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13/04/2006 | FRANCE | N°03NC00406

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 13 avril 2006, 03NC00406


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2003, présentée pour M. Bernard X, demeurant ..., par Me Remond avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-0850 en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'expertise du Dr Y enregistrée au tribunal le 15 décembre 1998 et de la décision en date du 28 avril 2000 par laquelle l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole a implicitement rejeté sa demande d'indemnisation des préjudices résultant des

suites de son intervention chirurgicale du 4 mai 1979 et, d'autre part, à la ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2003, présentée pour M. Bernard X, demeurant ..., par Me Remond avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-0850 en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'expertise du Dr Y enregistrée au tribunal le 15 décembre 1998 et de la décision en date du 28 avril 2000 par laquelle l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole a implicitement rejeté sa demande d'indemnisation des préjudices résultant des suites de son intervention chirurgicale du 4 mai 1979 et, d'autre part, à la condamnation de l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à lui verser une somme de 259 500 F assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 1999 et capitalisés, ainsi qu'une somme de 20 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administratives et à supporter la charge des frais d'expertise ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du 28 avril 2000 ;

3°) d'annuler l'expertise du Dr Y ;

4) de condamner l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à lui verser une somme de 39 560,52 €, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 1999, les intérêts étant eux mêmes capitalisés ;

5°) de condamner l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à supporter la charge des frais d'expertise ;

6°) de condamner l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il résulte de l'attestation établie par le médecin-conseil de M. X que le Dr Y a pris contact téléphoniquement avec le Dr Z en dehors des opérations d'expertise contrevenant ainsi à la règle du contradictoire et le Tribunal ne pouvait donc se référer aux conclusions du rapport d'expertise ;

- l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole est responsable d'une faute dans l'exécution des soins, le plâtre posé après son intervention du 4 mai 1979 a excessivement comprimé les muscles de son mollet et entraîné une nécrose musculaire irréversible, conformément aux avis émis par les Dr A et B ; la prescription d'un antalgique et les témoignages produits attestent des souffrances endurées du fait du plâtre trop serré, provoquant un syndrome des loges ;

- l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole est responsable d'un défaut d'information sur les risques encourus en cas de contention plâtrée ;

- l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole est responsable d'une faute dolosive compte tenu de la rétention d'information auquel il a procédé, empêchant M. X de poursuivre la faute médicale ;

- le lien de causalité est établi par l'analyse du Dr A et par la constatation d'une légère amyotrophie le 30 octobre 1979, qui n'a fait qu'empirer par la suite ;

- le préjudice lié à l'incapacité totale de travail doit être évalué à 5 874,62 €, celui lié à l'incapacité permanente partielle de 12 % à 25 611,43 €, le préjudice esthétique de 3/7 doit être indemnisé de 4573, 47 €, et les souffrances physiques de 6402, 86 € ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2003, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie du Jura, représentée par son directeur en exercice, par Me Paris et Me Paraiso, avocats ;

La caisse primaire d'assurance maladie du Jura conclut :

- à l'annulation du jugement ;

- à la condamnation de l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à lui payer une somme de 36 768,45 € au titre des débours qu'elle a exposés à la suite de l'intervention chirurgicale subie par M. X ;

- à la condamnation de l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole à lui payer une somme de 1 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle déclare s'associer aux moyens développés par M. X ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2003, présenté pour l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole, représenté par son directeur en exercice, ayant son siège 1 rue de Franche Comté à Champagnole (39300), par la SCP d'avocats Accart ; l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole conclut au rejet de la requête et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Jura, subsidiairement à ce que la Cour invite M. X à préciser le montant de ses demandes, très subsidiairement qu'elle réduise les indemnités demandées ;

Il soutient que :

- en toutes hypothèses, il n'est pas établi que la réponse qui a pu être faite par le Dr Z à l'expert ait pu être à l'origine des conclusions de non-imputabilité de celui-ci ; rien n'empêchait le requérant et son médecin-conseil de saisir l'expert de ce défaut de contradictoire allégué, or le dire qu'ils lui ont adressé après le dépôt du rapport d'expertise n'en fait pas même mention ;

- rien ne permet d'affirmer que les douleurs ressenties après l'intervention soient imputables au port du plâtre plutôt qu'à l'intervention elle même, par nature très douloureuse ;

- M. X ne s'est pas astreint à un suivi médical après l'intervention ni n'a même cru devoir suivre de séances de rééducation ;

- la symptomatologie présentée par M. X ne coïncide pas avec celle d'un syndrome des loges ;

- en l'absence de démonstration de l'imputabilité du préjudice à l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole et compte-tenu de l'absence d'obligation d'information à l'époque, le moyen tiré du défaut d'information devra être écarté ;

