Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Terrassement B... Travaux Publics (TRTP) a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 mai 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de régulariser sa situation en démontrant la valorisation des déchets déposés sur la parcelle cadastrée n° 909 B 31 sur le territoire de la commune de Marseille, ou, à défaut, en cessant l'activité d'installation de stockage de déchets inertes et en remettant le site en état, ou en déposant un dossier de demande d'enregistrement de cette installation, ainsi que de cesser l'apport et la réception de déchets sur le site, a suspendu son activité, et lui a infligé une amende administrative de 15 000 euros.
Par un jugement n° 2106290 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juin 2023, sous le n° 23MA01638, la SARL TRTP, représentée par Me Guichard, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 mai 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 mai 2021 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il viole le principe du contradictoire ;
- elle n'a pas procédé à une activité de stockage de déchets inertes ;
- le tribunal a commis une erreur de fait en estimant qu'elle avait le même dirigeant que la SAS Les carrières du Vallon ;
- elle justifie de la nature des déchets utilisés ;
- elle n'était pas tenue de produire l'autorisation d'urbanisme afférente au projet d'aménagement d'un parc photovoltaïque.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2024, la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête de la SARL TRTP.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la SARL TRTP ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chenal-Peter,
- et les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Les carrières du Vallon est propriétaire d'une parcelle cadastrée n° 909 B 31, située sur le site de l'ancienne carrière du Vallon à Marseille. Lors d'une visite inopinée sur cette parcelle, le 9 novembre 2020, un inspecteur de l'environnement a constaté la présence d'une installation de stockage de déchets inertes exploitée par la SARL TRTP et une gestion irrégulière de ces déchets. Par un arrêté du 11 mai 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de régulariser sa situation en démontrant la valorisation des déchets déposés sur cette parcelle, ou, à défaut, soit en cessant l'activité d'installation de stockage de déchets inertes et en remettant en état le site ou en déposant un dossier de demande d'enregistrement de cette installation, ainsi que de cesser l'apport et la réception de déchets sur le site, a suspendu son activité et lui a infligé une amende administrative de 15 000 euros. La SARL TRTP relève appel du jugement du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 11 mai 2021.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. / Elle peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages, l'utilisation des objets et dispositifs ou la poursuite des travaux, opérations, activités ou aménagements jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification, à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent. (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 du code précité : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". L'article L. 511-2 dudit code prévoit que : " Les installations visées à l'article L. 511-1 sont définies dans la nomenclature des installations classées établie par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport du ministre chargé des installations classées, après avis du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques. Ce décret soumet les installations à autorisation, à enregistrement ou à déclaration suivant la gravité des dangers ou des inconvénients que peut présenter leur exploitation. " Selon l'article 512-7 du même code : " I. - Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. (...) ".
3. D'autre part, selon l'article L. 541-1-1 du code de l'environnement : " Au sens du présent chapitre, on entend par : / Déchet : toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire ; (...) / Producteur de déchets : toute personne dont l'activité produit des déchets (producteur initial de déchets) ou toute personne qui effectue des opérations de traitement des déchets conduisant à un changement de la nature ou de la composition de ces déchets (producteur subséquent de déchets) ; / Détenteur de déchets : producteur des déchets ou toute autre personne qui se trouve en possession des déchets ; (...) ". L'article L. 541-2 de ce code prévoit que : " Tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d'en assurer ou d'en faire assurer la gestion, conformément aux dispositions du présent chapitre. / Tout producteur ou détenteur de déchets est responsable de la gestion de ces déchets jusqu'à leur élimination ou valorisation finale, même lorsque le déchet est transféré à des fins de traitement à un tiers. / Tout producteur ou détenteur de déchets s'assure que la personne à qui il les remet est autorisée à les prendre en charge ". L'article L. 541-3 du même code dispose, dans sa version applicable à la date de l'arrêté contesté, que : " I. - Lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour leur application, à l'exception des prescriptions prévues au I de l'article L. 541-21-2-3, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu'il encourt et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai de dix jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut lui ordonner le paiement d'une amende au plus égale à 15 000 euros et le mettre