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25/01/2007 | FRANCE | N°06NC00023

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 25 janvier 2007, 06NC00023


Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2006, présentée pour Mlle Nathalie X, élisant domicile ..., par Me Marah, avocat ;

Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400250 en date du 20 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 5 mars 2003 par lequel le directeur de l'Hôpital de Montier-en-Der l'a licenciée pour insuffisance professionnelle à l'issue de son stage et, d'autre part, à la condamnation de l'établissement à lui payer une s

omme de 30 000 € en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'...

Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2006, présentée pour Mlle Nathalie X, élisant domicile ..., par Me Marah, avocat ;

Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400250 en date du 20 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 5 mars 2003 par lequel le directeur de l'Hôpital de Montier-en-Der l'a licenciée pour insuffisance professionnelle à l'issue de son stage et, d'autre part, à la condamnation de l'établissement à lui payer une somme de 30 000 € en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de l'illégalité de cette décision ;

2°) d'annuler la décision en date du 5 mars 2003 ;

3°) de réintégrer la requérante en reconstituant sa carrière et de condamner l'Hôpital de Montier-en-Der à lui payer une somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts ;

4°) de condamner l'Hôpital de Montier-en-Der à lui payer une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que la décision ne devait pas être motivée alors que l'administration avait décidé elle-même de suivre la procédure prévue par la loi du 11 juillet 1979 ;

- la décision de licenciement n'est absolument pas motivée car le directeur se borne à faire référence à l'avis du conseil de discipline, lequel n'est pas compétent en la matière ;

- la procédure de licenciement n'a pas été respectée ; la règle de la communication du dossier a été méconnue, l'hôpital ne prouvant pas que la requérante aurait consulté son dossier le 11 février 2003 ; la requérante n'a pu se présenter devant la commission administrative paritaire en raison des manoeuvres du directeur ;

- les mêmes faits ne peuvent être sanctionnés deux fois ; or, la requérante avait déjà fait l'objet d'un avertissement à titre disciplinaire ; la mesure de licenciement est une sanction prise pour les mêmes faits ;

- la légalité interne de la décision de licenciement est également discutable ; la matérialité des faits n'est pas établie ; la manière de servir de la requérante est irréprochable comme le prouvent ses fiches de notation ainsi que le fait qu'elle a bénéficié de plusieurs renouvellements de contrat depuis 1987 avant son embauche définitive ;

- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir et de procédure ;

- la requérante devra être réintégrée et bénéficier d'une reconstitution de carrière ;

- le préjudice subi par la requérante, qui a été contrainte de demander le bénéfice du RMI et de vendre sa maison pour payer ses dettes, est évalué à 50 000 € ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2006, présenté pour l'Hôpital de Montier-en-Der, par Me de Chanlaire, avocat ;

L'Hôpital de Montier-en-Der conclut :

1°) au rejet de la requête de Mlle X ;

2°) à la condamnation de Mlle X à lui payer une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la requérante a bien été informée des motifs du licenciement par la communication du procès-verbal du conseil de discipline, qui indique les éléments factuels établissant l'insuffisance professionnelle de l'agent ; en tout état de cause, un licenciement en fin de stage n'a pas à être motivé selon la jurisprudence ;

- le licenciement en fin de stage n'a pas à être précédé d'une procédure contradictoire ; la convocation adressée à la requérante le 3 février 2003 lui indiquait la possibilité de consulter son dossier et de se faire assister par un conseil de son choix ; la consultation a été effective le 11 février 2003 ; c'est à sa propre négligence que la requérante doit de n'avoir éventuellement pas pu consulter son dossier dans des conditions optimales ; en tout état de cause, la jurisprudence n'exige pas la communication préalable du dossier dans le cas d'une mesure de licenciement en fin de stage dépourvue de caractère disciplinaire ;

- les allégations de la requérante relatives aux manoeuvres du directeur pour l'empêcher d'assister au conseil de discipline ne sont pas établies ;

- la requérante n'a pas fait l'objet d'une double sanction pour les mêmes faits car l'administration a engagé deux procédures tout à fait distinctes, l'une à caractère disciplinaire ayant donné lieu à un avertissement et l'autre relative à l'insuffisance professionnelle ;

- si l'employeur s'est montré bienveillant en début de stage et a prorogé à plusieurs reprises le stage de l'intéressée en raison de ses nombreuses absences, l'insuffisance professionnelle de la requérante est établie pas les pièces du dossier ; ce n'est qu'à compter de sa nomination le 1er février 1999 en tant que stagiaire que la manière de servir de la requérante a fait l'objet d'une évaluation et d'une notation annuelles écrites ;

- la décision étant légale, elle n'a pu causer aucun préjudice ;

- l'article 9 alinéa 3 du décret de mai 1997 indique que le licenciement d'un stagiaire à la suite d'un refus de titularisation n'ouvre droit à aucune indemnité à la charge de l'employeur ;

Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle en date du 12 mai 2006 accordant l'aide juridictionnelle totale à Mlle X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2007 :

- le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

- les observations de Me de Chanlaire, avocat de l'Hôpital de Montier-en-Der,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X a été nommée en qualité d'agent des services hospitaliers stagiaire à compter du 1er février 1999 ; que son stage, d'une durée d'un an, a été interrompu à compter du 29 décembre 1999, date à laquelle l'intéressée a été placée en congé de longue maladie jusqu'au 28 décembre 2000 puis en congé de longue durée à compter du 29 décembre 2000 ; que Mlle X a repris ses fonctions à mi-temps thérapeutique le 29 septembre 2001 puis à temps plein le 29 juin 2002 ; que, par décision du 5 mars 2003, le directeur de l'Hôpital de Montier-en-Der a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