- le compte-rendu d'examen médical de la caisse primaire d'assurance maladie du

30 octobre 1979 relève une légère amyotrophie du mollet et de la cuisse faisant partie des suites normales de l'intervention ;

- la caisse primaire d'assurance maladie du Jura ne distingue pas la part de ses débours imputable à l'accident et celle qui serait due à l'intervention ;

- les préjudices mis en compte sont surévalués et non-justifiés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2006 :

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,

- et les conclusions de M.Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure suivie en première instance :

Considérant que le jugement attaqué se fonde notamment sur les conclusions du rapport d'expertise établi par le Dr Y, expert nommé par ordonnance en date du 17 septembre 1998 du président du tribunal administratif de Besançon ; qu'il résulte de l'instruction que l'expert a pris contact téléphoniquement en dehors des opérations d'expertise avec le Dr Z, chirurgien ayant opéré M. X, alors en retraite ; que, dans ces circonstances, l'expertise n'a pas respecté les principes de la procédure contradictoire et le jugement attaqué doit, en ce qui le concerne, être annulé comme intervenu sur une procédure irrégulière ; que toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle, après évocation du litige, à ce que le rapport de l'expert qui constitue une des pièces du dossier sur laquelle M. X a pu faire valoir ses observations écrites soit retenu à titre d'élément d'information par la Cour et qu'il soit statué au fond sans recourir à une autre expertise ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, alors salarié de l'entreprise de travaux publics Soula, a été victime d'un accident de travail le 31 mars 1979, s'étant fait une entorse du genou droit à la suite d'une chute dans un fossé ; qu'il a été admis à l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole le 2 mai 1979, y a été opéré le 4 mai suivant et en est sorti le 15 mai avec un plâtre de maintien ; que M. X a repris le travail le 5 septembre 1979 ; qu'en juillet 1983, il s'est plaint d'une amyotrophie du mollet droit avec abolition du réflexe achilléen droit ; que le 6 avril 1984, il était opéré pour un allongement du tendon d'Achille ; qu'il s'est à nouveau plaint à partir de 1997 de troubles de la marche ; que M. X soutient que l'amyotrophie du mollet droit dont il souffre trouve son origine dans un syndrome des loges provoqué par le plâtre, trop serré, entourant sa jambe pendant six semaines après l'intervention du 4 mai 1979 ;

Considérant que nonobstant l'avis émis par le Dr A qui a estimé que la persistance de ses troubles pouvait être rattachée à l'intervention de 1979, les témoignages établis en 1999 de personnes déclarant se souvenir que, lors des visites de M. X durant son hospitalisation en 1979, elles ont constaté qu'il souffrait de sa jambe plâtrée, et la circonstance qu'un médicament antalgique lui ait été prescrit après l'opération, il résulte de l'instruction que la certitude d'un syndrome des loges et sa relation directe et certaine avec l'accident du 4 mai 1979 ne peut être établie ; qu'en effet, outre le temps écoulé entre les plaintes de l'intéressé, l'on ne retrouve ni dans son dossier médical ni dans son interrogatoire la douleur intense et l'élévation de température caractéristiques de l'installation de ce syndrome ; que les maux qui l‘affectent peuvent avoir pour origine un processus d'atrophie neurogène décelé en 1983 par le Dr C à la suite d'une blessure profonde en 1966, qui a entraîné une intervention chirurgicale ayant pu occasionner des lésions du nerf sciatique interne ; que, par ailleurs, il résulte de l'examen pratiqué dans le cadre de la législation des accidents du travail le 30 octobre 1979, moins d'un mois après la reprise du travail, qu'a été constatée chez M. X une légère amyotrophie tant au niveau de la cuisse que du mollet et que les doléances exprimées par l'intéressé ne concernaient alors que des douleurs du genou droit ; que dans ces conditions, le lien de causalité direct et certain entre les suites de l'intervention du 4 mai 1979 et les préjudices invoqués par M. X ne peut être regardé comme établi ;

Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Jura :

Considérant que, par voie de conséquence de ce qui précède, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Jura tendant au remboursement de ses débours doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'hôpital de Franche-Comté de Champagnole, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à M. X et à la caisse primaire d'assurance maladie du Jura la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 20 mars 2003 du Tribunal administratif de Besançon est annulé ;

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Besançon est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Jura sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à l'hôpital de Franche Comté de Champagnole et à la caisse primaire d'assurance maladie du Jura.

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N° 03NC00406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC00406
Date de la décision : 13/04/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : CONVERSET LETONDOR GOY-LETONDOR REMOND

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-04-13;03nc00406 ?
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