Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 5 juillet 2000 sous le n° 00NC00823, présenté par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre de l'intérieur demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 27 avril 2000 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 31 août 1998 interdisant à M. Yahya X l'exercice de la profession d'entrepreneur en bâtiment ;
Il soutient que :
- c'est à tort que le Tribunal administratif a tenu compte de l'expérience acquise par
M. X en Turquie, ainsi que des attestations d'activité en France ;
- le Tribunal a ignoré l'avis circonstancié de l'expert qui établit le manque de connaissance en gestion de M. X ainsi que le défaut de maîtrise de la langue française ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les mémoires en défense, enregistré le 12 janvier et le 15 mars 2004, présentés pour
M. X, par Me Nonnenmacher, avocat ; M. X conclut :
- au rejet du recours,
- à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le rapport de l'expert, qui est très peu motivé, ne peut être retenu comme seule justification ;
- l'absence de diplôme peut être compensée par une expérience professionnelle ;
- il exerce désormais depuis près de six ans l'activité d'entrepreneur en bâtiment ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code local des professions ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2004 :
- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 35 du code local des professions du 26 juillet 1900, dans sa rédaction issue de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 susvisée : (...) L'exercice de la profession d'entrepreneur en bâtiment et d'architecture, ainsi que l'exercice d'une branche quelconque de l'industrie du bâtiment, devra être interdit, s'il existe des faits d'où il résulte que l'exploitant ne présente pas les garanties suffisantes pour l'exercice de cette profession. Avant de prononcer cette interdiction, il y aura lieu (...), d'entendre les experts qui auront été désignés d'avance par l'autorité administrative supérieure pour donner, en cas de besoin, des avis de cette nature (...). Si l'autorité compétente estime que l'activité déclarée est susceptible d'être interdite en vertu des dispositions ci-dessus, elle transmet cette déclaration au représentant de l'Etat pour décision. L'activité déclarée ne pourra être exercée avant qu'une décision ait été prise. ;
Considérant que, par arrêté du 31 août 1998 pris sur le fondement des dispositions précitées de l'article 35 du code local des professions, le préfet du Bas-Rhin a interdit à M. X l'exercice de la profession d'entrepreneur ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X ne justifie d'aucun diplôme, titre ou certificat établissant qu'il disposerait d'une qualification professionnelle dans la construction, l'entretien et la réparation des bâtiments ; que s'il se prévaut de l'expérience acquise en Turquie pendant la période du 1er mai 1989 au 17 juin 1990 en qualité de maçon-crépisseur, il n'est ni établi, ni même allégué que cette expérience aurait fait l'objet d'une reconnaissance par l'autorité administrative ; qu'au surplus, selon le rapport de l'expert désigné en application de l'article 35 du code local des professions, M. X manque de connaissance en matière de gestion, ce qui ne lui permet pas de contrôler le travail d'un salarié ; qu'il en résulte que
M. X ne peut être regardé comme présentant les garanties suffisantes au sens des dispositions précitées du code local des professions, pour exercer la profession d'entrepreneur ; qu'ainsi le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a estimé que le préfet du Bas-Rhin avait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués en première instance par M. X ;
Considérant, d'une part, qu'en admettant même que le salarié engagé par M. X détienne la qualification professionnelle, cette circonstance ne dispense pas l'entrepreneur de présenter les garanties requises par les dispositions précitées du code local des professions ;
Considérant, d'autre part, que les circonstances que le requérant ait été à jour de ses cotisations sociales et des taxes sur la valeur ajoutée, qu'il aurait une clientèle, que la Chambre des métiers aurait accepté son dossier et qu'il n'entend pas se retrouver sans emploi, sont sans effet sur la légalité de l'interdiction décidée par le préfet ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 27 avril 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yahya X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
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N° 00NC00823