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14/11/2005 | FRANCE | N°04NC01024

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 14 novembre 2005, 04NC01024


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 novembre 2004, présentée pour Me X, élisant domicile ..., par Me Sauer-Bourguet, avocat ; Me X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000763 en date du 23 septembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés des 24 janvier 2000, 18 avril 2000 et 9 juillet 2001 du préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne, ainsi que du titre de perception émis à son encontre le 4 mai 2000 par cette même autorité ;

2°)

d'annuler ces décisions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 0...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 novembre 2004, présentée pour Me X, élisant domicile ..., par Me Sauer-Bourguet, avocat ; Me X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000763 en date du 23 septembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés des 24 janvier 2000, 18 avril 2000 et 9 juillet 2001 du préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne, ainsi que du titre de perception émis à son encontre le 4 mai 2000 par cette même autorité ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté du 24 janvier 2000 n'a pas été notifié à Me X, l'accusé de réception ne comporte pas sa signature, et la notification de la décision ne mentionne pas les voies et délais de recours ; sa demande d'annulation n'était donc pas tardive ;

- l'arrêté du 24 janvier 2000 n'est pas motivé et se réfère à un arrêté du 6 mai 1997 qui ne visait pas des déchets banals mais des déchets radioactifs ; il est entaché de contradiction de motifs puisqu'il concerne des déchets banals mais demande un contrôle de non-radioactivité ; enfin, il ne respecte pas les dispositions de l'article 18 du décret du 21 septembre 1977, l'exploitant n'ayant pas été entendu et le conseil départemental d'hygiène consulté ;

- il ne peut être justifié que Me X n'a pas respecté les prescriptions antérieures à la mise en demeure puisque leur exécution a été confiée à l'ANDRA et l'ADEME ; la procédure de consignation prévue à l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976 ne pouvait donc être initiée ;

- l'arrêté du 18 avril 2000 sera annulé par voie de conséquence de l'annulation de celui du 24 janvier 2000 ;

- la créance étant irrécouvrable, ainsi qu'il résulte notamment de l'ordonnance définitive du juge-commissaire en date du 8 octobre 2001, la consignation ne pouvait être prononcée, compte-tenu de la carence légitime du mandataire judiciaire ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2005, présenté par le ministre de l'écologie et du développement durable ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

-le préfet étant en situation de compétence liée lorsqu'il met en demeure un exploitant, le moyen tiré du défaut de motivation est inopérant ; au demeurant, l'arrêté du 24 janvier 2000 énonce les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, précisant notamment sur quels points les prescriptions ne sont pas respectées ;

- l'arrêté du 24 janvier 2000 a été régulièrement notifié à Me Xet comporte la mention des voies et délais de recours ;

-la remise en état du site est une obligation de l'exploitant et le préfet pouvait, en l'absence de diligence du liquidateur et tant que subsistaient des dangers, le mettre en demeure d'y procéder en application de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976 codifié à l'article L. 514-1 du code de l'environnement ;

- la circonstance que la créance n'aurait pas été déclarée ne peut être utilement invoquée contre l'arrêté de consignation et l'impécuniosité de la liquidation n'est pas de nature à faire obstacle à une mesure de remise en état ;

- le préfet a confié à l'ANDRA et l'ADEME l'exécution de travaux d'office aux frais de la société Orflam Plast ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2005 :

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société ORFLAM a traité depuis 1950 jusqu'en 1970 à Pargny-sur-Saulx de la monazite, minerai radioactif à l'état naturel, importé de Madagascar, et y a procédé à la préparation de nitrate de thorium et de ferrocérium, en vue de la fabrication de pierres à briquet ; qu'elle a été placée en liquidation judiciaire le 19 octobre 1987 ; que ses actifs ont été repris par la société ORFLAM PLAST, elle même placée en redressement puis liquidation judiciaire, par décision du Tribunal de commerce de Chalons-en-Champagne du 6 février 1997 ; qu'alertés par un courrier en date du 18 février 1997 du mandataire liquidateur, Me X, de la présence dans les locaux désaffectés de la société de déchets susceptibles d'être radioactifs, les agents de la direction régionale de l'industrie de la recherche et de l'environnement (D.R.I.R.E.) y ont constaté , à la suite d'une visite sur place, la présence de déchets radioactifs, de déchets chimiques et de déchets banals ; que le préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne a prescrit la décontamination du site par deux arrêtés en date des 11 avril et 6 mai 1997, puis en l'absence de satisfaction à toutes les obligations fixées, confié à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) et à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) l'évacuation des déchets radioactifs et chimiques, effectuée du 2 au 6 juin 1997 ; qu'une visite des lieux réalisée le 14 décembre 1998 ayant permis de constater encore la présence sur le site de déchets divers inflammables, le préfet a adressé au liquidateur un arrêté du 24 janvier 2000 le mettant en demeure de respecter les prescriptions de l'arrêté du 6 mai 1997 en procédant dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté à la reprise et à l'élimination des déchets encore présents ; qu'une visite des lieux le 17 mars 2000 a permis de constater que ces déchets n'avaient pas encore été évacués ; qu'ont alors été émis successivement par le préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet le Marne un arrêté du 18 avril 2000 mettant en oeuvre la procédure de consignation prévue à l'article 23-1 de la loi n° 76-663du 19 juillet 1976, en l'absence d'exécution de l'arrêté du 24 janvier 2000, pour un montant de 600 000 F représentant le coût des travaux d'élimination et de contrôle des déchets restant à effectuer et un titre de perception du 4 mai 2000 mettant cette somme à la charge du liquidateur, un arrêté du 25 avril 2001 confiant à l'ADEME la reprise et l'évacuation des déchets et l'évaluation du coût des contrôles de l'absence de radioactivité, enfin, un arrêté du 9 juillet 2001prescrivant à la société ORFLAM PLAST, représentée par Me X, les travaux de mise en sécurité du site préconisés par l'ANDRA ; que, par ordonnance définitive en date du 8 octobre 2001, le juge-commissaire a constaté que la créance poursuivie était irrécouvrable en l'absence de fonds suffisants et compte-tenu de l'ordre de priorité des créances ;

