La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2024 | FRANCE | N°23MA01951

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 03 décembre 2024, 23MA01951


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... et la société anonyme (SA) Carma ont demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision par laquelle la commune de Mougins a implicitement rejeté leur réclamation indemnitaire, d'autre part, de condamner, à titre principal, cette commune et la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, et, à titre subsidiaire, la société des autoroutes Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes (Escota), à verser, à M. B..., la somme de 18 918,59 euros, et,

à la SA Carma, la somme de 30 350,30 euros, assorties des intérêts au taux légal et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et la société anonyme (SA) Carma ont demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision par laquelle la commune de Mougins a implicitement rejeté leur réclamation indemnitaire, d'autre part, de condamner, à titre principal, cette commune et la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, et, à titre subsidiaire, la société des autoroutes Esterel Côte-d'Azur Provence Alpes (Escota), à verser, à M. B..., la somme de 18 918,59 euros, et, à la SA Carma, la somme de 30 350,30 euros, assorties des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, et, enfin, de mettre à la charge de la commune de Mougins et de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement n° 2001839 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Nice a condamné la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins à verser la somme de 16 084,09 euros, à M. B..., et la somme de 30 350,30 euros, à la SA Carma, avec intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2020 et capitalisation des intérêts échus au 28 avril 2021, à cette date et à chaque échéance annuelle. Le tribunal administratif de Nice a également mis à la charge de cette communauté d'agglomération la somme globale de 1 000 euros à verser à M. B... et à la SA Carma au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, avant de rejeter le surplus des conclusions des parties.

Procédures devant la Cour :

I. Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés, sous le n° 23MA01951, le 26 juillet 2023, et les 3 juin et 17 juillet 2024, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, représentée, en dernier lieu, par Me Pierson, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 30 mai 2023 en ce qu'il la reconnaît responsable des préjudices subis par M. B... et la SA Carma consécutivement aux évènements climatiques du 3 octobre 2015 ;

2°) à titre principal, de rejeter les conclusions présentées à son encontre par M. B... et la SA Carma devant le tribunal administratif de Nice, et de condamner ces derniers à lui restituer les sommes qu'elle leur a versées en exécution du jugement attaqué ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter sa responsabilité à une part n'excédant pas 30 % des préjudices allégués par M. B... et la SA Carma, de réduire le quantum de ces préjudices à de plus justes proportions, et de condamner la société Escota à la relever et la garantir de toute condamnation en principal, intérêt et frais, article L. 761-1 du code de justice administrative et dépens qui seraient mis à sa charge au bénéfice de M. B... et de la SA Carma ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, de juger la société Escota responsable des préjudices subis par M. B... et la SA Carma, et de condamner ces deux derniers à lui restituer les sommes qu'elle leur a versées en exécution du jugement attaqué ;

5°) en tout état de cause, de mettre à la charge, d'une part, de tout succombant, une somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, d'autre part, de M. B... et de la SA Carma, une somme de 13 euros, au titre du droit de plaidoirie, en application des dispositions des articles L. 723-3, R. 723-26-1 et R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale.

Elle soutient que :

Sur la compétence de la Cour :

- la Cour est compétente pour juger du présent litige par application des dispositions des articles R. 221-7 et R. 322-1 du code de justice administrative ;

Sur la recevabilité de sa requête :

- elle justifie d'un intérêt pour agir ;

- par application des dispositions de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, son appel n'est pas tardif ;

- si, dans son mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2024, la société Escota fait valoir que les demandes qu'elle forme à son encontre sont irrecevables car nouvelles en cause d'appel, M. B... et la SA Carma ont, dans leur mémoire du 7 décembre 2023, sollicité, à titre subsidiaire, la condamnation de cette société à les indemniser de leur entier préjudice et la Cour sera donc amenée à se prononcer sur sa responsabilité ;

Sur le fond :

- le tribunal administratif de Nice a commis des erreurs de droit et de fait en jugeant la demande de première instance de M. B... recevable et, dans ces conditions, excédant les limites de son office, il s'est fait administrateur :

