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16/05/2025 | FRANCE | N°24MA01201

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 16 mai 2025, 24MA01201


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société européenne MS Amlin Insurance SE (" Amlin "), venant aux droits de la société Amlin Europe NV et agissant en qualité de subrogataire de la commune du Rouret, et la société Assurances Pilliot ont demandé au tribunal administratif de Nice de condamner in solidum la société à responsabilité limitée RPM Bally, la société à responsabilité limitée Cap Déco, la société par actions simplifiée ABC Architectes (" ABC "), la société par actions simplifiée Apav

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société européenne MS Amlin Insurance SE (" Amlin "), venant aux droits de la société Amlin Europe NV et agissant en qualité de subrogataire de la commune du Rouret, et la société Assurances Pilliot ont demandé au tribunal administratif de Nice de condamner in solidum la société à responsabilité limitée RPM Bally, la société à responsabilité limitée Cap Déco, la société par actions simplifiée ABC Architectes (" ABC "), la société par actions simplifiée Apave Sudeurope, aux droits et obligations de laquelle vient la société par actions simplifiée Apave Infrastructures et Construction France (" Apave "), la société par actions simplifiée Soudal et la société anonyme V33 à leur verser une somme de 133 931,23 euros toutes taxes comprises, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, en indemnisation de son préjudice, et de mettre à leur charge les dépens et la somme de 10 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Par un jugement n° 2102329 du 2 avril 2024, le tribunal administratif de Nice a, en premier lieu, condamné in solidum la société RPM Bally, la société ABC et la société Apave à verser à la société Amlin une somme de 100 134,90 euros, assortie des intérêts moratoires au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête, et de la capitalisation des intérêts, en deuxième lieu, condamné la société RPM Bally à garantir la société Apave de l'intégralité de cette condamnation, en troisième lieu, mis à la charge de la société RPM Bally le versement de trois sommes de 1 000 euros aux sociétés Apave, Soudal et V33 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et mis à la charge de la société RPM Bally les frais de l'expertise.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 14 mai 2024, et un mémoire enregistré le 11 juin 2024, la société RPM Bally, représentée par Me Pujol, demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il tient à son encontre une part de responsabilité supérieure à la fraction de 16,6 % retenue par l'expert judiciaire, et de le confirmer pour le surplus ;

2°) de rejeter comme nouvel en appel l'appel en garantie de la société ABC à son encontre ;

3°) de statuer ce que de droit sur les dépens.

Elle soutient qu'il y a lieu de réformer le jugement en tant qu'il lui a attribué une part de responsabilité supérieure à 16,6 %.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2024, la société CETE Apave Sudeurope et la société Apave Infrastructures et Construction France, représentées par Me Martineu, demandent à la Cour :

1°) à titre liminaire, de prononcer la mise hors de cause de la société CETE Apave Sudeurope et de rejeter comme nouvelles en appel les conclusions des sociétés RPM Bally et ABC dirigées contre la société Apave Infrastructures et Construction France ;

2°) à titre principal, de confirmer le jugement de première instance et de rejeter toute demande présentée à l'encontre de la société Apave Infrastructures et Construction France ;

3°) ou, subsidiairement, de condamner in solidum la société RPM Bally et la société ABC à la relever et garantir intégralement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

4°) plus subsidiairement, de limiter sa part de responsabilité à un quantum qui ne saurait dépasser 5 % et de condamner in solidum les sociétés RPM Bally et ABC à la relever et garantir à hauteur de 95 % ;

5°) de rejeter toute demande tendant au prononcé à son encontre d'une condamnation in solidum avec un autre constructeur ;

6°) de mettre la part de toute partie insolvable à la charge des autres parties condamnées ;

7°) en tout état de cause, de mettre à la charge in solidum de la société RPM Bally et de tous autres succombants la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le " CETE Apave Sudeurope " doit être mis hors de cause ;

- l'appel de la société RPM Bally est mal dirigé ;

- les appels en garantie présentés à son encontre sont nouveaux en appel ;

- elle n'a commis aucune faute ;

- les désordres affectent des éléments dissociables de l'ouvrage ;

- or, sa mission se limitait aux éléments indissociables ;

- les désordres ne sont pas de nature à affecter la solidité de ce dernier ;

- subsidiairement, elle doit être relevée et garantie in solidum par les sociétés ABC et RPM Bally.

