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02/07/2024 | FRANCE | N°22MA00532

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 02 juillet 2024, 22MA00532


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 2 janvier 2019 par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ont rejeté sa demande de protection fonctionnelle et sa demande indemnitaire préalable, d'enjoindre aux ministres concernés de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle dès notification du jugement

à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de condamner l'Etat à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 2 janvier 2019 par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ont rejeté sa demande de protection fonctionnelle et sa demande indemnitaire préalable, d'enjoindre aux ministres concernés de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle dès notification du jugement à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 17 690 euros en réparation des divers préjudices subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il dit avoir été victime.

Par un jugement n° 1901904 du 16 décembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 février 2022 et le 6 mars 2024, M. A..., représenté par Me Dessinges, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 décembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 2 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre aux ministres concernés de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle dès notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard, en faisant cesser les agissements de harcèlement moral dont il est l'objet, en prenant toutes mesures destinées à le protéger et en prenant en charge les frais d'avocat exposés jusqu'ici ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 17 690 euros en réparation des divers préjudices subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il dit avoir été victime ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'un défaut de motivation en ce que, d'une part, il ne précise pas l'événement pris en considération pour considérer comme non crédible l'agissement lié à la publication d'une fiche de poste et, d'autre part, il n'indique pas les raisons pour lesquelles le ministre par ses affirmations a renversé la présomption de harcèlement créée par vingt des allégations avancées en première instance et correspondant premièrement au

court-circuitage de ses compétences, deuxièmement à la surcharge de travail à laquelle il a dû personnellement faire face du fait d'absence dans son service, troisièmement à la forte dégradation des relations avec sa hiérarchie à compter du 9 décembre 2016, au sujet de l'élaboration d'une fiche de poste et des difficultés concernant un seul des pôles de son service, dont le chef est absent depuis octobre 2016, sans tenir compte de ses signalements et de la spécificité de sa situation personnelle, quatrièmement à la mise en cause du pilotage de son service, cinquièmement à l'atteinte portée à son autorité hiérarchique, sixièmement à des déstabilisations, septièmement à l'absence de reconnaissance de son travail relatif au projet " schéma de cohérence territoriale ", huitièmement à la remise en cause de son honnêteté, neuvièmement à la négation de ses prérogatives, dixièmement à la mise en échec d'un projet de réorganisation d'un des pôles de son service, et onzièmement à ses absences aux comités de direction dues au mode dégradé de fonctionnement du service ;

- les agissements de harcèlement moral, au nombre de trente-huit, qui ont commencé en août 2016 avec l'arrivée notamment d'un nouveau directeur de la direction départementale des territoires des Alpes-de-Haute-Provence, ont consisté premièrement en deux griefs tenant à des omissions de badgeages et non-respect des horaires de travail et le visant seul, sa hiérarchie lui ayant reproché d'avoir répercuté auprès de ses subordonnés les consignes de respect de ces horaires, deuxièmement en une soumission à des astreintes non textuellement obligatoires, dont il n'a pas été relevé par sa hiérarchie à la différence d'autres agents, et dont les difficultés d'exercice lui ont été reprochées, troisièmement en un défaut de réaction et de soutien de sa hiérarchie face aux difficultés rencontrées avec son assistante ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il n'existe pas de considérations étrangères à tout harcèlement qui peuvent justifier de renverser les présomptions créées par les allégations de vingt agissements retenues par ailleurs par le jugement attaqué, et consistant globalement en une dégradation de ses conditions de travail, et plus spécialement en un défaut de soutien à la suite d'une agression de l'un de ses agents, en un courriel de dénigrement de son implication dans son service, en une mise à l'écart et en un retrait de certaines de ses missions, en prévoyant une réunion impliquant son service un jour pour lui non travaillé, en une évaluation professionnelle de novembre 2017 contraire à ses évaluations précédentes et à son avenir professionnel ;

- les agissements dont il a été victime ont porté atteinte à sa dignité, à sa santé physique et mentale et à son avenir professionnel en causant son placement en congé de maladie du 12 janvier au 16 juillet 2018, son suivi psychologique et médicamenteux, et en l'incitant à quitter la fonction publique de l'Etat ;

- les préjudices sont d'une part un préjudice financier lié à la perte de salaire due à ses arrêts de travail, et d'autre part un préjudice moral évalué à 10 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête, en renvoyant la Cour à ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 7 mars 2024 la clôture d'instruction a été fixée au 25 mars 2024, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Revert,