. aucune réclamation indemnitaire préalable ne lui a été adressée ou même transmise ; la commune de Mougins ayant expressément rejeté, par l'intermédiaire de son assureur et par un courrier du 23 juin 2017, la demande de la SA Carma du 23 juin 2017, et ayant de la sorte refusé de transmettre cette demande à l'autorité supposée compétente, cette commune ne pouvait pas, conformément à la jurisprudence, faire application des dispositions de l'article L. 114-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

. la décision portant rejet de la seconde demande indemnitaire préalable qui a été présentée à la commune de Mougins le 30 décembre 2019 était une décision confirmative de la première ;

- le tribunal administratif de Nice a entaché son jugement d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation en reconnaissant sa responsabilité alors que les intempéries du 3 octobre 2015 ont présenté le caractère d'un évènement de force majeure et que cette force majeure est un cas d'exonération totale de la responsabilité de la puissance publique ;

- à titre principal :

. il n'est pas établi de lien de causalité entre l'ouvrage public et les dommages allégués ; il est encore moins démontré que cet ouvrage aurait causé une aggravation des préjudices de M. B... et de son assureur ;

. sa responsabilité ne peut être utilement recherchée dès lors qu'en application des dispositions des articles R. 122-5 et R. 122-5-1 du code de la voirie routière, l'ouvrage relève de la responsabilité de la société Escota ; en tout état de cause, si la Cour devait estimer la demande de première instance recevable et fondée, elle devra condamner la société Escota à la garantir des condamnation dont elle ferait l'objet ;

. M. B... ayant présenté des conclusions contre la commune de Mougins le 18 juillet 2022, pour des faits antérieurs au 1er janvier 2018, sa responsabilité ne peut pas être engagée au regard de la prescription prévue à l'alinéa 1er de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

. les contrats d'assurance couvrent les effets des catastrophes naturelles, comme le rappelle l'alinéa 1er de l'article L. 125-1 du code des assurances ; un arrêté ministériel du 7 octobre 2015 ayant constaté l'état de catastrophe naturelle à la commune de Mougins, en sa qualité d'assureur de M. B..., la SA Carma doit donc prendre en charge la totalité des dommages que les inondations ont causé chez celui-ci ;

. le caractère de catastrophe naturelle l'exonère totalement de l'indemnisation des dommages qui seraient dû à cette catastrophe ;

. la SA Carma et M. B... devront être condamnés à lui restituer les sommes réglées en exécution de la condamnation prononcée par le tribunal administratif de Nice ;

- à titre subsidiaire :

. sa responsabilité ne peut être engagée dès lors qu'aucun ouvrage public n'a été défaillant en l'espèce ; en tout état de cause, l'expertise de la société Polyexpert lui est inopposable dès lors qu'elle n'y a pas participé, ni même n'y a été conviée ;

. en toute hypothèse, elle doit être exonérée de sa responsabilité dès lors que l'événement causal relève de la force majeure ;

- à titre infiniment subsidiaire, et à supposer que, par extraordinaire, sa responsabilité soit engagée, le quantum des préjudices devra être réduit à de plus justes proportions :

. aucun chiffrage contradictoire n'a eu lieu ; les dommages ont été évalués unilatéralement par l'expert de M. B... et de la SA Carma ;

. la vétusté ayant été évaluée à la somme de 8 861,40 euros, pour les dommages garantis, et à 1 233,82 euros, pour les dommages non garantis, ces sommes devront donc être retranchées des indemnités qui seraient, le cas échéant, allouées à la SA Carma et à M. B... ;

. si la Cour devait considérer que l'ouvrage litigieux a contribué à aggraver les dommages causés à la propriété de M. B..., elle ne devra supporter qu'une part de responsabilité qui ne saurait excéder 30 % ;

- ayant nécessairement une part de responsabilité dans la survenance des dommages dont se prévalaient M. B... et la SA Carma, la société Escota devra être condamnée à la relever et la garantir de toute condamnation en principal, intérêt et frais, article L. 761-1 du code de justice administrative et dépens qui seraient mis à sa charge.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 décembre 2023 et 6 septembre 2024, M. B... et la société anonyme (SA) Carma, représentées par Me Reina, concluent :

