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20/05/1999 | FRANCE | N°95NC01420

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 20 mai 1999, 95NC01420


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 4 septembre 1995, sous le n 95NC01420, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;
Le MINISTRE demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n 90706 en date du 6 avril 1995 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987 ;
- de remettre à la charge de M. et Mme X... lesdites impositions pour des montants de 85 236 F, 388 004 F et 382 408 F respectivement

pour ces trois années, assorties des intérêts de retard ;
Vu le juge...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 4 septembre 1995, sous le n 95NC01420, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;
Le MINISTRE demande à la Cour :
- d'annuler le jugement n 90706 en date du 6 avril 1995 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987 ;
- de remettre à la charge de M. et Mme X... lesdites impositions pour des montants de 85 236 F, 388 004 F et 382 408 F respectivement pour ces trois années, assorties des intérêts de retard ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 1999 :
- le rapport de Mme GESLAN-DEMARET, Premier Conseiller,
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES fait appel d'un jugement en date du 6 avril 1995, par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987 à raison de la remise en cause de l'exonération des entreprises nouvelles prévue par l'article 44 quater du code général des impôts dont avait bénéficié la S.A.R.L. de personnes Société de distribution de véhicules d'occasion (S.D.V.O.), créée le 1er avril 1984, dont ils étaient tous les deux les seuls actionnaires, en se fondant sur l'insuffisance de la motivation de la réponse aux observations du contribuable ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre de procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation - Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée " ; qu'il résulte de ces dispositions que si l'administration n'est pas tenu de répondre à tous les arguments du contribuable, elle doit cependant répondre même succinctement, à ses principales observations ;

Considérant que, pour remettre en cause l'exonération dont avait bénéficié la S.D.V.O., le vérificateur s'est fondé dans la notification de redressement du 29 juillet 1988, sur la circonstance que ladite société ne remplissait aucune des trois conditions posées par l'article 44 bis du code général des impôts auquel renvoie l'article 44 quater du même code, c'est à dire, en premier lieu, l'absence de caractère nouveau de l'activité exercée par rapport à celle exercée à titre individuel par son gérant, en deuxième lieu, la détention indirecte des droits de vote pour plus de 50 % de ladite société par la SARL Nord Automobile dont le gérant était le même que la S.D.V.O. et enfin, le non respect de la condition relative à la proportion de biens amortissables selon le mode dégressif ; que la S.D.V.O. a contesté dans le délai qui lui était imparti, les trois motifs de redressement qui lui étaient opposés ; que la circonstance que, dans la confirmation des redressements en date du 1er septembre 1988, le vérificateur s'est borné à indiquer que deux de ces conditions n'étaient pas remplies sans répondre aux observations présentées par la société en ce qui concerne la troisième condition relative à la détention des droits de vote, n'est pas de nature à entacher cette réponse d'insuffisance de motivation dès lors qu'un seul de ces motifs aurait été suffisant pour écarter le bénéfice du régime de faveur ; que dans ces conditions, la garantie instituée par le second alinéa de l'article L.57 du livre de procédures fiscales n'a pas été méconnue ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 6 avril 1995, le tribunal administratif de Lille a retenu l'insuffisance de la motivation de la réponse aux observations du contribuable pour accorder à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987 ; qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens développés par M. et Mme X... devant le tribunal administratif de Lille et devant la Cour à l'appui de leur demande ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts : "Les entreprises créées entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions posées par l'article 44 bis II, 2 et 3 , et III du même code ... sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au terme du trente-cinquième mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue. Les bénéfices réalisés au cours des vingt-quatre mois suivant la période d'exonération précitée ne sont retenus dans les bases de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés que pour la moitié de leur montant ..." ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 44 bis III : " ... les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes ou pour la reprise de telles activités ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus. Toutefois, cette disposition ne s'applique pas aux entreprises créées pour la reprise d'établissements en difficulté ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la S.A.R.L. S.D.V.O., imposable selon le régime des sociétés de personnes, a été constituée le 1er avril 1984 par M. et Mme X... pour exercer une activité de vente et réparation de matériel automobile, identique à celle exercée par son gérant M. X..., à titre individuel sous l'enseigne "Nord Automobile" dans une commune limitrophe du 1er août 1980 au 31 décembre 1988 ; que cette création a eu pour effet de redéployer de manière progressive l'activité individuelle préexistante de son gérant, à un moment où celui-ci ne pouvait plus prétendre, à titre personnel, au bénéfice des mesures prévues par les articles 44 bis et 44 ter ; qu'outre l'identité d'activité, de clientèle, de fournisseurs, et de pratiques commerciales qui reposent exclusivement sur l'art de la vente de M. X..., le contrôle a mis en évidence que la progression du chiffre d'affaires de la S.A.R.L. S.D.V.O. s'est réalisée au détriment de celui de l'entreprise individuelle et qu'une prise en charge indue, par l'entreprise individuelle préexistante, de dépenses incombant à la société nouvelle exonérée avait été réalisée ; qu'eu égard à ces éléments, la S.A.R.L. S.D.V.O. doit être regardée comme ayant été créée dans le cadre d'une reprise d'activités préexistantes au sens des dispositions de l'article 44 bis précité ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