- et les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., attaché principal d'administration occupant depuis le 1er mai 2015 le poste de chef du service " urbanisme et connaissance des territoires " au sein de la direction départementale des territoires (DDT) des Alpes de Haute-Provence, a présenté le 30 octobre 2018 au préfet des Alpes-de-Haute-Provence une demande de protection fonctionnelle, valant demande préalable d'indemnisation de son préjudice moral et de son préjudice financier, en raison des agissements de harcèlement moral dont il dit être victime de la part de sa hiérarchie. Par décision du 2 janvier 2019, les ministres de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, ont rejeté cette demande. Par un jugement du 16 décembre 2021, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, à ce qu'il soit enjoint aux ministres de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle dès notification du jugement à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 17 690 euros en réparation des divers préjudices subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il dit avoir été victime.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Pour écarter l'argumentation de M. A... consistant à soutenir qu'il a été victime de trente-huit agissements de harcèlement moral, le tribunal a considéré, d'une part, que quatre séries de ces agissements n'apparaissaient pas comme suffisamment crédibles et de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement, et d'autre part que, pour les autres agissements, qu'il a regardés comme de nature à faire naître cette présomption, la ministre de la transition écologique et solidaire avait produit, en sens contraire, une argumentation et des pièces de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.

4. Néanmoins, pour estimer que la présomption de harcèlement moral ainsi créée par les allégations de M. A... concernant cette trentaine d'agissements était renversée par l'argumentation de la ministre, le tribunal n'a motivé sa décision aux points 7 à 11 de son jugement qu'en ce qui concerne l'agression verbale alléguée, le contenu critique d'un courriel du directeur départemental des territoires, les reproches tenant à sa prétendue mise à l'écart et à la diminution de ses responsabilités et son évaluation professionnelle de novembre 2017. Il a omis de livrer les raisons pour lesquelles la surcharge de travail induite par des absences dans le service de l'intéressé, les tentatives de mise en échec et de déstabilisation, l'absence de reconnaissance du travail accompli, invoquées par M. A... à l'appui de ses allégations de harcèlement moral, s'expliquaient par des considérations étrangères au harcèlement moral.

Dans cette mesure, le jugement attaqué n'est donc pas suffisamment motivé et cette irrégularité, qui affecte le jugement en sa totalité, est de nature à justifier son annulation totale. Il y a ainsi lieu d'annuler le jugement attaqué, et au cas d'espèce, d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur les conclusions d'excès de pouvoir et les prétentions indemnitaires présentées par M. A... en première instance et en appel, fondées sur l'existence d'un harcèlement moral.

Sur l'existence d'un harcèlement moral de nature à justifier l'octroi de la protection fonctionnelle et l'indemnisation des préjudices allégués par M. A... :

En ce qui concerne le cadre juridique applicable :

5. Aux termes des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, désormais codifiées aux articles L. 133-2 et L. 133-3 du code général de la fonction publique : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'appréciation de la valeur professionnelle, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :/ 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / (...) ".

6. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui.

7. Les règles énoncées au point précédent s'appliquent également lorsque l'agent public entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement.

En ce qui concerne la période au titre de laquelle les agissements de harcèlement moral sont allégués :

8. M. A... affirme avoir été victime d'agissements de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie en se plaignant d'une série de trente-huit faits et circonstances qui se seraient produits sur la période qui commence en août 2016 avec le départ de la directrice départementale des territoires, et l'intérim aussitôt assuré par la directrice départementale adjointe jusqu'à l'arrivée du nouveau directeur le 1er octobre 2016, et qui s'achève en août 2018 avec le départ de la directrice départementale adjointe. Il précise que l'ensemble de ces agissements, dont la dernière manifestation est le compte rendu de son entretien d'évaluation établi le 9 octobre 2017 au titre de l'année 2017, a conduit à son placement le 12 janvier 2018 en position de congé de maladie, en raison d'un état anxio-dépressif en lien avec ses conditions de travail, jusqu'à sa reprise d'activité, le 16 juillet 2018.

9. D'une part, si M. A... fait néanmoins état de la circonstance, qu'il date du 25 mars 2016, soit cinq mois avant le début de la période en cause et qui n'est pas contestée par le ministre, que le secrétaire général de la direction départementale aurait délibérément accepté de valider la demande de l'une des agents du service du requérant, tendant au bénéfice du télétravail, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment pas du courriel de cet agent, qu'elle n'aurait pas, conformément à ses interrogations, présenté sa demande sous couvert de son chef de service, M. A.... En tout état de cause, une telle circonstance, qui traduit la persistance des rapports hiérarchiques entre cet agent et le secrétaire général, lequel occupait le poste de M. A... jusqu'au 1er avril 2015, n'est pas à elle seule constitutive d'un agissement de harcèlement moral de la part de ce cadre à l'encontre du requérant.