- à titre principal, au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué, à ce que la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins soit condamnée à verser, la somme de 18 918,59 euros, à M. B..., et la somme de 30 350,30 euros, à la SA Carma, outre intérêts de droit à compter de la " mise en demeure " du 1er avril 2019 et capitalisation en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil, et à ce qu'une somme de 3 000 euros, à verser à chacun d'eux, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens soient mis à la charge de cette communauté d'agglomération ;

- à titre subsidiaire, à ce que la société Escota soit condamnée à verser, cette somme de 18 918,59 euros, à M. B..., et cette somme de 30 350,30 euros, à la SA Carma, outre intérêts de droit avec capitalisation, en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

Ils font valoir que :

- le jugement attaqué du tribunal administratif devra être confirmé d'autant que la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins n'apporte pas la preuve technique de l'absence de lien de causalité entre l'ouvrage public en cause et le désordre, et que, comme l'indique la société Escota dans son mémoire en défense, cet ouvrage relève de la seule propriété de cet établissement public de coopération intercommunale en raison de sa fonction hydraulique de captage des eaux pluviales et de ruissellement ;

- la demande de remboursement formulée à leur encontre par la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, dans son dernier mémoire, doit être rejetée dès lors que cette dernière n'a pas exécuté le jugement attaqué ;

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif de Nice, M. B... ne saurait supporter le montant de la franchise contractuelle dont l'opposition résulte exclusivement de la mobilisation des garanties du contrat d'assurance souscrit auprès de la SA Carma en raison des dommages aggravés par la présence de l'ouvrage public litigieux engageant la responsabilité de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins ;

- dans l'hypothèse où la Cour devrait considérer qu'en application des dispositions des articles R. 122-5 et suivants du code de la voirie routière, l'ouvrage défectueux relèverait de la responsabilité de la société Escota, il conviendrait de condamner cette dernière à leur verser les indemnités qu'ils sollicitent.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2024, la société des autoroutes Esterel-Côte d'Azur-Provence-Alpes (Escota), représentée par Me Pujol, conclut à sa mise hors de cause et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les demandes dirigées à son encontre en appel sont nouvelles et, à ce titre, irrecevables ;

- toute demande dirigée à son encontre est prescrite ;

- l'ouvrage en cause dépend de l'unique responsabilité de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins qui ne peut donc solliciter sa garantie alors que sa responsabilité n'est pas démontrée.

Par une ordonnance du 9 septembre 2024, la clôture de l'instruction, en dernier lieu fixée au 9 septembre 2024, a été reportée au 27 septembre 2024, à 12 heures.

II. Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés, sous le n° 23MA01957, les 27 juillet 2023 et 17 juillet 2024, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, représentée par Me Pierson, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 mai 2023 en ce qu'il la reconnaît responsable des préjudices subis par M. B... et la SA Carma consécutivement aux évènements climatiques du 3 octobre 2015 ;

2°) à titre principal, de condamner M. B... et la SA Carma à lui restituer les sommes qu'elle leur a versées en exécution de ce jugement ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter sa responsabilité à une part n'excédant pas 30 % des préjudices allégués par M. B... et la SA Carma, et de condamner la société Escota à la relever et la garantir de toute condamnation en principal, intérêt et frais, article L. 761-1 du code de justice administrative et dépens qui seraient mis à sa charge au bénéfice de M. B... et de la SA Carma ;

4°) à titre encore plus subsidiaire, de juger la société Escota responsable des préjudices subis par M. B... et la SA Carma, et de condamner ces deux derniers à lui restituer les sommes qu'elle leur a versées en exécution du jugement attaqué ;

5°) en tout état de cause, de mettre à la charge de tout succombant une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si, dans son mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2024, la société Escota fait valoir que les demandes qu'elle forme à son encontre sont irrecevables car nouvelles en cause d'appel, M. B... et la SA Carma ont, dans leur mémoire du 7 décembre 2023, sollicité, à titre subsidiaire, la condamnation de cette société à les indemniser de leur entier préjudice et la Cour sera donc amenée à se prononcer sur sa responsabilité ;

