Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS Roses de Mai a demandé au tribunal administratif de Nice, à titre principal, d'annuler la décision du 25 janvier 2021 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi lui a infligé une amende de 23 400 euros pour violation des dispositions des articles L. 3171-2 et D. 3171-8 du code du travail, à titre subsidiaire, de ramener la sanction prononcée à un avertissement, à titre infiniment subsidiaire, de ramener le montant de l'amende à la somme de 2 400 euros et en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2101761 du 21 février 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté ces demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 avril 2024, la SAS Roses de Mai, représentée par Me Cauchetier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 21 février 2024 ;
2°) à titre principal, d'annuler la décision du 25 janvier 2021 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a prononcé une amende de 23 400 euros à son encontre pour violation des dispositions des articles L. 3171-2 et D. 3171-8 du code du travail ;
3°) à titre subsidiaire, de ramener la sanction prononcée à un avertissement ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, de ramener le montant de l'amende à la somme de 2 400 euros ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'erreur de calcul sur le montant de l'amende ;
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 8115-1 du code du travail, dès lors que des poursuites pénales ont été engagées ;
- la décision attaquée doit être annulée dès lors qu'elle méconnaît le droit à un procès équitable ;
- la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation ;
- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 8115-1 du code du travail dès lors qu'un décompte de la durée de travail existe ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dès lors que le système de décompte mis en place est conforme aux dispositions du code du travail ;
- le montant de l'amende est disproportionné.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2025, le ministre du travail, de la santé, des solidarités et de la famille conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une lettre en date du 8 avril 2025, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu entre le 15 mai et le 10 juillet 2025, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 29 avril 2025.
Par ordonnance du 14 mai 2025, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Aurélia Vincent, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. François Point, rapporteur,
- et les conclusions de M. Olivier Guillaumont, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Roses de Mai exploite un supermarché à l'enseigne " Super U ", situé à Grasse. L'établissement a fait l'objet de contrôles de l'inspection du travail les 6 mars et 18 juillet 2019, au cours desquels ont été constatés des manquements aux règles relatives à la tenue de décomptes de la durée du travail des salariés, en méconnaissance des dispositions des articles L. 3171-2 et D. 3171-8 du code du travail. Par un courrier du 6 février 2020, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a informé la société Roses de Mai qu'il était envisagé de prononcer une sanction administrative à l'égard de l'établissement et l'a invitée à présenter ses observations. Par un courrier du 18 mars 2020, la société Roses de Mai a présenté des observations écrites. Elle a également présenté des observations orales le 14 janvier 2021. Par une décision du 25 janvier 2021, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a prononcé une amende de 23 400 euros à son encontre, pour violation des dispositions des articles L. 3171-2 et D. 3171-8 du code du travail. La société Roses de Mai relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement :
2. Les premiers juges ont indiqué au point 21 de leur jugement que la société requérante encourait une amende maximale de 4 000 euros par salarié concerné, que l'administration lui avait infligé une amende de 300 euros par salarié, et que les manquements constatés concernaient bien l'ensemble des salariés de l'entreprise. Les premiers juges ont ainsi répondu au moyen soulevé dans les écritures de première instance, tiré de ce que le quantum de l'amende était erroné en tant qu'il prenait en compte soixante-dix-huit salariés au lieu de onze. Par suite, le moyen de régularité soulevé par la société Roses de Mai doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 8115-1 du code du travail : " L'autorité administrative compétente peut, sur rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1, et sous réserve de l'absence de poursuites pénales, soit adresser à l'employeur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'employeur une amende en cas de manquement : / (...) / 3° A l'article L. 3171-2 relatif à l'établissement d'un décompte de la durée de travail et aux dispositions réglementaires prises pour son application ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 8115-2 du même code : " L'autorité administrative compétente informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport de l'agent de contrôle ". Et aux termes de l'article L. 8113-7 de ce code : " (...) / Lorsqu'il constate des infractions pour lesquelles une amende administrative est prévue au titre V du livre VII de la quatrième partie ou à l'article L. 8115-1, l'agent de contrôle de l'inspection du travail peut, lorsqu'il n'a pas dressé un procès-verbal à l'attention du procureur de la République, adresser un rapport à l'autorité administrative compétente, dans le cadre de la procédure prévue au chapitre V du présent titre ".
