Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 décembre 2003, complétée par un mémoire enregistré le 17 décembre 2003, présentée pour la COMMUNE DE TOMBLAINE (Meurthe-et-Moselle), représentée par son maire en exercice, ayant pour mandataire Me Y..., de la SCP Lagrange et associés, avocat au barreau de Nancy ;
La COMMUNE DE TOMBLAINE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0300773 en date du 7 octobre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du maire de Tomblaine en date du 7 octobre 2003 en tant qu'il interdit au public les dimanches et jours fériés l'accès au circuit de karting Adrénaline de la SARL G2AS ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le Tribunal administratif de Nancy par la SARL G2AS ;
3°) de condamner la SARL G2AS à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors que le tribunal a été présidé par le magistrat qui avait déjà suspendu en référé l'exécution de l'arrêté ;
- le tribunal administratif a écarté à tort le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'il y avait lieu d'appliquer le règlement sanitaire départemental, compte tenu du caractère non fondé des allégations de la SARL G2AS et de la réalité des nuisances ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2005, présenté pour la SARL G2AS, dont le siège social est ..., représentée par son gérant en exercice, ayant pour mandataire la SCP Mery - Dubois - Maire, avocats au barreau de Nancy ;
Elle conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la COMMUNE DE TOMBLAINE à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que
- la commune est dépourvue d'intérêt à agir ;
- le tribunal administratif a fait une exacte appréciation des circonstances de l'espèce ;
Vu le code général des collectivités locales ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2005 :
- le rapport de M. Sage, président,
- les observations de Me X..., de la SCP Lagrange et associés, avocat de la COMMUNE DE TOMBLAINE,
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête :
Considérant que la circonstance que l'arrêté du maire de Tomblaine en date du 19 septembre 2002 réglementant pour une durée d'un an l'ouverture au public du circuit karting Adrénaline géré par la SARL G2AS n'était plus en vigueur au 7 octobre 2003, date du jugement attaqué qui a annulé partiellement cet arrêté, n'est pas de nature à rendre la COMMUNE DE TOMBLAINE dépourvue d'intérêt à interjeter appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'aux termes de l'article l. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : La police municipale ... comprend notamment ... le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les bruits, y compris les bruits de voisinage ... ;
Considérant que, par arrêté en date du 19 septembre 2002, le maire de Tomblaine a autorisé l'accès au public du circuit de karting géré par le SARL G2AS, sauf de 20 heures à 7 heures et sauf les dimanches et jours fériés, pour une durée d'un an, entendant ainsi fixer des heures d'ouverture en conformité avec l'article 3 de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 26 décembre 1996 concernant les bruits de voisinage qui prescrit l'interruption des activités professionnelles susceptibles de causer une gêne pour le voisinage en raison de leur intensité sonore entre 20 heures et 7 heures et toute la journée des dimanches et jours fériés, sauf dérogations exceptionnelles et de durées limitées accordées par le préfet ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SARL G2AS exploitait, sur une piste longue de 1 120 mètres, plusieurs engins munis de moteurs de 270 et 390 centimètres-cubes, dont le niveau sonore atteignait chacun 75 décibels ; que cette piste était installée sur les dépendances de l'Aéroport de Nancy, auquel l'agglomération de Tomblaine est contiguë ; qu'il n'est pas établi que seules les quelques habitations les plus proches du circuit de karting auraient été exposées à ses nuisances ; que l'absence de justification de plaintes des habitants de Tomblaine ne saurait être regardée comme excluant par elle-même l'existence des nuisances sonores qu'ils étaient susceptibles de subir du fait de l'activité du circuit ; que la SARL G2AS ne conteste d'ailleurs pas que les dispositions susmentionnées de l'arrêté préfectoral du 26 décembre 1996 lui étaient ainsi applicables ;
Considérant, en outre, que la convention d'occupation du domaine public, passée entre la SARL G2AS et l'Aéroport de Nancy, ne contient, en tout état de cause, d'autres stipulations concernant la pollution sonore que les caractéristiques des véhicules utilisés ; que, si la SARL G2AS invoquait une absence de mesures du niveau sonore en méconnaissance de l'article R. 48-4 du code de la santé publique alors en vigueur, cet article ne concernait que des dispositions pénales non applicables à l'exercice de la police municipale ; que la COMMUNE DE TOMBLAINE soutient, sans être utilement contredite, que l'arrêté attaqué avait été édicté après concertation avec l'exploitant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué en tant qu'il interdit l'accès du circuit au public les dimanches et jours fériés, le Tribunal administratif de Nancy s'est fondé sur les stipulations de la convention d'occupation du domaine public relatives aux nuisances sonores des véhicules, sur l'urbanisation réduite à proximité du circuit, sur l'absence de justification de plaintes des riverains, sur l'absence de mesures des nuisances et sur une prétendue absence de concertation entre la commune et l'exploitant ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL G2AS devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Considérant que, si la SARL G2AS se prévaut de ce qu'elle a succédé à un précédent exploitant qui n'avait pas fait l'objet d'un arrêté municipal équivalent, elle ne conteste pas utilement que cet exploitant était lui-même déjà soumis aux dispositions susmentionnées de l'arrêté préfectoral du 26 décembre 1996 et ne saurait se prévaloir de la violation de cet arrêté ;
Considérant que la SARL G2AS soutenait que l'arrêt attaqué était entaché d'une erreur manifestation d'appréciation en raison des nuisances de l'aéroport, ouvert le dimanche et les jours fériés, et de l'absence de rappel par la commune des sujétions particulières relatives au bruit de l'aérodrome résultant du plan d'exposition au bruit prévu par les articles L. 147-1 et suivants du code de l'urbanisme, elle ne conteste pas utilement que l'activité de l'aérodrome était alors des plus limitées et que le bruit de quelques avions légers ne pouvait être comparés en intensité et en continuité avec les nuisances sonores des véhicules circulant sur le circuit ; qu'ainsi, l'erreur d'appréciation alléguée ne saurait être regardée comme établie ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, que la COMMUNE DE TOMBLAINE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a fait droit à la demande de la SARL G2AS ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE TOMBLAINE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la SARL G2AS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en applications des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner la SARL G2AS à payer à la COMMUNE DE TOMBLAINE la somme de 1 000 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 7 octobre 2003 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SARL G2AS devant le Tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : La SARL G2AS est condamnée à verser à la COMMUNE DE TOMBLAINE la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de la SARL G2AS tendant à l'application de cet article sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE TOMBLAINE et à la SARL G2AS.
Copie pour information en sera transmise au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nancy.
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N° 03NC01245