Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association syndicale autorisée du canal de Ventavon Saint-Tropez a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer, avant dire-droit, une expertise aux frais de l'Etat aux fins d'évaluer les travaux nécessaires à la réfection du canal domanial de Ventavon aux normes en vigueur et les coûts afférents, et d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la préfète des Hautes-Alpes sur sa demande du 6 janvier 2021 tendant à la réalisation de travaux de réfection du canal domanial de Ventavon.
Par un jugement n° 2103811 du 23 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 mai 2023 et 14 mars 2024, l'association syndicale autorisée du canal de Ventavon Saint-Tropez, représentée par la SCP Lesage Berguet Gouard-Robert, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2103811 du 23 mars 2023 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la préfète des
Hautes-Alpes sur sa demande du 6 janvier 2021 tendant à la réalisation de travaux de réfection du canal domanial de Ventavon ;
3°) d'enjoindre à l'État d'exécuter toutes études et tous travaux nécessaires à la réfection du canal domanial de Ventavon, dans un délai de six mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il ne résulte ni des statuts, ni des lois du 18 juillet 1881 et du 26 août 1919, que l'ASA était responsable de l'entretien et de l'exploitation du canal à ses frais ;
- eu égard au principe de spécialité qui régit l'action des établissements publics, elle ne dispose pas de compétence d'ordre général pour procéder aux travaux qui s'imposent ;
- la gestion du tronçon historique relève de l'Etat et l'obligation d'entretien ne concerne que la partie du canal réalisée en aval de ce tronçon, dont l'ASA est devenue propriétaire au titre de l'article 4 des statuts de 1924 ;
- l'administration a une obligation d'entretien des ouvrages dont elle est propriétaire et l'Etat a manqué à ses obligations.
Par un mémoire enregistré le 26 février 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens d'appel ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 avril 2024, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi du 20 juillet 1881 ayant pour objet la déclaration d'utilité publique et la concession du canal de Ventavon ;
- la loi du 26 août 1919 relative à l'achèvement du canal de Ventavon ;
- l'ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004 ;
- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Revert ;
- et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Berguet, représentant l'ASA du canal de Ventavon
Saint-Tropez.
Une note en délibéré, présentée par Me Berguet pour l'ASA du canal de Ventavon
Saint-Tropez, a été enregistrée le 11 novembre 2024
Considérant que :
1. Le 6 janvier 2021, le président de l'association syndicale autorisée (ASA) du canal de Ventavon Saint-Tropez a demandé à la préfète des Hautes-Alpes de mettre en œuvre l'ensemble des décisions et mesures indispensables à la réfection du canal domanial de Ventavon. Par un jugement du 23 mars 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de l'ASA du canal de Ventavon Saint-Tropez tendant, d'une part, à la désignation d'un expert judiciaire, d'autre part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite rejetant sa demande de réalisation de travaux et, enfin, à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de procéder à ses frais à la réfection du canal domanial de Ventavon, dans un délai de six mois et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Compte tenu de son argumentation devant la Cour, l'ASA doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses deux dernières conclusions.
2. Certes, il résulte de la loi du 26 août 1919 relative à l'achèvement du canal de Ventavon que l'Etat est depuis cette date propriétaire de la partie du canal de Ventavon, dite canal principal ou canal domanial, comprise entre les communes de Valserres et de la Saulce. Si par cette même loi, l'association syndicale des propriétaires arrosants, créée le 20 juin 1880, et chargée par la loi du 20 juillet 1881 du maintien en bon état et à ses frais, du canal principal, des canaux secondaires et de leurs dépendances, a été dissoute et devait être remplacée par une autre association syndicale, celle-ci ne s'est vue transférer par cette loi que la concession du débit d'eaux ainsi que la propriété et la gestion des ouvrages secondaires. Par ailleurs, en vertu de ses statuts du 6 octobre 1924, l'ASA du canal de Ventavon n'était chargée que de l'entretien, l'exploitation et la distribution des eaux du canal dans ses parties alors en cours d'achèvement, et le cas échéant des travaux d'amélioration et d'extension, et n'était tenue de participer s'il y avait lieu qu'aux dépenses d'achèvement de ces ouvrages. D'ailleurs, par une convention du 22 mai 2003, l'Etat a demandé à l'ASA, qui l'a alors accepté, de prendre à sa charge à titre temporaire, pour une durée d'une année, renouvelable une seule fois, la gestion et l'entretien du canal principal, dans l'attente de la mise en place d'une " structure adéquate ".
3. Mais aux termes de l'article 2 des statuts, adoptés par délibération du 11 avril 2017 et approuvés par le préfet le 17 juin 2017, de l'ASA du canal de Ventavon Saint-Tropez, laquelle résulte de la fusion de l'ASA du canal de Ventavon et de l'ASA Saint-Tropez : " l'association syndicale a pour but et missions : / La conservation dans le bon état des ouvrages hydrauliques et qui à défaut, pourraient nuire aux propriétés comprises dans le périmètre, / l'entretien, la modernisation et la construction de tout ouvrage nécessaire à l'usage de la dotation d'eau ".
Aux termes de l'article 3 des mêmes statuts : " Le Canal de Ventavon Saint-Tropez dessert tout ou partie des communes de Lettret, Tallard, La Saulce, Lardier, Vitrolles, Ventavon, Monêtier-Allemont, Upaix, Le Poët, Sisteron et Valernes ". Il résulte de ces dispositions, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elles auraient été précédées de dispositions contraires depuis l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, sans qu'y fasse obstacle le principe de spécialité applicable à cet établissement public, que l'ASA, sans être pour autant devenue propriétaire du canal domanial, s'est donnée pour mission, notamment, d'entretenir et de conserver en bon état les ouvrages hydrauliques nécessaires à l'usage de la dotation d'eau des propriétés comprises dans son périmètre, dont le canal domanial. Si ce canal assure depuis les années 1920 non seulement l'alimentation en eau d'irrigation, mais également l'alimentation de l'usine hydro-électrique de " Fort la Saulce ", et s'il dessert, depuis des dizaines d'années, le périmètre de l'ASA des digues et conquêtes de Tallard, ni cette circonstance, ni l'ordonnance du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, qui n'impose pas que les ouvrages gérés par une ASA soient exclusivement affectés à la mission de service public dont elle est par ailleurs investie, ne sont de nature à dispenser l'ASA de son obligation statutaire d'entretien et de maintien en bon état du canal. Par suite, en refusant de faire droit à sa demande tendant à ce que soient réalisés des travaux de mise en sécurité et de rénovation du canal domanial, qui sont au nombre des travaux incombant statutairement à cette ASA, la préfète des Hautes-Alpes n'a pas commis d'illégalité.
4. Il résulte de tout ce qui précède que l'ASA du canal de Ventavon Saint-Tropez n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite refusant de mettre en œuvre l'ensemble des décisions et mesures indispensables à la réfection du canal domanial de Ventavon et à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de procéder aux études et travaux sollicités. Sa requête d'appel doit donc être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'ASA du canal de Ventavon Saint-Tropez est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association syndicale autorisée du canal de Ventavon Saint-Tropez et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Alpes.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, où siégeaient :
- M. Marcovici, président
- M. Revert, président assesseur,
- M. Martin, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 11 décembre 2024.
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N° 23MA01155