Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 6 septembre 2021 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé d'enregistrer et d'examiner sa demande de titre de séjour ;
Par un jugement n° 2105554 du 30 octobre 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2023, M. A... représenté par Me Oloumi, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 octobre 2023 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler la décision du 6 septembre 2021 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer dans l'attente un document provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans les huit jours suivants la notification de la décision à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente d'une nouvelle décision un document provisoire de séjour l'autorisant à travailler dès la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'erreurs de fait pour avoir indiqué que M. A... ne se prévalait que d'éléments antérieurs à la précédente mesure d'éloignement, laquelle est datée de façon erronée du 8 octobre 2021 ;
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit, voire d'une d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la demande de M. A... contenait un élément nouveau en ce qu'il établissait sa résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans, ainsi que l'a jugé la cour dans une ordonnance du 28 juin 2021 ;
- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la durée de sa présence en France qui est supérieure à dix ans ;
- le préfet aurait donc dû enregistrer sa demande et saisir la commission du titre de séjour en application du deuxième alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses liens privés et familiaux et de son intégration professionnelle en France.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
- Ont été entendus au cours de l'audience publique :
-le rapport de Mme Paix,
-et les observations de Me Trad substituant Me Oloumi pour M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations du public avec l'administration ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité tunisienne, soutient être entré en France en 2004 et s'y maintenir depuis cette date. Il a présenté une première demande de titre de séjour le 10 avril 2013 et a fait l'objet de deux décisions portant obligation de quitter le territoire français notifiées les 29 mai 2013 et 3 juillet 2015. Sa deuxième demande de titre de séjour présentée le 29 septembre 2017 au titre de l'admission exceptionnelle a fait l'objet d'une décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet des Alpes-Maritimes sur sa demande, qui a été annulée par un jugement du 27 février 2020 du tribunal administratif de Nice. Sur injonction du tribunal administratif, le préfet a procédé au réexamen de la demande de M. A... et a édicté un arrêté le 8 octobre 2020 par lequel il lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Cet arrêté a été confirmé par un jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Nice puis par une ordonnance du 28 juin 2021 de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille. M. A... a de nouveau présenté, le 18 août 2021, une demande d'admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 6 septembre 2021, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé d'enregistrer sa demande d'admission au séjour. M. A... demande l'annulation du jugement du 30 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande: 1o Les documents justifiants de son état civil; 2o Les documents justifiants de sa nationalité; 3o Les documents justifiants de l'état civil et de la nationalité de son conjoint, de ses enfants et de ses parents lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour pour motif familial. /La délivrance du premier récépissé et l'intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents. /Lorsque la demande de titre de séjour est introduite en application de l'article L. 431-2, le demandeur peut être autorisé à déposer son dossier sans présentation de ces documents. " Aux termes de l'article R. 431-11 du même code : " L'étranger qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande les pièces justificatives dont la liste est fixée par arrêté annexé au présent code. ". Et l'article R. 431-12 de ce code prévoit que : " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise. Ce document est revêtu de la signature de l'agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l'article R. 431-20, de l'instruction de la demande. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'en dehors du cas d'une demande à caractère abusif ou dilatoire, l'autorité administrative chargée d'instruire une demande de titre de séjour ne peut refuser de l'enregistrer, et de délivrer le récépissé y afférent, que si le dossier présenté à l'appui de cette demande est incomplet. En revanche, lorsqu'un étranger a fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour assortie d'une mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée, cette circonstance s'oppose à ce qu'un nouveau récépissé lui soit délivré, sauf si des éléments nouveaux conduisent l'autorité préfectorale à l'autoriser à former une nouvelle demande.
4. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de procéder à l'enregistrement de la demande de titre de séjour présentée par M. A... le 6 septembre 2021, le préfet des Alpes-Maritimes s'est fondé sur les circonstances que l'intéressé a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français qui lui a été notifiée le 12 octobre 2020, qu'il s'est maintenu sur le territoire français en dépit de la confirmation de cette mesure d'éloignement par un jugement du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Nice et d'une ordonnance du 28 juin 2021 de la présidente de cette cour et qu'il n'apporte aucun élément nouveau à l'appui de sa demande.
5. En premier lieu, pour invoquer des circonstances de fait nouvelles, M. A... se prévaut de sa durée de présence en France depuis plus de dix ans, du décès de ses parents, de nouvelles promesses d'embauche et de nouveaux relevés de compte justifiant de rentrées d'argent régulières. Toutefois, et d'une part, l'ordonnance du 28 juin 2021 qui a confirmé la légalité de l'arrêté du 8 octobre 2020 de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français, a seulement relevé que les premières pièces produites par M. A... dataient de l'année 2010 sans considérer pour autant qu'elles établissaient sa présence continue en France depuis cette date. D'autre part, les pièces produites par M. A..., constituées de documents de nature médicale, de factures d'achats et de relevés de compte bancaire ne permettent d'établir que sa présence ponctuelle au moins jusqu'à l'année 2013, de sorte que les nouveaux éléments concernant sa présence sur le territoire à compter de 2021 ne permettent pas d'établir une résidence habituelle de dix ans en France à la date de la décision en litige. En outre, s'il produit l'acte de décès de sa mère survenu le 15 octobre 2012, cette circonstance, à supposer même qu'elle ait jamais été portée à la connaissance du préfet, ne constitue pas un changement de situation suffisamment substantiel dès lors que le requérant se prévaut de vivre en France depuis l'année 2004. Il ne peut en outre se prévaloir utilement du décès de son père survenu le 15 février 2022 dès lors qu'il est postérieur à la date de la décision en litige. Enfin, s'agissant des promesses d'embauche des 6 et 8 juillet 2021 pour un emploi de plaquiste et des relevés de compte produits depuis l'arrêté du 8 octobre 2020, ils ne constituent pas un élément nouveau au regard de la demande de titre de séjour déjà présentée par M. A... et rejetée par le préfet des Alpes-Maritimes, cette demande ayant également été présentée sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions de l'article R. 431-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet a refusé d'enregistrer et d'analyser sa demande.
6. En second lieu, M. A... se prévaut de sa présence en France depuis l'année 2004, de son insertion professionnelle et des liens qu'il aurait établis sur le territoire. Il ne justifie toutefois pas de sa présence continue sur le territoire à tout le moins de 2004 à 2013 ainsi qu'il a été dit au point précédent. S'il se prévaut d'attestations, notamment du 6 août 2021, indiquant qu'il est connu à Grasse pour travailler " dans le domaine du placo " depuis dix ans, elles sont toutefois insuffisantes à elles seules pour établir une insertion professionnelle notable en France. Enfin, s'il se prévaut de la présence de son frère sur le territoire français qui est titulaire d'une carte de résident, il n'établit pas l'intensité des liens l'unissant à celui-ci, et les attestations de connaissances qu'il produit sont insuffisamment circonstanciées pour établir l'existence de liens stables, anciens et intenses qui l'attacheraient au territoire français alors, par ailleurs, qu'il est célibataire et sans enfant et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le préfet des Alpes-Maritimes n'a en tout état de cause, en refusant d'examiner la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. A..., pas entaché sa décision d'un vice de procédure en ne saisissant pas la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du territoire français, et ne peut être regardé comme ayant commis une erreur manifeste d'appréciation en ne régularisant pas la situation de l'intéressé sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 435-1 du même code.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2021 du préfet des Alpes-Maritimes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées, de même que les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente-rapporteure,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2024.
2
N° 23MA02857