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20/12/2007 | FRANCE | N°06NC00026

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2007, 06NC00026


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2006, présentée pour la société SA SOUTIRAN ET CIE, anciennement dénommée société financière des Chaulières, dont le siège est 6 rue de l'Eglise à Bouffignereux (02160), représentée par son président-directeur-général en exercice, par la SCP d'avocats Fossier ; la SA SOUTIRAN ET CIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 8 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles el

le a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 ;

2°) de prononcer la...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2006, présentée pour la société SA SOUTIRAN ET CIE, anciennement dénommée société financière des Chaulières, dont le siège est 6 rue de l'Eglise à Bouffignereux (02160), représentée par son président-directeur-général en exercice, par la SCP d'avocats Fossier ; la SA SOUTIRAN ET CIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 8 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 9 648 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que, s'agissant de l'abandon des créances Distrial, le tribunal a estimé que l'administration apportait la preuve de l'acte anormal de gestion au motif que la requérante n'était pas en mesure de justifier de l'existence de contreparties ; en raison du retard dans l'ouverture du magasin situé à Champniers, qui n'a pu être effective qu'en novembre 1994, la société requérante n'a fourni aucune prestation à sa cliente, ce qui justifiait l'annulation de la créance ;

- le tribunal a dénaturé les faits en estimant que les abandons d'intérêts consentis à la société Domaine de Saint-Ser auraient été faits sans contrepartie, alors que la société se trouvait en difficultés financières depuis 1994 et que l'administration n'a pas contesté cette situation déficitaire ;

- le redressement relatif à la provision pour créance douteuse est injustifié, le caractère probable d'une partie de la créance résultant manifestement de la situation financière obérée de la filiale ;

- les honoraires facturés au cabinet Feugas, avocat fiscaliste intervenu en 1996 dans l'établissement des déclarations fiscales de la société requérante et le suivi juridique de la société, sont une charge déductible ;


Vu le jugement attaqué ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2006, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre conclut au rejet de la requête de la société ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ; les difficultés d'ouverture du magasin géré par la société Distrial ne justifient pas les écritures comptables ayant annulé des prestations administratives pourtant dûment payées par le client et encaissées par la requérante ; les facturations de prestations n'ont jamais été contestées par le client ; la renonciation à la facturation d'intérêts à la société Domaine de Saint-Ser relève d'un acte anormal de gestion, la requérante ne donnant aucune précision sur l'intérêt commercial et financier seul de nature à constituer la contrepartie aux avances consenties ; la requérante n'apporte aucune justification sur les prestations du cabinet Feugas, dont les honoraires ne peuvent donc être déduits en charges ; l'existence de plusieurs bilans déficitaires chez la société Domaine de Saint-Ser ne suffit pas à démontrer que le recouvrement de la créance serait compromis ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2007 :

; le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

; et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;


Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne l'abandon de créance à la société Distrial :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que l'abandon de créance accordé par une entreprise au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société financière des Chaulières, aujourd'hui dénommée SA SOUTIRAN et CIE, a facturé des prestations administratives et comptables à la SA Distrial, dont elle détient la majorité du capital, à hauteur de 390 000 F hors taxes pour 1994, puis annulé ces prestations par une écriture comptable en date du 31 décembre 1994 ; que le service a estimé que cet abandon de recettes procédait d'une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion et a réintégré ladite somme dans le bénéfice imposable au titre de l'exercice clos en 1994 ;

