Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a expulsé du territoire, ou, à titre subsidiaire, de prononcer son assignation à résidence.
Par un jugement n° 2208164 du 22 février 2024, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 septembre 2024, M. A..., représenté par Me Wathle, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 13 juin 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision préfectorale est entachée d'erreur matérielle ;
- il a l'intention de solliciter la révision de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble qui le condamne à cinq ans de prison ;
- l'arrêté préfectoral est entaché d'erreur d'appréciation ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit.
Par une décision en date du 26 juillet 2024, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la décision par laquelle le président de la Cour a désigné M. B... Thielé, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,
- et les observations de Me Wathle pour M. A..., présent, ainsi que celles de l'épouse de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 13 juin 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône a expulsé du territoire M. A..., ressortissant algérien né le 28 août 1975. Par le jugement attaqué, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 ". Aux termes de l'article L. 631-2 du même code : " Ne peut faire l'objet d'une décision d'expulsion que si elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que l'article L. 631-3 n'y fasse pas obstacle : 1° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (...) 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été pendant toute cette période titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " (...) Par dérogation au présent article, l'étranger mentionné aux 1° à 4° peut faire l'objet d'une décision d'expulsion en application de l'article L. 631-1 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans (...) ".
3. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.
4. Pour décider l'expulsion de M. A..., le préfet des Bouches-du-Rhône a retenu que M. A... s'était rendu coupable, le 23 juin 2003, de vol en réunion en récidive, du 1er janvier au 1er août 2004 de trafic de stupéfiants, le 27 juillet 2004 de violence avec usage ou menace d'une arme, le 3 avril 2005 de violence aggravée suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours, le 6 avril 2017 de conduite d'un véhicule sous emprise de stupéfiants, usage illicite de stupéfiants et port d'arme illicite, du 25 octobre 2017 au 19 juin 2018 de recel de bien provenant d'un vol, de mars 2017 à avril 2018 de faits de transport, détention, offre ou cession, acquisition, usage illicite et trafic de stupéfiants, et le 25 juin 2018 de dégradation ou détérioration d'un bien destiné à l'utilité ou à la décoration publique. Il ressort des pièces du dossier que les faits de transport, détention, offre ou cession, acquisition, usage illicite et trafic de stupéfiants ont justifié la condamnation de M. A... à une peine ferme de cinq ans d'emprisonnement, qui l'empêche dès lors de se prévaloir des protections instituées aux 1° et au 3° de l'article L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Si M. A... soutient que ces faits, commis en réalité par son frère jumeau, lui ont été imputés à tort, à l'exception des faits commis de mars 2017 à avril 2018, le préfet aurait en tout état de cause pris la même décision s'il n'avait pas pris en considération les faits, anciens ou de faible gravité, dont M. A... nie être l'auteur, pour ne tenir compte que des faits commis entre mars 2017 et avril 2018 et ayant justifié sa condamnation à une peine de cinq ans de prison. Le moyen tiré de l'inexactitude matérielle de l'arrêté préfectoral doit donc, en tout état de cause, être écarté.
6. Si M. A... soutient, par ailleurs, qu'il a l'intention de demander la révision de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, en tirant argument du fait qu'un passé judiciaire lui a été imputé à tort, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de l'arrêté d'expulsion.
7. Enfin, compte tenu de la gravité des faits ayant justifié la condamnation de M. A... à une peine de cinq ans d'emprisonnement par arrêt du 23 juillet 2019 de la cour d'appel de Grenoble, le préfet n'a pas, en décidant d'expulser M. A..., fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Wathle.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2025, où siégeaient :
- M. Jean-Christophe Duchon-Doris, président de la Cour,
- M. Renaud Thielé, président assesseur,
- Mme Caroline Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2025.
N° 24MA02509 2