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06/07/2006 | FRANCE | N°05NC00428

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 06 juillet 2006, 05NC00428


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 avril 2005, présentée pour Mme Michelle X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Mery-Dubois-Maire ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 25 janvier 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 356 612,55 € en réparation des préjudices consécutifs à une vaccination contre l'hépatite B ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 78 768 €, 6 000 € et 20 000 € respectivement au ti

tre du préjudice matériel, de l'incapacité permanente partielle et du préjudice mora...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 avril 2005, présentée pour Mme Michelle X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Mery-Dubois-Maire ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 25 janvier 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 356 612,55 € en réparation des préjudices consécutifs à une vaccination contre l'hépatite B ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 78 768 €, 6 000 € et 20 000 € respectivement au titre du préjudice matériel, de l'incapacité permanente partielle et du préjudice moral ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il n'y avait aucun lien de causalité entre les vaccinations anti-hépatite B et la nouvelle poussée de sclérose en plaque alors que l'expert avait précisé qu'il existait un lien de cause à effet ; le jugement n'indique pas le motif pour lequel il s'est écarté des conclusions de l'expert ;

- les textes et la jurisprudence prévoient une responsabilité de plein droit de l'Etat ou du moins une présomption de responsabilité ;

- le préjudice subi par la requérante est évalué à 78 768 € au titre du préjudice matériel lié à la perte de salaires, à 6 000 € au titre de l'incapacité permanente partielle et à 20 000 € au titre du préjudice moral ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 juin 2005, présenté par le centre hospitalier universitaire de Nancy , représenté par son directeur général, qui précise que l'action de la requérante est dirigée contre l'Etat à l'exclusion du centre hospitalier universitaire de Nancy et qu'en conséquence, il n'a pas d'observations à faire valoir dans l'instance ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2005, présenté par le ministre de la santé et des solidarités ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il se réfère à cet effet aux observations en défense qu'il a présentées en première instance ; la relation entre la pathologie de la requérante et la vaccination anti-hépatite B n'est pas établie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303, 4 mars 2002, et notamment son article 104 ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2005 :

; le rapport de M. Leducq, président de chambre,

; et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement,

Considérant qu'aux termes de l'article L. 10, devenu l'article L 3111-4, du code de la santé publique : « Une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B, la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite. » ; qu'aux termes de L 3111-9 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable au litige : « Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l'Etat. » ; qu'enfin, aux termes de l'article 104 de la loi du 4 mars 2002 susvisée : « Les dispositions de l'article L 3111-9 du code de la santé publique sont applicables aux personnes visées à l'article L 3111-4 du même code qui ont été vaccinées contre l'hépatite B avant la date d'entrée en vigueur de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales. » ; qu'il résulte de ces dispositions, lesquelles ne prévoient pas pour engager la responsabilité de l'Etat un régime de présomption de causalité, que la responsabilité sans faute de l'Etat à raison des dommages causés par une vaccination obligatoire est subordonnée à la condition que soit établi un lien de causalité direct entre cette vaccination et le dommage dont la réparation est demandée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X, agent hospitalier au centre hospitalier universitaire de Nancy, a dû, en application de l'article L 3111-4 du code de la santé publique précité, faire l'objet de vaccinations contre l'hépatite B pratiquées les 7 mars, 28 avril et 26 septembre 1989 et suivies d'un rappel le 13 février 1992 ; que Mme X, souffrant d'une sclérose en plaque depuis 1979, soutient que la nouvelle poussée dont elle a été victime en avril 1990 et qui a nécessité une hospitalisation est imputable à ces vaccinations obligatoires ; qu'elle a ainsi présenté une demande tendant à condamner l'Etat, sur le fondement de la responsabilité sans faute prévue par les dispositions précitées de l'article L 3111-9, à la réparation des préjudices subis du fait de ces vaccinations ; qu'après examen de la demande par la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux placée auprès du ministre chargé de la santé dans sa séance du 28 juin 2001, le directeur général de la santé a par décision du 10 décembre 2001 refusé de reconnaître la responsabilité de l'Etat ; que Mme X a saisi le Tribunal administratif de Nancy d'une action en indemnité dirigée contre l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport en date du 12 mars 2001 de l'expert désigné dans le cadre de l'instruction du dossier devant ladite commission, que Mme X est atteinte de sclérose en plaque depuis probablement 1979, date d'apparition des premiers troubles neurologiques, et qu'elle a fait l'objet en vue de traiter ces troubles d'une hospitalisation en octobre 1981 au cours de laquelle a été posé le diagnostic de la maladie ; que la requérante n'a plus présenté de troubles jusqu'en avril 1990 où est réapparu un léger déficit neurologique ayant justifié une nouvelle hospitalisation ; que si l'expert a formulé à titre d'hypothèse la possibilité d'un lien entre les vaccinations et la nouvelle poussée de la sclérose en plaque survenue en avril 1990, il n'est cependant pas fait état d'un faisceau d'indices concordants selon lesquelles ces vaccination auraient contribué à l'apparition de cette poussée, laquelle n'est pas intervenue dans les suites immédiates des vaccinations mais seulement huit mois après ; que dans ces conditions, eu égard à la spécificité de l'évolution de la sclérose en plaque qui alterne phases de rémission et poussées successives, et compte tenu des données actuelles de la science et des connaissances médicales ainsi que du délai séparant les injections contestées et la survenue d'une nouvelle poussée de la maladie , et alors surtout que la requérante était atteinte par cette affection antérieurement aux vaccinations litigieuses, le lien de causalité direct entre les vaccinations incriminées et l'affection en cause ne peut, nonobstant la chronologie des faits relevés par l'expert, être regardé en l'espèce comme établi de façon certaine ; que par suite c'est à bon droit que le tribunal, qui n'était pas tenu par les conclusions de l'expert, a considéré que le lien de causalité entre les vaccinations incriminées et la poussée d'avril 1990 ne pouvait être retenu ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant que ces dispositions font, en tout état de cause, obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme X la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête susvisée de Mme X est rejetée.

Article 2 : : Le présent arrêt sera notifié à Mme Michelle X, au ministre de la santé et des solidarités, au centre hospitalier universitaire de Nancy et à la caisse primaire d'assurance maladie de Longwy.

2

N°05NC00428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05NC00428
Date de la décision : 06/07/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. Alain LEDUCQ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : MERY-DUBOIS-MAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-07-06;05nc00428 ?
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