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08/11/2007 | FRANCE | N°06NC00702

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 08 novembre 2007, 06NC00702


Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2006 au greffe de la Cour, présentée pour M. Bernard X, demeurant ... et la SCI GELUCOURT, dont le siège est 117, rue de l'Eglise à Gélucourt (57260), par Me Gassner-Hemmerle, avocat ;

M. X et la SCI GELUCOURT demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403707 en date du 14 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur requête tendant à annuler l'arrêté du 26 février 2004 du préfet de la Moselle portant approbation de la carte communale de Gélucourt ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 € au titre des dispositions d...

Vu la requête, enregistrée le 16 mai 2006 au greffe de la Cour, présentée pour M. Bernard X, demeurant ... et la SCI GELUCOURT, dont le siège est 117, rue de l'Eglise à Gélucourt (57260), par Me Gassner-Hemmerle, avocat ;

M. X et la SCI GELUCOURT demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403707 en date du 14 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur requête tendant à annuler l'arrêté du 26 février 2004 du préfet de la Moselle portant approbation de la carte communale de Gélucourt ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les observations en défense avaient été régulièrement présentées au nom de l'Etat, dès lors qu'il n'est pas établi que le directeur départemental de l'équipement aurait été empêché ;

- que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en écartant leur moyen tiré de l'insuffisance de l'évaluation des risques sur l'environnement au motif de l'élaboration future d'un règlement municipal de construction, dès lors qu'il ne pouvait prendre en considération un tel règlement, lequel aggrave au surplus l'atteinte aux paysages ;

- que le tribunal administratif, induit en erreur par les indications inexactes de l'administration, a également commis une erreur de droit en ce qui concerne la violation des règles de l'enquête publique ;

- qu'il y a lieu d'enjoindre l'administration de produire les pièces du dossier soumis à enquête publique afin de permettre à la Cour de vérifier si les changements opérés nécessitaient une nouvelle enquête publique ; qu'en tout état de cause, l'avis du commissaire enquêteur n'a pas été suivi et l'adoption ultérieure d'un règlement municipal de construction modifie l'économie générale du document tel que proposé à l'enquête ;

- que c'est à tort que le tribunal a considéré que deux des conseillers municipaux ayant fait partie de la commission occulte d'élaboration de la carte communale n'étaient pas, au même titre d'ailleurs que le maire, des conseillers municipaux intéressés au regard de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;

- que le tribunal n'a pas répondu ou insuffisamment répondu à leurs moyens relatifs à la violation des normes supracommunales par le document litigieux ;

- que la limite de la zone constructible ne saurait être tracée en vue d'imposer la création d'une voie ;

- que le tribunal a refusé de répondre et dénaturé leur moyen tiré du détournement de procédure, l'adoption du règlement municipal de construction venant en complément du plan de zonage établi par la carte communale ayant pour objet et effet de contourner les contraintes et garanties du plan local d'urbanisme tant en ce qui concerne la procédure que la sauvegarde des droits des administrés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2007, présenté par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la requête est irrecevable faute de notification des recours ;

- subsidiairement, que la requête est infondée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 24 août 2007, présenté pour M. X et la SCI GELUCOURT, qui concluent aux mêmes fins que la requête et soutiennent en outre que leur requête devant le tribunal administratif était recevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2007 :

- le rapport de M. Vincent, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : « En cas de …recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme…,…l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision…Cette notification doit être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation…d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme….La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt… du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision…est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux » ;

Considérant que les cartes communales qui, aux termes des dispositions des articles L. 124-1 et R. 124-1 du code de l'urbanisme, ont pour objet de préciser les modalités d'application des règles générales d'urbanisme prises en application de l'article L. 111-1 et comportent, outre un rapport de présentation, un ou plusieurs documents graphiques opposables aux tiers, constituent par suite un document d'urbanisme au sens des dispositions précitées ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X et la SCI GELUCOURT, qui relèvent appel du jugement en date du 14 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur requête tendant à annuler l'arrêté du 26 février 2004 par lequel le préfet de la Moselle a approuvé la carte communale de Gélucourt, ont notifié leur recours au préfet de la Moselle dans les formes et délais prescrits par les dispositions précitées ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir opposée de ce chef par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer doit être écartée ;

