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02/08/2007 | FRANCE | N°06NC00959

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 02 août 2007, 06NC00959


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2006, présentée pour Mme Liliane X, demeurant ..., par Worms Decker-Leclere Lenne Petit Vauthier Carmantrand, avocats ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301560 en date du 9 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à condamner la commune de Marly à réparer les préjudices subis du fait de l'exécution de travaux publics et de la suppression de l'usoir attenant à sa maison d'habitation ;

2°) de condamner la commune de Marly à lui payer une indemnité de 54 00

0 € avec les intérêts légaux à compter du 3 janvier 2003 ;

3°) de condamner...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2006, présentée pour Mme Liliane X, demeurant ..., par Worms Decker-Leclere Lenne Petit Vauthier Carmantrand, avocats ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301560 en date du 9 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à condamner la commune de Marly à réparer les préjudices subis du fait de l'exécution de travaux publics et de la suppression de l'usoir attenant à sa maison d'habitation ;

2°) de condamner la commune de Marly à lui payer une indemnité de 54 000 € avec les intérêts légaux à compter du 3 janvier 2003 ;

3°) de condamner la commune de Marly à lui payer une somme de 2 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas fait droit à sa demande d'indemnité alors qu'elle a subi un préjudice considérable du fait de l'exécution de travaux publics ; la démolition de l'immeuble mitoyen a favorisé l'agrandissement des fissures de la façade sur rue ; les troubles de voisinage sont avérés et le tribunal a même reconnu la responsabilité de la commune sur ce point ;

- la suppression de l'usoir justifie une réparation ;

- les frais d'expertise ne peuvent être mis à la charge des consorts X;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 février 2007, présenté pour la commune de Marly, représentée par son maire en exercice, par la SCP Seyve, avocat ;

La commune de Marly conclut :

1°) au rejet de la requête de Mme X ;

2°) à la condamnation de Mme X à lui payer une somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé ; la requérante n'a subi aucun préjudice du fait de l'exécution des travaux publics ; le droit d'accès de la requérante à sa maison n'a jamais été remis en cause ;

Vu l'ordonnance en date du 15 mai 2007 fixant la clôture d'instruction au 31 mai 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 Pluviôse An VIII ;

Vu le décret du 26 octobre 1849 ;

Vu le code civil ;

Vu la codification des usages locaux à caractère agricole du département de la Moselle ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2007 :

- le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

- les observations de Me Seyve, avocat de la commune de Marly,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à compter du mois de juin 2001, la commune de Marly (Moselle) a entrepris dans la rue des Ecoles des travaux consistant en la démolition de l'immeuble contigu à la maison d'habitation de Mme X afin de réhabiliter un ensemble d'habitations destinées à la location et d'aménager une placette située à l'avant des immeubles ; que Mme X a recherché la responsabilité de la commune à raison, d'une part, des dommages qu'elle impute à l'exécution des travaux publics et, d'autre part, de la suppression de l'usoir attenant à sa maison ;

Sur la responsabilité de la commune de Marly à raison de l'exécution des travaux publics :

En ce qui concerne les désordres affectant la façade sur rue de l'immeuble de Mme X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné en référé par le président du Tribunal administratif de Strasbourg, et n'est d'ailleurs pas contesté, que si les travaux de démolition ont contribué à l'apparition en surface de deux fissures micrométriques et de plusieurs micro-fissures, les désordres structurels révélés par l'agrandissement des fissures et qui nécessiteraient une reprise complète des fondations et de la maçonneries de la façade ont pour origine les importants travaux d'ouverture pratiqués par les époux X eux-mêmes sur la façade aux fins d'agrandir la porte de leur garage et de créer deux fenêtres ; qu'en se bornant à relever que l'expert n'exclut pas que les opérations de travaux publics ont favorisé l'apparition des désordres, la requérante ne critique pas utilement les motifs du jugement selon lesquels, d'une part, la part du préjudice imputable aux travaux réalisés par la commune doit être limitée au quart des conséquences dommageable des désordres et, d'autre part, les époux X ne justifient pas, en leur qualité de tiers par rapport aux travaux litigieux, de l'existence d'un préjudice excédant le coût des travaux de réfection effectués à ses frais par la commune en 2001 et 2002 ;

En ce qui concerne le retard de la commune à exécuter les travaux de réfection de la façade :

Considérant qu'à supposer même que Mme X ait entendu reprendre, à hauteur d'appel sans d'ailleurs l'assortir d'arguments nouveaux, le moyen tiré de ce que la commune de Marly aurait commis une faute en raison du retard pris pour réaliser les travaux de réfection nécessaires pour mettre fin aux désordres constatés sur la façade de sa maison d'habitation et que la commune s'était engagée à réaliser, il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

