La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/03/2007 | FRANCE | N°05NC01005

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 01 mars 2007, 05NC01005


Vu la requête enregistrée le 29 juillet 2005, présentée pour M. François X élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Languille-Knitel-Walbot-Fouray ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 31 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 décembre 2003 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement pour motif économique, ensemble de la décision du 15 juin 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale confirmant, sur recours hiérarchique, la

décision de l'inspecteur du travail ;

2°) d'annuler, pour excès de ...

Vu la requête enregistrée le 29 juillet 2005, présentée pour M. François X élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Languille-Knitel-Walbot-Fouray ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 31 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 décembre 2003 de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement pour motif économique, ensemble de la décision du 15 juin 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale confirmant, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

Il soutient que :

- la décision de l'inspecteur du travail ne se prononce pas sur la régularité de la procédure spéciale de consultation du comité d'entreprise et a fortiori sur la procédure des livres III et IV auxquels était soumis l'employeur ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les mentions des visas étaient suffisantes au regard des exigences de motivation ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que trois offres valables d'emploi lui avaient été proposées, la seule proposition de postes de reclassement ne suffisant pas à caractériser l'impossibilité de reclasser le salarié, et la validité des offres n'étant pas démontrée ;

- le lien entre le motif économique et la suppression du poste n'est pas davantage établi ; son poste n'a pas en réalité été définitivement supprimé ;

- la procédure de licenciement collectif pour motif économique n'a pas été respectée ; le comité d'entreprise n'a pas été consulté dans des formes régulières ;

- le plan de sauvegarde élaboré par l'employeur est manifestement insuffisant au regard des obligations s'imposant à lui ; aucune mesure de reclassement interne n'a été envisagée ; les offres de reclassement externes ne présentent, compte tenu de leur nombre, aucune alternative sérieuse au licenciement ; les mesures de mobilité fonctionnelles sont de simples déclarations d'intention ; aucun engagement financier n'a été pris concernant les frais liés aux recherches de reclassement externe ; la mise en place d'une antenne emploi n'est pas suffisante ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu, en date du 12 août 2005, la communication de la requête au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ;

Vu, enregistré le 30 janvier 2007, le mémoire en défense présenté pour la société Europfil, par Me Langevin, avocat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er février 2007 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me Cahen, avocat de M. X,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, que la décision du 15 décembre 2003 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. X, délégué syndical au sein de la société Europfil Production, comporte, outre l'énoncé des considérations de droit, les éléments de fait, propres à la situation de l'entreprise et à celle de M. X, justifiant le licenciement ; qu'ainsi et alors même que la décision ne vise pas la procédure de consultation du comité d'entreprise, engagée à l'initiative de l'employeur en application des livres III et IV du code du travail, elle est régulièrement motivée ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 412-18 du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis des fonctions de délégué syndical qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un incendie accidentel, survenu dans la nuit du 29 au 30 juin 2003, a détruit l'ensemble des bâtiments exploités par la société Europfil, Production, spécialisée dans la fabrication de conteneurs métalliques ; que si l'entreprise a rapidement fait le choix de maintenir une partie de la production sur le territoire de la commune d'implantation, l'existence d'un marché en perte de volume et des contraintes d'environnement, attestées par les pièces du dossier, l'ont conduite à renoncer à recréer sur le nouveau site les chaînes de traitement de surface des produits finis ; que trente-cinq postes, dont celui de responsable qualité et sécurité occupé par M. X, ont ainsi été supprimés ; qu'eu égard à ces circonstances, la réalité du motif économique du licenciement de M. X est établi ;