Par un mémoire enregistré le 3 juin 2024, la société ABC, représentée par Me Cinelli, demande à la Cour :

1°) de confirmer le jugement attaqué et de rejeter la requête d'appel de la société RPM Bally ;

2°) de condamner la société RPM Bally à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la société RPM Bally la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas commis de faute ;

- elle doit être garantie de la condamnation par les sociétés RPM Bally et Apave ;

- les demandes présentées à son encontre sont infondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2024, la commune du Rouret, représentée par Me Fiorentino, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 2 avril 2024 en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre la société Soudal, en tant qu'il a retenu une atténuation de responsabilité de 10 % et en tant " qu'il a rejeté les conclusions reconventionnelles de la commune [du] Rouret visant à être indemnisée en totalité du préjudice de 23 144,51 euros toutes taxes comprises " ;

2°) de condamner in solidum les sociétés ABC, Apave, RPM Bally et Amlin à lui verser la somme de 23 144,51 euros ;

3°) de mettre à la charge in solidum des sociétés ABC, Apave, RPM Bally, Soudal et Amlin la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont exclu la faute des sociétés ABC, Apave et Soudal ;

- elle n'a commis aucune faute de nature à atténuer la responsabilité des constructeurs ;

- sa demande indemnitaire était recevable car elle avait la qualité de défendeur ;

- cette demande, qui vise des préjudices non indemnisés, est fondée.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 12 juillet 2024 et le 30 septembre 2024, la société par actions simplifiée Pilliot et la société Amlin, représentées par la SELARL d'avocats Houle, demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement en tant qu'il a limité le montant de la condamnation à 100 134,90 euros toutes taxes comprises, et de porter le montant de la condamnation à 133 931,23 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la présente requête, avec capitalisation des intérêts ;

2°) de le confirmer pour le surplus ;

3°) de mettre à la charge de la société RPM Bally ou de tout succombant les dépens ainsi que la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les moyens présentés à l'appui de la requête d'appel sont infondés ;

- les demandes indemnitaires de la commune sont irrecevables ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a limité le montant de la condamnation.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 septembre 2024, la société Soudal, représentée par la SELARL Job, Ricouart et Associés, demande à la Cour :

1°) de confirmer le jugement en tant qu'il rejette les demandes présentées à son encontre comme présentées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître et rejette comme irrecevables les conclusions présentées par la commune du Rouret ;

2°) subsidiairement, de statuer ce que de droit sur les demandes présentées par les sociétés Amlin et Assurances Pilliot à l'encontre des sociétés ABC, Apave Sudeurope, RPM Bally et Cap Déco et de la mettre hors de cause ;

3°) plus subsidiairement, de limiter sa part de responsabilité à 16,60 % et de condamner les sociétés V33, ABC, RPM Bally, Apave et la commune du Rouret à la relever et garantir intégralement de toute condamnation, et de rejeter toute demande de condamnation in solidum présentée à son encontre ;

4°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune du Rouret, des sociétés Amlin, Pilliot ou de toute autre partie succombante la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la juridiction administrative est incompétente pour statuer sur les demandes présentées contre elle ;

- sa responsabilité ne peut être engagée ;

- elle n'a commis aucune faute ;

- elle est fondée à appeler en garantie les autres intervenants ;

- les demandes complémentaires de la commune sont irrecevables.

Par une lettre en date du 26 juillet 2024, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu d'ici au 31 décembre 2024, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 1er octobre 2024.

Par ordonnance du 18 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Par une lettre du 27 mars 2025, la Cour a informé les parties de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur deux moyens d'ordre public, tirés :

- de l'irrégularité du jugement, en tant que celui-ci rejette la demande indemnitaire de la commune du Rouret contre la société Soudal, simple fabricant, comme irrecevable au lieu de la rejeter comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

- de ce qu'ayant été désintéressée par le versement de l'indemnité par son assureur, la commune du Rouret n'a plus qualité pour demander le rehaussement des condamnations prononcées à la demande de la société Amlin.

