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29/01/2007 | FRANCE | N°05NC00648

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2007, 05NC00648


Vu le recours, enregistré le 26 mai 2005, complété par un mémoire en date du 28 avril 2006, présenté par le MINISTRE DES SOLIDARITES, DE LA SANTE ET DE LA FAMILLE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401728 du 12 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision en date du 25 octobre 2004 par laquelle le ministre de la santé a rejeté le recours hiérarchique dirigé contre la décision du directeur de l'agence régionale d'hospitalisation de Champagne-Ardenne en date du 16 juin 2004 prononçant la suspen

sion de l'activité libérale de M. X pour une durée de six mois et condam...

Vu le recours, enregistré le 26 mai 2005, complété par un mémoire en date du 28 avril 2006, présenté par le MINISTRE DES SOLIDARITES, DE LA SANTE ET DE LA FAMILLE ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401728 du 12 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision en date du 25 octobre 2004 par laquelle le ministre de la santé a rejeté le recours hiérarchique dirigé contre la décision du directeur de l'agence régionale d'hospitalisation de Champagne-Ardenne en date du 16 juin 2004 prononçant la suspension de l'activité libérale de M. X pour une durée de six mois et condamnant l'Etat (ministre de la santé et de la protection sociale) à verser à M. Y la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le ministre soutient que c'est à tort que le tribunal a retenu une erreur manifeste d'appréciation relative au dépassement des limites autorisées pour l'exercice de l'activité libérale à l'hôpital fixée à 20 % de la durée du service hospitalier hebdomadaire en application de l'article L. 6154-2 2° du code de la santé publique, et une disproportion en ce qui concerne la sanction infligée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistrés les 16 mars et 25 avril 2006, les mémoires en défense présentés pour M. X élisant domicile ... par Me Colomes, avocat, tendant au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors d'une part que le signataire ne vise pas de délégation régulière, d'autre part qu'à la date du 11 août 2005, elle est tardive, enfin qu'elle ne contient aucune critique du jugement permettant d'apprécier la portée des arguments ;

- en ce qui concerne les décisions, elles sont insuffisamment motivées dès lors qu'elles ne font état d'aucune motivation relative à la situation personnelle du praticien, et l'avis de la chambre régionale des comptes est relatif à l'année 2001 non en cause dans la sanction présente ;

- le ministre a occulté toute discussion sur la matérialité des faits reprochés qui sont contestés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction le 3 mai 2006 à 16 heures ;

Vu, enregistrées les 31 mai et 27 décembre 2006, les productions d'un mémoire pour M. X, par Me Colomes, avocat ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2007 :

- le rapport de M. Job, président,

- les observations de Me Colomes, de la SCP Jean-Yves, Xavier et Stanislas, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 6154-1 du code de la santé publique : «Dès lors que l'intérêt du service public hospitalier n'y fait pas obstacle, les praticiens statutaires exerçant à temps plein dans les établissements publics de santé et les syndicats inter hospitaliers autorisés à exercer les missions d'un établissement de santé sont autorisés à exercer une activité libérale dans les conditions définies au présent chapitre.»; qu'aux termes de l'article L. 6154-2 «L'activité libérale peut comprendre des consultations, des actes et des soins en hospitalisation ; elle s'exerce exclusivement au sein des établissements dans lesquels les praticiens ont été nommés ou, dans le cas d'une activité partagée, dans l'établissement où ils exercent la majorité de leur activité publique, à la triple condition : 1° Que les praticiens exercent personnellement et à titre principal une activité de même nature dans le secteur hospitalier public ; 2° Que la durée de l'activité libérale n'excède pas 20 % de la durée de service hospitalier hebdomadaire à laquelle sont astreints les praticiens ; 3° Que le nombre de consultations et d'actes effectués au titre de l'activité libérale soit inférieur au nombre de consultations et d'actes effectués au titre de l'activité publique. (…).» ; qu'aux termes de l'article L. 6154-4 : «Les modalités d'exercice de l'activité libérale font l'objet d'un contrat conclu entre le praticien concerné et l'établissement public de santé sur la base d'un contrat type d'activité libérale établi par voie réglementaire. (…).» ; qu'aux termes de l'article L. 6154-6 : «L'autorisation mentionnée à l'article L. 6154-4 peut être suspendue ou retirée par le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation lorsque le praticien méconnaît les obligations qui lui incombent en vertu des lois et règlements et les dispositions du contrat ; cette décision est prise après avis ou sur proposition de la commission mentionnée au premier alinéa de l'article L. 6154-5 dans des conditions définies par décret. / Le ministre chargé de la santé, saisi dans le cadre d'un recours hiérarchique des contestations relatives aux décisions prises en application de l'alinéa précédent, doit statuer après avis de la commission nationale mentionnée à l'article L. 6154-5.» ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 714-28-22 : «La durée de la suspension de l'autorisation d'exercice de l'activité libérale prévue par l'article L. 6154-6 ne peut excéder deux ans.» ;

