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26/11/1998 | FRANCE | N°94NC00814

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 26 novembre 1998, 94NC00814


(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juin 1994 sous le n 94NC00814, présentée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS, dont le siège est ... (Pas-de-Calais), représentée par son président ;
La CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 20 janvier 1994 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mises à sa charge pour la période du 1er janvier 1

980 au 31 décembre 1982 et des pénalités y afférentes, et en tant qu'il a ...

(Deuxième Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juin 1994 sous le n 94NC00814, présentée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS, dont le siège est ... (Pas-de-Calais), représentée par son président ;
La CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 20 janvier 1994 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la réduction des cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mises à sa charge pour la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1982 et des pénalités y afférentes, et en tant qu'il a déclaré irrecevables ses conclusions de la requête n° 89-536 tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée dont la déduction a été omise pour les années 1980, 1981 et 1982 pour les dépenses afférentes au service particulier ;
2° - de lui accorder les décharges et restitutions demandées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 1998 :
- le rapport de Mme ROUSSELLE, Conseiller,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;

En ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée supportée lors de la construction du bâtiment affecté au service des douanes :
Considérant que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS a déduit, en 1981 et 1982, la taxe sur la valeur ajoutée acquittée lors de la construction du bâtiment affecté au transit des voyageurs ; qu'à l'issue du contrôle, l'administration a procédé à un rappel de 147 760 F, correspondant à la part de taxe sur la valeur ajoutée afférente à la construction de la partie du bâtiment affectée au service des douanes ;
Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : "1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS met gratuitement à la disposition de l'administration des douanes, au sein de la zone de transit qu'elle a fait construire et dont elle assure la gestion, un ensemble de locaux affectés à l'usage exclusif des services douaniers ; que tant les conditions de la mise à disposition que le fait que les locaux en cause ne soient pas directement nécessaires aux activités soumises à taxe sur la valeur ajoutée exercées par la compagnie requérante au sein de la zone de transit font obstacle à ce que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé la construction des locaux en cause donne lieu à déduction ;
En ce qui concerne le prorata de taxe sur la valeur ajoutée déductible :
Considérant qu'aux termes de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction issue du décret n° 79-1163 du 29 décembre 1979 : "Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations égale au montant de cette taxe multiplié par le rapport existant entre le montant annuel des recettes afférentes à des opérations ouvrant droit à déduction et le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées. ( ) L'Etat et les collectivités locales n'inscrivent le produit de leurs opérations provenant de leur budget qu'au seul dénominateur du rapport" ; et qu'aux termes de l'article 213 de la même annexe : "Lorsqu'un assujetti a des secteurs d'activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, ces secteurs font l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction. Le montant de la taxe déductible au titre des biens communs aux différents secteurs est déterminé par application du rapport prévu à l'article précédent" ; que, pour calculer le pourcentage de déduction propre à chaque secteur, selon les règles fixées à l'article 212 précité, il y a lieu de prendre en considération, au titre du montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées par des assujettis, les seules recettes qui sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ou en sont exonérées ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, le vérificateur a considéré que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS exploitait cinq secteurs d'activité distincts ; que, pour calculer le pourcentage de déduction propre à chaque secteur, il a inclus dans le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées les virements internes réalisés du budget général vers les budgets des services industriels et commerciaux ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 256-1 du code général des impôts, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ; que, s'agissant de prestations de services, la base d'imposition est constituée, au terme de l'article 266-1 du même code, par les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le prestataire en contrepartie de la prestation ; qu'il résulte de ces dispositions que seules sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée les sommes versées par un tiers qui aurait un intérêt à la poursuite de l'exploitation ; qu'il suit de là que les virements internes réalisés par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS, qui viennent en complément des recettes provenant directement de l'exploitation commerciale du parking Charost et de l'Aéroport, ne constituant pas la contrepartie d'un service rendu, ne sont pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, dès lors, la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE est fondée à soutenir que ces sommes n'avaient pas à figurer au dénominateur du prorata défini à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts précité ;
Considérant, par ailleurs, que, à supposer que la France ait entendu, en application de l'article 19 de la sixième directive européenne du 17 mai 1977, user de la faculté d'inclure dans le dénominateur le montant de subventions autres que celles directement liées aux prix des livraisons de biens et de certaines prestations, visées à l'article 11 sous A paragraphe 1 sous a), en mentionnant au deuxième alinéa de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts précité que "l'Etat et les collectivités locales n'inscrivent le produit de leurs opérations provenant de leur budget qu'au seul dénominateur du rapport", elle ne saurait eu égard à l'exigence d'interprétation stricte des termes de cette dérogation, être regardée comme l'ayant étendue aux établissements publics que constituent les chambres de commerce et d'industrie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande sur ce point ; qu'il y a lieu de lui accorder la décharge, à concurrence de 102 294 F, du complément de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1982 ;
Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : "Lorsqu'une personne physique ou morale, ou une association tenue de souscrire ou de présenter une déclaration ou un acte comportant l'indication de bases ou d'éléments à retenir pour l'assiette, la liquidation ou le paiement de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques établis ou recouvrés par la direction générale des impôts, déclare ou fait apparaître une base ou des éléments d'imposition insuffisants, inexacts ou incomplets ou effectue un versement insuffisant, le montant des droits éludés est majoré ( ) de l'indemnité de retard prévue à l'article 1727 s'il s'agit des versements, impôts et taxes énumérés audit article" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'elle soutient, la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS, qui a régulièrement obtenu le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée dont elle pouvait disposer au cours des années en litige, ne disposait donc d'aucun crédit de taxe dans les écritures du trésor, sur lesquels les droits légalement dus auraient pu être imputés ; qu'ainsi, la totalité des droits supplémentaires constituait des droits éludés au sens de l'article 1728 précité du code, et des droits devant être regardés comme ayant été éludés à partir de la date où ils auraient dû être légalement versés au trésor ; que la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des indemnités de retard auxquelles elle a été assujettie ;
Sur les droits de taxe sur la valeur ajoutée dont la déduction aurait été omise :
Considérant que, pour rejeter la demande de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS sur ce point, le tribunal administratif de Lille a considéré que ces conclusions étaient irrecevables, eu égard aux termes dans lesquels elles étaient présentées ; qu'il résulte de l'instruction que la demande de la Chambre de Commerce et d'Industrie devant le tribunal administratif tendait à obtenir la restitution de droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des dépenses effectuées dans le cadre du "service particulier" de la chambre, qui avaient été omis ; que, dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a déclaré irrecevables les conclusions de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS ; qu'il s'ensuit que ledit jugement doit être annulé sur ce point ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande susvisée présentée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS devant le tribunal administratif de Lille ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.194-1 du livre des procédures fiscales : "Lorsque, ayant donné son accord au redressement ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la notification de redressement, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de redressement, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable" ;