en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé. (...) ". L'article L. 541-4 de ce code précise que : " Les dispositions du présent chapitre s'appliquent sans préjudice des dispositions spéciales concernant notamment les installations classées pour la protection de l'environnement (...) ". Aux termes de l'article L. 541-7 du code précité : " I -Les personnes qui produisent, importent, exportent, traitent, collectent, transportent ou se livrent à des opérations de courtage ou de négoce des déchets tiennent à disposition de l'autorité administrative toutes informations concernant : / 1° La quantité, la nature et l'origine des déchets qu'elles produisent, remettent à un tiers ou prennent en charge ; / 2° La quantité de produits et de matières issus de la préparation en vue de la réutilisation, du recyclage ou d'autres opérations de valorisation de ces déchets ; / 3° Et, s'il y a lieu, la destination, la fréquence de collecte, le moyen de transport et le mode de traitement ou d'élimination envisagé pour ces déchets. (...) / II. - Sans préjudice du I du présent article, les personnes qui produisent, importent, exportent, traitent, collectent, transportent ou se livrent à des opérations de courtage ou de négoce des terres excavées et des sédiments tiennent à disposition de l'autorité administrative toutes informations concernant : / 1° La quantité, la nature, l'origine de ces terres excavées et sédiments et leur destination ; / 2° Et, s'il y a lieu, le moyen de transport et le mode de traitement ou d'élimination envisagé. : Sont concernés par le présent II les terres excavées et les sédiments dès lors qu'ils sont extraits de leur emplacement d'origine et ne sont pas utilisés sur le site même de leur excavation, qu'ils aient ou non le statut de déchet. (...) ". L'article L. 541-7-1 de ce code dispose que : " Tout producteur ou, à défaut, tout détenteur de déchets est tenu de caractériser ses déchets et en particulier de déterminer s'il s'agit de déchets dangereux ou de déchets qui contiennent des substances figurant sur la liste de l'annexe IV du règlement (UE) 2019/1021 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 concernant les polluants organiques persistants, ou qui sont contaminés par certaines d'entre elles ". Et aux termes de l'article L. 541-32 du même code : " Toute personne valorisant des déchets pour la réalisation de travaux d'aménagement, de réhabilitation ou de construction doit être en mesure de justifier auprès des autorités compétentes de la nature des déchets utilisés et de l'utilisation de ces déchets dans un but de valorisation et non pas d'élimination (...) ".
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
5. L'arrêté contesté vise les textes sur lesquels il se fonde, notamment les articles L. 512-7, L. 171-7, L. 541-2, L. 541-3, L 741-7 et L. 541-7-1 du code de l'environnement. La circonstance que cet arrêté vise des articles sans lien avec l'infraction est sans incidence sur sa légalité. Il mentionne également les circonstances de fait tirées notamment de ce que lors d'une visite d'inspection de l'ancienne carrière du Vallon, le 9 novembre 2020, l'inspecteur de l'environnement a constaté la présence d'une installation de stockage de déchets inertes exploitée par la société TRTP relevant des rubriques de la nomenclature des installations classées 2760 (installation de stockage de déchets à l'exclusion des installations visées à la rubrique 2720) et 2760-3 (installation de stockage de déchets inertes) alors que cette installation est exploitée sans l'enregistrement requis en application de l'article L. 512-7 du code de l'environnement et de ce que les constats effectués lors de cette visite mettent en évidence que la société TRTP réalise une gestion irrégulière des déchets en éliminant des déchets au sein d'une installation de stockage de déchets inertes non enregistrée, en ne justifiant pas de la traçabilité et de la caractérisation des déchets réceptionnés et éliminés sur le site, ce qui constitue des non conformités au regard des articles L. 541-2, L. 541-7 et L. 541-7-1 du code de l'environnement. L'arrêté en litige impose, par ailleurs, à la société TRTP le paiement d'une amende administrative de 15 000 euros afin de prévenir toute dérive de même nature et de compenser, en partie, les gains potentiellement générés. Ainsi, ces motifs suffisamment compréhensibles permettent à la société TRTP de comprendre les faits reprochés. En outre, la mention erronée de la société Les carrières du Vallon dans le dernier considérant de l'arrêté relatif à l'amende de 15 000 euros est une simple erreur de plume, sans incidence sur sa légalité, dès lors que le dispositif de cette décision se réfère sans ambiguïté à la société TRTP, que ce soit pour la mise en demeure ou pour l'amende administrative. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté litigieux doit être écarté.
6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la promesse unilatérale de bail emphytéotique a été signée, le 19 mai 2021, par M. A... B... en sa qualité de " président " et " gérant " de la société Les carrières du Vallon, lequel est également le gérant de la société TRTP, ainsi qu'il résulte des mentions du procès-verbal de cette visite et d'un courrier du 3 mars 2021 de la société requérante elle-même. De même, M. B... a signé la lettre du 10 novembre 2020 adressée à la DREAL, en qualité de président de la société Espace Recyclage Méditerranéen (ERM). Par suite, la société TRTP n'est pas fondée à soutenir qu'elle est sans lien avec les sociétés Les carrières du Vallon et ERM.