Sur le moyen tiré de la participation de personnes intéressées :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 124-2 du code de l'urbanisme : « …Les cartes communales sont approuvées, après enquête publique, par le conseil municipal et le préfet. Elles sont approuvées par délibération du conseil municipal puis transmises pour approbation au préfet, qui dispose d'un délai de deux mois pour les approuver. A l'expiration de ce délai, le préfet est réputé les avoir approuvées. Les cartes communales approuvées sont tenues à la disposition du public… » ;

Considérant que s'il résulte des dispositions qui précèdent que les cartes communales font l'objet d'une approbation donnée distinctivement par le conseil municipal et le préfet, leur entrée en vigueur est subordonnée à l'approbation préfectorale ; que si l'approbation donnée par le conseil municipal ne revêt ainsi qu'un caractère préparatoire à la décision du préfet, laquelle peut seule faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, les requérants sont recevables à exciper, à l'appui d'un tel recours, des éventuelles irrégularités entachant la délibération préalable du conseil municipal ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales : « Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part ou plusieurs membres du conseil intéressés à l'affaire qui en fait l'objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataire » ;

Considérant qu'il ressort des mentions de l'extrait du plan cadastral de la commune de Gélucourt que M. Benoît Y est propriétaire d'une vaste parcelle au lieu dit « Grand Vignoble », que la carte communale litigieuse a pour effet de classer en secteur constructible ; qu'il ressort des observations portées sur le registre ouvert à l'occasion de l'enquête publique que M. Claude Y, père de M. Benoît Y, y a indiqué « apporter un soutien total » au projet de carte communale « comme conseiller municipal l'ayant défendu, amendé, confronté aux différentes administrations… » et « comme parent » ; que l'intéressé a notamment participé, en tant que conseiller municipal, et en présence de représentants des collectivités et services concernés, aux deux réunions successives tenues en mairie de Gélucourt concernant l'élaboration de la carte communale, puis à la réunion consécutive d'examen du projet ; qu'il résulte de ce qui précède que M. Claude Y, qui avait un intérêt personnel d'ordre familial à l'adoption du projet, a par ailleurs pris une part très active à sa confection ; qu'il s'ensuit que la délibération du 2 décembre 2003 par laquelle le conseil municipal a adopté le projet de carte communale, quand bien même celui-ci s'est prononcé à l'unanimité, est entachée d'une irrégularité de nature à vicier la décision consécutive par laquelle le préfet de la Moselle a approuvé la carte communale ;

Sur les autres moyens énoncés par les requérants :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : « Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme…, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation…, en l'état du dossier » ;

Considérant que le moyen tiré de ce que les limites de la zone constructible ne sauraient légalement être fixées en fonction de l'objectif de réserver l'emplacement nécessaire à une voie de desserte d'un futur lotissement apparaît également, en l'état du dossier, susceptible de fonder l'annulation de la décision litigieuse ; qu'en revanche, aucun des autres moyens énoncés par M. X et la SCI GELUCOURT n'apparaît susceptible en l'état du dossier de fonder l'annulation de la décision litigieuse ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que M. X et la SCI GELUCOURT sont fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ladite décision :

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 € au titre des frais exposés par M. X et la SCI GELUCOURT et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 14 mars 2006 est annulé ainsi que la décision du 26 février 2004 du préfet de la Moselle.

Article 2 : L'Etat versera à M. X et à la SCI GELUCOURT une somme globale de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Bernard X, à la SCI GELUCOURT et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

Copie en sera adressée à la commune de Gélucourt.

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06NC00702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00702
Date de la décision : 08/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : GASSNER HEMMERLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-11-08;06nc00702 ?
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