Considérant qu'en raison de la suppression du poste occupé par M. X, lequel n'avait pas d'équivalent au sein de l'entreprise, aucune proposition de reclassement interne ne lui a été soumise ; qu'en revanche, il ressort des pièces du dossier que la société Europfil Production a proposé au salarié, assorti de toutes les précisions nécessaires sur la nature de l'emploi, sa localisation, le niveau de rémunération, un poste d'assistant qualité auprès d'une entreprise du groupe ; qu'ainsi, indépendamment d'ailleurs des offres d'emploi présentées par la cellule de reclassement mise en place dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi, initié par l'employeur, la société Europfil doit être regardée comme ayant satisfait à l'obligation qui lui incombait de rechercher les possibilités d'assurer le reclassement de M. X ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-3 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur : «(….) Sans préjudice des dispositions de l'article L. 432-1, dans les entreprises ou professions mentionnées ci-dessus où sont occupés habituellement au moins cinquante salariés, les employeurs qui projettent d'y effectuer un licenciement dans les conditions visées à l'alinéa précédent sont tenus de réunir et de consulter le comité d'entreprise (….)» ; qu'aux termes de l'article L.432-1 du même code : «Dans l'ordre économique, le comité d'entreprise est obligatoirement informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise et, notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel. Le comité d'entreprise est obligatoirement saisi en temps utile des projets de compression des effectifs ; il émet un avis sur l'opération projetée et ses modalités d'application. Cet avis est transmis à l'autorité administrative compétente. Le comité est informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, notamment en cas (…) de modification importante des structures de production de l'entreprise (…). Le chef d'entreprise doit indiquer les motifs des modifications projetées et consulter le comité sur les mesures qui sont envisagées à l'égard des salariés lorsque ces modifications comportent des conséquences pour ceux-ci.(…)» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dès le 1er et le 10 juillet, la société Europfil Production a réuni le comité d'entreprise pour l'informer des conséquences du sinistre sur l'activité de l'entreprise et l'avenir des salariés ; que le comité d'entreprise a été consulté, le 25 septembre, sur le projet économique et industriel, lequel comportait l'annonce de la restructuration et de la compression d'effectifs ; que lors des réunions tenues les 9 et 29 octobre, et les 12 et 14 novembre, les membres du comité ont été appelés à donner leur avis sur le projet de licenciement et plus largement sur le plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'à l'exception des deux premières réunions organisées immédiatement après le sinistre, le comité d'entreprise a été régulièrement convoqué sur des ordres du jour précis, signés par le président et le secrétaire ; que la circonstance que la rédaction des comptes-rendus de réunion présenterait un caractère sommaire n'est pas de nature à établir que les membres du comité d'entreprise qui ont eu communication en temps utile des documents soumis à leur examen n'auraient pu donner leur avis en toute connaissance de cause ; qu'ainsi le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a pu estimer, sans entacher sa décision du 15 juin 2004 par laquelle il confirme la décision de l'inspecteur du travail, que le comité d'entreprise avait été consulté conformément aux obligations découlant, pour l'employeur, des articles L. 321-3 et L. 432-1 précités du code du travail ;

Considérant que lorsqu'en vertu des dispositions de l'article L. 312-4 du code du travail, l'employeur est tenu de mettre en oeuvre un plan social comportant des mesures destinées à favoriser le reclassement du personnel dont le licenciement ne peut être évité, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer que les salariés protégés ont accès aux mesures de reclassement externe prévues par le plan dans des conditions non discriminatoires ; qu'en revanche, il ne lui appartient pas d'apprécier le respect par l'employeur de ses obligations de reclassement externe, cette appréciation ne pouvant être dissociée de celle portée par le juge judiciaire sur la validité du plan social et l'autorisation de licenciement ne faisant pas obstacle à ce que le salarié puisse ultérieurement contester cette validité devant la juridiction judiciaire ; qu'il suit de là qu'il n'entre pas dans la compétence du juge administratif de trancher les contestations relatives au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'ainsi, et dès lors que M. X n'établit, ni même n'allègue avoir été empêché d'avoir accès aux mesures de reclassement externe prévues par le plan social, les critiques qu'il formule contre les mesures prévues par ledit plan ne peuvent être discutées devant la juridiction administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. François X, au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et à la société Europfil Production.

2

N° 05NC01005


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05NC01005
Date de la décision : 01/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : LANGUILLE FOURAY GUIRANNA CAHEN MORTIN KNITTEL WATBOT LUISIN GERRIET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-03-01;05nc01005 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award