Connaissance prise des mémoires enregistrés le 21 octobre 2024 et le 17 avril 2025, présentés pour la société ABC et pour la société V33.

Vu :

- la décision du 6 février 2025 par laquelle le président de la Cour a désigné Mme Anne-Laure Chenal-Peter présidente par intérim de la 6ème chambre ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- les conclusions de M. Olivier Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Frej pour les sociétés Amlin et Assurances Pilliot, celles de Me Paulus pour la société ABC et celles de Me Gomila pour la société Soudal.

Considérant ce qui suit:

1. Par un contrat de marché public conclu en 2014, la commune du Rouret (Alpes-Maritimes) a confié à la société RPM Bally le lot n° 5 (" Finitions ") d'un marché public de travaux ayant pour objet la construction d'un espace associatif et culturel polyvalent, sous maîtrise d'œuvre d'un groupement d'entreprises solidaire dont le mandataire était la société ABC. La société RPM Bally a sous-traité à la société Cap Déco la fourniture et la pose du parquet en bois de l'ouvrage. Peu après la réception des travaux prononcée le 12 mai 2016, le maître de l'ouvrage a, par un courrier reçu le 23 décembre 2016, mis en demeure la société RPM Bally de reprendre la totalité des désordres affectant le parquet, et tenant à des défauts de planimétrie et des soulèvements des pavés de bois, ainsi que des écartements anormaux et des variations de coloris importantes. Le 23 mars 2017, la commune a déclaré le sinistre à son assureur dommages-ouvrage, la société Amlin. Le 10 avril 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a, à la demande de la commune, ordonné une expertise. Après le dépôt du rapport intervenu le 14 septembre 2020, la société Amlin, subrogée dans les droits de la commune à hauteur de l'indemnité de 133 931,23 euros qu'elle lui avait versée, a saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande tendant à la condamnation in solidum des sociétés RPM Bally, Cap Déco, ABC, Apave, Soudal et V33 à lui verser la même somme de 133 931,23 euros. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif a, en premier lieu, condamné in solidum la société RPM Bally, la société ABC et la société Apave à verser à la société Amlin une somme de 100 134,90 euros, assortie des intérêts moratoires au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête, et de la capitalisation des intérêts, en deuxième lieu, condamné la société RPM Bally à garantir la société Apave de l'intégralité de cette condamnation, en troisième lieu, mis à la charge de la société RPM Bally le versement de trois sommes de 1 000 euros aux sociétés Apave, Soudal et V33 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et mis à la charge de la société RPM Bally les frais de l'expertise. La société RPM Bally relève appel en sollicitant la réformation de ce jugement en tant qu'il lui attribue une part de responsabilité excédant 16,6 %.

Sur la mise hors de cause :

2. La société Cete Apave Sudeurope, à l'encontre de laquelle des conclusions ont été présentées par erreur, doit être mise hors de cause, ces conclusions devant être regardées comme dirigées contre la société Apave Sudeurope, aux droits et obligations de laquelle vient la société Apave Infrastructures et Construction France.

Sur l'appel principal de la société RPM Bally :

En ce qui concerne la condamnation in solidum :

3. Conformément aux principes qui régissent les actions décennales, les différentes entreprises liées au maître d'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage et auxquelles les désordres sont imputables sont tenues, in solidum, à réparation de la totalité du préjudice subi par ce dernier. Dès lors, la circonstance, invoquée par la société RPM Bally, que sa faute n'a contribué qu'à hauteur de 16,6 % à la survenance du désordre, est sans influence sur le bien-fondé de la condamnation prononcée par le tribunal administratif de Nice au titre de la responsabilité décennale des constructeurs.

