Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... et A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.
Par un jugement n° 1905048 du 12 avril 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 27 avril 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Canis, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1905048 du 12 avril 2023 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'ils justifiaient de la rectification du prix d'acquisition des actions de la D... pour l'application du b) de l'article 74-0 H de l'annexe II au code général des impôts ;
- le prix de cession des actions de la D... doit être fixé au montant réellement payé en application du 1. de l'article 150-0 D du code général des impôts ;
- ils sont fondés à se prévaloir du 14. de l'article 150-0 D du code général des impôts, compte tenu de l'existence d'une convention de garantie de passif.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Platillero,
- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,
- et les observations de Me Canis, pour M. et Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces, à l'issue duquel une proposition de rectification du 23 juin 2011 leur a été notifiée. Au terme de la procédure, ils ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2008, assorties des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 12 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et majorations, de ces impositions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. M. et Mme B... font valoir que le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'ils justifiaient de la rectification du prix d'acquisition des actions de la D...pour l'application du b) de l'article 74-0 H de l'annexe II au code général des impôts. Toutefois, dès lors que le tribunal a jugé que l'existence même d'une convention de garantie dans l'acte de cession ou annexée à ce dernier n'était pas établie au sens du a) du même article, il n'était pas tenu de répondre à ce moyen. M. et Mme B... ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts : " I. 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que des articles 150 UB et 150 UC, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu (...) ". Aux termes de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation (...) 14. Par voie de réclamation présentée dans le délai prévu au livre des procédures fiscales en matière d'impôt sur le revenu, le prix de cession des titres ou des droits retenu pour la détermination des gains nets mentionnés au 1 du I de l'article 150-0 A est diminué du montant du versement effectué par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession par laquelle le cédant s'engage à reverser au cessionnaire tout ou partie du prix de cession en cas de révélation, dans les comptes de la société dont les titres sont l'objet du contrat, d'une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou d'une surestimation de valeurs d'actif figurant au bilan de cette même société à la date de la cession. Le montant des sommes reçues en exécution d'une telle clause de garantie de passif ou d'actif net diminue le prix d'acquisition des valeurs mobilières ou des droits sociaux à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain net de cession des titres concernés ". Aux termes de l'article 74-0 H de l'annexe II à ce code : " Pour l'application des dispositions du 14 de l'article 150-0 D du code général des impôts, les contribuables qui demandent la décharge ou la réduction de l'imposition initiale, résultant de l'imputation sur le prix de cession du reversement de tout ou partie de son montant effectué en exécution d'une clause de garantie de passif ou d'actif net, doivent notamment fournir à l'appui de leur réclamation les pièces justificatives suivantes : a) Copie de la convention figurant dans l'acte de cession ou annexée à ce dernier mentionnant les termes de la clause de garantie de passif ou d'actif net ; b) Copie de tout document de nature à établir la réalité, la date et le montant du versement effectué en exécution de la convention ainsi que son caractère définitif. ".
5. M. et Mme B... ont cédé, par acte sous-seing privé du 10 juin 2008, 1 493 actions qu'ils détenaient dans le capital de la société anonyme Soja à la société par actions simplifiée Antipodes, pour un montant de 2 000 000 euros. M. et Mme B... n'ayant déclaré aucune plus-value relative à cette cession au titre de l'année 2008, l'administration fiscale, par une proposition de rectification du 23 juin 2011, a soumis à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux la plus-value réalisée à l'occasion de la cession sur le fondement de l'article 150-0 D du code général des impôts, pour un montant fixé en dernier lieu à 324 585 euros, compte tenu du prix d'acquisition des parts. M. et Mme B... contestent les impositions en litige en faisant valoir que, postérieurement à la cession, la E...a déclenché une garantie de passif qui lui était consentie, les parties à la cession ayant conclu un protocole transactionnel au terme duquel le prix de cession a été réduit de 760 000 euros, l'opération s'étant ainsi traduite par une moins-value de 435 415 euros.
6. D'une part, pour l'application des dispositions du 1. de l'article 150-0 D du code général des impôts, la date à laquelle la cession à titre onéreux de parts sociales d'une société générant une plus-value imposable doit être regardée comme réalisée est celle à laquelle s'opère le transfert de propriété, indépendamment des modalités de paiement et des événements postérieurs à ce fait générateur. Le transfert de propriété a lieu, sauf dispositions contractuelles contraires, à la date de la vente, c'est-à-dire à la date où un accord intervient sur la chose et le prix.
7. Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., la plus-value en litige ne devait pas être déterminée par rapport au prix de cession réellement payé, mais par rapport à celui stipulé dans l'acte de cession, la circonstance que le cessionnaire ne s'est pas acquitté de l'intégralité du prix prévu à l'acte de cession étant en elle-même sans incidence sur le montant de la plus-value imposable en application du 1. de l'article 150-0 D du code général des impôts.
8. D'autre part, en vertu des dispositions de l'article 74-0 H de l'annexe II au code général des impôts citées au point 4, les contribuables doivent joindre à l'appui de leur réclamation la copie de la convention, figurant dans l'acte de cession ou annexée à ce dernier et mentionnant les termes de la clause de garantie de passif, ainsi que la copie de tout document permettant d'établir la réalité, la date et le montant du versement effectué, ainsi que son caractère définitif.
9. Il résulte de l'instruction que l'acte de cession des actions de la D... du 10 juin 2008 ne contient aucune clause de garantie de passif. La convention de garantie d'actif et de passif produite n'est pas datée et n'a pas été enregistrée. La seule circonstance que le protocole transactionnel du 10 janvier 2011 au terme duquel le prix de cession a été réduit de 760 000 euros fasse état d'une garantie de passif qui aurait été signée le même jour que l'acte de cession, sans même d'ailleurs mentionner les termes qu'aurait revêtu cette clause, ne permet pas d'établir que la convention de garantie de passif aurait été effectivement annexée à l'acte, dans lequel elle ne figure pas et qui n'y fait aucune référence. Dans ces conditions, à défaut pour M. et Mme B... d'établir que la cession des parts de la D... le 10 janvier 2008 était assortie à cette date d'une convention de garantie de passif ou d'actif, ils ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions du 14. de l'article 150-0 D du code général des impôts, sans qu'ils puissent utilement se prévaloir de la réalité de la rectification du prix d'acquisition, dès lors que l'existence même de la clause de garantie n'est pas établie.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande. Leurs conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge, en droits et majorations, des impositions en litige doivent dès lors être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2025, où siégeaient :
- M. Duchon-Doris, président de la Cour,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 janvier 2025.
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N° 23MA01055