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24/03/2025 | FRANCE | N°25MA00033

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 24 mars 2025, 25MA00033


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune du Cannet-des-Maures a demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, de condamner la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) à lui payer la somme de 7 595 832,21 euros au titre de divers préjudices affectant un bâtiment à usage de dojo qu'elle avait fait construire, ou, à titre subsidiaire, de condamner in solidum la société à responsabilité limitée Atelier d'architectures Ferret, la société par actions simp

lifiée Ginger CEBTP, la société par actions simplifiée Qualiconsult, la société par actions...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune du Cannet-des-Maures a demandé au tribunal administratif de Toulon, à titre principal, de condamner la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) à lui payer la somme de 7 595 832,21 euros au titre de divers préjudices affectant un bâtiment à usage de dojo qu'elle avait fait construire, ou, à titre subsidiaire, de condamner in solidum la société à responsabilité limitée Atelier d'architectures Ferret, la société par actions simplifiée Ginger CEBTP, la société par actions simplifiée Qualiconsult, la société par actions simplifiée société d'exploitation des établissements Trève Abel (SEETA), la société en nom collectif Eiffage Route Méditerranée venant aux droits de la société en nom collectif Appia, la société par actions simplifiée Marenco et compagnie, le cabinet Betem Ingénierie et la société à responsabilité limitée Alma Provence à lui payer la somme de 8 765 832,21 euros toutes taxes comprises, et, en troisième lieu, de mettre à la charge in solidum de ces intervenants les dépens et une somme de 12 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Par un jugement n° 1802647 en date du 20 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulon, après avoir refusé d'admettre l'intervention de la société anonyme Axa France IARD au soutien de son assurée la société SEETA, a, en premier lieu, condamné in solidum les sociétés Atelier d'architectures Ferret, Ginger CEBTP, SEETA, Eiffage Route Méditerranée et Marenco et compagnie à payer à la commune une somme de 320 388 euros toutes taxes comprises avec intérêts de droit à compter du 23 août 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 24 août 2019, en deuxième lieu, condamné in solidum les sociétés Atelier d'architectures Ferret, SEETA, Eiffage Route Méditerranée et Marenco et compagnie, à payer à la commune une somme de 2 996 267 euros toutes taxes comprises avec intérêts de droit à compter du 23 août 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 24 août 2019, en troisième lieu, condamné in solidum les sociétés Atelier d'architectures Ferret et Ginger CEBTP à payer à la commune une somme de 2 785 458 euros toutes taxes comprises avec intérêts de droit à compter du 23 août 2018 et capitalisation des intérêts à compter du 24 août 2019, en quatrième lieu, mis les frais et honoraires d'expertise à la charge définitive, in solidum, de l'ensemble de ces intervenants, en cinquième lieu, condamné la société Marenco et compagnie à garantir la société SEETA de la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de 50 % et, en sixième lieu, condamné la société Marenco et compagnie à garantir la société Eiffage Route Méditerranée de la totalité de la condamnation prononcée à son encontre.

Par un arrêt n° 20MA03576, 20MA03584, 20MA03606, 20MA03607, 20MA03674 du 21 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Marseille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement n° 1802647 du tribunal administratif de Toulon du 20 juillet 2020 présentées dans la requête n° 20MA03607, a rejeté les conclusions de la société Betem Ingénierie tendant à la réformation du jugement, a annulé les articles 2 à 9 du jugement, a rejeté les conclusions de la commune du Cannet-des-Maures dirigées contre la société SMABTP et contre la société Betem Ingénierie, a déclaré la société Atelier d'architectures Ferret, la société Qualiconsult, la société SEETA et la société Ginger CEBTP responsables in solidum, au titre de la garantie décennale, du préjudice causé à la commune du Cannet-des-Maures et correspondant, d'une part, au préjudice d'image et, d'autre part, au coût de la démolition et de la reconstruction du bâtiment à usage de dojo, a déclaré la société SEETA, la société Eiffage Route Méditerranée, la société Marenco et compagnie, la société Atelier d'architectures Ferret et la société Qualiconsult responsables in solidum, au titre de la garantie décennale, du préjudice causé à la commune du Cannet-des-Maures et correspondant au coût des travaux de reprise destinés à reprendre les désordres affectant le système de drainage périphérique, a déclaré la société Marenco et compagnie, la société Eiffage Route Méditerranée, la société Atelier d'architectures Ferret et la société Qualiconsult responsables in solidum, au titre de la garantie décennale, du préjudice causé à la commune du Cannet-des-Maures et correspondant au coût des travaux de reprise destinés à reprendre les désordres affectant les canalisations d'évacuation des eaux pluviales, et a prescrit une expertise, au contradictoire de l'ensemble des parties présentes à l'instance.

Par une ordonnance du 25 janvier 2023, la présidente de la Cour a désigné M. B... A... comme expert.

Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2024 sous le n° 24MA03050, la société SEETA, représentée par Me Degryse, a demandé à la Cour d'interpréter l'arrêt du 21 décembre 2022 et de préciser si l'expert est contraint de ne chiffrer qu'une solution de démolition/reconstruction intégrale du bâtiment sans conservation de quelque existant que ce soit ou s'il lui est loisible de chiffrer une solution de démolition/reconstruction partielle avec conservation de certains existants.

Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2024 sous le n° 24MA03052, la société Atelier d'architectures Ferret a demandé à la Cour d'interpréter l'arrêt du 21 décembre 2022 et de préciser si le préjudice indemnisable de la commune du Cannet-des-Maures correspond nécessairement au coût de la démolition/reconstruction totale du dojo ou s'il peut aussi correspondre au coût d'une démolition/reconstruction partielle dont la faisabilité serait établie dans le cadre de l'expertise judiciaire.

