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11/01/2007 | FRANCE | N°06NC00849

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 11 janvier 2007, 06NC00849


Vu la requête, enregistrée au greffe le 26 mai 2000 sous le n° 00NC00686, complétée par mémoire enregistré le 26 juin 2001, présentée pour la Société BARBARA DISTRIBUTION, dont le siège social est 7 route des Tuileries à Souffelweyersheim (67460), représentée par son liquidateur, Me Jenner, par Me Kopp ;

La Société BARBARA DISTRIBUTION demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n° 961865-961866-961906-961907 du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 20 mars 2000 en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande en décharge des rappels

de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er mai 1988 au 3...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 26 mai 2000 sous le n° 00NC00686, complétée par mémoire enregistré le 26 juin 2001, présentée pour la Société BARBARA DISTRIBUTION, dont le siège social est 7 route des Tuileries à Souffelweyersheim (67460), représentée par son liquidateur, Me Jenner, par Me Kopp ;

La Société BARBARA DISTRIBUTION demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n° 961865-961866-961906-961907 du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 20 mars 2000 en ce qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er mai 1988 au 31 mars 1991, et a rejeté ses conclusions en décharge de la retenue à la source qui lui a été réclamée pour les exercices clos en 1989, 1990 et 1991, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1989 et 1990 ainsi que de la pénalité qui lui a été infligée pour les mêmes exercices au titre de l'article 1763 A du code général des impôts ;

2°) - de prononcer le dégrèvement intégral des impositions complémentaires à l'impôt sur les sociétés, la taxe sur la valeur ajoutée, la retenue à la source et les pénalités subséquentes mises à sa charge au titre des années 1986 à 1989 ;

3°) - de mettre une somme de 30 000 F à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu l'arrêt en date du 16 décembre 2004 par lequel la Cour a rejeté comme tardive la requête susvisée de la Société BARBARA DISTRIBUTION ;

Vu l'arrêt n° 277556 du 24 mai 2006 par lequel le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt susvisé et renvoyé l'affaire devant la Cour ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 8 septembre 2006, présenté pour la Société BARBARA DISTRIBUTION, qui conclut aux mêmes fins que sa requête et à ce que la somme à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative soit portée à 4 500 € ;

Elle soutient que :

- les premiers juges ont insuffisamment motivé leur décision en se bornant à affirmer qu'elle n'apportait aux débats aucun élément susceptible de contredire le faisceau d'indices produit par l'administration en sa défaveur, en omettant de répondre au moyen tiré de l'erreur de droit commise par le service dans la notification de redressement, et en ne précisant pas en quoi les irrégularités comptables relevées étaient de nature à rendre la comptabilité impropre à justifier les résultats déclarés ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté son moyen tiré du détournement de procédure en estimant que le contrôle fiscal était demeuré distinct du contrôle économique en ne recherchant pas si la réalité des soupçons de fraude en matière de contributions indirectes ou d'infractions à la législation économique justifiait l'intervention de l'administration sous le couvert de l'article 45 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et si la juxtaposition des deux procédures engagées à la seule initiative de l'administration fiscale ne générait pas des interférences portant atteinte aux droits du contribuable vérifié ;

- c'est à tort que le Tribunal a écarté sa comptabilité comme non probante et a estimé que la charge de la preuve du défaut de bien-fondé des redressements lui incombait ;

- que, concernant les dissimulations prétendues de recettes « Voyages RFA », les premiers juges ont retenu sa critique, tout en n'en tirant aucune conséquence quant au redressement lui-même ;

- que sa bonne foi étant établie, les premiers juges ne pouvaient entériner les redressements litigieux sans constater le caractère sommaire de la reconstitution ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 10 août 2006, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire ;

Il soutient que les moyens énoncés par la société requérante ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2006 :