En ce qui concerne la condamnation à garantir :

S'agissant des fins de non-recevoir opposées par la société Apave :

4. En premier lieu, les demandes de la société RPM Bally dirigées contre le " CETE Apave Sudeurope " devaient être regardées comme dirigées contre la société Apave Infrastructures et Construction France, qui vient aux droits et obligations de la société Apave Sudeurope. La fin de non-recevoir tirée du caractère mal dirigé des conclusions de la société RPM Bally doit donc être rejetée.

5. En second lieu, la société RPM Bally s'est bornée à contester le quantum de la condamnation à garantir la société Apave qui a été prononcée à son encontre, sans solliciter elle-même la condamnation de la société Apave à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre. La fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau en appel des conclusions de la société RPM Bally doit donc également être rejetée.

S'agissant du bien-fondé de l'appel en garantie dirigé contre la société RPM Bally :

6. Il ressort du rapport d'expertise que les désordres sont dus à la mise en œuvre d'un primaire inadapté au type de colle et à l'enduit de ragréage. Il en ressort également que ce défaut de conception est imputable à la société RPM Bally et à son sous-traitant la société Cap Déco, qui ne se sont pas assurés de la faisabilité de ce collage en contactant les fournisseurs et les fabricants, ainsi qu'à la société Soudal, fabricant de la colle et du primaire, et à la société V33, distributeur de Soudal, qui, pour le premier, a recommandé à tort d'associer le primaire de type WPRB-11 avec la colle de type MS-30 PLUS, et, pour le second, a fourni ces produits à la société Cap Deco sans consulter la société Soudal, fabricant, pour vérifier la possibilité d'appliquer le primaire de type WPRB-11 avec l'enduit de type UZIN.

7. Certes, l'expert met également en cause le maître d'œuvre et le bureau de contrôle, en notant que ceux-ci se sont abstenus d'exiger la réalisation d'essais de convenance. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les stipulations contractuelles, ou les règles de l'art, auraient imposé la réalisation de tels essais au cours du chantier. A ce titre, si le point 1.9 du cahier des clauses techniques particulières du lot prévoit que " l'entrepreneur devra sous son entière responsabilité toutes les études et tous les plans nécessaires à l'exécution des ouvrages relevant de son sous lot ainsi que les frais correspondant " et que " les notes de calcul de tous ses ouvrages seront à fournir à la maîtrise d'œuvre et au contrôleur technique ", cette obligation de fournir des études d'exécution, destinées à permettre la réalisation de l'ouvrage, n'implique pas normalement l'obligation de réaliser des essais de convenance des matériaux mis en œuvre. En outre, s'agissant du contrôleur technique, la société Apave fait valoir, à juste titre, que la mission de contrôle technique de type " L " qui lui avait été confiée portait seulement, comme le prévoit la norme NFP 03-100, sur la solidité de l'ouvrage ainsi que des éléments indissociables de l'ouvrage, à l'exclusion des éléments dissociables de l'ouvrage. Or le plancher, appliqué sur le support au moyen d'une colle, doit être regardé comme un élément dissociable de l'ouvrage dès lors qu'il peut être procédé à son enlèvement sans ôter de matière à l'ouvrage. Aucune faute du maître d'œuvre ou du contrôleur technique n'est donc établie.

8. Compte tenu de la nature des fautes imputables aux sociétés RPM Bally, Cap Déco, V33 et Soudal, il y a lieu de retenir la responsabilité de la société RPM Bally à hauteur du quart du montant de la condamnation.

9. Compte tenu de la nature de l'appel en garantie, qui s'analyse comme une action quasi-délictuelle, les différents intervenants ne peuvent être tenus que de leurs fautes propres. A cet égard, l'article 113 du code des marchés publics alors applicable, qui prévoit qu'" en cas de sous-traitance, le titulaire demeure personnellement responsable de l'exécution de toutes les obligations résultant du marché ", a pour seul objet de régir les rapports entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur titulaire. Dès lors, la société RPM Bally ne pouvait, vis-à-vis de la société Apave, être tenue des fautes commises par son sous-traitant.

10. Il en résulte que la société RPM Bally est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif l'a condamnée à garantir la société Apave à hauteur de la totalité du montant de la condamnation, au lieu de limiter cette condamnation au quart du montant de la condamnation.

