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19/04/2004 | FRANCE | N°99NC02433

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme f°/ 1ere chbre - formation a 3, 19 avril 2004, 99NC02433


Vu la requête et les mémoires complémentaires enregistrés au greffe de la Cour les 10 décembre 1999, 21 mars, 28 septembre et 4 décembre 2000 présentés pour Mme Marie-Christine X demeurant ... par Mes Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

Elle demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 19 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 6 juillet 1998 de l'inspecteur du travail de Mulhouse refusant à la société Weleda l'autorisation de la licencier pour faute ;

2°/ de condamner la société Weleda à lui verser la somme de 15 000 francs au titr...

Vu la requête et les mémoires complémentaires enregistrés au greffe de la Cour les 10 décembre 1999, 21 mars, 28 septembre et 4 décembre 2000 présentés pour Mme Marie-Christine X demeurant ... par Mes Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

Elle demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement du 19 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 6 juillet 1998 de l'inspecteur du travail de Mulhouse refusant à la société Weleda l'autorisation de la licencier pour faute ;

2°/ de condamner la société Weleda à lui verser la somme de 15 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;

Code : C +

Plan de classement : 66-07-01-04 / 07-01-01-02-01

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il ne contient pas les visas ;

- en reconnaissant les faits reprochés comme constituant des fautes professionnelles justifiant le licenciement, le Tribunal a commis une erreur ;

- si l'inspecteur n'a pas retenu la discrimination, les difficultés professionnelles ne sont pas sans lien avec le mandat syndical qu'elle détient notamment le lieu de l'exercice de ces responsabilités dans le Haut-Rhin et professionnels en région parisienne ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu enregistrés les 4 février , 26 mai et 17 novembre 2000, les mémoires présentés pour la société Weleda dont le siège se trouve 9, rue Eugène Jung à Huninge ( Haut-Rhin ) représentée par son président, par Me Jammet, avocat, tendant au rejet de la requête, à la condamnation de Mme X à lui verser la somme de 25 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;

Vu enregistré le 11 avril 2000, le mémoire par lequel la ministre de l'emploi et de la solidarité fait connaître à la Cour que la requête n'appelle pas d'autres observations que celles qui ont été produites devant le Tribunal auxquelles elle se réfère expressément ;

Vu enregistrés, les 10 octobre 2003 et 25 novembre 2003, les mémoires en réponse au moyen d'ordre public présentés pour Mme Marie-Christine X par Mes Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, tendant à l'application de la loi du 6 août 2002 ;

Vu enregistré le 20 octobre 2003, le mémoire en réponse au moyen d'ordre public présenté pour la société Weleda par Me Jammet, avocat, précisant que le bénéfice de la loi d'amnistie n'est acquis qu'en ce qui concerne des faits qualifiés de fautes disciplinaires, alors qu'en ce qui la concerne, l'action a été conduite tant sur le motif tiré de l'insuffisance professionnelle qui n'entre pas dans le champ d'application de la loi, que sur le motif tiré des fautes commises par Mme X ; que la qualification ne saurait être modifiée par l'autorité administrative ; que les fautes de l'intéressée sont également des actes de déloyauté manifeste n'entrant pas dans le champ de la loi ;

Vu enregistré le 24 octobre 2003 le mémoire par lequel le ministre des affaires sociales , du travail et de la solidarité fait connaître à la Cour qu'à la suite de la nouvelle demande présentée par la société auprès de l'inspecteur du travail de Mulhouse, ce dernier a refusé l'autorisation de licenciement et que le dossier de l'affaire est toujours pendant devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Vu enregistré le 26 décembre 2003, le mémoire présenté pour Mme Marie-Christine X par Mes Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction le 24 octobre 2003 à 16 heures ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que l'arrêt paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mars 2004 :

- le rapport de M. JOB, Président ;

- et les conclusions de Mme SEGURA-JEAN ,Commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de la minute du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 octobre 1999 que celui ci comporte l'ensemble des mentions exigées et qu'il fait notamment l'analyse des différents mémoires échangés par les parties au cours de la procédure ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision de l'inspecteur du travail :

Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 Sont amnistiés les faits commis avant le 17 mai 2002 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles(....). / Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à l'honneur, à la probité et aux bonnes moeurs (...). ;

Considérant que, par un courrier du 13 mars 1998, la société Weleda a demandé à l'inspecteur du travail du Haut-Rhin, l'autorisation de licencier son employée Mme X, visiteuse médicale, délégué syndicale, déléguée du personnel , sans distinguer les motifs tirés de l'insuffisance professionnelle et ceux tirés de la faute ; que si , par sa décision du 6 juillet 1998, l'inspecteur du travail n'a retenu aucun des faits reprochés à l'employée comme constitutifs d'insuffisance professionnelle ou de fautes disciplinaires, en revanche, pour annuler cette décision, le Tribunal a apprécié les faits au seul regard de fautes professionnelles ;

Considérant qu'il appartient au juge administratif d'apprécier l'existence des faits, puis de les qualifier en vue d'apprécier la légalité d'une décision administrative d'autorisation de licenciement prise sur leur fondement ; qu'il ressort des pièces du dossier que les faits qui ont motivé la partie de la demande ne relevant pas de l'insuffisance professionnelle ne constituent des manquements ni à l'honneur ni à la probité ni aux bonnes moeurs ; qu'ainsi, ces faits commis avant le 17 mai 2002, sont amnistiés ; que dès lors, ils ne peuvent plus servir de fondement à une autorisation de licenciement ;

Considérant toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par la société Weleda devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que, lorsque l'employeur d'un de ces salariés demande l'autorisation de le licencier pour insuffisance professionnelle, il appartient à l'autorité compétente de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si cette insuffisance est telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu notamment de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, et des caractéristiques de l'emploi exercé ;

Considérant que l'inspecteur du travail a estimé que, dans le cadre d'une nouvelle organisation de tournées, le résultat des activités de visiteuse médicale révélé par le taux de réalisation d'objectifs des différentes visites ne pouvait être utilement comparé à la situation d'autres visiteurs médicaux dans l'entreprise, et en conséquence, a regardé l'insuffisance professionnelle reprochée à Mme X comme non établie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une comparaison des résultats obtenus par Mme X puisse être utilement faite avec ceux d'autres visiteurs placés dans une situation comparable à la sienne ; que la société Weleda ne démontre pas plus que les résultats obtenus par l'intéressée pour les années 1997 et 1998 en cause soient, au regard des objectifs fixés par l'entreprise, d'une faiblesse telle qu'ils établissent que cette salariée de dix ans d'expérience a fait preuve d'une insuffisance professionnelle de nature à justifier la rupture du contrat de travail ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision de l'inspecteur du travail ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article l.761-1 du code de justice administrative qui se sont substituées à celles de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 octobre 1999 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Strasbourg par la société Weleda, ses conclusions et celles de Mme X présentées devant la Cour tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie Christine X, à la société Weleda et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme f°/ 1ere chbre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99NC02433
Date de la décision : 19/04/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés GILTARD
Rapporteur ?: M. JOB
Rapporteur public ?: Mme SEGURA-JEAN
Avocat(s) : MASSE-DESSEN THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-04-19;99nc02433 ?
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