10. D'autre part, contrairement à ce que soutient M. A..., la comparaison entre son évaluation professionnelle réalisée en 2016 par son ancienne directrice pour l'année 2015 et son évaluation établie par son nouveau directeur pour l'année 2017, utilement complétée par l'attestation établie par la première le 15 novembre 2019, dont ni la date ni le contenu ne sont de nature à justifier qu'elle soit écartée des débats, ne montre aucun infléchissement dans l'appréciation portée par sa hiérarchie sur sa manière de servir à compter du mois d'août 2016.

En ce qui concerne les agissements allégués :

11. Les agissements de harcèlement moral dont M. A... prétend avoir été victime au sein de la direction départementale des territoires des Alpes-de-Haute-Provence consistent, premièrement en des excès de formalisme et l'application d'un traitement inégalitaire concernant le respect des horaires et le relèvement des astreintes hebdomadaires, deuxièmement en l'absence de soutien de sa hiérarchie dans les difficultés rencontrées avec son assistante et l'un de ses chefs de pôle et face à la surcharge de travail subie, troisièmement en des reproches injustifiés concernant notamment l'élaboration et la publication d'une fiche de poste, des mises en situation d'échec et déstabilisations, quatrièmement en la remise en cause du pilotage de son service, cinquièmement en l'atteinte portée à ses compétences, à son autorité hiérarchique, sixièmement en la remise en cause de son honnêteté et de sa bonne foi, septièmement en l'absence de reconnaissance de son travail relatif au projet " schéma de cohérence territoriale " (SCOT) et huitièmement en une évaluation professionnelle du 9 octobre 2017 pour l'année 2017 constitutive d'une atteinte portée à son avenir professionnel et en l'attribution d'un complément individuel d'activité pour 2018 suivant un taux vexatoire et humiliant.

S'agissant des excès de formalisme, de l'application rigide du règlement sur les horaires et du traitement inégalitaire en matière d'astreintes hebdomadaires :

12. Toutefois, d'une part, s'il résulte de l'instruction que sur la période en cause, M. A... a fait part le 27 septembre 2016 de son impossibilité d'assurer l'astreinte hebdomadaire prévue la semaine du 27 octobre 2016, le ministre de la transition écologique affirme, sans être sérieusement contredit, qu'un décalage de cette astreinte lui a été proposé pour tenir compte de sa situation familiale. En soulignant avoir dû se soumettre à des astreintes de direction malgré la naissance de ses jumeaux le 11 juillet 2016, et la profession de sa conjointe la conduisant à assurer des gardes certains week-ends, et que certains agents de son service, dont un chef de pôle, ont pu être relevés de leurs obligations d'astreinte, M. A..., qui même en produisant un courriel de sa part du 29 mai 2017, lequel se limite sur ce point à l'expression de difficultés rencontrées, ne justifie pas avoir présenté des demandes de relèvement d'astreinte ayant essuyé des refus, ni l'identité de situations avec ces agents, n'est pas fondé à soutenir avoir été soumis à un traitement inéquitable ou discriminatoire. Ni son courriel du 1er août 2017 ni celui de la directrice départementale adjointe, qui dément l'interprétation donnée par l'intéressé de leurs précédents échanges, ne font présumer que M. A... aurait été soumis de manière abusive et sans considération de ses contraintes personnelles, aux astreintes hebdomadaires de direction.

13. D'autre part, il résulte de l'instruction, et notamment du courriel de la directrice adjointe du 5 septembre 2016 et du courrier du directeur départemental, déposé sur le bureau du requérant le 5 janvier 2017, que du mois d'août au mois d'octobre 2016, M. A..., qui compte tenu des termes du courriel du 5 septembre 2016, ne conteste pas sérieusement avoir opté pour l'horaire variable et non pour le forfait journalier, n'a pas respecté strictement les obligations d'horaires et de badgeage auxquelles il était pourtant soumis en application du règlement intérieur. Si M. A... affirme avoir reçu de la sorte un traitement inéquitable et discriminatoire, il n'allègue pas que d'autres chefs de service de la direction bénéficieraient d'une application plus souple de la réglementation relative aux horaires et badgeages. Le rappel de la réglementation par sa direction en septembre 2016 et janvier 2017, qui ne procède pas d'un usage excessif du pouvoir hiérarchique et qui ne s'explique pas, ainsi qu'il a été dit au point précédent, par des refus de relèvement d'astreintes ou des omissions d'y procéder, ne constitue pas un agissement de harcèlement moral. Dans ces conditions, la remontrance qui lui a été adressée par le directeur, à la suite du message adressé par l'intéressé aux agents de son service leur rappelant la nécessité de respecter cette réglementation, alors que le rappel à l'ordre du directeur ne concernait que lui, ne peut davantage être qualifiée d'agissement de harcèlement moral.

