Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2023 par lequel le maire de la commune de Fuveau a délivré à M. F... D... un permis de construire portant sur l'extension d'une construction sur un terrain cadastré section AR n° 42, situé impasse des Bartavelles.
Par une ordonnance n° 2402249 du 6 mai 2024, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 juin et 25 octobre 2024, M. et Mme A..., représentés par Me Tagnon, demandent à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 6 mai 2024 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté de permis de construire du 18 décembre 2023 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Fuveau la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière, dès lors que la requête de première instance contenait un moyen assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ;
- ils ont intérêt à agir à l'encontre du permis de construire en litige, dès lors que leur maison d'habitation se situe sur la parcelle initialement cadastrée section B n° 2406, qui jouxte la parcelle B 20407, devenue AR 42, qui constitue le terrain d'assiette du projet et qu'ils vont, du fait de celui-ci, souffrir de vis-à-vis sur leurs espaces de vie, d'une modification de leur vue sur l'espace environnant, de troubles liés à la présence d'un nouveau voisinage et d'une perte de la valeur vénale de leur bien ;
- le dossier de permis de construire comporte des insuffisances au regard des articles R. 431-5, R. 431-6, R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 qui ont faussé l'appréciation du maire de Fuveau ; il existe des omissions et incohérences dans le dossier quant à la destination de la construction et sa surface de plancher ; le dossier ne comporte aucun plan faisant apparaître l'état des façades et du toit existants ; le plan de masse ne contient aucune précision s'agissant du maintien ou de la suppression des arbres existants en partie sud ;
- le projet méconnaît l'article 2-AUH2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de Fuveau dès lors que le bâtiment existant, qui n'est pas raccordé aux réseaux, n'a pas un usage d'habitation et qu'en tout état de cause, sa surface de plancher est inférieure à 50 m² ; la cour pourra, si nécessaire, désigner un expert afin d'établir un relevé de la surface du bâti existant ;
- le projet, eu égard à son ampleur, ne constitue pas une extension d'une construction existante mais une construction nouvelle interdite en zone AUH2 ;
- le projet, qui prévoit un raccordement au canal de Provence pour l'alimentation en eau, méconnaît l'article 4-AUH2 du règlement du PLU, dès lors que la construction existante n'est pas déjà alimentée par captage privé ;
- le projet, qui prévoit le raccordement, y compris de l'existant, à un dispositif d'assainissement autonome, méconnaît l'article 28-2.2.1 des dispositions générales du règlement du PLU et l'article 4-AUH2 du même règlement ;
- le permis de construire aurait dû être refusé sur le fondement de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme dès lors que la partie existante de la construction doit être raccordée au réseau public d'assainissement et que l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou concessionnaire de service public les travaux d'extension du réseau nécessaires au raccordement seront exécutés ;
- le projet méconnaît l'article 11-AUH2 du règlement du PLU, dès lors que le projet, situé dans un environnement campagnard et boisé, prévoit, en l'absence d'indications contraires sur le plan de masse, la suppression de l'ensemble des arbres situés sur le terrain ; le maire aurait dû émettre une prescription imposant le maintien des arbres existants et interdisant l'abattage des sujets de haute tige ;
- le projet méconnait l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors qu'il est situé en zone d'aléa moyen à exceptionnel du porter à connaissance du préfet relatif au risque de feux de forêt et qu'il va augmenter la vulnérabilité et exposer de nouveaux habitants au risque, d'autant que le terrain n'est pas raccordé au réseau d'eau potable ou au canal de Provence et qu'il ne dispose d'aucune défense extérieure contre l'incendie.
Par un mémoire, enregistré le 2 octobre 2024, la commune de Fuveau, représentée par la SCP Bérenger Blanc Burtez-Doucède et Associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la mise en œuvre des articles L. 600-5-1 ou L. 600-5 du code de l'urbanisme et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de M. et Mme A... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants n'ont pas intérêt à agir à l'encontre du permis de construire en litige ;
- les requérants ne justifient pas de l'accomplissement des formalités prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme s'agissant de leur recours devant le tribunal administratif et de leur requête d'appel ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. D... a produit, le 19 décembre 2024, un mémoire et des pièces sans l'intermédiaire d'un avocat et n'a pas régularisé cette production en dépit de l'invitation qui lui a été faite par courrier du 31 décembre 2024. Ce mémoire et ces pièces n'ont, pour ce motif, pas été communiqués.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Tagnon, représentant M. et Mme A... et G..., représentant la commune de Fuveau.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 18 décembre 2023, le maire de la commune de Fuveau a délivré à M. D... un permis de construire portant sur l'extension d'une construction existante située impasse des Bartavelles. M. et Mme A... relèvent appel de l'ordonnance du 6 mai 2024 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ".