Par une ordonnance nos 24MA03050, 24MA03052 du 12 décembre 2024, le président de la 6ème chambre de la Cour a rejeté ces requêtes comme irrecevables, au motif qu'il résultait des dispositions de l'arrêt, dépourvues d'ambiguïté, que l'expert était invité à chiffrer le montant du préjudice subi par la commune, qui correspond au coût de la démolition et de la reconstruction du bâtiment, sans que cet arrêt ne précisât que la démolition des éléments de structure du bâtiment existant dût être totale.

Procédure devant la Cour :

Par une requête en tierce opposition, enregistrée le 6 janvier 2025, et un mémoire enregistré le 24 janvier 2025, la commune du Cannet-des-Maures, représentée par la SELARL LX Aix-en-Provence, demande à la Cour :

1°) de déclarer nulle et non avenue cette ordonnance ;

2°) de rejeter la demande d'interprétation de l'arrêt comme irrecevable.

Elle soutient que :

- une décision d'irrecevabilité d'une demande d'interprétation ne peut contenir aucune interprétation ;

- l'auteur de l'ordonnance attaquée était incompétent ;

- son interprétation modifie le sens et la portée de l'arrêt du 21 décembre 2022 ;

- elle modifie la mission de l'expert ;

- elle a été prise en méconnaissance du principe du contradictoire.

Par un mémoire, enregistré le 20 janvier 2025, la société à responsabilité limitée Atelier d'architectures Ferret, représentée par la société CLL Avocats, demande à la Cour de rejeter la requête en tierce opposition de la commune, et de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commune aurait pu intervenir à l'instance ;

- l'ordonnance attaquée ne préjudicie pas aux droits de la commune ;

- les moyens de cette dernière ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 22 janvier 2025, la société SEETA, représentée par la SELARL Cabinet Degryse et Massuco, demande à la Cour de rejeter la requête en tierce opposition de la commune, et de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés à l'appui de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 27 janvier 2025, la société Qualiconsult, représentée par la SCP Raffin et Associés, demande à la Cour de rejeter la requête en tierce opposition de la commune, et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens présentés à l'appui de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Boulan pour la commune du Cannet-des-Maures, celles de Me Roussarie pour la société Atelier d'architectures Ferret et celles de Me Degryse pour la société SEETA.

Connaissance prise de la note en délibéré communiquée le 11 mars 2025 pour la commune du Cannet-des-Maures.

Considérant ce qui suit :

1. La commune du Cannet-des-Maures forme tierce opposition à l'ordonnance, rendue le 12 décembre 2024 par le président de la 6ème chambre de la Cour, et qui a, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté deux demandes d'interprétation des dispositions de l'arrêt nos 20MA03576, 20MA03584, 20MA03606, 20MA03607, 20MA03674 comme irrecevables, au motif qu'il ressortait de cet arrêt, dépourvu d'ambiguïté, que l'expert avait été invité à chiffrer le montant du préjudice subi par la commune, qui correspond au coût de la démolition et de la reconstruction du bâtiment, sans que cet arrêt ne précisât que la démolition des éléments de structure du bâtiment existant dût être totale.

2. Aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative : " Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision ".

3. En premier lieu, le tiers opposant, s'il est admis à faire valoir les moyens pour lesquels il estime que la décision juridictionnelle en cause est mal fondée, ne peut utilement invoquer, à l'appui de cette action, les irrégularités entachant cette même décision. Les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'ordonnance attaquée et de la méconnaissance du caractère contradictoire de l'instruction, ne peuvent donc être utilement invoqués.

4. En second lieu, pour rejeter comme irrecevable la demande d'interprétation dont il était saisi, le président de la 6ème chambre de la Cour a observé que cet arrêt ne précisait pas que la démolition et la reconstruction des éléments de structure du bâtiment existant dût être totale et qu'il ne faisait donc pas obstacle à ce que l'expert identifiât des mesures constructives permettant de remédier à l'ensemble des vices initiaux, sans pour autant procéder à la démolition totale de l'existant. Il en a déduit que cet arrêt était à cet égard dépourvu de toute obscurité ou ambiguïté.

5. Il y a lieu pour la Cour d'adopter les motifs ainsi retenus à bon droit par l'auteur de l'ordonnance attaquée, qui n'a ni altéré le sens de l'arrêt dont l'interprétation était sollicitée ni modifié la portée de la mission confiée à l'expert.

6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de sa requête en tierce opposition, la commune du Cannet-des-Maures n'est pas fondée à demander que celle-ci soit déclarée nulle et non avenue.

7. Il n'y a pas lieu de mettre une somme à la charge de la commune du Cannet-des-Maures en remboursement des frais exposés par les sociétés Atelier d'architectures Ferret, SEETA et Qualiconsult.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune du Cannet-des-Maures est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des sociétés Atelier d'architectures Ferret, SEETA et Qualiconsult tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Cannet-des-Maures, à la société Marenco et compagnie, à la société SEETA, à la société Atelier d'architectures Ferret, à la société Ginger CEBTP, à la société Alma Provence, à la société Betem Ingénierie, à la société Qualiconsult, à la société SMABTP et à la société Eiffage Route Méditerranée.

Copie en sera adressée à M. A..., expert.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2025, où siégeaient :

- M. Jean-Christophe Duchon-Doris, président de la Cour,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Caroline Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2025.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 25MA00033
Date de la décision : 24/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Diverses sortes de recours - Recours en interprétation.

Procédure - Voies de recours - Tierce-opposition.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : SELARL LEXAVOUÉ AIX-EN-PROVENCE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-24;25ma00033 ?
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