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06/06/2024 | FRANCE | N°23MA02860

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 3ème chambre, 06 juin 2024, 23MA02860


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.



Par un jugement n° 2306676 du 30 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa d

emande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2023,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2306676 du 30 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2023, Mme C..., représentée par Me Amara, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 juin 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est entaché d'une erreur matérielle pour avoir relevé à tort qu'elle n'avait pas joint les certificats de scolarité de ses enfants ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions des articles L. 211- 2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation personnelle ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait pour avoir indiqué qu'elle ne justifiait pas de liens personnels et familiaux sur le territoire ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation concernant sa vie privée et familiale au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision fixant le pays de sa destination :

- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Platillero a été entendu au cours de l'audience publique.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante marocaine, a sollicité le 21 avril 2023 son admission au séjour sur le fondement de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 30 juin 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme C... relève appel du jugement du 30 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Mme C..., née le 3 août 1997, soutient être entrée régulièrement en France le 1er janvier 2019 au moyen de son titre de séjour espagnol en cours de validité et se maintenir de manière continue sur le territoire français depuis cette date avec son époux, avec lequel elle s'est mariée le 16 août 2013 au Maroc, et leurs deux enfants également nés au Maroc les 18 mars 2014 et 17 septembre 2016. Il ressort des pièces du dossier que M. C... bénéficie d'une carte de séjour temporaire d'une durée d'un an en qualité de salarié valable jusqu'au 2 septembre 2023, qui a au demeurant été renouvelée à son échéance. Il ressort également des pièces du dossier que Mme C... et son époux sont titulaires d'un bail conclu le 1er juillet 2019 et que M. C... est employé en qualité d'ouvrier de conditionnement et de production par un contrat à durée indéterminée depuis le 11 mai 2021. Par les pièces versées en appel, Mme C... établit par ailleurs que ses enfants, qui ont été munis de documents de circulation pour étrangers mineurs, sont scolarisés depuis le 2 février 2019 au sein de l'école de la commune et qu'ils sont, à la date de l'arrêté en litige, en classe de cours élémentaire 1ère année pour l'aîné et en classe de cours préparatoire pour la cadette. Dans ces conditions, compte tenu de la durée de son séjour et de la réalité de ses liens familiaux sur le territoire français, où résident régulièrement son époux et ses enfants mineurs, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français en litige ont porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elles ont été prises et ont ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône. Ce jugement et cet arrêté doivent dès lors être annulés.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté en litige retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, sous réserve de changement dans les circonstances de droit et de fait, que l'administration délivre le titre de séjour demandé par Mme C.... Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... d'une somme de 1 500 euros.

DECIDE :

Article 1 : Le jugement n° 2306676 du 30 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 30 juin 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer le titre de séjour demandé par Mme C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2024.

N° 23MA028602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02860
Date de la décision : 06/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : AMG AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-06;23ma02860 ?
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