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14/06/2007 | FRANCE | N°05NC01396

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 14 juin 2007, 05NC01396


Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour la SCI ESSOR, agissant par son gérant en exercice, ayant son siège 3 route d'Offenheim à Truchtersheim (67370), par Me Anjuere, avocat ; la SCI ESSOR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 7 septembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1996 au 30 novembre 1998 qui lui ont été réclamés par un avis de mise en recouvrement émis le 30 ao

ût 2000 pour un montant de 68 649 francs (10 465,47 euros) ;

2°) de pron...

Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2005, présentée pour la SCI ESSOR, agissant par son gérant en exercice, ayant son siège 3 route d'Offenheim à Truchtersheim (67370), par Me Anjuere, avocat ; la SCI ESSOR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 7 septembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1996 au 30 novembre 1998 qui lui ont été réclamés par un avis de mise en recouvrement émis le 30 août 2000 pour un montant de 68 649 francs (10 465,47 euros) ;

2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 10 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas sanctionné l'irrégularité de la procédure de contrôle suivie à l'encontre de la société requérante ; s'agissant d'une société civile immobilière n'exerçant qu'une activité civile et qui n'est pas astreinte à la tenue d'une comptabilité, l'administration ne pouvait pas effectuer une vérification de comptabilité ;

- c'est à tort que le tribunal a confirmé les redressements afférents aux lots n°s 11, 20 et 27 de l'immeuble à Gries au titre de l'année 1996, qui sont fondés sur une minoration de la surface vendue et du prix de cession qui n'est pas établie ; contrairement à l'avis de la commission départementale des impôts, l'administration a estimé à tort que la surface du bien vendu ainsi que son prix de vente auraient été minorés ; les actes passés lors de l'achat du bien le 7 avril 1995 et lors de sa revente le 26 mars 1996 font état d'une même surface de 53,20 m2 pour le lot 11 et la modification de surface intervenue après la revente n'est pas imputable à la société ESSOR ; par ailleurs, il n'est pas possible en matière de taxe sur la valeur ajoutée de faire application des dispositions de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales mais il appartient à l'administration d'établir que la sous-évaluation de la valeur des lots résulte de la fraude ou de l'évasion fiscale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre conclut au rejet de la requête de la SCI ESSOR ;

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition n'est pas fondé dès lors que l'administration est en droit d'opérer un contrôle sur place des documents notamment comptables des SCI de gestion dont la tenue est prévue aux articles 172 bis du code général des impôts et 46 B à D de l'annexe III ;

- c'est à juste titre que l'administration a écarté le prix stipulé dans l'acte de vente dans la mesure où le bien immobilier a été vendu à un prix nettement insuffisant au regard de la surface réelle ; l'administration apporte la preuve que le bien a été vendu à un prix inférieur à sa valeur vénale réelle ; la surface du bien étant minorée, le caractère frauduleux de la minoration de prix du vente est de ce fait établi ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2007 :

; le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

; et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article 172 bis du code général des impôts, ainsi que des dispositions réglementaires des articles 46 B à D de l'annexe III audit code prises pour leur application, qu'afin d'examiner les documents comptables et autres pièces justificatives que ces dernières dispositions imposent de tenir aux sociétés civiles immobilières qui donnent leurs immeubles en location ou en confèrent la jouissance à leurs associés, l'administration peut légalement procéder à un contrôle sur place de ces documents, dans le respect des garanties bénéficiant à l'ensemble des contribuables vérifiés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante, la circonstance qu'une société civile immobilière ne serait pas contrainte de tenir une comptabilité ne saurait faire obstacle à la mise en oeuvre de ce contrôle sur place qui, s'il doit se dérouler dans le respect des garanties générales conférées aux contribuables faisant l'objet d'une vérification de comptabilité, ne saurait néanmoins être regardé comme une vérification de comptabilité ; qu'il n'est pas allégué par la requérante que le service aurait exigé la production de documents ou de pièces autres que ceux qu'elle était tenue de conserver en vertu des dispositions susvisées du code général des impôts ; qu'il n'est pas davantage allégué par celle-ci qu'elle aurait été privée d'une des garanties attachées à la procédure de contrôle sur place dont s'agit ; que dès lors, c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Strasbourg a écarté le moyen de la requérante selon lequel elle aurait indûment fait l'objet d'une vérification de comptabilité ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 257-7° du code général des impôts, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles ; qu'aux termes du 2 de l'article 266 de ce code, pris pour l'adaptation de la législation nationale aux objectifs poursuivis par l'article 11-A-1-a) de la directive du 17 mai 1977 modifiée du Conseil de la Communauté européenne : En ce qui concerne les opérations entrant dans le champ d'application du 7 G de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise : (...) b. Pour les mutations à titre onéreux ou les apports en société sur : le prix de la cession, le montant de l'indemnité ou la valeur des droits sociaux rémunérant l'apport, augmenté des charges qui s'y ajoutent ; la valeur vénale réelle des biens, établie dans les conditions prévues à l'article L. 17 du livre des procédures fiscales, si cette valeur vénale est supérieure au prix, au montant de l'indemnité ou à la valeur des droits sociaux, augmenté des charges ; qu'enfin aux termes de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales : « En ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elle est due aux lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations. La rectification correspondante est effectuée suivant la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L. 55, l'administration étant tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations » ;