- à titre principal, il n'est pas établi de lien de causalité entre l'ouvrage public et les dommages allégués ; il est encore moins démontré que cet ouvrage aurait causé une aggravation des préjudices de M. B... et de son assureur ; ces derniers devront être condamnés à lui restituer les sommes réglées en exécution de la condamnation prononcée par le tribunal administratif de Nice ;

- à titre subsidiaire, si la Cour devait considérer que l'ouvrage litigieux a contribué à aggraver les dommages causés à la propriété de M. B..., elle ne devra supporter qu'une part de responsabilité qui ne saurait excéder 30 % ;

- ayant nécessairement une part de responsabilité dans la survenance des dommages dont se prévalaient M. B... et la SA Carma, la société Escota devra être condamnée à la relever et la garantir de toute condamnation en principal, intérêt et frais, article L. 761-1 du code de justice administrative et dépens qui seraient mis à sa charge.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2024, la société des autoroutes Esterel-Côte d'Azur-Provence-Alpes (Escota), représentée par Me Pujol, conclut à sa mise hors de cause et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les demandes dirigées à son encontre sont nouvelles en appel et, à ce titre, irrecevables ;

- toute demande dirigée à son encontre est prescrite ;

- l'ouvrage en cause dépend de l'unique responsabilité de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins qui ne peut donc solliciter sa garantie alors que sa responsabilité n'est pas démontrée.

La procédure a été communiquée à M. B... et à la SA Carma, qui n'ont pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 18 juillet 2024, la clôture de l'instruction, en dernier lieu fixée au 19 juillet 2024, a été reportée au 19 août 2024, à 12 heures.

Vu les autres pièces des deux dossiers.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de la voirie routière ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lombart,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations Me Andre-Cianfarani, substituant Me Reina, représentant M. B... et la SA Carma, et celles de Me Alimoussa, substituant Me Pujol, représentant la société Escota.

Une note en délibéré, présentée pour la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, par Me Pierson, a été enregistrée le 20 novembre 2024, dans l'instance enregistrée sous le n° 23MA01951.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est propriétaire d'une maison d'habitation, dénommée " Le Mas de L'Oulivie ", qui est située 131 chemin de la Garrigue, sur le territoire de la commune de Mougins. Le 3 octobre 2015, à la suite de fortes intempéries, des eaux de ruissellement charriant des pierres et des gravats se sont déversées sur cette propriété. Estimant qu'en acheminant et en déversant ces eaux, pierres et gravats, le tunnel de collecte et d'évacuation des eaux pluviales qui se trouve au droit de la propriété de M. B... a aggravé les conséquences dommageables de ces intempéries, le tribunal administratif de Nice a, par un jugement du 30 mai 2023, condamné la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, qu'il a jugé gardienne de cet ouvrage, qu'il a qualifié d'ouvrage public, à verser la somme de 16 084,09 euros, à M. B..., et la somme de 30 350,30 euros, à son assureur, la SA Carma, assorties des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2020 et de la capitalisation des intérêts échus au 28 avril 2021, à cette date, et à chaque échéance annuelle, en réparation des préjudices subis du fait de l'inondation de cette propriété. Par les deux requêtes susvisées, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins relève appel de ce jugement. M. B... et la SA Carma doivent être regardés comme demandant, par la voie de l'appel incident, l'annulation de ce même jugement en tant qu'il a limité l'indemnité allouée à M. B... à la somme de 16 084,09 euros.

Sur la jonction :

2. Les deux requêtes susvisées, enregistrées sous les nos 23MA01951 et 23MA01957, sont présentées par la même appelante et sont dirigées contre le même jugement. Par suite, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance présentée par M. B... et la SA Carma :

S'agissant de l'intérêt pour agir de M. B... et de la SA Carma :

