La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/06/2024 | FRANCE | N°22MA03131

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 6ème chambre, 03 juin 2024, 22MA03131


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société anonyme Service d'assainissement de Marseille Métropole a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la métropole Aix-Marseille-Provence à lui verser la somme de 1 051 608,91 euros en règlement des factures émises entre septembre 2010 et janvier 2014 au titre des déversements des eaux usées émanant des communes périphériques, somme assortie des intérêts capitalisés.



Par un jugement n° 2010312 du 25 octobre 2022, le trib

unal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme Service d'assainissement de Marseille Métropole a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la métropole Aix-Marseille-Provence à lui verser la somme de 1 051 608,91 euros en règlement des factures émises entre septembre 2010 et janvier 2014 au titre des déversements des eaux usées émanant des communes périphériques, somme assortie des intérêts capitalisés.

Par un jugement n° 2010312 du 25 octobre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 décembre 2022 et le 21 novembre 2023, la société Service d'assainissement de Marseille Métropole, représentée par Me de Metz-Pazzis, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 octobre 2022 ;

2°) de condamner la métropole Aix-Marseille-Provence à lui verser la somme de 1 051 608,91 euros, somme majorée des intérêts légaux capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont répondu à un moyen qu'elle avait certes soulevé dans ses premières écritures mais qu'elle a en définitive abandonné en cours d'instance ;

- les premiers juges ont mentionné une contestation opposée par la défense qui ne figure dans aucune des écritures qui lui ont été communiquées, révélant ainsi soit une dénaturation par les premiers juges des pièces du dossier, soit l'absence de communication d'écritures produites par la défense en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- en vertu du contrat de délégation qui l'a liée à la métropole Aix-Marseille-Provence, elle est en droit de réclamer que les sommes perçues par cette dernière, en tant qu'elle vient aux droits de l'ancienne communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, lui soient reversées s'agissant de recettes propres ;

- à titre subsidiaire, elle est en droit de rechercher la responsabilité pour faute de la métropole Aix-Marseille-Provence en raison de son abstention fautive de renégocier avec les communes périphériques les conventions de déversement avant l'échéance du contrat de délégation ;

- à titre infiniment subsidiaire, il est certain que l'autorité délégante a commis un manquement en stipulant un complément de rémunération à percevoir par le délégataire auprès des collectivités extérieures sans assurer la perfection juridique du système.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2023, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Cabanes, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société Service d'assainissement de Marseille Métropole la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Un courrier du 25 octobre 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

Par ordonnance du 6 décembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée à sa date d'émission en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Ruiz, rapporteure,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me de Metz-Pazzis, pour la société anonyme Service d'assainissement de Marseille Métropole, et de Me Michaud, pour la métropole Aix-Marseille-Provence.

Connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 21 mai 2024, et produite pour la société anonyme Service d'assainissement de Marseille Métropole.