4. La société requérante fait valoir qu'alors que les sanctions administrative et pénale sont, en application des dispositions de l'article L. 8115-1 du même code, alternatives, la sanction administrative litigieuse a été édictée alors même que des poursuites pénales avaient été engagées. Toutefois, l'information du procureur de la République prévue par les dispositions précitées de l'article L. 8115-2 du code du travail a pour objet de permettre au ministère public de diligenter des poursuites pénales s'il l'estime nécessaire. Contrairement à ce que soutient la société requérante, la lettre adressée par l'autorité administrative compétente au procureur de la République le 31 janvier 2020 avait pour seul but d'informer le procureur de la République, en application des dispositions précitées de l'article L. 8113-7 du code du travail précité, et constitue ainsi une simple information des suites données au rapport de l'agent de contrôle. Il ne résulte pas de l'instruction que le procureur de la République aurait entendu diligenter des poursuites pénales à la suite de cette information. Par ailleurs, le fait, pour l'autorité administrative, d'avoir adressé une information au procureur de la République n'entrainait pas l'abandon de toute procédure de sanction administrative ou l'impossibilité de prononcer toute sanction administrative. Enfin, l'autorité administrative n'était pas tenue d'attendre le délai d'un an suivant la transmission de l'information au procureur de la République pour prononcer l'amende en litige. Dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 8115-1 du code du travail.
5. En deuxième lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que la sanction administrative en litige a été prononcée par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui n'est pas une autorité administrative indépendante mais un service déconcentré de l'Etat. Les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi n'exercent aucune fonction de jugement et ne peuvent être regardées, ni par leur composition ni par la procédure suivie pour prononcer les sanctions en cause, comme des tribunaux au sens des stipulations de la convention européenne des droits de l'homme. En outre, la sanction prononcée est susceptible d'un recours de plein contentieux devant la juridiction administrative, dont les procédures sont conformes aux exigences de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance du principe de séparation des fonctions des poursuites et des sanctions, et le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 8115-5 du code du travail : " Avant toute décision, l'autorité administrative informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l'invitant à présenter, dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, ses observations. A l'issue de ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende et émettre le titre de perception correspondant. ".
8. La décision du 25 janvier 2021 vise les dispositions légales sur lesquelles elle se fonde et comporte des éléments de fait précis relatifs à la situation de la société Roses de Mai. La décision vise notamment les dispositions applicables du code du travail, le courrier adressé à la société Roses de Mai le 6 février 2020 et le courrier de réponse en date du 18 mars 2020. Par ailleurs, l'auteur de la décision a fait état des deux visites réalisées le 6 mars 2019 et le 18 juillet 2019 dans les locaux de l'entreprise, et relate les différents constats établis au cours de cette visite. Pour justifier l'existence de manquements aux dispositions du code du travail relatives au temps de travail, la décision indique que l'inspectrice a constaté des discordances entre le planning et la feuille de présence, l'absence de système de décompte en temps réel, et le caractère incomplet des documents présentés. La décision mentionne que les faits concernent soixante-dix-huit salariés et comporte une liste de ces salariés. Par ailleurs, l'administration n'était pas tenue de répondre à toutes les observations formulées par la société Roses de Mai dans le cadre de la procédure contradictoire. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision du 25 janvier 2021 doit être écarté.
En ce qui concerne le bien-fondé de la décision :
9. Aux termes de l'article L. 3171-2 du code du travail : " Lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés ". Aux termes de l'article D. 3171-8 du même code : " Lorsque les salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe, au sens de l'article D. 3171-7, ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée du travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes: / 1° Quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail accomplies ; / 2° Chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens du nombre d'heures de travail accomplies par chaque salarié ". Aux termes de l'article L. 3171-3 de ce code : " L'employeur tient à la disposition de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. / La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire ". Enfin, aux termes de l'article D. 3171-16 du même code : " L'employeur tient à la disposition de l'inspection du travail : / 1° Pendant une durée d'un an, y compris dans le cas d'horaires individualisés, ou pendant une durée équivalente à la période de référence en cas d'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à l'année, les documents existant dans l'entreprise ou l'établissement permettant de comptabiliser les heures de travail accomplies par chaque salarié ; / (...) ".