3. D'une part, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins faisait valoir devant les premiers juges que M. B... ne disposait pas d'un intérêt à agir au motif que les inondations qui ont eu lieu le 3 octobre 2015 auraient relevé d'un évènement classé " catastrophe naturelle " et que le tunnel de collecte et d'évacuation des eaux pluviales qui se trouve au droit de sa propriété ne présentait aucune défaillance. A les supposer même établies, de telles circonstances n'auraient pas eu pour effet de priver M. B... d'un intérêt pour agir afin d'obtenir l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. (...) ". Il appartient à l'assureur qui demande à bénéficier de la subrogation prévue par ces dispositions législatives de justifier par tout moyen du paiement d'une indemnité à son assuré, de l'encaissement effectif de l'ensemble des sommes qu'il a réglées en application du contrat d'assurance et de fournir des explications précises et circonstanciées mettant le juge à même d'apprécier la correspondance entre les diverses sommes exposées et les prétentions indemnitaires au titre de la subrogation. Cette preuve doit être apportée au plus tard à la date de la clôture de l'instruction.

5. En l'espèce, contrairement à ce que faisait également valoir devant les premiers juges, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, le contrat d'assurance-habitation conclu par M. B... et la SA Carma le 1er septembre 2009 a été versé aux débats et cette société d'assurance démontre avoir versé à M. B... la somme de de 30 350,30 euros. La SA Carma justifie, ce faisant, qu'elle dispose d'un intérêt pour agir.

S'agissant de la liaison du contentieux à l'égard de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins :

6. D'une part, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ". La condition tenant à l'existence d'une décision de l'administration doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l'administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle.

7. D'autre part, aux termes de l'article L. 114-2 du code des relations entre le public et l'administration, " Lorsqu'une demande est adressée à une administration incompétente, cette dernière la transmet à l'administration compétente et en avise l'intéressé. " Aux termes de l'article L. 114-3 du même code : " Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite de rejet court à compter de la date de réception de la demande par l'administration initialement saisie (...) ". Et aux termes de l'article L. 231-4 du même code : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : / (...) 2° Lorsque la demande (...) présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif ; / 3° Si la demande présente un caractère financier (...) ".

8. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 30 décembre 2019, M. B... et la SA Carma ont demandé au maire de Mougins l'indemnisation des préjudices qu'ils estiment avoir subis consécutivement aux inondations causées par les intempéries du 3 octobre 2015 et qui auraient été aggravés par la défaillance du tunnel de collecte et d'évacuation des eaux pluviales situé au droit de la propriété de M. B.... Dès lors qu'il est constant que la compétence afférente à la gestion des eaux pluviales avait été, à la date de cette demande, transférée à la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins par application des dispositions combinées des articles L. 2226-1, L. 5211-5 et L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, cette demande aurait dû être transmise par le maire de Mougins au président de cet établissement public de coopération intercommunale, en application des dispositions précitées de l'article L. 114-2 du code des relations entre le public et l'administration. A défaut, cette demande est réputée avoir été adressée à l'autorité compétente. Dès lors, le silence gardé par l'administration dans le délai de deux mois suivant sa réception a fait naître une décision implicite de rejet dont M. B... et la SA Carma peuvent se prévaloir à l'appui de leurs conclusions indemnitaires présentées contre la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins. Par suite, c'est à bon droit, et sans au demeurant excéder les limites de leur office, que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée de l'absence de réclamation préalable ayant lié le contentieux.

S'agissant du caractère confirmatif de la décision implicite portant rejet née du silence gardé sur la réclamation indemnitaire préalable du 30 décembre 2019 :

9. La communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins soutient que la décision implicite portant rejet de la réclamation indemnitaire préalable formée par la commune de Mougins et la SA Carma le 30 décembre 2019 n'est qu'une décision confirmative de celle du 23 juin 2017 par laquelle la société PNAS assurances a rejeté, pour la commune de Mougins, la demande d'indemnisation présentée par la SA Carma. Il résulte toutefois de l'instruction que cette décision du 23 juin 2017 n'est pas assortie de la mention des voies et délais de recours. La décision implicite de rejet née du silence gardé sur cette réclamation indemnitaire préalable du 30 décembre 2019 ne saurait dès lors être regardée comme confirmative de la précédente.

10. Il suit de là que la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance présentée par M. B... et la SA Carma était irrecevable.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

S'agissant du cadre juridique applicable :

11. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel. Le maître d'ouvrage ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure.

