Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, et prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2400363 du 7 février 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 mars 2024, M. B... A..., représenté par Me Mendaci, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes du 7 février 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 janvier 2024 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux est entaché d'inexactitude matérielle, en mentionnant qu'il ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire ;
- le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation en relevant qu'il était célibataire et sans enfant ;
- la procédure est irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que l'agent qui a consulté les fichiers de police judiciaire était régulièrement habilité à cet effet ;
- l'arrêté attaqué est privé de base légale et est entaché d'inexactitude matérielle dès lors que, contrairement à ce qui y est mentionné, il établit être entré régulièrement sur le territoire français ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur sa vie personnelle ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français durant deux ans méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;
La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Claudé-Mougel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité algérienne, demande l'annulation du jugement du 7 février 2024 du tribunal administratif de Nîmes qui a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté du 28 janvier 2024 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination et en assortissant cette mesure d'éloignement d'une interdiction de retour.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. A... soutient que le jugement attaqué serait irrégulier faute de s'être prononcé sur le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux est entaché d'inexactitude matérielle, en mentionnant qu'il ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire, il ressort au contraire du point 8 dudit jugement que si M. A... soutient être entré sur le territoire français muni d'un visa court séjour et s'être maintenu sur le territoire français depuis son arrivée le 10 mai 1999, il n'en apporte pas la preuve. Ce moyen, qui manque en fait, doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
3. En premier lieu, l'arrêté litigieux mentionne que M. A... est célibataire et déclare avoir un enfant de cinq ans à sa charge mais dont l'autorité parentale est exercée exclusivement par la mère suivant un jugement du juge aux affaires familiales du 12 novembre 2019. Ces mentions ne sont pas contestées par l'intéressé et la circonstance que cet arrêté mentionne par ailleurs, et par erreur, que M. A... est célibataire et sans enfant ne saurait à elle seule établir que le préfet des Bouches-du-Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation.
4. En deuxième lieu, si M. A... soutient que l'agent qui a procédé à la consultation du fichier du traitement des antécédents judiciaires n'avait pas d'habilitation à cette fin, il n'apporte pas les précisions suffisantes à l'appui de ce moyen permettant d'en apprécier le bien-fondé.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants :/ 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) "
6. Si M. A... établit avoir disposé d'un visa Shengen valable du 21 avril au 20 juillet 1999 qui apparaît sur le passeport qu'il produit à l'appui de sa requête, valable du 5 octobre 1994 au 4 octobre 1999, ce document ne comporte, contrairement à ce qu'il soutient, aucun tampon de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle à la date du 10 mai 1999, mais celui de l'aéroport international d'Oran Ahmed Ben Bella. Dès lors, M. A... ne démontre pas être entré sur le territoire français à cette date et ne peut valablement soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'inexactitude matérielle, ou ne pouvait être valablement fondé sur les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
8. Ainsi qu'il a été dit au point 6, M. A... ne démontre pas être entré sur le territoire à compter de l'année 1999. S'il produit de nombreuses pièces composées de factures, de prescriptions médicales et de décomptes de remboursement de la caisse primaire d'assurance maladie ainsi que de courriers divers, ces documents n'établissent pas la présence régulière sur le territoire durant la période de 25 années dont il se prévaut ni, en tout état de cause, une quelconque insertion socio-professionnelle. Si, par ailleurs, il a reconnu le 15 mars 2019 une enfant née le 9 mars précédent de sa relation avec une compatriote, il ne démontre pas que celle-ci serait régulièrement présente sur le territoire ni, au demeurant, que cet enfant serait de nationalité française. En tout état de cause, les quelques photos et mandats cash que M. A... produit ne démontrent pas qu'il contribuerait à l'entretien et à l'éducation de cette enfant, alors par ailleurs qu'il ne conteste pas, ainsi que le mentionne l'arrêté litigieux, qu'il n'exerce pas l'autorité parentale sur celle-ci. Ainsi, les moyens tirés de ce que cet arrêté méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent qu'être écartés. De même, M. A... n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté serait entaché d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire :
9. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences d'une interdiction de retour sur le territoire français doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 7 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 28 janvier 2024 du préfet des Bouches-du-Rhône. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également, et par voie de conséquence, être rejetées.
D É C I D E
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, où siégeaient :
- M. Portail, président,
- Mme Courbon, présidente assesseure,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 septembre 2024
2
N°24MA00586
nb