Sur les manquements :
10. Il résulte des dispositions citées au point précédent que lorsque les salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, il incombe à l'employeur de prévoir les modalités par lesquelles un décompte des heures accomplies par chaque salarié est établi quotidiennement et chaque semaine, selon un système qui doit être objectif, fiable et accessible.
11. La société Roses de Mai soutient en premier lieu que la décision du 25 janvier 2021 est entachée d'erreur de fait et d'erreur de droit, dès lors que seuls les manquements relatifs à l'absence de système de décompte de temps de travail peuvent être sanctionnés, et non sa mauvaise application. Il résulte toutefois des dispositions combinées des articles L. 8115-1 et L. 3171-2 du code du travail que l'autorité administrative peut prononcer une amende en cas de manquements à la tenue des documents nécessaires au décompte de la durée de travail. Par suite, la société Roses de Mai n'est pas fondée à soutenir que l'existence d'un système de décompte du temps de travail au sein de l'entreprise était de nature à écarter toute méconnaissance de ses obligations en matière de décompte du temps de travail.
12. En deuxième lieu, pour prendre la décision contestée, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a tenu compte, d'une part, de l'absence d'indication des heures de début et de fin de travail effectivement réalisées, de l'absence d'indication des pauses et, d'autre part, de l'absence de fiabilité des documents transmis, eu égard à l'absence de validation tant par le salarié que par le supérieur hiérarchique.
13. Concernant, tout d'abord, les faits relatifs au décompte du temps de travail pour le mois de février 2019, il résulte de l'instruction que, lors du contrôle du 6 mars 2019, les inspecteurs du travail ont demandé à la société requérante de produire les décomptes quotidiens de la durée de travail pour le mois concerné. Il résulte de la lecture du rapport des agents de contrôle que les décomptes quotidiens présentés, réalisés sur la base d'un planning prévisionnel, ne comportaient pas tous la validation du supérieur hiérarchique attestant que l'heure réelle correspondait à l'heure théorique indiquée et qu'ils n'étaient pas visés par le salarié concerné, ces derniers ayant déclaré ne pas noter leurs horaires. Le service de contrôle a également relevé qu'aucun décompte n'était tenu pour le personnel administratif et que les feuilles de présence des agents de caisse, distinctes du décompte, étaient raturées et ne décomptaient pas les temps de pause. La société requérante ne produit aucun élément de nature à contredire utilement les constatations établies par les agents de contrôle lors des visites sur place. Si la société Roses de Mai soutient que les managers de l'entreprise contrôlent chaque jour, sur la base du planning prévisionnel, si le salarié a bien pris son poste, puis débauché aux horaires attendus, aucun élément de preuve n'est versé à l'appui de ces allégations pour les décomptes quotidiens du mois de février 2019. Les documents qu'elle verse au dossier concernant le mois de février 2019 ne permettent pas de contredire l'analyse du service de contrôle sur le manque de fiabilité et le caractère incomplet des documents de suivi du temps de travail. Dès lors, les manquements relevés par les inspecteurs du travail concernant le mois de février 2019 sont établis.