S'agissant de l'exception de prescription quadriennale :

12. Aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " Selon l'article 2 de cette même loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement. / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; / Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ; / Toute émission de moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a pas été exactement désigné. / Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. "

13. Le fait générateur des créances que M. B... et la SA Carma prétendent détenir sur la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins au titre de l'engagement de la responsabilité sans faute de cette dernière est constitué par les inondations que la propriété de M. B... a subies lors des intempéries du 3 octobre 2015. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 2 juin 2017, la SA Carma a sollicité de la commune de Mougins le remboursement de l'indemnité qu'elle a versée à M. B... pour couvrir le sinistre qui en a résulté tandis que, le 30 décembre 2019, le conseil de M. B... et de la SA Carma a demandé, à la même commune, de réparer les préjudices qu'ils estiment avoir respectivement subis consécutivement à ces intempéries. Ces deux demandes ont eu pour effet d'interrompre la prescription quadriennale qui avait recommencé à courir le 1er janvier 2016. Par suite, les créances dont M. B... et la SA Carma se prévalent n'étaient pas prescrites à la date d'enregistrement de leur demande de première instance. L'exception de prescription quadriennale opposée par la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins et la société Escota ne peut dès lors qu'être écartée.

S'agissant de la force majeure :

14. S'il est constant que l'état de catastrophe naturelle a été reconnu, pour la commune de Mougins, par un arrêté du ministre de l'intérieur du 7 octobre 2015, cette circonstance ne suffit pas, à elle seule, à caractériser un cas de force majeure. Par ailleurs, il ne résulte pas des pièces versées aux débats, y compris du résumé du rapport final de retour d'expérience élaboré à la demande conjointe du ministre de l'intérieur et de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, que, malgré leur importance et leur intensité exceptionnelles, les pluies orageuses qui se sont abattues sur la commune de Mougins le 3 octobre 2015 ont présenté un caractère de violence imprévisible constituant un cas de force majeure.

S'agissant du principe de responsabilité :

15. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de pluies d'une intensité exceptionnelle mais qui, ainsi qu'il vient d'être dit, n'ont pas présenté un caractère de violence imprévisible constituant un cas de force majeure, des eaux provenant de la colline et de l'autoroute A8 qui surplombent la propriété de M. B..., et entraînant des pierres et des gravats, se sont déversées sur celle-ci via le tunnel de collecte et d'évacuation des eaux pluviales qui se situe au droit de cette propriété et qu'elles ont causé les dommages dont M. B... et la SA Carma demandent réparation à la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins. En permettant ainsi le passage de ces eaux, pierres et gravats, ce tunnel, dont il résulte également de l'instruction que la grille est en outre sous-dimensionnée, a permis l'inondation de la propriété de M. B.... Il s'ensuit que les dommages dont M. B..., qui a la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage en cause, demande réparation, avec son assureur, la SA Carma, sont imputables à l'existence de celui-ci, et sont, compte tenu de leur caractère grave et spécial, supérieurs à ceux qui sont susceptibles d'affecter toute personne résidant à proximité immédiate d'un tel tunnel. M. B... et la SA Carma sont donc fondés à rechercher la responsabilité sans faute du gardien de cet ouvrage, dont il n'est pas contesté devant la Cour qu'il présente le caractère d'un ouvrage public.

S'agissant de la détermination de la personne responsable :

16. Il résulte de l'instruction que le tunnel, qui passe sous l'autoroute A8 et une voie secondaire, le chemin du Belvédère, constitue un ouvrage de transparence hydraulique, constitutif d'un élément du réseau d'évacuation des eaux pluviales et qu'il comporte également une canalisation de couleur rouge qui fait office de conduit d'évacuation des eaux usées. Dans ces conditions, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles R. 122-5 et R. 122-5-1 du code de la voirie routière, doit être regardée, eu égard aux compétences qu'elle exerce, en particulier, ainsi qu'il a été rappelé au

point 8 du présent arrêt en matière de gestion des eaux pluviales, comme le maître de cet ouvrage et, dès lors, la société Escota est fondée à demander sa mise hors de cause.

