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30/09/2024 | FRANCE | N°24MA00259

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 30 septembre 2024, 24MA00259


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 juin 2023, par lequel le préfet du Var a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2302795 du 4 janvier 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par un

e requête, enregistrée le 6 février 2024, Mme B..., représentée par Me Dhib, demande à la Cour :



1°) d'annuler le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 juin 2023, par lequel le préfet du Var a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2302795 du 4 janvier 2024, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2024, Mme B..., représentée par Me Dhib, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 4 janvier 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 juin 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de lui enjoindre de procéder au réexamen de sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- en lui refusant un titre de séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président par intérim de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante algérienne née en 1971, déclare être entrée en France le 11 septembre 2006 munie d'un visa court séjour, et ne plus avoir quitté le territoire depuis lors. Le 30 novembre 2011, elle a contracté un mariage avec un ressortissant français dont elle a divorcé le 14 octobre 2021. Ses demandes de titres de séjour présentées en 2012, en 2015 et en 2018 ont fait l'objet de trois refus de titre de séjour assortis d'obligation de quitter le territoire français le 2 juin 2014, le 15 décembre 2015 et le 21 janvier 2018. Le 17 août 2021, Mme B... a déposé une demande de régularisation de sa situation. Par un arrêté du 21 juin 2023, le préfet du Var a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... a alors saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par le jugement du 4 janvier 2024, le tribunal administratif a rejeté cette demande. Mme B... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

3. Pour refuser la délivrance d'un certificat de résidence, le préfet du Var lui a opposé l'absence de justifications suffisantes de sa présence pour les années 2009 à 2012, 2013 à 2019 et 2020 à 2021. Les premiers juges ont quant à eux retenu l'insuffisance des documents fournis pour les périodes de 2015 à 2016, et de 2021 à 2023. Il ressort des pièces du dossier qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, l'intéressée justifie de sa présence pour la période antérieure de 2008 à 2014 et pour la période de 2017 à 2020. En outre, il ressort des pièces du dossier que pour l'année 2015, l'appelante produit l'attestation de ses droits au titre de la couverture maladie universelle valable du 1er août 2014 au 31 juillet 2015, la déclaration de son médecin traitant, des ordonnances médicales et le récépissé du dépôt d'une demande de titre de séjour. Pour l'année 2016, alors qu'elle est en procédure de divorce et qu'elle a fait appel du jugement rejetant son recours contre l'arrêté du préfet lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, elle verse l'attestation de son avocat déclarant l'avoir reçue en avril 2016, l'attestation d'un médecin faisant état de ce qu'il a reçu l'intéressée en mars, avril, juillet et novembre de l'année 2016, une attestation de son conjoint attestant de la reprise de la vie commune datée de juin 2016, une facture pour des lunettes correctives en date du 2 septembre 2016 ainsi que l'attestation émanant de l'association Femme dans la Cité mentionnant sa participation aux activités proposées par l'association. Pour l'année 2017, sont produits le certificat d'hébergement daté du 11 mars 2021, l'attestation du médecin qui la suit depuis le 29 novembre 2010, l'attestation d'élection de domicile auprès du centre communal d'action sociale de Toulon. Pour l'année 2022, elle produit une attestation d'hébergement, son dépôt de demande de titre de séjour, de nombreuses pièces médicales ainsi qu'une attestation de domiciliation au sein du même centre communal d'action sociale. Enfin, pour l'année 2023, l'appelante verse une promesse d'embauche pour un contrat à durée indéterminée en tant qu'agent de nettoyage du 2 janvier 2023, une copie de sa carte vitale, les récépissés de demande de carte de séjour, l'attestation de ses droits au titre de la couverture maladie universelle valable du 1er avril 2023 au 30 juin 2023, des documents médicaux, l'attestation du même médecin déclarant l'avoir reçue en consultation le 7 août 2023, des factures de téléphonie mobile des mois de mars 2023 à juillet 2023, des courriers et actes devant le tribunal administratif de Toulon, des billets de train ainsi qu'une attestation de domiciliation au sein du même centre communal d'action sociale. Ainsi, l'appelante démontre sa résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Ainsi, en estimant que Mme B... ne justifiait pas d'une résidence habituelle sur le territoire français de dix ans et en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement, le préfet du Var a fait une inexacte application de l'article 6-1 précité. La décision du 21 juin 2023 du préfet du Var refusant à Mme B... un certificat de résidence est illégale et doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur l'injonction et l'astreinte :

5. Eu égard aux motifs du présent arrêt, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la situation de la requérante se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de l'arrêté attaqué, l'exécution de cet arrêt implique nécessairement la délivrance à Mme B... d'un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet du Var de procéder à cette délivrance dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros qui sera versée à Mme B... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 4 janvier 2024 du tribunal administratif de Toulon et l'arrêté du 21 juin 2023 du préfet du Var sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Var de délivrer à Mme B... un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au procureur de la République près du tribunal judiciaire de Toulon et au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2024, où siégeaient :

- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère,

- M. Nicolas Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 septembre 2024.

N° 24MA00259 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00259
Date de la décision : 30/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. THIELÉ
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : DHIB

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-30;24ma00259 ?
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