3. Dans leur requête présentée devant le tribunal administratif sans le concours d'un conseil, M. et Mme A... ont fait valoir qu'au égard au doute quant à la surface de plancher de la construction existante, le projet méconnaissait l'article AUH2 du " PLUi d'Aix-en-Provence ". Si ce document d'urbanisme n'existe pas, ils ont repris la teneur de cet article dans leurs écritures et produit, à leur appui, l'extrait pertinent du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Fuveau. Dans ces conditions, leur requête, qui contenait un moyen assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne relevait pas du champ d'application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative permettant de la rejeter, au fond et non pour irrecevabilité, par ordonnance, mais de la compétence d'une formation collégiale du tribunal. Par suite, M. et Mme A... sont fondés à soutenir que l'ordonnance attaquée est irrégulière et à en obtenir, pour ce motif, l'annulation.
4. Il y a lieu pour la Cour de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions présentées par les intéressés devant le tribunal administratif.
Sur la recevabilité de la demande de première instance et de la requête d'appel de M. et Mme A... :
5. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
7. Il ressort des pièces du dossier que les requérants, qui sont propriétaires d'une maison d'habitation implantée sur la parcelle cadastrées section AR n° 41, qui jouxte le terrain d'assiette du projet, localisé sur la parcelle cadastrée section AR n° 42, ont la qualité de voisins immédiats de ce dernier. Ils font état de la localisation de la future construction, en face du côté sud de leur maison où se situent les pièces à vivre, la terrasse et la piscine, de l'importance de l'extension projetée par rapport à l'existant, de ce que la construction sera désormais habitée et de la présence de nombreuses ouvertures côté nord, donnant sur leur parcelle. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient la commune de Fuveau, M. et Mme A... justifient d'intérêt à agir pour contester le permis de construire accordé à M. D....
8. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. / (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A... ont notifié au maire de Fuveau et à M. D..., bénéficiaire du permis de construire qu'ils contestent, copie de leur recours contentieux devant le tribunal administratif et de leur requête d'appel devant la Cour, dans le délai imparti par les dispositions énoncées au point précédent. Par suite, la commune de Fuveau n'est pas fondée à soutenir que leur requête est irrecevable faute pour eux d'avoir accompli ces deux formalités.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 20 décembre 2023 :
10. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : (...) e) La destination des constructions, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 431-6 du même code : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28, leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues et si leur destination ou sous-destination est modifiée par le projet. ". Aux termes de l'article R. 431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : / a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; (...) ".
11. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
12. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que le formulaire Cerfa fait état d'une construction à usage d'habitation de 25 + 25 m² de surface de plancher alors que la notice mentionne que " le bâti existant cadastré d'une superficie de 25 m² comporte également une remise de 25 m² " et que l'attestation de prise en compte de la réglementation environnementale RE 2020 fait état d'un bâti existant de 49 m². Ce dossier ne comprend aucun plan des toitures, que ce soit avant ou après travaux, alors que le projet, qui procède à une extension de la construction existante, outre la création d'un garage et d'une terrasse couverte, modifie sensiblement les toitures existantes. Il comporte, par ailleurs, uniquement les plans des façades à l'état futur, sans que cette insuffisance soit compensée par les autres pièces du dossier, notamment les photographies, qui ne font apparaitre que les façades ouest et nord. Dans ces conditions, les insuffisances du dossier de permis de construire, qui ne permet de déterminer, de façon certaine, ni la surface et la consistance de la construction existante, ni la nature et l'ampleur de l'extension projetée, ont été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à fausser l'appréciation du maire de Fuveau sur la conformité du projet à la réglementation applicable à la zone AUH dans laquelle il s'implante, qui autorise uniquement les extensions des constructions d'habitation d'une surface minimale de 50 m². Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire doit être accueilli.