Connaissance prise de la note en délibéré enregistrée le 23 mai 2024, et produite pour la métropole Aix-Marseille-Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention dite " de déversement " conclue le 13 octobre 1973 entre les communes de Marseille et d'Aubagne, modifiée notamment par un avenant du 25 janvier 1988, la commune d'Aubagne a été autorisée à raccorder son réseau d'assainissement à celui de la commune de Marseille en contrepartie d'une redevance destinée à couvrir les coûts d'exploitation engendrés par ce raccordement pour les équipements d'épuration. Par une convention de délégation de service public du 30 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2001, la commune de Marseille, à laquelle a succédé à cette même date la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, a confié à la société Service d'assainissement de Marseille Métropole (SERAMM), pour une durée de douze ans, la gestion de son service public d'assainissement collectif. Entre le 15 septembre 2010 et 15 janvier 2014, cette dernière a émis cinquante et une factures en vue de recouvrer la participation de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Étoile, venue aux droits de la commune d'Aubagne, aux frais de mise en service d'un traitement biologique à la station d'épuration de Marseille. La communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Étoile ayant refusé d'honorer ces factures, la société Service d'assainissement de Marseille Métropole lui a adressé le 23 avril 2014 une réclamation préalable en vue du paiement des sommes mises à sa charge à ce titre, déduction faite des sommes déjà versées pour un solde de 1 051 608,91 euros, à laquelle n'a pas répondu la communauté d'agglomération. Par un jugement du 21 juin 2017, confirmé par un arrêt de la cour administrative de Marseille du 29 juin 2020, le tribunal a rejeté la demande de la SERAMM tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Étoile à lui verser cette somme. Le 1er septembre 2020, la société Service d'assainissement de Marseille Métropole a adressé une nouvelle réclamation préalable à la métropole Aix-Marseille-Provence, venant aux droits de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Étoile, aux fins de lui verser la somme de 1 051 608,91 euros, demande à laquelle la métropole n'a pas répondu. La société Service d'assainissement de Marseille Métropole a alors saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à la condamnation de la métropole Aix-Marseille-Provence à lui verser la somme de 1 051 608,91 euros. Par le jugement du 25 octobre 2022, le tribunal administratif a rejeté cette demande. La société Service d'assainissement de Marseille Métropole relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, si la société anonyme Service d'assainissement de Marseille Métropole fait valoir qu'en répondant à un moyen qu'elle avait pourtant abandonné, les premiers juges ont entaché d'irrégularité leur jugement, ces derniers ne peuvent être regardés comme ayant ainsi jugé ultra petita, contrairement à ce que soutient l'appelante. En tout état de cause, la réponse par les premiers juges à un moyen abandonné reste sans incidence sur la régularité du jugement.

3. En second lieu, la société appelante soutient qu'en leur opposant le fait que la métropole Aix-Marseille-Provence aurait contesté ses allégations selon lesquelles le délégataire du service d'eau potable de la communauté d'agglomération du pays d'Aubagne et de l'Etoile aurait facturé à ses usagers et reversé à la communauté d'agglomération les redevances au nouveau tarif de l'avenant n° 5 pour les années 2010 à 2014 alors que de telles écritures n'ont pas été portées à sa connaissance, les premiers juges auraient dénaturé les pièces du dossier et méconnu le principe du contradictoire. Mais, d'une part, le moyen de la dénaturation est un moyen de cassation auquel il n'appartient pas au juge d'appel d'y répondre. D'autre part, ainsi qu'elle l'oppose, la métropole Aix-Marseille-Provence a bien contesté dans son mémoire du 28 janvier 2022 présenté devant le tribunal administratif de Marseille, lequel a été communiqué, les allégations de la société. Il s'ensuit que les moyens tirés de la dénaturation des pièces du dossier et de la méconnaissance du principe du contradictoire ne peuvent qu'être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. D'une part, selon la convention de déversement du 13 octobre 1973 conclue entre la ville de Marseille et la commune d'Aubagne : " Monsieur C... D..., es-qualité, autorise Monsieur A... B..., es-qualité, à faire procéder au branchement du réseau sanitaire d'assainissement de la ville d'Aubagne sur le collecteur sanitaire de la ville de Marseille de la vallée de l'Huveaune. / La présente autorisation est subordonnée aux conditions suivantes : / Article premier / La ville d'Aubagne construira la totalité du collecteur destiné à desservir son périmètre d'agglomération jusqu'au collecteur du réseau de Marseille établi sur la rive gauche de l'Huveaune (...) ". En vertu des stipulations de l'article 3 de cette convention : " La ville d'Aubagne s'engage à verser à la ville de Marseille une participation sous forme de fonds de concours d'un montant de : un million cinquante-cinq mille deux cents quarante francs (...) calculée sur l'économie de la construction d'une station d'épuration par la ville d'Aubagne, d'une part, et l'accroissement des dépenses pour surcalibrage du collecteur par la ville de Marseille, d'autre part. ". Aux termes de son article 5 : " La participation définie à l'article 3 demeurera définitive aussi longtemps que le réseau général d'assainissement de la ville de Marseille déversera les effluents transités directement en mer / La construction et l'exploitation d'une station de traitement par la ville de Marseille au débouché de l'émissaire, en mer, pourra faire l'objet d'une nouvelle convention. ".