Considérant que, par le jugement attaqué en date du 23 septembre 2004, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté comme tardive et, par suite, irrecevable la demande de Me X tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2000, et comme non fondées les demandes d'annulation des arrêtés du 18 avril 2000 et 9 juillet 2001 ainsi que du titre de perception émis le 4 mai 2000 ;

Sur la recevabilité des conclusions dirigées contre l'arrêté du 24 janvier 2000 :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ; qu' aux termes de l'article R. 421-5 du même code : Les délais de recours contre une décision déférée au tribunal ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ;

Considérant, d'une part, qu'en cas de notification par pli recommandé d'une décision, la preuve de l'absence de qualité du signataire incombe au destinataire si l'administration produit l'avis de réception signé dudit pli ; qu'il résulte de l'instruction que l'arrêté du 24 janvier 2000 a été notifié par pli recommandé le 27 janvier 2000 à Me X à son adresse et que l'avis de réception du même jour a été signé par son destinataire ; que Me X ne rapporte pas la preuve de l'absence de qualité dudit signataire ; que, d'autre part, l'article 3 de l'arrêté querellé mentionne les voies et délais de recours contentieux ; que, par suite, les premiers juges ont, à bon droit, rejeté comme tardive et donc irrecevable la demande d'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2000 enregistrée le 12 mai 2000 ;

Sur les conclusions dirigées contre les autres décisions :

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'arrêté du préfet de la Marne en date du 24 janvier 2000 mettant en demeure la société ORFLAM PLAST, représentée par Me X, de poursuivre et d'achever l'élimination des déchets encore présents sur le site de Pargny-sur-Saulx est devenu définitif faute d'avoir été contesté dans le délai de recours contentieux ; que, par suite, Me X n'est pas recevable, au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne du 18 avril 2000 prescrivant la consignation d'une somme de 600 000 francs en vue de la réalisation des travaux en cause, à exciper de l'illégalité de l'arrêté de mise en demeure du 24 janvier 2000, qui est dépourvu de valeur réglementaire et ne forme pas avec l'arrêté de consignation une opération complexe ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976, dont les dispositions sont aujourd'hui reprises à l'article L. 514-1 du code de l'environnement : I. -Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : 1º Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites (...) ; qu'il n'est pas sérieusement contesté par Me X que c'est l'exécution incomplète des prescriptions de l'arrêté du 6 mai 1997 par l'entreprise défaillante et son liquidateur qui a nécessité que le préfet fasse intervenir l'ANDRA et l'ADEME pour assurer l'évacuation et le nettoyage du site industriel, sans que, comme l'a à juste titre relevé le tribunal, l'exécution d'office des travaux au lieu et place de l'exploitant soit de nature à exonérer ce dernier de son obligation d'en assurer la charge ;

Considérant, en troisième lieu, que si les dispositions des articles 47 à 53 de la loi du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, reprises aux articles L. 621-40 à 46 du code de commerce, régissent les conditions dans lesquelles peuvent être produites puis payées les créances détenues sur une entreprise qui fait l'objet d'une procédure collective, elles ne font pas obstacle à ce que l'administration fasse usage de ses pouvoirs, notamment de police administrative, qui peuvent la conduire, dans les cas où la loi le prévoit, à mettre à la charge de particuliers ou d'entreprises, par voie de décision unilatérale, des sommes dues aux collectivités publiques ; que ces dispositions ne font pas davantage obstacle à ce que le juge administratif statue sur les contestations auxquelles ces actes donnent lieu ou sur les litiges qui opposent les particuliers à l'administration en ce qui concerne le principe et l'étendue des droits de cette dernière ; qu'en revanche, il appartient à l'administration, pour obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues, de suivre les règles relatives à la procédure judiciaire applicable au recouvrement des créances ; qu'il s'ensuit que le préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne, a pu, à bon droit, sur le fondement de la législation relative aux installations classées, ordonner la consignation contestée ;

Considérant, enfin, que si le préfet peut, le cas échéant, prendre en considération l'insolvabilité d'un exploitant, celui ci ne peut pas se prévaloir de sa propre insolvabilité pour échapper aux obligations qui sont les siennes en application de la loi du 19 juillet 1976 ; qu'en conséquence, Me X ne peut utilement invoquer la circonstance que la société ORFLAM PLAST serait insolvable pour contester le bien-fondé des arrêtés du 18 avril 2000 et 9 juillet 2001 ainsi que du titre de perception émis le 4 mai 2000 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Me X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes d'annulation des actes susvisés ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à Me X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Me X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me X, en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société ORFLAM PLAST et au ministre de l'écologie et du développement durable.

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N° 04NC01024


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04NC01024
Date de la décision : 14/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SAUER-BOURGUET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-11-14;04nc01024 ?
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