Considérant que les contribuables ne peuvent utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales du fait qu'ils ne rentreraient pas dans les cas d'exclusion du régime de faveur limitativement énumérés par la doctrine administrative, et notamment les instructions 4 A.8 79 du 18 avril 1979 et 4 A.6 80 du 9 avril 1980 selon lesquelles "la reprise d'activités préexistantes désigne l'acquisition par une personne physique ou morale d'une entreprise déjà constituée" , dès lors qu'il ne résulte pas desdites instructions que l'administration ait entendu ne regarder comme des entreprises nouvelles que celles qui ne procéderaient à la reprise d'activités préexistantes que par l'acquisition d'une entreprise déjà constituée et que la liste qui figure dans l'instruction postérieure du 11 avril 1983 ne présente aucun caractère limitatif ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 6 avril 1995, le tribunal administratif de Lille a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987 ; qu'il y a lieu, dès lors, de remettre à la charge de M. et Mme X... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987, à l'exception des majorations pour mauvaise foi primitivement appliquées auxquelles il convient de substituer les intérêts de retard dans la limite de leur quantum, conformément à la demande du ministre en ce sens ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce qu'il soit condamné à rembourser à M. et Mme X... les frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement en date du 6 avril 1995 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme X... ont été assujettis au titre des années 1985 à 1987, sont remises à leur charge, assorties des intérêts de retard dans la limite du montant des pénalités primitivement assignées.
Article 3 : Les conclusions de M. et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à M. et Mme X....


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95NC01420
Date de la décision : 20/05/1999
Sens de l'arrêt : Annulation droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-03-02-02-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT - MOTIVATION -Caractère suffisamment motivé d'une réponse aux observations du contribuable concernant le bénéfice de l'exonération des entreprises nouvelles.

19-01-03-02-02-01 Pour remettre en cause l'exonération dont avait bénéficié une entreprise au titre du régime des entreprises nouvelles, le vérificateur s'est fondé dans la notification de redressement sur la circonstance qu'elle ne remplissait aucune des trois conditions posées par l'article 44 bis du code général des impôts auquel renvoie l'article 44 quater du même code. La circonstance que, dans la confirmation des redressements en date du 1er septembre 1988, le vérificateur s'est borné à indiquer que deux de ces conditions n'étaient pas remplies sans répondre aux observations présentées par la société en ce qui concerne la troisième condition relative à la détention des droits de vote, n'est pas de nature à entacher cette réponse d'insuffisance de motivation dès lors qu'un seul de ces motifs aurait été suffisant pour écarter le bénéfice du régime de faveur.


Références :

CGI 44 quater, 44 bis, 44 ter
CGI Livre des procédures fiscales L80
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Président : M. Moreau
Rapporteur ?: Mme Geslan-Demaret
Rapporteur public ?: M. Stamm

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1999-05-20;95nc01420 ?
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