17. Alors que, d'une part, il n'est ni établi, ni même allégué que M. B... se serait exposé en connaissance de cause au risque d'inondation, ni qu'il aurait commis des fautes exonératoires de responsabilité, et que, d'autre part, et ainsi qu'il a été déjà dit, les préjudices que ce dernier a subis du fait des inondations rappelées ci-dessus présentent un caractère anormal et spécial, les appelants sont fondés à rechercher la responsabilité entière et exclusive de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins.

S'agissant de l'évaluation et de la réparation des préjudices :

Quant aux préjudices subis par M. B... :

18. D'une part, il est constant qu'à la suite des fortes intempéries du 3 octobre 2015, les abords de la piscine de M. B..., le mur de clôture et la terrasse de sa maison ont été endommagés. Par leur jugement attaqué, en se fondant sur les pièces du dossier, et en particulier sur les devis ainsi que le rapport établi le 28 décembre 2015, à la demande de la SA Carma, par le cabinet Polyexpert, lequel, contrairement à ce que soutient la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, ne saurait être écarté des débats au seul motif qu'il n'a pas été dressé contradictoirement alors que les éléments qui ressortent de cette expertise ont été soumis au débat contradictoire en cours d'instance devant le tribunal administratif de Nice comme devant la Cour, les premiers juges ont condamné la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins à verser à M. B... la somme totale de 16 084,09 euros, en réparation de ses préjudices et compte tenu des sommes déjà versées par son assureur. L'appelante ne conteste pas sérieusement l'appréciation à laquelle se sont ainsi livrés et à bon droit les premiers juges aux points 17 et 20 de leur jugement attaqué et qu'il convient donc pour la Cour d'adopter.

19. D'autre part, et alors même qu'il demande à la Cour la confirmation du jugement attaqué, M. B... doit être regardé comme sollicitant, par la voie de l'appel incident, que la somme de 16 084,09 euros que lui ont allouée les premiers juges soit portée à 18 918,59 euros. Toutefois, et alors que l'indemnité attribuée au propriétaire d'un immeuble atteint de dommage de travaux publics ne peut être affectée d'un abattement de vétusté et que l'évaluation faite par les premiers juges est exempte de toute critique de la part des intimés, il ne saurait être versé à M. B... la somme de 460,58 euros, au titre d'un tel abattement de " vétusté ". De même, la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins ne saurait être condamnée au paiement de la somme de 1 140 euros, au titre de la franchise contractuelle, dès lors que l'indemnité globale de 16 084,09 euros qui a été allouée à M. B..., à bon droit, par les premiers juges, résulte de la soustraction à la somme totale due au titre de la réparation de l'ensemble de ses préjudices de la somme de 30 350,30 euros qui lui a été versée par son assureur et qu'elle le remplit donc entièrement dans ses droits.

Quant aux préjudices subis par la SA Carma :

20. Aux termes de l'article L. 111-3 du code des assurances : " Dans tous les cas où l'assureur se réassure contre les risques qu'il a assurés (...), il reste seul responsable vis-à-vis de l'assuré. " En vertu de l'article L. 121-12 du même code : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'assureur est fondé, quelle qu'ait été la cause du dommage indemnisé, y compris lorsque l'état de catastrophe naturelle a été déclaré et alors même qu'il se serait réassuré contre ce risque, à se prévaloir de la subrogation légale prévue à l'article L. 121-12 du code des assurances vis-à-vis de l'auteur du dommage dont la responsabilité est engagée.

21. Le quantum de la somme de 30 350,30 euros accordée par le tribunal administratif de Nice n'est davantage pas discuté devant la Cour par la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins et il y a dès lors lieu, là encore, d'adopter les motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 24 à 26 de leur jugement attaqué.

S'agissant des intérêts :

22. Lorsqu'ils ont été demandés et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine.

23. Les premiers juges ont, par leur jugement attaqué, assorti les sommes qu'ils ont allouées à M. B... et à la SA Carma des intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de leur demande de première instance, soit le 28 avril 2020. En l'absence de toute contestation sur ce point par les intimés, qui se bornent à solliciter de nouveau, sans autre précision, les intérêts moratoires à compter de la " mise en demeure " du 1er avril 2019, soit un courriel portant cette date, sans au demeurant, établir la date de réception de ce dernier par l'administration, il y a lieu de confirmer ce jugement.