Considérant que la société requérante soutient que l'annulation comptable et la soustraction du chiffre d'affaires des facturations concernées s'expliquent par le fait que les prestations n'ont pas été effectivement réalisées au profit de la société Distrial ; qu'elle fait valoir à cet effet que si le conseil d'administration a décidé le 2 décembre 1993 de facturer à la société Distrial des prestations administratives et comptables pour un montant mensuel de 30 000 F hors taxes dans le cadre d'un contrat conclu pour l'ouverture d'un nouveau magasin à Champniers, elle n'a pas eu a assurer de prestations effectives en raison du retard d'ouverture de l'établissement en fin d'année 1994, et a, dès lors, décidé, nonobstant le caractère forfaitaire des honoraires, de ne pas maintenir cette facturation dans le but de conserver des relations commerciales avec l'entreprise ; qu'il n'est cependant pas contesté que des frais de déplacement au siège de la société Distrial ont été passés en charges sur la période concernée ; que la société financière des Chaulières a périodiquement établi des factures de prestations que la société Distrial n'a pas contestées et a effectivement réglées à compter du 20 octobre 1994 ; que ces sommes ont été encaissées par la requérante, qui n'allègue même pas les avoir remboursées ; que, dans ces conditions, l'administration doit être réputée apporter la preuve que cet abandon de créance relevait dès lors d'une gestion commerciale anormale ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans le bénéfice imposable de la société requérante au titre de l'exercice clos en 1994 ;

En ce qui concerne la facturation des intérêts des avances à la société Domaine de Saint-Ser :

Considérant que le fait de consentir des prêts sans intérêt et sans indexation à un tiers constitue une libéralité étrangère à l'intérêt social sauf s'il est établi l'existence d'une contrepartie ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avances est une filiale de la société, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société-mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté ;

Considérant qu'après avoir constaté que le compte de la société Domaine de Saint-Ser, filiale de la requérante, présentait un solde débiteur dans le comptes de cette dernière, le service a réintégré dans les bénéfices de la société financière des Chaulières, imposables au titre des exercices clos en 1994 et 1996, le montant des intérêts non réclamés à la société Domaine de Saint-Ser, en appliquant au titre de l'année 1994 le taux, non contesté, de 7,17 % retenu par la société requérante pour les avances consenties à un autre filiale , en situation déficitaire, la SNC Holdis et pour l'année 1996 le taux de 7,17 % servi par la société requérante en rémunération des avances en compte courant consenties aux associés, au lieu du taux de 6,42% facturé par la requérante pour ses propres avances en compte courant ; que si la société financière des Chaulières soutient que les abandons d'intérêts ont été effectués en vue d'éviter l'aggravation de la situation financière de sa filiale, en situation déficitaire depuis 1994, elle n'apporte cependant aucun élément précis de nature à établir la réalité et la consistance de l'intérêt commercial et financier allégué et seul de nature à constituer la contrepartie aux avances sans intérêts ; qu'ainsi, en se prévalant de l'absence de contrepartie retirée par la société de sa renonciation à percevoir des intérêts, l'administration apporte la preuve du bien-fondé des redressements relatifs aux abandons d'intérêt consentis à la société Domaine de Saint-Ser ;

En ce qui concerne les honoraires versés au cabinet Feugas :

Considérant que la société financière des Chaulières persiste à demander la déduction en tant que charges des honoraires versés au cabinet Feugas d'un montant de 47 487 F, dont elle indique, après avoir initialement soutenu que la facture correspondait à une étude relative à l'évaluation des filiales, qu'ils ont été versés en rémunération d'une mission de contrôle de la régularité dans l'établissement des déclarations fiscales ; qu'elle n'apporte cependant aucun élément probant de nature à justifier la réalité de la prestation effectuée pour son compte ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction la somme litigieuse ;

En ce qui concerne la provision pour créance douteuse :

Considérant que la société financière des Chaulières a constitué au cours de l'exercice 1996 une provision de 374 752 F pour créance douteuse ; que pour justifier, comme il lui appartient de le faire, la constitution de cette provision, la société requérante se borne à faire état de la mauvaise situation financière de la société Domaine de Saint-Ser et à produire le bilan déficitaire de cette société au 31 octobre 1996 ; qu'elle n'apporte pas ainsi d'éléments permettant d'évaluer, avec une précision suffisante, le risque de non recouvrement de la créance à laquelle se rapporte la provision litigieuse et ne justifie dès lors pas du caractère de probabilité de la perte à laquelle cette provision avait pour objet de faire face ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SA SOUTIRAN ET CIE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la société SA SOUTIRAN ET CIE la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;



DECIDE



Article 1er : La requête de la SA SOUTIRAN ET CIE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SOUTIRAN ET CIE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


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N°06NC00026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00026
Date de la décision : 20/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : FOSSIER SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-12-20;06nc00026 ?
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