Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 2002968 du 31 octobre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2024, M. D..., représenté par Mes Dumas et Cauchois, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 31 octobre 2023 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- dans la mesure où c'est à tort que l'administration a estimé que E... devait être soumise aux impôts commerciaux, dès lors que son activité n'est pas lucrative et que sa gestion est désintéressée, il ne pouvait être imposé à raison de revenus distribués par l'association ;
- l'administration n'était pas fondée à faire application de la majoration pour manquement délibéré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Cauchois, représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. E..., qui a pour objet la formation aux travaux sous-marins, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale a estimé que sa gestion ne pouvait être regardée comme désintéressée et que, par conséquent, elle devait être assujettie aux impôts commerciaux. M. D..., qui a été regardé par l'administration comme le directeur de fait de E..., a quant à lui fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle à l'issue duquel il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2014 et 2015, résultant de l'imposition entre ses mains de revenus distribués par E.... Il fait appel du jugement du 31 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a ainsi été assujetti et des pénalités correspondantes.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article 108 du code général des impôts : " Les dispositions des articles 109 à 117 fixent les règles suivant lesquelles sont déterminés les revenus distribués par : 1° Les personnes morales passibles de l'impôt prévu au chapitre II du présent titre (...) ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 206 de ce code : " 1. (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, (...) toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif (...) ". Aux termes de l'article 261 du même code : " Sont exonérés de la TVA : / (...) 7. / 1° a. les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée. / (...) d. le caractère désintéressé de la gestion résulte de la réunion des conditions ci-après : / L'organisme doit, en principe, être géré et administré à titre bénévole par des personnes n'ayant elles-mêmes, ou par personne interposée, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation. / (...) l'organisme ne doit procéder à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfice, sous quelque forme que ce soit'; / les membres de l'organisme et leurs ayants droit ne doivent pas pouvoir être déclarés attributaires d'une part quelconque de l'actif sous réserve du droit de reprise des apports'(...) ".
3. Il résulte de l'instruction que l'administration a regardé comme des avantages occultes consentis à M. D... la prise en charge par E... d'un logement au titre de l'année 2015, pour un montant de 11 866 euros, ainsi que des remboursements de frais non justifiés à hauteur des montants respectifs de 27 385 euros en 2014 et 6 670 euros en 2015. Ces sommes ont été imposées entre les mains de M. D... en tant que revenus distribués.
4. D'une part, si E...était présidée par M. B..., qui résidait au Maroc, elle était gérée par M. D..., lequel était titulaire des procurations sur les comptes bancaires ouverts au nom de l'association, effectuait à son nom personnel des achats de l'association et s'est présenté dans ses relations avec le vérificateur comme son dirigeant de fait. En outre, il est constant que l'association a versé à M. D..., qui ne disposait d'aucun mandat et ne bénéficiait pas d'un contrat de travail, des rémunérations s'élevant respectivement à 38 423 euros et 53 966 euros au titre des années 2014 et 2015. Par ailleurs, le requérant ne conteste pas sérieusement les constatations du vérificateur quant à la mise à sa disposition d'un logement financé en tout ou pour partie par l'association à compter du mois de juillet 2015 en se bornant à faire valoir, sans d'ailleurs l'établir par les pièces produites, que les maisons d'habitation qui ont été successivement prises en location ont également servi à loger d'autres salariés ainsi que des bénévoles et il ne conteste pas avoir disposé d'un véhicule pris en crédit-bail par l'association et utilisé personnellement le soir et le week-end. D'autre part, M...est par ailleurs dirigeant d'une société de droit marocain, la société A..., et actionnaire de la fiducie A... Offshore, dont le siège est à Gibraltar, lesquelles ont donné du matériel en location à E... lors de sa création, une somme globale de 112 017 euros ayant été versée à ce titre depuis 2013. Il n'est par ailleurs pas contesté que M. B... a indiqué, au cours d'auditions dont il a fait l'objet dans le cadre d'une procédure pénale, qu'une somme de 12 856 euros versée par la société A... à l'association en 2014 correspondait au règlement d'une formation et que lui-même est rémunéré par l'association au titre de ses prestations en tant qu'instructeur. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la gestion de E... ne pouvait être regardée comme présentant un caractère désintéressé. Dans ces conditions, c'est à juste titre que l'administration a estimé que E... était passible de l'impôt sur les sociétés au titre de la période en litige et a regardé, par conséquent, les avantages consentis à M. D... et non comptabilisés comme des revenus distribués entre ses mains.
Sur les pénalités :
5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
6. Pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré aux suppléments d'impôt mis à la charge de M. D..., l'administration a relevé que l'intéressé, compte tenu des relations de E... avec les entités dont son président est dirigeant ou associé et de l'importance des rémunérations qu'il a lui-même perçues et des avantages en nature qui ont été consentis et alors qu'il résulte sans ambiguïté du procès-verbal de l'assemblée générale de l'association du 17 décembre 2013 qu'elle a été avertie par le cabinet d'expertise comptable des risques d'assujettissement aux impôts commerciaux résultant de ses modalités de gestion, ne pouvait ignorer, en tant que membre du conseil d'administration et directeur de fait, que l'association était passible de l'impôt sur les sociétés. En se fondant sur ces éléments, l'administration doit être regardée comme établissant l'intention délibérée de M. D... de se soustraire à l'impôt et, par suite, le bien-fondé de la pénalité en litige.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur les frais liés au litige :
8. En premier lieu, aucun dépens n'ayant été exposé dans cette instance, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D... tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.
9. En second lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande M. D... au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Duchon-Doris, président de la Cour,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 janvier 2025.
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N° 24MA00053