S'agissant de la capitalisation des intérêts :

24. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, y compris pour la première fois en appel. Cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande.

25. C'est ainsi à bon droit que le tribunal administratif de Nice a jugé que, la capitalisation des intérêts ayant été demandée par M. B... et la SA Carma, dans leur demande de première instance enregistrée le 28 avril 2020, les intérêts échus au 28 avril 2021 devront être capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle.

26. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à M. B..., la somme de 16 084,09 euros, et, à la SA Carma, la somme de 30 350,30 euros, assorties des intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2020 et de la capitalisation des intérêts échus au 28 avril 2021, à cette date, et à chaque échéance annuelle, ni, par voie de conséquence, et en tout état de cause, à solliciter la restitution des sommes qu'elle aurait versées, en exécution de ce jugement, à M. B... et à la SA Carma. Ces deux derniers ne sont pas davantage fondés à soutenir, par la voie de l'appel incident, que la somme à verser à M. B..., mise à la charge de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, devait être portée à 18 918,59 euros.

Sur l'appel en garantie formée par la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins à l'encontre de la société Escota :

27. Il résulte de l'examen des mémoires présentés par la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins devant le tribunal administratif de Nice, que cet établissement public de coopération intercommunale n'a pas présenté de conclusions à fin d'appel en garantie à l'encontre de la société Escota. Dès lors, ses conclusions tendant à ce que cette société la garantisse des condamnations prononcées contre elle, présentées pour la première fois en appel, ne sont pas recevables. Pour ce motif, la fin de non-recevoir afférente, opposée par la société Escota, doit être accueillie et ces conclusions à fin d'appel en garantie doivent être rejetées.

Sur les dépens :

28. La présente instance n'a pas donné lieu à dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de M. B... et de la SA Carma tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins ne peuvent donc qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

29. D'une part, aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "

30. Ces dispositions font obstacle à ce que tant M. B... et la SA Carma que la société Escota, qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent à la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

31. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'appelante une somme globale de 2 000 euros à verser à M. B... et à la SA Carma, et la somme de 1 000 euros à verser à la société Escota au titre des frais exposés par ces derniers et non compris dans les dépens.

32. D'autre part, aux termes de l'article R. 652-26 du code de la sécurité sociale : " Le droit de plaidoirie prévu au premier alinéa de l'article L. 652-6 est exigible devant les juridictions administratives de droit commun (...). " Selon l'article R. 652-27 du même code : " Le droit de plaidoirie est dû à l'avocat pour chaque plaidoirie faite aux audiences dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. A défaut de plaidoirie, est considéré comme ayant plaidé l'avocat représentant la partie à l'audience. / (...) Le droit de plaidoirie est dû à l'avocat auquel un de ses confrères s'est substitué à titre occasionnel ou en qualité de salarié ou de collaborateur. (...) ". Enfin, l'article R. 652-28 de ce code précise que : " Le montant du droit de plaidoirie est fixé à 13 euros. "

33. Ni le conseil de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, ni aucun avocat qui l'aurait substitué n'ayant présenté des observations orales à l'audience, il n'y a pas lieu, en tout état de cause, de faire droit à la demande de cet établissement public de coopération intercommunale formée au titre du droit de plaidoirie.

D E C I D E :

Article 1er : La société Escota est mise hors de cause.

Article 2 : Les requêtes nos 23MA01951 et 23MA01957 de la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins sont rejetées.

Article 3 : La communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins versera une somme globale de 2 000 euros à M. B... et à la SA Carma, et une somme de 1 000 euros à la société Escota au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions à fin d'appel incident présentées par M. B... et la SA Carma ainsi que leurs conclusions présentées au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération Cannes-Pays de Lérins, à M. A... B..., à la société Carma et à la société des autoroutes Esterel-Côte d'Azur-Provence-Alpes (Escota).

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

2

Nos 23MA01951, 23MA01957


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award