Considérant que M. X exerce à temps plein au centre hospitalier de Troyes les fonctions de chef du service dermatologique ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des conclusions du rapport établi en octobre 2004 par le docteur Z, membre de l'inspection générale des affaires sociales, que les dénégations de M. X qui ne sont assorties d'aucun document propre à les étayer ne peuvent amoindrir, que les activités de consultations publiques que donne ce dernier sont d'une durée hebdomadaire de 8h00 alors que les consultations médicales donnée à titre privé dépassent, depuis de nombreuses années et de façon importante, la limite fixée au 2° de l'article L. 6154-2 du code de la santé publique susénoncé de deux demi-journées affichées pour les consultations privées ; qu'ainsi, en sanctionnant ces importants dépassements habituels d'une suspension de six mois du contrat d'activité libérale qui correspond au quart de la durée de suspension maximale, le ministre n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation de la situation ; qu'il suit de là que c'est à tort que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé sa décision ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Sur la violation des droits de la défense sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 6154-5 du code de la santé publique : «Dans chaque établissement public de santé où s'exerce une activité libérale, une commission de l'activité libérale est chargée de veiller au bon déroulement de cette activité. / Une commission nationale de l'activité libérale siège auprès du ministre chargé de la santé. / Les attributions, la composition et les conditions de fonctionnement de ces commissions sont fixées par voie réglementaire. / Ces commissions peuvent, sous réserve du respect du secret médical, demander toutes informations utiles sur l'activité libérale d'un praticien, et notamment communication des statistiques de son activité qui sont détenues par les organismes de sécurité sociale compétents.» ; qu'aux termes des articles R. 714-28-24 à R. 714-28-30 du code de la santé publique actuellement codifiés sous les articles R. 6154-18 à R. 6154-24. Préalablement à toute instance contentieuse, les contestations relatives aux décisions mentionnées à l'article R. 714-28-23 ci-dessus doivent faire l'objet d'un recours hiérarchique devant le ministre chargé de la santé déposé dans les deux mois à compter de la notification. / Le silence gardé par le ministre pendant plus de quatre mois sur ce recours hiérarchique vaut décision implicite de rejet.» ; Article R. 714-28-25 : «La commission nationale de l'activité libérale donne un avis au ministre chargé de la santé sur les recours hiérarchiques mentionnés à l'article R. 714-28-24 ci-dessus. / La commission est saisie par le ministre.» ; Article R. 714-28-28 : «Le président désigne, sur proposition du chef de l'inspection générale des affaires sociales, un rapporteur membre de l'inspection générale des affaires sociales n'appartenant pas à la commission. / Le rapporteur instruit l'affaire par tous les moyens propres à éclairer la commission.» ; Article R. 714-28-29 Le praticien concerné et le directeur de l'établissement sont informés de la date de la réunion de la commission trente jours à l'avance au moins ; ils peuvent demander à être entendus. / La commission peut entendre toute personne susceptible de l'éclairer. Article R. 714-28-30 : «Ne peut siéger, pour l'examen d'une affaire, un membre de la commission lui-même concerné, ou exerçant dans le même établissement que le praticien en cause. / La commission se prononce au scrutin secret. L'avis est émis à la majorité des membres présents. Il doit être motivé. En cas de partage des voix, la voix du président est prépondérante.» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la suspension pour une durée de six mois du contrat d'activité libérale de M. X a été prononcée par le directeur de l'agence régionale d'hospitalisation de Champagne-Ardenne le 16 juin 2004 aux motifs qu'au titre de l'activité libérale de l'année 2003, il avait dépassé de 1 043 actes le nombre de ceux qu'il avait réalisés en consultation publique, en application du 3° de l'article L. 6154-2 du code de la santé publique ; qu'en fonction des énonciations contenues dans le rapport du docteur Z transmis à la commission nationale, en vertu desquelles le motif tenant à l'infériorité du nombre de consultations et d'actes effectués au titre de l'activité publique par rapport à celui effectué au titre de l'activité libérale était erroné, le ministre, statuant sur recours hiérarchique obligatoire, dont la décision se substitue à celle du directeur de l'agence régionale d'hospitalisation, a prononcé la même sanction pour un autre motif tiré du dépassement répété des limites autorisées du temps consacré à l'activité libérale importante en dehors des jours prévus pour son exercice ; que ce nouveau motif, qui ne repose que sur le rapport susmentionné n'a pu être contradictoirement discuté devant la commission nationale par M. X, dès lors qu'il est constant que le rapport du docteur Z n'a été porté à sa connaissance qu'au moment de la réunion alors qu'il en avait demandé la transmission des semaines auparavant ; qu'ainsi, M. X est fondé à soutenir que l'avis émis par la commission nationale est entaché d'un vice de procédure qui entache d'illégalité la sanction prononcée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE n'est pas fondé à se plaindre que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé sa décision du 25 octobre 2004 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE est rejeté.

Article 2 : L'Etat, (ministère de la santé et des solidarités) est condamné à verser à M. X la somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES et à M. Jean-Marc X.

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N° 05NC00648


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05NC00648
Date de la décision : 29/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Pascal JOB
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP COLOMES JEAN-YVES, XAVIER et STANISLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-01-29;05nc00648 ?
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