S'agissant du défaut de soutien de sa hiérarchie :

14. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. A..., l'échange de courriels du 7 septembre 2016 entre le secrétaire général, auquel il s'est adressé pour trouver une solution au congé posé inopinément par son assistante, la directrice adjointe, qui a approuvé le rappel à cet agent du respect du règlement intérieur, et lui-même, contredit son allégation selon laquelle sa hiérarchie se serait abstenue de le soutenir face à de telles difficultés. S'il résulte d'un courriel de M. A... du 15 février 2016 qu'il a signalé à l'assistante sociale le cas de son assistante et souhaiter en discuter avec elle, et s'il affirme avoir évoqué ses inquiétudes sur la santé physique et mentale de cet agent au cours de réunions avec sa hiérarchie, il ne livre aucune indication sur d'autres circonstances que la pose de congé inopinée, précédemment évoquée, qui auraient justifié des mesures particulières de la part de sa direction. Le courriel du requérant, adressé le 13 octobre 2016 à sa hiérarchie pour signaler la priorisation de ses missions à laquelle il allait devoir se résoudre compte tenu des absences dans son service, notamment de son assistante, ne permet pas davantage de faire présumer un refus ou une inertie blâmables de son directeur et de sa directrice adjointe de prendre les mesures relatives à l'absentéisme de son assistante et à ses conséquences sur le fonctionnement du service.

15. En deuxième lieu, il est vrai qu'à la suite d'un emportement du chef du pôle planification envers M. A... le 29 septembre 2016, et de son signalement à la directrice adjointe, celle-ci a d'abord, le même jour, réagi en livrant une appréciation sur les conditions du service de M. A..., et exprimé son inquiétude à ce sujet, avant d'exprimer son soutien à ce dernier par un autre courriel du même jour. Mais l'ensemble de ces réponses de la part de la hiérarchie de M. A..., à laquelle a été signalé un manque d'implication de l'intéressé dans l'encadrement de son service, ne traduisent ni un défaut de soutien et d'appui face à des réactions anormales d'un agent à l'égard de son supérieur hiérarchique direct, ni l'expression d'une défiance à l'égard de M. A..., ni une préoccupation illégitime concernant le bon fonctionnement de l'un de ses services, alors qu'en contestant la réalité de dysfonctionnements affectant l'ensemble du service " urbanisme et connaissance des territoires " qu'il dirige, M. A... ne remet pas en cause la réalité des difficultés rencontrées par une partie de celui-ci.

16. En troisième lieu, si l'instruction montre que le service dirigé par M. A... était confronté à une charge de travail importante, compte tenu notamment de la combinaison de congé de maladie, de temps partiel et de départ d'agent non immédiatement remplacé, et que M. A... en a fait part à sa hiérarchie, il résulte des éléments versés à l'instance, notamment des échanges de courriels entre la directrice adjointe et le requérant, les 29 septembre et 2 octobre 2016, qu'une priorisation des missions du service a été décidée par l'intéressé de concert avec sa hiérarchie. En se référant à un courriel indiquant à la directrice adjointe le 13 décembre 2016 la mise en œuvre à compter du 1er janvier 2017 d'une nouvelle organisation du pôle planification afin d'en assurer un fonctionnement en " mode dégradé ", M. A... ne livre pas d'indication sur le type d'agissement qu'il impute de la sorte à son administration.

S'agissant des reproches injustifiés, déstabilisations et mises en situation d'échec :

17. Premièrement, M. A... affirme qu'au cours de la semaine du 9 au 15 décembre 2016, sa hiérarchie lui a demandé d'actualiser des fiches de poste, spécialement la fiche du poste de chargé d'études planification, sans tenir compte de son absence le 6 décembre pour garder l'un de ses enfants malade, des absences affectant son service et de sa quotité de travail hebdomadaire de 80 %, et que sa directrice adjointe lui a demandé de reprendre son travail à plusieurs reprises, et fait part dans le même temps de ses inquiétudes sur le fonctionnement de son service. Toutefois, alors qu'il résulte du courriel du secrétaire général de la direction du 9 décembre 2016 qu'il a été demandé aux chefs de service de l'informer sur les postes vacants en vue du prochain cycle de mobilité, et que cette demande avait été renouvelée lors du comité de direction du 5 décembre 2016 et rappelée le 7 décembre avec pour date limite de remise le 9 décembre 2018, le ministre de la transition écologique précise, sans être utilement contredit, que M. A..., dont l'assistante avait adressé le 8 décembre 2016 des documents non validés par lui, n'a procédé à cet envoi que le 12 décembre 2016. Il n'est donc pas fondé à soutenir que par le choix de ce calendrier, sa hiérarchie l'aurait délibérément placé dans une situation d'échec. Par ailleurs, les demandes de sa directrice adjointe tendant à ce qu'il reprenne la présentation de la fiche du poste de chargé d'études planification, soutenues par le directeur départemental, ne résultent, compte tenu de leurs termes, que d'une incompréhension mutuelle quant aux attentes respectives sur ce point, et ne méconnaissent pas par elles-mêmes les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

