Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 septembre 2001, complétée par mémoire enregistré le 23 janvier 2002, présentée pour la société à responsabilité B7, dont le siège social est ..., représentée par son gérant en exercice, ayant pour mandataire Me X..., avocat ;
La société B7 demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 juillet 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 6 avril 2001 décidant la fermeture pour une durée de six mois du débit de boissons B7 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser 8 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a estimé à tort que le préfet avait pu se dispenser d'observer la procédure contradictoire ;
- le tribunal administratif a reconnu à bon droit que la méconnaissance de la réglementation des débits de boissons ne ressortait pas du dossier ;
- le tribunal administratif a jugé à tort que le débit de boissons était impliqué dans les événements survenus entre étrangers en situation irrégulière qui ne fréquentent pas régulièrement les endroits publics et qu'il appartient aux services de police de prévenir ;
- l'appréciation du tribunal administratif sur l'absence de caractère disproportionné de la sanction est critiquable ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2001, présenté par le ministre de l'intérieur ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun moyen n'est fondé ;
Vu l'ordonnance du 17 juin 2004 portant clôture de l'instruction au 30 juillet 2004 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2005 :
- le rapport de M. Sage, président,
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'article 114 de la loi 2003-239 du 18 mars 2003 : La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par arrêté du représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, soit à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements, soit en vue de préserver l'ordre, la santé ou la moralité publics ;
Considérant qu'en application des dispositions précitées le préfet de la Moselle, par arrêté du 6 avril 2001, a prononcé pour une durée de six mois la fermeture du débit de boissons situé ... et dénommé B7, aux motifs, d'une part, que l'exploitant de l'établissement contrevenait de façon caractérisée à la réglementation en vigueur, et d'autre part, que des atteintes particulièrement graves à l'ordre public avaient eu lieu à l'endroit considéré ;
Considérant que le ministre de l'intérieur ne conteste pas que le motif tiré de ce que le gérant du B7 contrevenait de façon caractérisée à la réglementation en vigueur n'était pas établi par les pièces du dossier, ainsi que l'indique le jugement attaqué ;
Considérant que la société B7 soutient sans être contredite que la tentative de meurtre et l'assassinat commis aux alentours du débit de boissons n'ont pas concerné des clients habituels de l'établissement, mais des étrangers en situation irrégulière qui ne fréquentent pas longtemps les mêmes lieux et que l'ordre public était fréquemment troublé dans le quartier de Borny sans que le débit de boissons en soit responsable ; que si des faits commis à l'extérieur de l'établissement peuvent légalement justifier la fermeture d'un débit de boissons, il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet de la Moselle a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne la durée de l'interdiction ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société B7 est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative applicable devant les cours administratives d'appel : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions susvisées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à la société B7 la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 6 avril 2001 sont annulés.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la société B7 la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société B7 et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
Copie en sera transmise pour information au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Metz.
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