13. En deuxième lieu, le terrain d'assiette du projet se situe en zone AUH2 du plan local d'urbanisme (PLU) de Fuveau, qui correspond à une " zone d'urbanisation future à vocation d'habitat insuffisamment équipée et dans laquelle la commune souhaite maîtriser le développement urbain et les conditions de sa mise en œuvre ". Aux termes de l'article 1-AUH2 du règlement du PLU : " Toute occupation et utilisation du sol autre que celles visées dans l'article 2-AUH2 ci-après. ". L'article 2-AUH2 autorise, en son point 3, " L'agrandissement des constructions d'habitation existantes disposant d'une SP [surface de plancher] d'au moins 50 m² avec un maximum de 250 m² B... extension comprise. ". Aux termes de l'article R. 111-22 du code de l'urbanisme : " La surface de plancher de la construction est égale à la somme des surfaces de plancher de chaque niveau clos et couvert, calculée à partir du nu intérieur des façades après déduction : (...) ".
14. A supposer que la construction existante sur le terrain d'assiette du projet puisse être regardée comme une construction à usage d'habitation, même si elle n'est raccordée à aucun réseau et n'est pas habitée, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice architecturale, qui fait état d'une remise de 25 m², et des photographies, qui font apparaître, sur la façade sud, une terrasse couverte empiétant notamment sur la surface de plancher de l'étage, que la surface de plancher de cette construction est inférieure à 50 m², ce que la commune, seule défendeur à l'instance, ne conteste pas utilement en se bornant à indiquer qu'il convient de prendre en compte les termes de la demande, dont il a été dit au point 12 ci-dessus qu'ils sont, à cet égard, à la fois imprécis et contradictoires. Par suite, M. et Mme A... sont fondés à soutenir que le projet de M. D... méconnaît l'article 2-AUH2 du règlement du PLU.
15. En troisième lieu, aux termes de l'article 28 des dispositions générales du règlement du PLU, relatif aux réseaux divers : " 1. Eau : / Les constructions nouvelles doivent être raccordées au réseau public de distribution d'eau potable. (...) ". Aux termes de l'article 4-AUH2 du règlement du PLU : " Eau : / Pour les constructions existantes et déjà alimentées en eau potable par captage privé dont Le Canal de Provence ainsi que pour leurs extensions, ce mode d'alimentation en eau est toléré, dans le respect de la réglementation en vigueur, en l'absence de réseau public et dans l'attente de sa réalisation. (...) ".
16. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la notice figurant dans le dossier de demande, qu'il est prévu, s'agissant de l'eau potable, un raccordement ultérieur de la construction, qui ne bénéficie d'aucune desserte en eau potable, au canal de Provence. Il résulte toutefois des dispositions du règlement du PLU énoncées au point précédent que seules les constructions existantes déjà alimentées par le canal de Provence peuvent continuer, à l'occasion de leur extension, à utiliser ce mode de desserte. Dans ces conditions, M. et Mme A... sont fondées à soutenir que le projet en litige méconnaît l'article 4-AUH2 du PLU de Fuveau.
17. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. (...) " Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics, sans prise en compte des perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité, et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement. Un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et que, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.
18. Ainsi qu'il a été dit au point 16 ci-dessus, la construction projetée doit être raccordée au réseau public de distribution d'eau potable. Il est constant que le terrain d'assiette n'est pas actuellement desservi par ce réseau, de telle sorte que le raccordement doit être regardé comme nécessitant des travaux d'extension de celui-ci. La commune de Fuveau ne soutient pas être en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés et il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le maire de Fuveau aurait accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation sur ce point. Par suite, le projet méconnait les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme.
19. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2023.
Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
20. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
21. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
22. Les différents vices entachant le permis de construire du 18 décembre 2023 relevés dans le présent arrêt n'affectent pas une partie identifiable du projet. Par ailleurs, les vices relevés aux points 14 et 16 ci-dessus ne sont pas susceptibles d'être régularisés. Par suite, les conclusions présentées à titre subsidiaire par la commune de Fuveau tendant à la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-5 ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne peuvent qu'être rejetées.
23. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... sont fondés à obtenir l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2023 par lequel le maire de Fuveau a accordé un permis de construire à M. D....
Sur les frais liés au litige :
24. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Fuveau une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de ces derniers, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Fuveau sur ce fondement.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 2402249 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 6 mai 2024 est annulée.
Article 2 : L'arrêté du 18 décembre 2023 par lequel le maire de Fuveau a accordé un permis de construire à M. D... est annulé.
Article 3 : La commune de Fuveau versera la somme de 2 000 euros à M. et Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : les conclusions présentées par la commune de Fuveau sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Mme E... A..., à M. F... D... et à la commune de Fuveau.
Copie en sera adressée au procureur de la république près le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 avril 2025.
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N° 24MA01649
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