18. Deuxièmement, il résulte de l'instruction que M. A... avait en charge la rédaction d'une note sur la publicité dont la présentation en réunion bilatérale avec le préfet des

Alpes-de-Haute-Provence était prévue dès le mois de décembre 2016, et avait été rappelée par le directeur le 3 janvier 2017 fixant une date butoir de remise le 12 janvier 2017.

Le 13 janvier 2017 étant pour M. A... un jour non travaillé, il a demandé le 12 janvier à son adjointe de préparer un projet de note et en a informé la directrice adjointe. Si, par son courriel du 12 janvier, adressé à cette dernière mais envoyé également par erreur à M. A..., le directeur départemental se plaint, avec ironie sur la bonne foi de l'intéressé, de son attitude désinvolte, une telle remarque, dans son contexte d'intervention, ne peut être regardée comme un agissement de harcèlement moral.

19. Troisièmement, en se plaignant auprès de M. A..., le 7 juin 2017, du caractère obsolète des cartes de SCOT qu'il lui avait communiquées dans la perspective d'une nouvelle réunion bilatérale avec le préfet, la directrice adjointe, auquel le requérant a répondu qu'il ne faisait de la sorte que répondre à sa demande, ne peut être vue, dans cette situation d'incompréhension mutuelle, comme ayant cherché à le déstabiliser par des ordres contradictoires. Il en va de même au sujet de sa réponse du 15 juin 2017, bien que formulée en des termes secs, au courriel de M. A... relatif à des points de blocage concernant le fonctionnement de certaines commissions.

20. Quatrièmement, contrairement à ce que soutient M. A..., le directeur départemental ne lui a pas adressé, par son courriel du 4 octobre 2017, l'ordre illégal de proposer au maire d'une commune une solution contraire à son plan local d'urbanisme pour assurer l'implantation de deux entreprises, alors qu'il n'est pas allégué que le non-respect de cette consigne aurait été assorti d'une quelconque sanction ou mesure défavorable.

21. Cinquièmement, M. A... soutient, en invoquant la qualification de " Mise en situation d'échec - réprimande - absence de reconnaissance des efforts et du travail ", avoir reçu, de la part du secrétaire général de la direction, une demande de présentation en comité technique, le 27 octobre 2017, d'un projet de réorganisation du pôle planification, et se plaint de la réaction déplacée de sa hiérarchie lorsqu'il lui a annoncé qu'il ne présenterait que des options, compte tenu de sa charge de travail et de la nécessité d'assurer la concertation au sein de son service sur une question importante pour ses agents. Mais il résulte des indications précises du ministre de la transition écologique, non démenties par le requérant, que M. A... n'a remis cette note, attendue pour le 17 novembre 2017 au plus tard, que le 24 novembre 2017, sous la seule forme d'options, et a contraint le directeur départemental à l'élaboration d'un nouveau document le week-end précédant sa rencontre avec les organisations syndicales. Dans ces conditions, le courriel du directeur départemental manifestant son mécontentement le 24 novembre 2017 n'a pas excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

S'agissant de la remise en cause du pilotage de son service :

22. Pour prétendre avoir été l'objet d'une mise en cause du pilotage de son service, lors d'une réunion du 24 janvier 2017, M. A..., qui renvoie à une pièce qui n'a pas trait à cette réunion, n'assortit ses allégations d'aucune indication sur le déroulement de celle-ci ni sur les propos qui y auraient été tenus par sa direction, et se borne à affirmer avoir dû y rappeler les actions jusqu'alors accomplies et qu'à compter de cette date, les agissements subis n'ont plus pris la forme d'échanges de courriels mais de retraits progressifs de ses attributions. Ce faisant, l'intéressé ne soumet pas au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement.

