de mettre à la charge du Centre hospitalier universitaire de Nancy une somme de 15 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- la requête d'appel est recevable puisqu'elle a été enregistrée avant l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du jugement ;
- concernant le préjudice personnel de Mme Josiane Y :
- les souffrances physiques endurées par Mme Josiane Y ont été sous- estimées ; l'opération qu'elle a subie a duré cinq heures ; elle a eu mal au dos suite à l'opération ; dès le deuxième jour, elle a souffert de vomissements, de diarrhées et d'hyperthermie ; le 20 juillet, jour du décès, les douleurs étaient majeures (corps couverts de marbrures, extrémités violacées) ; elle n'a pas fait l'objet de traitement anti-douleur ou plutôt la posologie anti-douleur a été sans effet ;
- elle a aussi souffert moralement, se sentant angoissée et abandonnée ; elle s'est vue mourir, laissant ses trois enfants mineurs derrière elle ;
- en raison des soins de mauvaise qualité qui lui ont été dispensés, elle a subi un préjudice lié à une perte de chance de survie ;
- ces chefs de préjudice doivent être indemnisés à hauteur de 30 490 € au lieu des 6 000 € accordés par les premiers juges ;
- concernant M. Vincent X :
- son préjudice moral est considérable puisqu'il n'avait plus de relations qu'avec sa mère et qu'il a assisté à son décès ; il en sera fait une juste évaluation en lui accordant 48 784 € ;
- le préjudice économique doit être chiffré à 22 145,43 € conformément au barème de l'ONIAM ; il a été privé de 23,3 % des revenus de sa mère jusqu'à l'âge de ses 25 ans dès lors que la défunte était divorcée ; le capital-décès qu'il a perçu de la caisse primaire d'assurance maladie n'aurait pas dû être déduit de son indemnité ;
- le préjudice matériel lié à la vente de la maison de Mme Josiane Y, qui a été causée par le décès, est de 35 049,63 € ;
- concernant Mlle Emilie X :
- son préjudice moral est considérable ; il en sera fait une juge évaluation en lui accordant 48 784 € ;
- son préjudice économique doit être chiffré à 27 765,93 € conformément au barème de l'ONIAM ; elle a été privée de 23,3 % des revenus de sa mère jusqu'à l'âge de ses 25 ans ;
- le préjudice matériel lié à la vente de la maison de Mme Josiane Y, qui a été causée par le décès, est de 35 049,63 € ;
- concernant M. et Mme Guy Y :
- leur préjudice moral est considérable, leur relation avec leur fille étant très étroite surtout depuis son divorce ; il devra leur être alloué à chacun une somme de 45 735 € ;
- leur préjudice matériel sera compensé par l'octroi d'une indemnité à hauteur de 40 275,75 € ; suite au décès, ils ont dû agrandir leur maison pour héberger leurs petits-enfants ; ceci est la conséquence directe du décès de leur fille et non de la mésentente existant avec leur ex-gendre ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ils ne possédaient plus leur maison sis ... permettant d'accueillir leurs-petits enfants ; ils ont dû aussi supporter des frais de contentieux pour les procès engagés contre leur ex-gendre ;
- concernant M. Jean-Louis Z :
- son préjudice moral ne peut être réparé qu'à hauteur de 45 735 €; compagnon de Mme Josiane Y, ils devaient se marier ; ils avaient construit une maison ensemble ; il a participé à l'éducation des enfants ;
- il a subi un préjudice matériel en lien avec le décès à hauteur de 19 450 € puisque la maison de Mme Josiane Y a été vendue ; il avait prêté de l'argent, acheté des matériaux et consacré beaucoup de temps et d'énergie ; il est en droit d'obtenir le remboursement des frais funéraires ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2006, présenté pour le Centre hospitalier universitaire de Nancy, par Me Cuinat, avocat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- la requête est irrecevable pour tardiveté ;
- une partie des souffrances physiques endurées par Mme Josiane Y est liée à l'opération initiale ; les douleurs liées à l'infection n'ont duré que quelques jours ;
- le préjudice moral des appelants a été évalué conformément à la jurisprudence habituelle ;
- les pertes de revenus subies par les enfants ont été généreusement évaluées ;
- la vente de la maison de Mme Josiane Y n'a causé aucun préjudice, aucune moins-value immobilière n'ayant été constatée ; de plus, la vente ne s'imposait pas, une mise en location étant envisageable ; la somme sollicitée de 102 283,58 € ne correspond à rien ;
- l'agrandissement de la maison des époux Y est dû au litige familial les opposant au père de leurs petits-enfants ; il constitue une plus-value et non un préjudice ; les frais de procédure réclamés sont sans lien direct avec le décès de Mme Josiane Y ;
- M. Z a été remboursé des sommes qu'il avait prêtées à Mme Josiane Y ; le remboursement des travaux qu'il a réalisés n'est pas dû par l'hôpital mais concerne la succession de la défunte ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2008 :
- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,
- les observations de Me Kroell, avocat de M. Vincent X, de Mlle Emilie X, de M. et Mme Guy Y et de M. Jean-Louis Z, et de Me Cuinat, avocat du Centre hospitalier universitaire de Nancy,
- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par l'hôpital intimé :
Considérant, d'une part, que M. Vincent X, Mlle Emilie X, M. et Mme Guy Y et M. Jean-Louis Z demandent la réformation du jugement en date du 30 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy n'a que partiellement fait droit à leurs prétentions indemnitaires tendant à la réparation par le Centre hospitalier universitaire de Nancy des préjudices qu'ils ont subis suite au décès le 20 juillet 1999 de leur mère, fille ou compagne, Mme Josiane Y ; qu'au soutien de leur critique du jugement, les appelants reprennent intégralement les demandes formées et l'argumentation développée en première instance ; qu'il ne ressort pas de l'instruction qu'à l'exception du préjudice matériel invoqué par M. et Mme Y, les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, écarté à tort la réparation de certains chefs de préjudices qui étaient sans lien direct avec le décès de Mme Josiane Y ou fait une évaluation insuffisante des chefs de préjudice qu'ils ont retenus comme établis ;
Considérant, d'autre part, que si les époux Y, parents de la victime, ont dû agrandir leur maison pour héberger leurs petits-enfants dont ils s'étaient vu attribuer la garde suite au décès de leur fille par décision du juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Nancy du 5 août 1999, les travaux qu'ils ont engagés ainsi que les frais de procès qu'ils ont également exposés n'étaient pas la cause directe et immédiate de la faute commise par l'hôpital intimé mais de la mésentente familiale existant entre eux et le père divorcé des enfants ; qu'ils ne sauraient, pour ce motif, obtenir réparation du préjudice matériel dont ils font état ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Vincent X, Mlle Emilie X, M. et Mme Guy Y et M. Jean-Louis Z ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal n'a que partiellement fait droit à leurs demandes indemnitaires ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête susvisée de M. Vincent X, de Mlle Emilie X, de M. et Mme Guy Y et de M. Jean-Louis Z est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Vincent X, Mlle Emilie X, M. et Mme Guy Y et M. Jean-Louis Z, au Centre hospitalier universitaire de Nancy et à la caisse primaire d'assurance maladie de Moselle.
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N° 06NC00559