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07/02/2025 | FRANCE | N°24MA01950

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 07 février 2025, 24MA01950


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon à titre principal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2023 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer une carte de séjour temporai

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon à titre principal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2023 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, ou, à titre subsidiaire, d'une part, d'annuler l'obligation de quitter le territoire français et l'interdiction de retour prises à son encontre et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Var de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2401064 du 24 juin 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2024, M. A... B..., représenté par Me Mothere, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2023 par lequel le préfet du Var a refusé de faire droit à sa demande de titre de séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros qui sera versée à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le signataire de l'arrêté attaqué n'avait pas délégation de signature pour les décisions portant refus de titre de séjour ;

- il remplit toutes les conditions posées par les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et justifie du caractère réel et sérieux de sa formation en dépit d'un changement d'orientation ;

- le préfet du Var a estimé à tort être en situation de compétence liée pour prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

- sa demande de titre de séjour n'était pas manifestement infondée ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français fait obstacle à ce qu'il puisse se rendre en Italie.

La procédure a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une décision du 27 septembre 2024, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 10 janvier 2005, de nationalité tunisienne, est entré en France en 2021. Il a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance à compter du 27 juillet 2021. Par une ordonnance du juge des enfants du tribunal judiciaire de Toulon, son placement provisoire a été ordonné jusqu'au 30 avril 2022. Par un jugement en assistance éducative du 5 avril 2022, cette mesure a été prolongée jusqu'au 10 janvier 2023, date de sa majorité. M. B... a présenté, le 21 décembre 2022, une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " en application des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 5 décembre 2023, le préfet du Var a refusé de faire droit à cette demande de titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. B... interjette appel du jugement en date du 24 juin 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation dudit arrêté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. Giudicelli, secrétaire général de la préfecture du Var qui, par un arrêté du 21 août 2023, régulièrement publié le même jour au recueil des actes de la préfecture du Var, a reçu délégation du préfet du Var aux fins de signer " tous actes, décisions, recours juridictionnels, saisines juridictionnelles notamment en matière de police des étrangers ", la police des étrangers incluant, contrairement à ce que soutient le requérant, les décisions portant refus de titre de séjour. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 5 décembre 2023 doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".

4. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a, dans un premier temps, été inscrit à un CAP métiers de la coiffure et a bénéficié d'un contrat d'apprentissage auprès de la société Amir Coiffure qui devait se dérouler du 16 décembre 2021 au 27 août 2023. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment de ses bulletins de notes et des appréciations de ses professeurs tant dans les matières générales que dans les matières professionnelles, que l'intéressé a, au cours des semestres du 30 novembre 2021 au 6 juillet 2022 et du 29 août 2022 au 9 janvier 2023, fait preuve d'un absentéisme très important qu'il ne justifie pas en se bornant à faire état d'une phobie scolaire, et d'un grand manque d'implication et d'investissement dans sa formation. Dans un second temps, M. B... a été inscrit à un CAP restauration et a bénéficié d'un contrat d'apprentissage auprès de la société BBQ House à compter du 1er septembre 2023. Toutefois, le bulletin de notes du 1er semestre de l'année 2023/2024 révèle également un absentéisme important et un manque d'investissement de l'intéressé. Ainsi, M. B..., qui ne produit au demeurant qu'un seul bulletin de salaire, ne justifie pas du caractère réel et sérieux de sa formation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents (...) ".

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Var, qui a procédé à une analyse circonstanciée de la situation de M. B..., se serait cru tenu d'assortir le refus de titre de séjour opposé d'une obligation de quitter le territoire français.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse (...) ".

9. Le moyen tiré de ce que la demande de titre de séjour présentée par M. B..., qui a, au demeurant, bénéficié d'un délai de départ volontaire de trente jours, n'était pas manifestement infondée est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français.

10. En second lieu, la circonstance que M. B... soit entré sur le territoire français après avoir transité par l'Italie est également inopérante sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 5 décembre 2023 ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais d'instance :

12. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. B... doivent, dès lors, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Mothere.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2025, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 février 2025.

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bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01950
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : MOTHERE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-07;24ma01950 ?
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