S'agissant de la mise à l'écart et de la marginalisation :

23. D'une part, si M. A... se plaint de la tenue d'une réunion de travail entre son service et l'unité interdépartementale de conseil aux territoires des Alpes du Sud un vendredi, sur l'initiative de la directrice adjointe, alors que cette date ne correspondait pas à ses jours travaillés, une telle circonstance, justifiée par les contraintes de calendrier de toutes les parties prenantes à cette réunion, dont l'agent de son service en charge du dossier concerné, n'est pas de nature à révéler l'intention de sa direction de renier son temps partiel ou de l'évincer de son service.

24. D'autre part, il résulte de l'instruction que par courriel du 1er décembre 2016, dont M. A... a reçu copie, le directeur départemental des territoires a donné son accord pour le recrutement d'un architecte-paysagiste-conseil de l'État. L'affirmation de M. A... que, à la différence de la procédure suivie par son ancienne direction, il n'a pas été consulté pour le recrutement de cette catégorie d'agents dont le pilotage de l'activité relève pourtant des attributions de son service, est replacée dans son contexte par le ministre de la transition écologique qui souligne que compte tenu à la fois de la faible marge d'appréciation dont dispose à ce titre le directeur départemental et de la charge de travail pesant sur M. A..., il a proposé oralement à ce dernier de rencontrer seul les candidats. Ainsi, la pièce produite au soutien des allégations de M. A... et les considérations avancées par le ministre ne permettent pas de considérer que ce recrutement manifesterait la volonté de sa hiérarchie de le mettre à l'écart, de diminuer ses responsabilités ou de dénigrer ses compétences professionnelles.

25. Il résulte enfin des déclarations circonstanciées du ministre de la transition écologique, qui bien que non assorties de pièces ne sont pas sérieusement contestées par M. A..., que le processus de recrutement du chef du pôle planification, en janvier 2017, s'est traduit par la tenue par M. A... des entretiens avec les candidats à ce poste et par le classement par ce dernier des candidatures par ordre de préférence. Ainsi, s'il est constant que la proposition de recrutement en interne soumise par M. A... n'a pas été retenue, ce dernier, dont le courriel de la directrice adjointe du 12 janvier 2017 montre que la proposition a néanmoins été étudiée, n'est pas fondé à prétendre qu'il aurait été à cette occasion marginalisé.

S'agissant de l'atteinte portée à ses compétences, à ses attributions et à son autorité hiérarchique :

26. En premier lieu, s'il est constant que le 25 janvier 2017 la direction de M. A... a organisé une réunion de cadrage avec certains agents de son service et lui-même, au sujet de la refonte des " porter-à-connaissance " et de l'avancement d'un " porter-à-connaissance " concernant une commune, l'intéressé ne peut valablement prétendre que cette réunion n'aurait d'autre finalité vexatoire que la mise sous tutelle de son service, en se bornant à remettre en cause la pertinence d'une telle démarche sans contester la réalité des difficultés rencontrées par son service dans l'accomplissement de cette tâche.

27. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et plus spécialement du rapprochement de l'ordre du jour de la réunion du 28 novembre 2017 organisée par la direction de M. A... avec l'ensemble de son service, et des explications précises du ministre, que cette réunion, au cours de laquelle l'intéressé a fait le choix de ne pas s'exprimer, a eu pour objet la réorganisation du service, à la suite des propositions formulées par M. A... sans satisfaire sa direction, et ne peut être considérée comme révélant la volonté de celle-ci de reprendre en main ce service, à son détriment, alors que le ministre affirme sans être contredit qu'elle a permis de lever des points de blocage et qu'une réunion similaire a concerné le service d'économie agricole.

28. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la compétence stratégique relative à la montée en puissance des SCOT, inscrite depuis mai 2015 dans la fiche de poste de M. A..., a donné lieu à la création, que l'intéressé date du 7 avril 2017, d'un poste de chargé de mission " SCOT et transversalité ", auprès du directeur départemental, pour une durée de trois ans.

Le ministre de la transition écologique précise, sans être démenti, que cette création de poste dédié à cette compétence était rendue nécessaire par l'augmentation de procédures d'élaboration de SCOT et l'enjeu stratégique que constitue l'accompagnement de l'État. Ainsi M. A... qui a été associé à cette création ainsi que le montre le courriel du directeur départemental du

7 avril 2017 produit par ses soins, et dont la charge de travail était encore importante à cette date, ne peut valablement soutenir que la perte de cette compétence, objectivement justifiée, devrait s'analyser en un agissement de harcèlement moral, alors même que l'agent nommé sur ce poste de chargé de mission est celui qu'il avait proposé pour occuper dans son service l'emploi de chef du pôle planification.

