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31/03/2005 | FRANCE | N°04NC00661

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 31 mars 2005, 04NC00661


Vu le recours, enregistré le 23 juillet 2004, complété par un mémoire enregistré le 23 décembre 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n°s 03-531 / 03-532 du 16 mars 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nancy a accordé à la S.A.S. Disvalor, la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1997, 1998 et 1999, et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour l

a période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 ;

2°) de remettre ces impositions...

Vu le recours, enregistré le 23 juillet 2004, complété par un mémoire enregistré le 23 décembre 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n°s 03-531 / 03-532 du 16 mars 2004, par lequel le Tribunal administratif de Nancy a accordé à la S.A.S. Disvalor, la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1997, 1998 et 1999, et de rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 ;

2°) de remettre ces impositions à la charge de la S.A.S. Disvalor, à concurrence de la décharge prononcée par les premiers juges ;

3°) d'annuler également la condamnation de l'Etat à verser une somme de 900 euros à la société requérante ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a admis la déduction, en charges, du bénéfice imposable de la société, des cotisations versées à l'association CEFILEC , qui assure des actions de formation de personnels, dans le cadre du groupe E. Leclerc , destinées en pratique aux salariés envoyés à l'étranger, alors que ces dépenses ne peuvent être regardées comme engagées dans l'intérêt direct de la société contribuable ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, il n'est établi, ni que le refus de payer ces cotisations aurait entraîné une exclusion du groupe E. Leclerc, ni que les nouveaux magasins établis à l'étranger, n'auraient pu assumer les charges de formation de leurs personnels, ce dernier moyen étant en tout état de cause, inopérant ;

- les obligations contractuelles des membres du groupe sont sans incidence sur les impositions en litige, établies en application de la loi fiscale ;

- la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces mêmes dépenses de formation des personnels n'étaient pas déductibles, compte tenu des éléments susanalysés ; en outre, il n'existe aucune recette taxable, reçue directement en contrepartie des sommes versées, ce qui interdit la récupération de la taxe correspondante ; les avantages invoqués par la société contribuable apparaissent trop généraux et indirects, pour être pris en compte ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, le mémoire en défense enregistré le 1er décembre 2004, présenté pour la société par actions simplifiée Disvalor dont le siège est ..., par Me Philippe Lelievre, avocat ; elle conclut au rejet du recours du ministre, à la confirmation du jugement attaqué, et à ce que l'Etat soit condamné à lui payer une somme de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- compte-tenu de la spécificité du réseau des magasins E. Leclerc et des obligations de ses adhérents, le tribunal administratif a jugé, à bon droit, que les cotisations litigieuses avaient été versées dans l'intérêt de l'entreprise, qui bénéficie de l'expansion, des activités du groupe à l'étranger, rendue indispensable par la concurrence très vive constatée dans la grande distribution ;

- le refus de payer ces cotisations aurait constitué un motif d'exclusion du groupe et de résiliation du contrat de panonceau ;

- ces cotisations ont bien une contrepartie, consistant en une économie de charges directe et immédiate pour les magasins établis en France, ainsi qu'un meilleur amortissement des équipements du groupe ;

- l'expansion sur l'étranger ainsi financée comporte plusieurs effets économiques bénéfiques, et permet notamment d'accroître l'expérience des personnels ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées les 21 et 30 mars 2005, présentées pour la S.A.S. Disvalor ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2005 :

- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,

- les observations de Me Lelievre, avocat de la S.A.S. Disvalor,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.A.S. Disvalor, qui exploite un supermarché sous l'enseigne E. Leclerc à Vandoeuvre-les-Nancy, a déduit de ses résultats des exercices 1997, 1998 et 1999, les cotisations qu'elle a versées à l'association CEFILEC , constituée au sein du réseau de sociétés dont elle est membre, et chargée de la formation de personnels, destinés notamment à être affectés à de nouvelles unités, dans d'autres pays de l'Union Européenne ; que par une notification de redressement du 29 novembre 2000, l'administration a estimé que cette dépense n'avait pas été exposée dans le cadre d'une gestion commerciale normale, et l'a en conséquence réintégrée dans les bases de l'impôt sur les sociétés auquel la S.A.S. Disvalor était assujettie ; que, simultanément, la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations de l'association susnommée, sur laquelle la société avait exercé son droit à récupération, a fait l'objet de rappels ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait régulièrement appel du jugement du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Nancy, en tant qu'il a accordé à la S.A.S. Disvalor la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, demeurant en litige, et a condamné l'Etat à payer une somme de 900 euros à la société requérante, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les suppléments d'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209-I du même code : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant... 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre... ; qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ;

Considérant que les dépenses en litige sont, comme il a été rappelé ci-dessus, des cotisations versées à une association, CEFILEC , ayant pour mission de former des salariés destinés à être ensuite affectés à de nouvelles implantations du réseau E. Leclerc au sein de l'union européenne ; que ces actions de formation ne présentent pas d'intérêt direct pour l'exploitation du supermarché géré par la S.A.S. Disvalor ; que cette dernière fait valoir qu'en contrepartie des avantages de clientèle et de prix de revient liés notamment au renom de l'enseigne et aux économies ou ristournes réalisées sur les approvisionnements grâce à un référencement national des fournisseurs et à l'utilisation de centrales d'achats à forme coopérative que lui procure l'appartenance au réseau des centres de distribution E. Leclerc, elle est tenue de respecter diverses obligations contractuelles, notamment de participer à des associations ayant pour but des actions de développement du réseau auquel elle a adhéré ; que, toutefois, si elle soutient qu'un refus de verser les cotisations litigieuses à l'association CEFILEC aurait entraîné son exclusion de groupement, elle ne l'établit pas par les documents qu'elle produit ; qu'en particulier, une telle sanction n'est pas prévue par les statuts de l'association ; que, dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, que la prise en charge de cette dépense, n'était pas conforme à une gestion commerciale normale, et que les sommes correspondantes ne pouvaient, dès lors, être déduites des résultats, sur le fondement de l'article 39-I-1e précité ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 271-I-1 du code général des impôts : La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération... ; que l'article 230-1 de l'annexe II au même code précise : La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation... ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que les prestations de l'association Cefilec , qui n'étaient pas fournies à la S.A.S. Disvalor ne peuvent être regardées comme des services nécessaires à l'exploitation au sens des dispositions de l'article 230-1 précité ; que la société redevable ne peut davantage alléguer les profits attendus de la politique d'expansion du réseau dont elle est membre, qui ne sauraient constituer la contrepartie directe des frais qu'elle a assumés ; que l'administration était par suite fondée à rappeler la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations de Cefilec , que la société redevable avait initialement déduite sur le fondement de l'article 271-I-1 précité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et dans la mesure ou la S.A.S. Disvalor n'a soulevé aucun autre moyen, tant en première instance qu'en appel, que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a accordé à la société précitée la décharge des impositions demeurant en litige et à obtenir que ces impositions soient remises à la charge de la contribuable ;

Sur les conclusions des parties relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la S.A.S. Disvalor la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant d'autre part, que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions du ministre tendant à annuler la condamnation de l'Etat, prononcée par les premiers juges, à payer à la S.A.S. Disvalor une somme de 900 euros en application des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Nancy sont annulés.

Article 2 : Les suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels la S.A.S. Disvalor a été assujettie au titre des exercices 1997, 1998 et 1999, et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999, sont remis à sa charge à concurrence des décharges prononcées par les premiers juges.

Article 3 : Les conclusions de la S.A.S. Disvalor tendant à obtenir à son profit l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à la S.A.S. Disvalor.

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04NC00661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04NC00661
Date de la décision : 31/03/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : DUTOIT, FOUQUES, CARLUIS et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-03-31;04nc00661 ?
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