Considérant qu'en ce qui concerne la cession le 27 mars 1996 du logement, composé des lots n° 11, 20 et 27, situé dans l'immeuble sis 46 rue principale à Gries, le service a considéré que le prix de vente était minoré par rapport à la valeur vénale réelle du bien immobilier, estimée à 740 954 francs toutes taxes comprises, et a fixé à une somme de 185 700 francs hors taxes le montant de cette minoration, qu'il a assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des dispositions combinées du 7° de l'article 257 et du 2 de l'article 266 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par acte notarié du 7 avril 1995, la SCI ESSOR a acquis de la SCI Les « Bonsaïs » les lots n°11, n° 20 et n° 27 susvisés représentant un appartement en duplex d'une surface au premier niveau de 53 m2 et de 50 m2 au second niveau pour un montant de 448 000 F toutes taxes comprises porté après deux avenants à 465 925 F ; que ce bien a été revendu le 27 mars 1996 pour un prix de 517 000 F toutes taxes comprises à M. Denis X, associé de la SCI ESSOR depuis sa création le 1er octobre 1994 jusqu'au 7 février 1995, date à laquelle il a cédé toutes ses parts à M. Robin X ; que M. Denis X a été associé dans la Sàrl Maison Jaurès, maître d'oeuvre de la construction de l'immeuble concerné, dont il a été le gérant du 3 avril 1989 au 7 juin 1996, et a d'ailleurs suivi le chantier en sa qualité de responsable technicien, salarié de ladite société ;

Considérant, en premier lieu, que pour déterminer la valeur vénale des lots vendus, le service a, s'agissant de la surface du lot n° 11, retenu une surface totale pondérée de 99,16 m2 en prenant en compte l'esquisse d'étage n° 6 du 30 janvier 1995 dressée par un géomètre-expert, annexée à l'état descriptif de division et au règlement de copropriété, de l'immeuble, actes également publiés au Livre foncier, et qui précise que le lot considéré est un appartement dans les combles d'une surface habitable de 92,70 m2 ; que les énonciations du document du géomètre expert sont corroborées par l'acte de vente du 27 mars 1996, qui renvoie expressément à l'esquisse susvisée, et qui décrit le lot n °11 comme un appartement en duplex incluant aux « combles 1 », deux chambres, une cuisine, un W.C., une entrée, un débarras, un escalier d'accès aux combles 2 et un balcon, et aux « combles 2 », deux chambres, une salle de bains, un bureau, un W.C., un dressing, un dégagement et un palier ; que, dans ces conditions, dès lors que la vente a nécessairement porté sur les deux niveaux constituant l'appartement à aménager, la société requérante ne saurait soutenir que la vente concernait une surface limitée à 53,20 m2 ; que la requérante ne saurait utilement se prévaloir de l'avis de la commission départementale des impôts en date du 1er mars 2000 constatant que les actes notariés mentionnent une surface de 53,20 m2 dès lors que ledit avis ne précise pas s'il s'agit d'une surface totale ou de la surface de premier niveau ; qu'enfin, si la requérante argue de ce que la modification de surface serait intervenue après la revente des lots et ne lui serait dès lors pas imputable, elle n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations ;

Considérant, en second lieu, que pour fixer la valeur vénale du logement litigieux à 740 954 francs toutes taxes comprises, soit 7 472 francs par mètre carré, le service a pu légalement prendre comme termes de comparaison le prix auquel ont été cédés quatre autres logements situés dans le même immeuble, les 7 avril et 29 décembre 1995 présentant des caractéristiques similaires au logement litigieux, compte tenu notamment de leur date de construction et de leur localisation ; que, d'ailleurs, la société requérante tant en première instance qu'en appel n'apporte aucun élément de nature à contester valablement les termes de comparaison retenus par l'administration ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, l'administration doit être regardée comme établissant que la base d'imposition retenue par le service correspond à la valeur vénale réelle des biens ; que, d'autre part, au vu de l'ensemble des circonstances ci-dessus relevées, compte tenu notamment de la minoration significative du prix de cession et des liens étroits existant entre le vendeur, l'acquéreur et le promoteur, et alors qu'il n'est pas allégué que l'acquéreur avait la possibilité de déduire la taxe sur la valeur ajoutée collectée par le vendeur, le service doit également être regardé comme établissant que l'insuffisance de prix procède d'une volonté d'évasion fiscale ; que, par suite, c'est à bon droit que le service a procédé à la rectification du prix de vente des lots n° 11, n° 20 et n° 27 sis 46 rue principale à Gries devant servir de base à l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI ESSOR n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1996 au 30 novembre 1998 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la requérante la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI ESSOR est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI ESSOR et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

5

05NC01396


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05NC01396
Date de la décision : 14/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : JUDICIA CONSEILS CABINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-06-14;05nc01396 ?
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