29. En quatrième lieu, il est constant que le 20 novembre 2017, au cours d'un comité de direction, le directeur départemental a informé l'ensemble des chefs de service dont M. A..., d'une nouvelle affectation dans son service à titre de renfort. Si M. A..., qui affirme sans être contredit ne pas en avoir été prévenu avant cette date, y voit le manque de considération de sa hiérarchie à son égard et une dénégation de ses responsabilités, le ministre affirme, sans être

lui-même démenti, que cette affectation a dû être décidée dans l'urgence, en accord avec le service médico-social de la direction départementale, afin de mettre fin à un conflit insurmontable entre deux agents et prévenir l'apparition de risques psycho-sociaux. Dans ces conditions particulières, une telle affectation, en dépit de ses modalités, ne peut être vue comme une atteinte portée aux prérogatives et responsabilités de M. A... en tant que chef de service, ni partant comme un agissement de harcèlement moral.

S'agissant de l'absence de reconnaissance du travail accompli :

30. Pour tout fait de nature à démontrer selon lui l'absence de reconnaissance par sa hiérarchie du travail qu'il a réalisé, M. A... se borne à invoquer les remerciements adressés par son directeur au nouveau chargé de mission SCOT, par courriel du 16 juin 2017 dont il a reçu copie et qui ne mentionne pas le travail préparatoire qu'il aurait lui-même accompli avant le transfert de cette compétence. Mais cette seule circonstance n'est ni de nature à accréditer l'absence de reconnaissance de l'implication de M. A... dans l'approfondissement de ce travail qui lui avait été demandé avant le transfert de la compétence SCOT au chargé de mission, ni propre à faire présumer l'existence d'un agissement constitutif de harcèlement moral.

S'agissant de la remise en cause de l'honnêteté et de la bonne foi de M. A... :

31. Le courriel adressé par M. A... à la directrice adjointe, le 1er août 2017, après un entretien avec elle, visant à démentir des rumeurs lui attribuant une indisponibilité pour accueillir le nouveau chef du pôle planification PUP à 9 heures comme prévu, ne permet pas, par son contenu, de rendre vraisemblable son allégation selon laquelle sa hiérarchie, qui en tout état de cause pouvait légitimement s'assurer du bon fonctionnement de ses services sur la base d'informations lui parvenant, a mis en doute son honnêteté et sa bonne foi.

32. Par ailleurs, l'unique contre-visite médicale diligentée le 18 mai 2018 à la demande de son directeur départemental le 4 mai 2018 au cours de son arrêt de travail qui avait débuté le 12 janvier 2018, n'est ni illégal ni abusif, alors même que le bien-fondé de son congé a été confirmé à l'issue de ce contrôle et qu'avant le mois de janvier 2018, il n'avait déposé que très peu d'arrêts de travail.

S'agissant du compte rendu d'évaluation professionnelle du 9 octobre 2017 au titre de l'année 2017 et de l'attribution du complément individuel d'activité pour 2018 :

33. Ainsi qu'il a été dit au point 10, l'évaluation professionnelle de la manière de servir de M. A... réalisée au titre de l'année 2017 par le directeur départemental ne contraste pas avec les appréciations portées par la précédente directrice au titre de l'année 2015. Si la grille d'appréciation des compétences de M. A... pour l'année 2017 comporte davantage de mentions " passable " que, au titre de l'année 2016, de mentions " maîtrisé ", et fait état d'une mention " insuffisant ", les deux évaluations ne sont pas à cet égard efficacement comparables compte tenu du changement, dans les comptes rendus d'entretien, de la dénomination des éléments d'appréciation entre les deux années. En se prévalant de ses notations annuelles avant son arrivée dans la direction en 2015, de la contestation de cette évaluation pour 2017 qu'il a portée auprès du directeur et de son entretien avec lui en présence d'un délégué syndical, dont il ne précise pas les suites, M. A..., qui avance des arguments mettant en avant les actions à porter à son crédit et ne soutient pas que cette évaluation, dont son auteur a nécessairement tenu compte des absences dans son service et de son temps partiel, serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation, n'apporte pas suffisamment d'éléments pour faire présumer l'existence à ce titre d'un agissement de harcèlement moral. La circonstance qu'il a formé un recours contre son compte rendu d'entretien professionnel établi le 4 décembre 2018, au titre de l'année 2017, et que, par un arrêt du 18 janvier 2022, la Cour a annulé l'ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 1er juillet 2020 rejetant ce recours et a renvoyé l'affaire devant le tribunal, n'est pas de nature à infirmer les motifs précédents. Contrairement à ce que soutient enfin M. A..., la suggestion formulée par l'inspecteur général chargé de mener l'entretien d'orientation professionnelle au titre de l'année 2017, qu'il surveille et recherche les " opportunités en privilégiant les options qui lui permettraient de se rapprocher de la décision et de l'opération (collectivités, autres opérateurs publics, voire privés) ", ne manifeste pas l'intention de sa direction de l'inviter à quitter la fonction publique de l'Etat ou à rompre tout lien avec le service public.