Sur l'appel incident et provoqué de la société Apave :

En ce qui concerne l'appel incident :

11. Il résulte de ce qui précède que la société Apave n'est pas fondée à demander à être garantie par la société RPM Bally au-delà du quart du montant de la condamnation.

En ce qui concerne l'appel provoqué :

12. En l'absence de faute de la société ABC, l'appel en garantie de la société Apave contre cette société ne peut être accueilli.

Sur les appels en garantie présentés par la société ABC :

13. Ces conclusions sont, comme le soutiennent les sociétés RPM Bally et Apave, nouvelles en appel, et donc irrecevables.

Sur l'appel de la commune du Rouret :

En ce qui concerne les demandes présentées contre la société Soudal :

14. La société Soudal, qui a fourni des matériaux génériques et non un ouvrage ou une partie d'ouvrage conçu et produit pour satisfaire à des exigences précises et déterminées à l'avance, ne peut être tenu solidairement responsable des constructeurs par application de l'article 1792-4 du code civil.

15. Dès lors, la demande présentée par la commune et tendant à la condamnation de cette société ressortit à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. En rejetant cette demande comme irrecevable, le tribunal administratif de Nice a entaché son jugement d'irrégularité. Le jugement doit donc être annulé dans cette mesure. Statuant par la voie de l'évocation, il y a lieu pour la Cour de rejeter cette demande comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

En ce qui concerne le rejet des autres demandes indemnitaires :

16. Comme l'a jugé le tribunal administratif au point 15 de son jugement, les demandes indemnitaires présentées en première instance par la commune du Rouret, n'ayant pas été présentées par une partie défenderesse à l'instance, ne peuvent être regardées comme des conclusions reconventionnelles. Elles étaient donc irrecevables. A cet égard, la circonstance que la commune a été appelée dans la cause par son assureur n'est pas de nature à lui conférer la qualité de défendeur, en l'absence de demande présentée à son encontre par le requérant.

En ce qui concerne les autres aspects du jugement :

17. La commune du Rouret, ayant été désintéressée par le versement, par la société Amlin, de l'indemnité d'assurance, n'a plus qualité pour solliciter, à la place de cette dernière, la réformation du jugement en tant qu'il rejette partiellement ses demandes dans le cadre de l'action subrogatoire.

Sur l'appel incident et provoqué de la société Amlin :

18. La société Amlin sollicite le rehaussement du montant de la condamnation prononcée. Toutefois, elle se borne à se prévaloir du fait qu'elle a été subrogée dans les droits de la commune pour un montant supérieur à celui de la condamnation prononcée, sans critiquer les motifs du jugement par lesquels les premiers juges ont retenu une atténuation de responsabilité en raison d'un défaut d'entretien imputable à la commune. Sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, ces conclusions doivent donc être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

19. L'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société RPM Bally, qui n'est pas la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge des autres parties.

D É C I D E :

Article 1er : La société CETE Apave Sudeurope est mise hors de cause.

Article 2 : La société RPM Bailly est condamnée à garantir la société Apave Infrastructures et Construction France à hauteur du quart du montant de la condamnation prononcée par l'article 1er du jugement n° 2102329 du 2 avril 2024 du tribunal administratif de Nice.

Article 3 : L'article 2 du jugement du 2 avril 2024 est réformé en conséquence.

Article 4 : L'article 5 du jugement du 2 avril 2024 est annulé en tant qu'il rejette la demande de la commune tendant à la condamnation de la société Soudal.

Article 5 : Cette demande est rejetée comme présentée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société RPM Bally, à la société Cete Apave Sudeurope, à la société Apave Infrastructures et Construction France, à la société ABC Architectes, à la société Soudal, à la société V33, à la société la Parqueterie Cannoise, à la commune du Rouret, à la société européenne Amlin Insurance et à la société Assurances Pilliot.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2025, où siégeaient :

- Mme Anne-Laure Chenal-Peter, présidente,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- M. François Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2025.

N° 24MA01201 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01201
Date de la décision : 16/05/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. - Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. - Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. - Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : FIORENTINO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-16;24ma01201 ?
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