- le rapport de M. Vincent, président,

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient que l'enquête effectuée du 10 octobre 1990 au 13 février 1991 par la brigade de contrôle et de recherches de la direction des services fiscaux du Bas-Rhin auprès d'elle-même et de ses fournisseurs sur le fondement des articles 31 et 47 de l'ordonnance susvisée du 1er décembre 1986 aurait été entreprise pour des raisons exclusivement fiscales et constituerait une vérification de comptabilité irrégulière en tant que dépourvue de garanties prévues à cet effet, dès lors que les opérations litigieuses auraient été entreprises à l'initiative des seuls services fiscaux et par leurs agents, que les modalités de contrôle reprendraient les techniques de la vérification de comptabilité, que les infractions relevées excéderaient le champ de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et que les informations issues de ladite enquête, dont les services fiscaux ont demandé la communication auprès du procureur de la République antérieurement à la vérification de comptabilité entreprise du 11 juin au 14 novembre 1991, ont été utilisées par le vérificateur pour établir les impositions litigieuses ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'enquête susvisée a fait l'objet d'un procès-verbal en date du 1er mars 1991, transmis au procureur de la République, qui a engagé des poursuites pénales pour achats ou ventes sans factures ou ventes avec facturation non conforme ; qu'eu égard à ce qui précède, les premiers juges n'étaient pas en tout état de cause tenus en outre de rechercher si l'administration disposait avant d'entreprendre l'enquête litigieuse de soupçons sérieux de fraude de la société requérante à la législation économique; que si, comme ils y avaient droit sur le seul fondement de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, les agents enquêteurs se sont fait communiquer la comptabilité de la société, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils aient procédé à une comparaison systématique des écritures comptables et des déclarations fiscales souscrites par la société ; qu'au demeurant, aucune des informations recueillies au cours de l'enquête ne concerne les redressements litigieux, à l'exception, s'agissant du redressement afférent aux voyages en France, de la substitution aux prix des voyages payés par la clientèle tels qu'indiqués par la comptabilité de la société de ceux indiqués par certains fournisseurs, ces derniers prix ayant d'ailleurs été corroborés par des investigations ultérieures effectuées lors de la vérification de comptabilité ; qu'ainsi le moyen tiré du détournement de procédure dont aurait usé l'administration fiscale doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que si le juge pénal a constaté la nullité du procès-verbal d'infraction dressé le 1er mars 1991 et prononcé l'annulation de tous les actes de procédure subséquents, l'irrégularité de l'enquête litigieuse est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition, de même que l'irrégularité alléguée par la requérante, à la supposer établie, tenant à ce que les agents enquêteurs auraient selon elle excédé le champ des investigations susceptibles d'être accomplies sur le fondement de l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la décision du juge pénal n'a pas pour effet de priver l'administration du droit de se prévaloir des pièces ainsi annulées pour établir l'imposition, dès lors qu'elle en avait auparavant obtenu régulièrement communication auprès de l'autorité judiciaire ;

Considérant, en dernier lieu, que les investigations des agents enquêteurs dans le cadre de l'enquête susrappelée ayant été effectuées sur le seul fondement des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986, la société requérante ne saurait utilement soutenir que les agents qui y ont procédé auraient ce faisant outrepassé le droit de communication que les services fiscaux tiennent des articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que c'est par une exacte appréciation des pièces du dossier que les premiers juges ont affirmé que plusieurs catégories de recettes n'étaient pas comptabilisées au jour le jour, que les agents commerciaux ne tenaient aucun décompte des ventes réalisées lors des voyages auprès de la clientèle indiquant pour chacun d'entre eux le nombre d'articles vendus et le prix correspondant et que certaines factures des fournisseurs n'avaient pas été comptabilisées ; que ces irrégularités relevées par l'administration avaient un caractère grave et étaient de nature à priver la comptabilité de tout caractère probant ; que c'est ainsi à juste titre qu'en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, le Tribunal administratif a estimé que la charge de la preuve du défaut de bien-fondé des redressements incombait au contribuable dès lors que les impositions litigieuses ont été établies conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts en sa séance du 31 mars 1993 ; qu'il appartient par suite à la société requérante soit d'établir que la méthode de reconstitution des recettes suivie par l'administration est excessivement sommaire ou radicalement viciée dans son principe, soit à défaut de préconiser une méthode de reconstitution plus précise que celle proposée par l'administration ;