34. En outre, il est vrai que par un jugement du 16 décembre 2021, devenu définitif, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 22 novembre 2018 par laquelle le directeur départemental des territoires a attribué à M. A... le complément indemnitaire annuel pour l'année 2018, pour un montant de 480 euros, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, et a enjoint au directeur départemental des territoires de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois. Mais alors que cette annulation a été prononcée pour un vice de procédure, lié à l'intervention de cette décision avant la tenue de l'entretien professionnel conduit par le supérieur hiérarchique direct de l'agent, le seul fait que les motifs de cette décision d'attribution n'ont pas été donnés à l'intéressé et que le montant ainsi alloué relève de la fourchette basse des 10% des agents de son corps ayant bénéficié du niveau de modulation indemnitaire le plus faible, ne peut suffire à faire présumer chez l'autorité hiérarchique de M. A... une intention vexatoire ou la volonté de l'humilier.

S'agissant de la dégradation alléguée de ses conditions de travail et l'altération de l'état de santé de M. A... :

35. En relevant successivement, avoir dû alerter les syndicats sur sa situation le 7 janvier 2018, et saisir le médecin de prévention le 8 janvier et le consulter le 9 janvier 2018, avoir été maintenu en arrêt de travail par le médecin mandaté par l'administration à la suite de la visite médicale de contrôle du 16 mai 2018 et avoir dû reprendre le travail pour des raisons financières le 16 juillet 2018 après plusieurs renouvellements de ses arrêts de travail, M. A... ne fait état d'aucun fait susceptible d'être qualifié d'agissement de harcèlement moral.

36. Il résulte certes des différents certificats médicaux et arrêts de travail joints au dossier, au titre de la période du 12 janvier au 16 juillet 2018, que son placement en congé de maladie ordinaire est justifié, successivement, par " un état d'anxiété relationnelle à une souffrance au travail ", une " anxiété relationnelle liée à une souffrance au travail ", une " souffrance psychique au travail ", et un " syndrome anxio-dépressif réactionnel à une souffrance au travail ". Toutefois, aucune des pièces médicales ainsi produites, qui ne se prononcent pas sur l'existence d'un harcèlement moral et le lien entre l'état de santé de l'agent et de tels faits, ni le courrier de M. A... du 8 janvier 2018 au médecin de prévention, qui évoque un choc à la notification le 11 décembre 2017 du compte rendu d'entretien professionnel pour 2017 et un ressassement pendant les vacances d'hiver, ne sont de nature à révéler, rétrospectivement, l'existence d'agissements de harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983.

37. Il résulte de l'ensemble des motifs précédents que s'il est constant que M. A... a dû exercer ses fonctions de chef de service dans un contexte dégradé du fait d'absences et de non-remplacements d'agents dans son service, auquel se sont ajoutées des contraintes liées à sa situation personnelle, et si son état de santé a pu s'altérer sous l'effet de ses conditions de travail, il ne résulte pas de l'instruction qu'il a dû subir, comme il le soutient, sur la période d'août 2016 à août 2018, des conditions de travail vexatoires et humiliantes, lui causant un sentiment de crainte, d'angoisse et de perte de confiance en soi, relevant de la qualification de harcèlement moral.

38. Il résulte de tout ce qui précède non seulement qu'en refusant d'accorder à M. A... la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral commis par ses supérieurs hiérarchiques, les ministres de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales n'ont pas entaché d'illégalité leur décision du 2 janvier 2019, mais encore que M. A... n'est pas fondé à rechercher l'engagement de la responsabilité de l'Etat pour de tels prétendus agissements. Ses conclusions de première instance et d'appel tendant d'une part à l'annulation de cette décision, à ce qu'il soit enjoint au ministre de la transition écologique de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle en faisant cesser les agissements de harcèlement moral dont il dit être l'objet, en prenant toutes mesures destinées à le protéger et en prenant en charge les frais d'avocat exposés jusqu'ici, et tendant d'autre part à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 17 690 euros en réparation de son préjudice financier et de son préjudice moral ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

39. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de l'Etat qui n'est la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. Ses conclusions présentées à ce titre ne peuvent donc qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1901904 rendu le 16 décembre 2021 par le tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... et ses conclusions d'appel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

N° 22MA005322


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00532
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection contre les attaques.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : SCP TOMASI GARCIA & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;22ma00532 ?
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