En ce qui concerne les troubles de voisinage :

Considérant qu'eu égard notamment au caractère provisoire des travaux dont s'agit, il ne résulte pas de l'instruction que les époux X auraient subi, du fait de ces travaux, et notamment des opérations d'aménagement des places de stationnement, des gênes qui auraient excédé les sujétions que doivent supporter sans indemnité les riverains de la voie publique dans l'intérêt général et notamment celui de la voirie ; que, par suite, si elle fait valoir que le tribunal a admis qu'elle pouvait se prévaloir de sa qualité de tiers pour demander la réparation des troubles de voisinage, la requérante n'est cependant pas fondée à demander la réparation des désagréments liés notamment aux bruits, poussières et trépidations, résultant de l'exécution des travaux publics litigieux ;

Sur la responsabilité de la commune de Marly à raison de la suppression de l'usoir invoqué par Mme X :

Considérant que, selon une coutume dont les règles ont fait l'objet de la «codification des usages locaux à caractère agricole du département de la Moselle», approuvée par le Conseil général le 9 janvier 1961, l'usoir est une bande de terrain située le long des routes à la traversée des localités jusqu'aux immeubles construits ; qu'aux termes de l'article 59 de ce texte : «les usoirs servent avant tout et en premier lieu aux besoins des riverains, propriétaires, possesseurs ou détenteurs d'immeubles attenant immédiatement aux usoirs» ; que l'article 60 dispose que les riverains «ont la faculté de se servir des usoirs principalement comme chemin d'accès vers leurs immeubles, comme lieu de dépôt pour leur fumier, leur bois et autres matériaux, pour leurs instruments d'exploitation agricole, commerciale, artisanale ou autres (…) .L'usage que fera l'ayant droit de l'usoir variera nécessairement d'après le genre d'exploitation de l'immeuble attenant» ; que l'article 65 précise que : «Les administrations compétentes conservent le droit de supprimer tout ou partie de l'usoir et d'en modifier la consistance, mais à la condition que l'exploitation et la circulation au profit des riverains continuent à être possibles dans la même mesure que par le passé» ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les travaux publics litigieux, qui avaient pour objet de créer un emplacement de stationnement au 47 rue des Ecoles et de permettre à la commune de se réserver la possibilité de rectifier l'étranglement de la chaussée à cet endroit, ont eu pour effet d'apporter des modifications à l'espace situé entre la maison d'habitation de Mme X et la voie publique ; qu'il est, d'une part, constant que le droit d'accès à la propriété de Mme X a toujours été préservé ; que, d'autre part, il n'est pas établi ni même allégué que l'immeuble de la requérante ferait l'objet d'une exploitation particulière, de nature agricole, artisanale ou encore commerciale, justifiant une utilisation prioritaire et exclusive de l'usoir, et notamment des emplacements de stationnement qui y ont été nouvellement aménagés ; que, dès lors, en admettant même que l'emplacement considéré revêtait le caractère d'un usoir au sens des dispositions précitées, la requérante n'établit pas avoir été privée du droit d'accès ou de dépôt afférent à l'usoir dont elle se prévaut et n'établit pas que les modifications apportées pour des motifs d'intérêt général à cette dépendance du domaine public méconnaîtraient lesdites dispositions et seraient, par suite, constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

Considérant, en second lieu, qu'à supposer que la requérante ait entendu rechercher la responsabilité sans faute de la commune de Marly sur le fondement de la rupture d'égalité devant les charges publiques, elle n'établit pas, en l'absence notamment de privation des aisances de voirie accordées aux riverains et d'atteinte aux droits conférés par les usages locaux, avoir subi un préjudice anormal et spécial du fait des opérations d'aménagement entrepris par la commune de Marly au droit de son immeuble ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que, dès lors qu'il a rejeté à juste titre l'ensemble des conclusions à fin d'indemnité présentées par les époux X, le tribunal a pu, à bon droit, mettre l'intégralité des frais d'expertise à la charge des demandeurs, qui avaient la qualité de partie perdante dans ladite instance, quand bien même le tribunal a admis que les travaux publics ont contribué à l'apparition de fissures sur la façade de l'immeuble litigieux ; que, par suite, Mme X n'est pas davantage fondée à demander la réformation sur ce point du jugement attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Marly, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la requérante la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer à la commune de Marly la somme qu'elle réclame à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Marly tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Liliane X et à la commune de Marly.

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N° 06NC00959


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00959
Date de la décision : 02/08/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : VORMS DECKER-LECLERE LENNE PETIT VAUTHIER CARMANTRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-08-02;06nc00959 ?
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