Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 31 mai 2023 par lequel le préfet du Var a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302149 du 29 septembre 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 mars 2024, M. A..., représenté par Me Ben Hassine, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 29 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 31 mai 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est entaché d'une erreur de fait sur le fondement de sa demande d'admission au séjour ;
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;
- le préfet, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a méconnu l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail ;
- le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne signé à Tunis le 28 avril 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 31 mai 2023, le préfet du Var a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. A..., ressortissant tunisien né en 1988, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 29 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au séjour des étrangers en France s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 110-1 du code, sous réserve des conventions internationales. En ce qui concerne les ressortissants tunisiens, l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail stipule : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation ". L'article 3 du même accord stipule que " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié'' ". Le protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne, signé le 28 avril 2008 stipule, à son point 2.3.3, que " le titre de séjour portant la mention ''salarié'', prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'accord du 17 mars 1988 modifié est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) ". L'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " (...) sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
3. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a sollicité " l'admission exceptionnelle au séjour pour motif professionnel " en faisant état de l'ancienneté depuis 2007 de son séjour en France, de la présence de sa sœur en France et du décès de son père. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. A... ne pouvait fonder une demande de titre de séjour en qualité de salarié sur les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pas plus d'ailleurs qu'il ne peut invoquer ces dispositions dans le cadre de la présente instance, et que le préfet, compte tenu des mentions de la demande, a pu régulièrement requalifier sa demande de titre de séjour en l'examinant sur le fondement des articles 7 ter d) et 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, relatifs au titre de séjour délivré aux ressortissants tunisiens justifiant résider habituellement en France depuis plus de dix ans et à la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par conséquent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté serait entaché d'une erreur de fait sur le fondement de sa demande d'admission au séjour.
5. En deuxième lieu, aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'obligation qu'avait le préfet de saisir la commission du titre de séjour en soutenant qu'il justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans.
7. En troisième et dernier lieu, si M. A... soutient avoir résidé de façon continue sur le territoire français depuis 2009, il se borne à produire des pièces éparses et insuffisamment probantes, notamment au titre des années 2018, 2019 et 2021, qui ne sont pas de nature à attester d'une présence habituelle sur le territoire français. En outre, si l'intéressé, qui est célibataire et sans charges de famille en France, fait valoir que sa sœur réside en France, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Tunisie, où résident sa mère ainsi que cinq frères. Enfin, s'il a travaillé de façon ponctuelle en France, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle à la date de l'arrêté en litige. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, et alors que M. A... a d'ailleurs fait l'objet précédemment de plusieurs mesures d'éloignement, le préfet ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent par voie de conséquence être rejetées. Il en va de même de ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Ben Hassine et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 novembre 2024.
2
N° 24MA00563