Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial, formulée au bénéfice de son épouse.
Par un jugement n° 2203476 du 22 février 2024, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 avril 2024, M. B..., représenté par Me Oloumi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 février 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 mai 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes d'autoriser le regroupement familial, subsidiairement de réexaminer sa demande, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il doit être tenu compte de la période d'épidémie de Covid 19, des indemnités journalières perçues durant un arrêt maladie, de l'évolution de sa situation professionnelle et de la structure de son foyer dès lors qu'il n'a pas la garde de ses enfants ; il justifie ainsi de ressources suffisantes au regard des dispositions de l'article R. 434-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnaît son droit au respect de sa vie privée eu égard à la durée de sa présence en France et à l'ancienneté de son mariage.
La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Poullain a été entendu en audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien né en 1981, relève appel du jugement du 22 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mai 2022 du préfet des Alpes-Maritimes refusant de faire droit à sa demande de bénéfice d'une mesure de regroupement familial au profit de son épouse, avec laquelle il s'est marié en secondes noces le 27 mars 2021.
2. Aux termes de l'article L. 434-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial : / 1° Par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 434-7 du même code : " L'étranger qui en fait la demande est autorisé à être rejoint au titre du regroupement familial s'il remplit les conditions suivantes : / 1° Il justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 434-4 de ce code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 434-7, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : / 1° Cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; / 2° Cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; / (...) ". Aux termes de l'article R. 434-11 du même code : " L'étranger qui sollicite le regroupement familial présente à l'appui de sa demande les pièces justificatives dont la liste est fixée par arrêté annexé au présent code. ". Ledit arrêté précise que les justificatifs de ressources sont à produire pour les douze derniers mois.
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période. Toutefois, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible pour le préfet de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande.
4. En premier lieu, si M. B... justifie qu'il n'a pas la garde de ses enfants dont la résidence habituelle est fixée au domicile de leur mère dont il est divorcé, il n'en demeure pas moins qu'il contribue aux besoins financiers de ceux-ci. Dès lors, c'est à bon droit que le préfet des Alpes-Maritimes a estimé que, pour bénéficier de la mesure de regroupement familial qu'il sollicitait, M. B... devait justifier de ressources stables atteignant au moins la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance majorée d'un dixième, soit 1 346,40 euros net, conformément au 2° de l'article R. 434-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, il ressort des bulletins de salaire ainsi que des attestations de versement d'indemnités par l'assurance maladie que M. B... produit, que son revenu net mensuel moyen n'a pas dépassé, sur la période évoquée de douze mois précédant le dépôt de la demande, la somme de 1 200 euros. Il ne ressort pas des pièces du dossier que son revenu antérieur, perçu en dehors de la période d'épidémie de Covid 19, aurait été supérieur ainsi qu'il le soutient, bien au contraire. Par ailleurs, si son revenu a effectivement augmenté durant les six derniers mois avant l'intervention de la décision litigieuse pour dépasser légèrement le montant mensuel de 1 346,40 euros, cette évolution demeurait récente à la date de la décision attaquée et son revenu moyen ne dépassait pas le montant de référence sur la période de douze mois précédant cette décision. Dès lors le préfet n'a pas entaché celle-ci d'une erreur d'appréciation en rejetant la demande du requérant au motif que ses revenus étaient insuffisants, la circonstance que les ressources de l'intéressé soient aujourd'hui supérieures étant à cet égard sans incidence.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Si M. B... vit depuis de nombreuses années en France, la décision attaquée, qui ne l'empêche ni de rendre visite à son épouse avec laquelle il ne s'est marié que le 27 mars 2021, ni de déposer une nouvelle demande de regroupement familial, ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Il y a dès lors lieu de rejeter sa requête, en ce comprises ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2024, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 octobre 2024.
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N° 24MA00998
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