Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Finareal a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) du territoire Marseille Provence.
Par un jugement n° 2002814 du 10 janvier 2024, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 12 mars 2024, le 21 novembre 2024 et le 17 janvier 2025, la société Finareal, représentée par Me Morabito, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 janvier 2024 ;
2°) d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 du conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence ;
3°) d'enjoindre à la métropole Aix-Marseille-de reprendre l'élaboration de son plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) en modifiant le classement de sa parcelle en zone AUH ou AUM, voire en zone AU3 ou AU1 ;
4°) de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le signataire du certificat de conformité de la délibération attaquée ne bénéficiait pas d'une délégation de fonction à cette fin ;
- l'avis de la commission d'enquête est insuffisamment motivé dès lors qu'elle n'a pas répondu à ses observations et compte tenu du nombre de requêtes concernant le zonage sur le territoire de la commune d'Allauch ;
- le classement en zone AU2 du secteur où se trouve sa parcelle est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) qui qualifie la commune d'Allauch de centralité de deuxième niveau au sein de laquelle doit être préservée, dans le tissu urbain, une mixité fonctionnelle pour l'artisanat, la logistique urbaine, la petite activité, les services d'une part, et l'habitat d'autre part ;
- ce classement est en contradiction avec le projet d'aménagement et de développement durables du PLUi en litige qui entend privilégier les interventions urbaines dans l'enveloppe existante, notamment par l'investissement du foncier disponible, et faire évoluer les tissus disposant de capacité d'évolution ;
- ce classement est entaché d'erreur manifeste d'appréciation alors que la parcelle était constructible dans le précédent document d'urbanisme ; un classement de sa parcelle en zone UAH ou UAM est parfaitement justifié compte tenu de sa configuration et de sa localisation ;
- la délibération attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 24 octobre 2024, le 20 décembre 2024 et le 6 février 2025, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Mialot et Poulard, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société appelante en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la Cour a désigné Mme Courbon, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement de la 1ère chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Claudé-Mougel,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de M. A..., élève avocat, plaidant aux côtés de Me Olmier, représentant la société Finareal, et celles de Me Garigue, représentant la métropole Aix-Marseille-Provence.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 19 décembre 2019, le conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) du Territoire Marseille Provence. La société Finareal, propriétaire d'une parcelle cadastrée section DZ n° 0059, située 185 chemin de Barbaraou sur le territoire de la commune d'Allauch, relève appel du jugement du 10 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-23 du code général des collectivités territoriales : " Les délibérations sont inscrites par ordre de date. / Elles sont signées par tous les membres présents à la séance, ou mention est faite de la cause qui les a empêchés de signer. " Ces dispositions, qui prévoient la signature des délibérations du conseil municipal par tous les membres présents à la séance, ne sont pas prescrites à peine de nullité de ces délibérations. La circonstance que la certification conforme de la délibération en litige dans le registre des délibérations de la métropole Aix-Marseille-Provence aurait été signée par une personne ne bénéficiant pas d'une délégation à cette fin n'a pas davantage d'incidence sur sa légalité.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 153-19 du code de l'urbanisme : " Le projet de plan local d'urbanisme arrêté est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire ". Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les conclusions émises par le commissaire-enquêteur ou la commission d'enquête à l'issue de l'enquête publique doivent être motivées. Elles lui imposent d'indiquer au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis, mais ne l'obligent pas à répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête et ses réponses peuvent revêtir une forme synthétique.
4. Comme le relève la société appelante elle-même, la commission d'enquête a fait état de ses observations dans les annexes à son rapport et les a donc nécessairement prises en compte. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, la commission d'enquête n'avait pas à y répondre spécifiquement. Il ressort de ses conclusions qu'elle a procédé à une synthèse thématique des observations du public, des réponses qui y ont été apportées par le conseil de territoire de la métropole Aix-Marseille-Provence et de sa propre appréciation sur chacun des 11 thèmes recensés. A l'issue de cette synthèse, la commission a, compte tenu des appréciations portées sur le déroulement de l'enquête publique, du dossier soumis à enquête publique, de la synthèse des observations du public et des réponses de la métropole, et en relevant que cette enquête avait mis au jour plusieurs points sensibles du projet de PLUi, émis un avis favorable assorti de plusieurs réserves et recommandations. Contrairement à ce que soutient la société Finareal, la commission d'enquête a ainsi émis des conclusions motivées et a donné son avis personnel sur le projet.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme (...) sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale (...) ". Aux termes de l'article L. 141-5 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans le respect des orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables, le document d'orientation et d'objectifs détermine : / 1° Les orientations générales de l'organisation de l'espace et les grands équilibres entre les espaces urbains et à urbaniser et les espaces ruraux, naturels, agricoles et forestiers ; / 2° Les conditions d'un développement urbain maîtrisé et les principes de restructuration des espaces urbanisés, de revitalisation des centres urbains et ruraux, de mise en valeur des entrées de ville, de valorisation des paysages et de prévention des risques ; / 3° Les conditions d'un développement équilibré dans l'espace rural entre l'habitat, l'activité économique et artisanale, et la préservation des sites naturels, agricoles et forestiers. / Il assure la cohérence d'ensemble des orientations arrêtées dans ces différents domaines. ". L'article L. 141-12 dans sa rédaction alors en vigueur dispose : " Le document d'orientation et d'objectifs définit les objectifs et les principes de la politique de l'habitat au regard, notamment, de la mixité sociale, en prenant en compte l'évolution démographique et économique et les projets d'équipements et de dessertes en transports collectifs. / Il précise : / 1° Les objectifs d'offre de nouveaux logements, répartis, le cas échéant, entre les établissements publics de coopération intercommunale ou par commune ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 142-1 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : / 1° Les plans locaux d'urbanisme prévus au titre V du présent livre ; (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale (SCOT) peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme (PLU) sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des PLU, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des SCOT, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.
7. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, l'appréciation de la compatibilité d'un PLU avec un SCOT s'opère dans le cadre d'une analyse globale, à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert par ce PLU, et la société appelante ne peut, dès lors, utilement invoquer l'existence d'une telle incompatibilité au seul motif du classement de sa parcelle par le zonage du PLUi litigieux qui l'empêcherait de réaliser son programme immobilier portant sur la réalisation d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et d'une résidence pour séniors. Au demeurant, s'il est exact que le document d'orientations générales du SCOT de Marseille Provence approuvé le 29 juin 2012 identifie la commune d'Allauch comme une centralité secondaire et qu'il fixe comme objectif de favoriser la mixité fonctionnelle au niveau des centralités qu'il identifie, celui-ci s'entend sur l'ensemble du territoire de cette centralité et il en ressort que, pour assurer cette mixité fonctionnelle, il est indispensable de spécialiser des sites dédiés à l'économie. Ainsi, en classant la parcelle en cause, qui se situe en dehors du centre de la commune tout en étant à proximité d'un habitat pavillonnaire, en zone à urbaniser AU2, dont la vocation principale est d'accueillir des activités économiques, le PLU est compatible avec les objectifs fixé par le SCOT de Marseille Provence Métropole.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. " Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le PADD, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
9. Ainsi qu'il est dit au point précédent, la cohérence au sein du PLU entre une disposition du PLU et le PADD s'apprécie globalement, à l'échelle du territoire concerné, si bien que la circonstance que la société Finareal ne pourrait réaliser son projet de construction d'un EHPAD et d'une résidence pour séniors compte tenu du classement de sa parcelle dans une zone à urbaniser dédiée aux seules activités économiques, ne peut dès lors, à elle seule, traduire une incohérence du zonage du secteur où se trouve cette parcelle avec le PADD. De même, la société appelante ne peut se borner à soutenir que le classement de sa parcelle en zone AU2 est contraire à l'objectif du PADD de développement économique et de services collectifs, pour en déduire une méconnaissance des dispositions de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme. Au demeurant, contrairement à ce qu'elle soutient, il ne ressort nullement du PADD que la construction d'un EHPAD sur sa parcelle est recommandée mais, au titre de l'orientation intitulée " pour un urbanisme raisonné et durable ", que, s'agissant des zones urbaines à vocation économique tel que le secteur de Barbaraou où se trouve cette parcelle, il est nécessaire "'d'assurer une pérennité des espaces commerciaux de l'entrée de ville sud (secteur de Barbaraou) et de son développement, tout en introduisant un traitement qualitatif et une complémentarité avec l'activité commerciale de la centralité'" mais qu'en zone d'urbanisation future, il convient de " conserver une capacité foncière mesurée en extension pour le développement et l'organisation des secteurs de Fontvieille et de Barbaraou " secteurs urbanisables à moyen et long termes) ". Le classement de la parcelle en litige en zone AU2, dont la vocation principale est d'accueillir des activités économiques, est dès lors compatible avec les orientations du PADD du PLUi litigieux.
10. En cinquième lieu, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
11. La société Finareal ne peut valablement soutenir, compte tenu de ce qui a été rappelé au point précédent, que le classement de sa parcelle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au seul motif qu'elle était, dans le précédent document d'urbanisme applicable sur le territoire de la commune d'Allauch, classée en zone à urbaniser à vocation principale d'activités économiques et de services d'intérêt collectif, permettant d'y implanter un EHPAD. Par ailleurs, il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur l'opportunité d'un classement retenu par les auteurs d'un document local d'urbanisme. Par suite, la société Finareal ne peut davantage utilement soutenir qu'un classement en zone UAH ou UAM de sa parcelle est justifié compte tenu de sa configuration et de sa localisation.
12. En sixième et dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué au seul motif qu'un permis de construire aurait été délivré à une autre société en vue de la construction d'un EHPAD sur une parcelle à proximité le 28 août 2019, soit antérieurement à l'approbation du PLUi en litige, n'est pas établi.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la société Finareal n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence a approuvé le PLUi du territoire Marseille Provence. Ses conclusions à fin d'annulation de ce jugement et de cette délibération doivent donc être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la métropole Aix-Marseille Provence, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la société Finareal au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la métropole Aix-Marseille Provence et non compris dans les dépens.
D É C I D E
Article 1er : La requête de la société Finareal est rejetée.
Article 2 : La société Finareal versera à la métropole Aix-Marseille Provence une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Finareal et à la métropole Aix-Marseille Provence.
Copie en sera faite à la commune d'Allauch.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2025, où siégeaient :
- Mme Courbon, présidente,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller,
- Mme Dyèvre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mars 2025.
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N° 24MA00623