14. Concernant, ensuite, la journée du 18 juillet 2019, il résulte de l'instruction que les inspecteurs du travail, lors de leur visite sur place le jour même, ont demandé à la société requérante de produire le décompte quotidien de la durée de travail pour la journée en cours. Le rapport des agents de contrôle mentionne que le décompte quotidien présenté n'était pas rempli par les salariés, que les horaires réels n'étaient pas contrôlés par les managers, que les horaires théoriques indiqués dans le planning ne correspondaient pas aux horaires des salariés interrogés et que le document d'enregistrement des horaires de pause n'était pas systématiquement rempli par les salariés. Si la société Roses de Mai produit un décompte relatif à cette journée du 18 juillet 2019, il ressort de ce document que le manager a seulement contrôlé l'heure de prise de poste et de départ de deux salariés, alors même que la société requérante fait valoir que les plannings prévisionnels journaliers sont, au fur et à mesure de la journée, " biffés " par le supérieur hiérarchique des salariés concernés. Ce document ne fournit pas d'information fiable sur l'heure de départ réelle des salariés. Par ailleurs, si la société requérante soutient que les salariés indiquent leur temps de pause sur un document spécifique, signés par eux, ce document, incomplet, n'est pas suffisant pour établir un décompte fiable et effectif du temps de travail. Enfin, s'agissant des feuilles de présence pour le personnel de caisse, le document produit par la société requérante, comportant des ratures, des modifications, des horaires mentionnés puis finalement rayés dès lors que le salarié en litige est absent ce jour-là, n'est pas de nature à permettre un décompte effectif de la durée de travail des salariés concernés. Dès lors, les manquements relevés par les inspecteurs du travail concernant la journée du 18 juillet 2019 sont établis.
15. En troisième lieu, les décomptes quotidiens et hebdomadaires mentionnés par les dispositions précitées de l'article D. 3171-8 du code du travail constituent deux dispositifs distincts qui ne peuvent se substituer l'un à l'autre. Par suite, le moyen tiré de ce que l'établissement d'un décompte hebdomadaire serait suffisant doit être écarté.
16. Il résulte de ce qui précède que la société Roses de Mai n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur de fait ou d'une erreur de droit quant à l'existence de manquements dans la mise en œuvre du décompte quotidien du temps de travail.
Sur le quantum et le caractère proportionné de la sanction :
17. Aux termes de l'article L. 8115-3 du code du travail : " Le montant maximal de l'amende est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois qu'il y a de travailleurs concernés par le manquement. ". Aux termes de l'article L. 8115-4 du même code : " Pour déterminer si elle prononce un avertissement ou une amende et, le cas échéant, pour fixer le montant de cette dernière, l'autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges ".
18. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 8115-3 du code du travail que le montant de l'amende peut être calculé à raison du nombre de salariés concernés par le manquement. Il ressort de l'examen de la décision attaquée que le service de contrôle a établi une liste de soixante-dix-huit salariés concernés par les manquements, nombre correspondant à l'ensemble de l'effectif. Au regard de ce qui a été exposé précédemment aux points 13 et 14 concernant les manquements constatés sur le dispositif de suivi du temps de travail, l'administration était fondée à considérer que les manquements concernaient l'ensemble des salariés de l'entreprise. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'une erreur de calcul concernant le quantum de l'amende doit être écarté.
19. Il résulte de l'instruction que les manquements relevés par l'autorité administrative concernant le respect des règles relatives à la tenue de décomptes de la durée du travail avaient déjà été relevés lors d'un précédent contrôle le 17 avril 2018 et que la société requérante avait été invitée à mettre en place un système de décompte conforme. L'autorité administrative a, de nouveau, constaté de tels manquement lors des contrôles sur place le 6 mars 2019 et le 18 juillet 2019. Par suite, les manquements ont un caractère répété. Les manquements constatés concernent soixante-dix-huit salariés. Par ailleurs, alors que la société requérante encourait une amende maximale de 4 000 euros par salarié concerné, l'administration ne lui a infligé qu'une amende de 300 euros par salarié, en prenant en considération la situation financière de l'entreprise et l'impact de la crise sanitaire sur la situation économique et financière des structures relevant des branches professionnelles contraintes de cesser temporairement leur activité ou fortement affectées dans leur fonctionnement. Les circonstances que le réseau " U " préconise le système de tableau, ou le fait allégué par la société requérante que les salariés n'auraient " ressenti aucun préjudice " sont sans incidence sur le principe et la détermination du montant de l'amende. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû faire l'objet d'un simple avertissement ou que le montant de l'amende infligée, à hauteur de 23 400 euros, aurait un caractère disproportionné.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société Roses de Mai n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la société Roses de Mai demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Roses de Mai est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Roses de Mai et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Vincent, présidente,
- M. Point, premier conseiller.
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2025.
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N° 24MA01000