Considérant que la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS a été établie sur la base de ses déclarations ; qu'il lui appartient, dès lors, de démontrer le caractère exagéré de son imposition, sans que l'administration soit dans l'obligation, comme la requérante le soutient, de procéder aux vérifications de ses allégations en vue d'établir de manière précise le montant des droits omis ;
Considérant que, pour établir qu'elle a omis de procéder à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des dépenses concernant l'ensemble de ses activités et excédant le seul "secteur particulier", la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS se borne à présenter un tableau faisant apparaître, année par année, le montant hors taxes, la taxe sur la valeur ajoutée totale et la taxe sur la valeur ajoutée déductible, d'une part, des immobilisations, d'autre part, des autres biens et services ; que ce tableau n'est accompagné d'aucun autre élément de nature à permettre de déterminer les immobilisations, biens et services pris en considération, ni d'aucune indication relative à la détermination du prorata de déduction allégué ; qu'ainsi, elle n'apporte pas la preuve du caractère exagéré de son imposition et n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a rejeté sur ce point sa demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 20 janvier 1994 est annulé en tant qu'il a déclaré irrecevable la requête n° 89-536 présentée par la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS.
Article 2 : La CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS est déchargée, à concurrence de 102 294 F, du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 1980 au 31 décembre 1982.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 20 janvier 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS devant la Cour et sa demande tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie du fait de droits dont elle aurait omis la déduction, présentée devant le tribunal administratif de Lille, sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la CHAMBRE DE COMMERCE ET D'INDUSTRIE DE CALAIS et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 94NC00814
Date de la décision : 26/11/1998
Sens de l'arrêt : Annulation décharge partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-06-02-08-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - DEDUCTIONS - CAS DES ENTREPRISES QUI ENGLOBENT DES SECTEURS D'ACTIVITE DIFFERENTS -Chambre de commerce et d'industrie - Secteurs d'activité distincts - Déduction de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des biens communs - Détermination du dénominateur du rapport entre les recettes afférentes à des opérations ouvrant droit à déduction et les recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées - a) Absence de prise en compte des virements internes- b) Absence d'extension de la dérogation prévue pour l'Etat et les collectivités territoriales.

19-06-02-08-03-04 Chambre de commerce et d'industrie exploitant cinq secteurs d'activité distincts. Pour calculer le pourcentage de déduction propre à chaque secteur, en application de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts, le vérificateur a inclus dans le montant annuel des recettes afférentes à l'ensemble des opérations réalisées les virements internes réalisés du budget général vers les budgets des services industriels et commerciaux. a) Les virements internes réalisés par la chambre de commerce et d'industrie, qui viennent en complément des recettes provenant directement de l'exploitation commerciale de certaines installations, ne constituant pas la contrepartie d'un service rendu, ne sont pas soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Ces sommes n'ont pas à figurer au dénominateur du prorata défini à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts. b) A supposer que la France ait entendu, en application de l'article 19 de la sixième directive européenne du 17 mai 1977, user de la faculté d'inclure dans le dénominateur le montant de subventions autres que celles directement liées aux prix des livraisons de biens et de certaines prestations, visées à l'article 11 sous A paragraphe 1 sous a), en mentionnant au 2ème alinéa de l'article 212 de l'annexe II du code général des impôts précité que "l'Etat et les collectivités locales n'inscrivent le produit de leurs opérations provenant de leur budget qu'au seul dénominateur du rapport", elle ne saurait eu égard à l'exigence d'interprétation stricte des termes de cette dérogation, être regardée comme l'ayant étendue aux établissements publics que constituent les chambres de commerce et d'industrie.


Références :

CEE Directive 388-77 du 17 mai 1977 Conseil Sixième Directive art. 19, art. 11
CGI 271, 256, 266, 1728
CGI Livre des procédures fiscales R194-1
CGIAN2 212, 213
Décret 79-1163 du 29 décembre 1979


Composition du Tribunal
Président : M. Madelaine
Rapporteur ?: Mme Rousselle
Rapporteur public ?: M. Commenville

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1998-11-26;94nc00814 ?
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