7. En troisième lieu, il résulte du procès-verbal de constat effectué le 9 novembre 2020 par un inspecteur de l'environnement que, lors d'une visite inopinée de la parcelle cadastrée n° 909 B 31 appartenant à la SAS Les carrières du Vallon, il a été constaté la présence de nombreux camions portant le logo TRTP. Le gérant de la société TRTP a indiqué aux inspecteurs que les déchets présents dans les camions et déchargés sur le site provenaient de chantiers sur lesquels sa société travaillait. Il a également déclaré que la société TRTP était venue décharger 3 600 m3 de terres en vue de l'aménagement d'un parking, qu'environ 8 500 m3 provenaient directement du site et qu'une autre zone d'apport correspondait à des terres issues d'un chantier de Bouygues Immobilier. Par un courriel du 4 décembre 2020, la société Les carrières du Vallon a indiqué avoir déposé une déclaration préalable pour l'aménagement de ces parkings, le 2 décembre 2020, postérieurement à la visite précitée. Toutefois, l'inspecteur a constaté que la description des travaux faite dans la déclaration ne correspondait pas aux constats effectués le 9 novembre 2020 et en a déduit que l'activité présente le jour de l'inspection devait être considérée comme une installation de stockage de déchets inertes exploitée par la SARL TRTP, relevant des rubriques de la nomenclature des installations classées, 2760 (installation de stockage de déchets à l'exclusion des installations visées à la rubrique 2720) et 2760-3 (installation de stockage de déchets inertes) alors que cette installation est exploitée sans l'enregistrement requis en application de l'article L. 512-7 du code de l'environnement et de ce que les constats effectués lors de cette visite mettaient en évidence que la société TRTP réalisait une gestion irrégulière des déchets en éliminant des déchets au sein d'une installation de stockage de déchets inertes non enregistrée, ne justifiant pas de la traçabilité et de la caractérisation des déchets réceptionnés et éliminés sur le site, ce qui constituait des non conformités vis-à-vis des articles L. 541-2, L. 541-7 et L. 541-7-1 du code de l'environnement.
8. La société TRTP conteste exercer une telle activité de stockage de déchets inertes et fait valoir qu'elle se borne à collecter et transporter des déchets pour le compte de tiers, en particulier la société ERM qui exerce légalement une telle activité sur ce site. Toutefois, il résulte du constat mentionné au point précédent que la société TRTP a bien réalisé, à l'aide de ses camions, un dépôt de déchets sur la parcelle cadastrée n° 909 B 31 qui constitue une installation de stockage de déchets mentionnée aux rubriques n° 2760 (installation de stockage de déchets à l'exclusion des installations visées à la rubrique 2720) et n° 2760-3 (installation de stockage de déchets inertes) de la nomenclature des installations classées annexée à l'article R. 511-9 du code de l'environnement, soumise à enregistrement, lequel n'a pas été réalisé. Par ailleurs, il résulte d'un jugement n° 2106289 du 11 mai 2023 du tribunal administratif de Marseille que la société ERM exerçait une activité de tri et recyclage de déchets sur ce site sans bénéficier de l'enregistrement requis en application de l'article L. 512-7 du code de l'environnement. Ainsi, la société TRTP doit être regardée comme une personne " intéressée " au sens de l'article L. 171-7 du code de l'environnement et le préfet des Bouches-du-Rhône a pu légalement la mettre en demeure soit de cesser son activité irrégulière d'installation de stockage de déchets et de remettre en état le site soit de déposer un dossier d'enregistrement de cette installation.
9. En quatrième lieu, il ressort du procès-verbal de la visite inopinée du 9 novembre 2020 que l'inspecteur de l'environnement a également constaté une gestion irrégulière des déchets, ne justifiant pas de la traçabilité des déchets réceptionnés et éliminés sur site en violation des articles L. 541-2, L. 541-7 et L. 541-7-1 du code de l'environnement. La société TRTP produit une étude de sol en date du 26 février 2020 effectuée par la société Remera, concluant à un dépassement des seuils prévus par l'arrêté ministériel du 12 décembre 2014 relatif aux conditions d'admission des déchets inertes dans les installations relevant des rubriques 2515, 2516, 2517 et dans les installations de stockage de déchets inertes relevant de la rubrique 2760 de la nomenclature des installations classées. Toutefois, la requérante verse également aux débats une étude sur la qualité des sols réalisée le 12 avril 2021 par la société de conseil Resolve, transmise au préfet des Bouches-du-Rhône par courrier du 3 mai 2021, dont les 8 sondages effectués ont permis de mettre en évidence la présence de remblais sur des épaisseurs d'un à cinq mètres de profondeur, et qui conclut à l'absence d'indice organoleptique défavorable et de dépassement des seuils inertes définis par l'arrêté du 12 décembre 2014 précité. Si cette étude ne permet pas d'établir la quantité et l'origine de ces terres excavées ainsi que la traçabilité des déchets réceptionnés et éliminés sur le site, elle justifie néanmoins du caractère inerte de ces déchets. Par ailleurs, par ce même courrier du 3 mai 2021, la société TRTP a justifié auprès du préfet des Bouches-du-Rhône de la cessation d'apports de déchets sur son site en produisant un procès-verbal de constat d'huissier réalisé le 6 avril 2021 constatant que le site ne présentait plus aucune activité et était fermé. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur d'appréciation en mettant en demeure la SARL TRTP de cesser les apports et la réception des déchets sur le site et d'apporter la justification de la nature des déchets utilisés et de réaliser les prélèvements et analyses nécessaires afin de déterminer les caractéristiques des déchets.
10. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 25 février 2021, la directrice régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) a informé le directeur de la société TRTP de ce qu'il encourait des sanctions administratives et qu'il avait la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai de dix jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix. Par ailleurs, la DREAL lui a transmis, par lettre du 25 mars 2021, la fiche de constat, une copie du procès-verbal des constats, du rapport de contrôle et de la lettre de transmission de ce rapport, ainsi que, par lettre du 29 mars 2021, le projet d'arrêté portant mise en demeure. La société requérante y a répondu par des courriers des 3 mars, 6 et 12 avril 2021 et 3 mai 2021. Il est constant que l'arrêté contesté n'a ni visé ni pris en compte la lettre du 3 mai 2021 et les pièces qu'elle contenait, en particulier le constat d'huissier du 6 avril 2021 et l'étude sur la qualité des sols du 12 avril 2021. Toutefois, cette seule circonstance, alors qu'au demeurant ces éléments ont été communiqués bien au-delà du délai imparti à la société, n'est pas de nature à caractériser une méconnaissance du principe du contradictoire à l'encontre de l'intégralité de l'arrêté en litige, mais simplement à l'encontre des seules mises en demeure qui lui ont été faites de cesser les apports et la réception des déchets sur le site, d'apporter la justification de la nature des déchets utilisés et de réaliser les prélèvements et analyses nécessaires afin de déterminer les caractéristiques des déchets, lesdites mises en demeure étant entachées d'illégalité, ainsi qu'il a été dit au point précédent.
11. En dernier lieu, la société requérante fait valoir que l'ensemble des travaux et aménagements de ce site ont pour objectif de réhabiliter cette ancienne carrière en y implantant une centrale photovoltaïque. Toutefois, si elle produit une promesse de bail emphytéotique signée le 19 mai 2021 entre la SAS Les carrières du Vallon et la société Réservoir Sun, celle-ci est postérieure à l'arrêté contesté et ne suffit pas à justifier de l'avancement d'un tel projet. Il en est de même du compte rendu de la réunion du 5 juin 2023 avec les services de la ville de Marseille, lequel souligne que ce projet nécessite une modification du plan local d'urbanisme intercommunal en cours de préparation, voire une révision, ainsi que le dépôt d'un permis d'aménager. Ainsi, la société TRTP ne démontre pas l'utilité de tels dépôts de déchets pour réaliser ce projet de centrale photovoltaïque, lequel reste encore hypothétique. C'est par suite sans commettre d'erreur d'appréciation ni d'erreur de droit que le préfet a estimé que l'apport et le stockage des déchets ne s'inscrivaient pas dans le cadre d'une action de valorisation au sens de l'article L. 541-32 du code de l'environnement.
12. Il résulte de tout ce qui précède, que la SARL TRTP est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'article 1er de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 mai 2021 en tant qu'il lui a demandé de cesser les apports et la réception des déchets sur le site, d'apporter la justification de la nature des déchets utilisés et de réaliser les prélèvements et analyses nécessaires afin de déterminer les caractéristiques des déchets.
Sur les frais liés au litige :
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SARL TRTP et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 1er de l'arrêté du 11 mai 2021 du préfet des Bouches-du-Rhône est annulé, en tant qu'il a mis en demeure la SARL TRTP de cesser les apports et la réception des déchets sur le site, de justifier de la nature des déchets entreposés et de réaliser les prélèvements et analyses nécessaires afin de déterminer leurs caractéristiques.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 mai 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la SARL TRTP la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL TRTP est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Terrassement B... Travaux Publics et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2025 où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 février 2025.
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N° 23MA01638
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