Considérant, en premier lieu, que si elle a, à l'issue de son stage, sans que celui-ci ait fait l'objet d'une décision expresse de prolongation ou de renouvellement, continué d'exercer ses fonctions, Mlle X a conservé sa qualité de stagiaire, en l'absence d'une décision expresse de titularisation ; que l'administration pouvait mettre fin, à tout moment, à ses fonctions pour des motifs tirés de l'inaptitude de l'agent à exercer son emploi ; qu'ainsi que l'a jugé le tribunal, dont l'appréciation sur ce point n'est d'ailleurs pas contestée par la requérante, la décision du 5 mars 2003 revêt le caractère d'un licenciement en fin de stage consécutif à un refus de titularisation ;

Considérant, en deuxième lieu, que si, pour contester la régularité formelle de la décision attaquée, la requérante fait valoir que le directeur s'est borné à se référer à l'avis du conseil de discipline, ledit moyen, tiré du défaut de motivation de la décision querellée, doit être écarté dès lors que le licenciement d'un stagiaire en fin de stage pour des motifs tirés de son insuffisance professionnelle n'entre dans aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en troisième lieu, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des procès-verbaux du conseil d'administration de l'établissement réuni le 31 janvier 2003 et de la commission administrative paritaire réunie le 28 février 2003, que le licenciement de l'intéressée est intervenu pour des motifs tirés de son inaptitude à exercer les fonctions auxquelles elle pouvait être appelée et, de manière générale, sur sa manière de servir, et n'a pas, dès lors, le caractère d'une sanction disciplinaire ; que si l'administration a estimé utile de faire bénéficier l'agent de certaines garanties de la procédure disciplinaire, cette seule circonstance ne saurait suffire à regarder ladite décision comme revêtant un caractère disciplinaire ; que, d'autre part, le stagiaire se trouvant dans une situation probatoire et provisoire, la décision de ne pas le titulariser en fin de stage, alors même qu'elle est prise en considération de sa personne, n'est pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n'est soumise qu'aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ; que, dès lors, Mlle X, qui d'ailleurs avait été avertie par la convocation en date du 3 février 2003 en vue de la réunion de la commission administrative paritaire de la possibilité de consulter son dossier et de se faire assister par un conseil de son choix, n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait été prise à la suite d'une procédure irrégulière, faute pour elle d'avoir eu préalablement communication de son dossier ;

Considérant, en quatrième lieu, que les allégations de Mlle X selon lesquelles le directeur aurait exercé des manoeuvres pour l'empêcher d'assister à la séance de la commission administrative paritaire ne sont pas assorties du moindre élément de preuve ;

Considérant, en cinquième lieu, que la requérante ne saurait utilement soutenir que les faits reprochés auraient été sanctionnés deux fois, dès lors, ainsi qu'il a été dit plus haut, que la mesure de licenciement dont s'agit est fondée uniquement sur la manière de servir de l'intéressée et non sur des motifs disciplinaires ;

Considérant, en sixième lieu, que la requérante argue de ce que sa manière de servir est irréprochable et se prévaut, à cet effet, de ses fiches de notation et des nombreux renouvellements de contrat dont elle a fait l'objet depuis 1987 avant son embauche définitive ; qu'il ressort cependant des pièces du dossier, et notamment des procès-verbaux susmentionnés du conseil d'administration et de la commission administrative paritaire, ainsi que du rapport de saisine de la commission administrative paritaire, qui ne sont pas sérieusement contredits par la requérante, que la manière dont Mlle X exécutait ses tâches et son comportement général vis-à-vis de ses supérieurs hiérarchiques et de ses collègues étaient marqués par de nombreuses insuffisances et inaptitudes ; que si la requérante fait valoir qu'elle exerçait depuis 1987 au sein de l'établissement en qualité d'agent non titulaire et que sa note a été fixée en début de stage à 17 sur 20, ces circonstances ne faisaient pas obstacle à ce que l'administration portât une nouvelle appréciation sur sa manière de servir lors de sa reprise de fonctions deux ans plus tard en vue de son éventuelle titularisation ; qu'il est constant que, pour les années 2000, 2001 et 2002, la requérante n'a pu faire l'objet d'aucune évaluation du fait qu'elle était placée, au cours de cette période, en congés de longue maladie puis de longue durée ; que, dès lors, la requérante ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que sa note n'aurait pas baissé depuis 1999 ; qu'ainsi, en estimant que la requérante ne présentait pas les aptitudes professionnelles nécessaires à sa titularisation, le directeur de l'Hôpital de Montier-en-Der n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir et de procédure allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 5 mars 2003 par laquelle le directeur de l'Hôpital de Montier-en-Der l'a licenciée pour insuffisance professionnelle à l'issue de son stage ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant, que la décision du 5 mars 2003, qui n'est pas entachée d'illégalité, n'est pas constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Hôpital de Montier-en-Der ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a rejeté les conclusions de la requérante tendant à la réparation du préjudice moral et financier qu'elle aurait subi du fait de l'illégalité de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mlle X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, à supposer que la requérante ait entendu présenter une demande de réintégration et de reconstitution de carrière, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Hôpital de Montier-en-Der, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à la requérante la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Nathalie X et à l'Hôpital de Montier-en-Der.

2

N° 06NC00023


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00023
Date de la décision : 25/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : MARAH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-01-25;06nc00023 ?
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