Considérant en premier lieu que, pour effectuer le redressement relatif aux voyages publicitaires effectués en France, le service a substitué aux prix unitaires des voyages comptabilisés par la société les prix indiqués par les dépliants distribués dans les boîtes aux lettres, corroborés par les chèques remis en paiement aux transporteurs et mentionnés par les auditions de certains transporteurs dans le cadre de l'enquête susrappelée ; que la société requérante n'avance aucun élément tendant à prouver l'inexactitude du prix retenu ; qu'en admettant même qu'elle ait également entendu contester le fait, affirmé par les dirigeants de la société dans le procès-verbal d'infraction susrappelé, selon lequel elle percevait, par l'intermédiaire de ses agents commerciaux, l'intégralité du prix versé par les voyageurs aux transporteurs, elle n'avance aucun élément de preuve en sens contraire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que les recettes réalisées en 1988 à raison des voyages effectués en Allemagne n'ont pas été comptabilisées ; que, pour procéder au redressement y afférent, le service a pu à bon droit user du droit de communication auprès de la société « Autocars Schmitt », qui assurait le transport des voyageurs ; que la société requérante ne saurait sérieusement mettre en doute l'information donnée par ladite société, selon laquelle le compte client intitulé « K et K » correspondait aux initiales des noms des deux dirigeants de la société Barbara Versand, à laquelle s'est substituée la Société BARBARA DISTRIBUTION à compter du 1er avril 1988, qui comportait les mêmes dirigeants, en se bornant à soutenir qu'il pourrait s'agir de celui d'une société tierce ou qu'il ne retracerait pas les sommes qui lui ont été versées, alors qu'elle n'avance aucun élément tendant à prouver que les prix des voyages indiqués par la société « Autocars Schmitt » ne correspondraient pas à la réalité ;

Considérant, en troisième lieu, que le service a procédé à un redressement concernant les recettes issues de la vente des petits articles lors des voyages en substituant d'autres prix à ceux enregistrés en comptabilité ; que si la société requérante critique la force probante des informations communiquées au service à sa demande par diverses personnes en mesure de connaître les tarifs qu'elle pratiquait, dont les réponses sont au demeurant convergentes, les prix retenus par le service figurent également sur plusieurs correspondances émanant de la société ; que celle-ci n'avance par ailleurs aucun élément probant tendant à faire apparaître qu'elle appliquerait des tarifs inférieurs à ceux ainsi diffusés ;

Considérant, en dernier lieu, que le service a également effectué un redressement afférent aux recettes remises par le service des postes correspondant aux colis postaux expédiés contre remboursement en rapprochant les recettes comptabilisées par la société à ce titre et les bordereaux de mandats émis par le bureau de postes, la différence ainsi obtenue étant corrigée de l'incidence des mandats non émis au profit de la Société BARBARA DISTRIBUTION ; qu'afin d'évaluer cette incidence, le vérificateur a procédé à un recensement exhaustif des destinataires des mandats portant sur une période déterminée et a extrapolé ce résultat à l'ensemble de la période en se fondant sur les témoignages de plusieurs agents du service des postes ; que la société requérante n'apporte pas la preuve du caractère excessif du pourcentage de 90 % de mandats destinés à la Société BARBARA DISTRIBUTION retenu par le service, sensiblement inférieur à celui ressortant de l'échantillon, corroboré par les indications des employés et d'ailleurs corrigé dans un sens favorable à la société lors de l'examen de la réclamation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société BARBARA DISTRIBUTION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la Société BARBARA DISTRIBUTION au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la Société BARBARA DISTRIBUTION est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me Jenner, liquidateur de la Société BARBARA DISTRIBUTION, et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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06NC00849


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00849
Date de la décision : 11/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : KOPP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-01-11;06nc00849 ?
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