5. L'article 1er de l'avenant n°88/222 à cette convention, conclu le 25 janvier 1988 stipule que " Le présent avenant à la convention n° 74/45 passée entre la commune d'Aubagne et la commune de Marseille est justifié par la mise en route des installations de traitement des eaux usées de la ville de Marseille. / Il a pour objet de déterminer les conditions techniques et financières dans lesquelles les eaux usées des communes limitrophes peuvent être admises dans les antennes amont du réseau d'assainissement de Marseille (...) ". Selon l'article 8 relatif à la " participation financière au coût d'exploitation des ouvrages de traitement " de ce même avenant : " La convention initiale entre la ville de Marseille et la commune contractante réglait le problème de la participation financière de la commune contractante aux investissements réalisés par la ville de Marseille, liés au raccordement du réseau d'assainissement amont sur le réseau de transport et l'installation de traitement des effluents situés à l'aval. / Le présent avenant à la convention initiale, sur le plan économique, est destiné à fixer la contribution annuelle de la commune contractante aux dépenses d'exploitation de la station d'épuration à compter de sa mise en service (...). Cette contribution annuelle est donc due à partir du 1er janvier 1988. / Cette contribution annuelle IN est calculée par révision d'une contribution annuelle Io évaluée valeur janvier 1986 (année o). (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article 5 du contrat d'affermage n° 00/544 du service d'assainissement de la ville de Marseille conclu le 30 octobre 2000 entre la commune de Marseille, à laquelle a succédé la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, et la société Service d'assainissement de Marseille Métropole : " L'exploitation du service d'assainissement comporte pour le fermier : (...) 8) la perception auprès des communes périphériques des redevances établies par convention. ". Selon l'article 15, intitulé " contrats du service avec des tiers ", de cette convention : " A la date d'effet du présent contrat, le fermier reprend toutes les obligations contractées par la collectivité pour la gestion du service et que celle-ci lui a fait connaître. (...) De plus, le fermier poursuit l'application des conventions de raccordement liant la collectivité aux communes limitrophes. A la date d'entrée en vigueur du contrat, les communes concernées sont (...) Aubagne (...) ". Son article 32 " REMUNERATION DU FERMIER " prévoit que : " 3.2.1. Rémunération de base / En contrepartie des charges qui lui incombent en exécution du présent contrat, le Fermier perçoit : / (...) / 1-4 Au titre effluents collectés auprès des communes limitrophes : / une rémunération Cr proportion aux volumes consommées par les usagers dont la valeur de base " Cro " hors taxes, est définie dans les cons existantes. Ces rémunérations s'entendent en valeur de base à la date du 1er Janvier 2001 et pour les installations figurant à l'état des lieux visés à l'article 53. / (...) ". Enfin, selon l'article 72.4 de ce contrat " le fermier adressera aux communes concernées une facturation suivant les modalités prévues dans leur convention ".

7. Aux termes du préambule de l'avenant n° 3 06/1199 à la convention du 30 octobre 2000, conclu entre la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole et la société Service d'assainissement de Marseille Métropole le 2 août 2006 : " S'agissant des collectivités raccordées hors du périmètre de MPM, dont les effluents sont traités par la station d'épuration de Marseille, les conventions d'origine, qui figurent en annexe au contrat d'affermage, font l'objet de discussions entre la communauté urbaine et les communes concernées afin de répercuter les surcoûts d'exploitation du nouvel ouvrage. ". L'article 5 " REMUNERATION DU FERMIER " de ce même avenant prévoit que : " L'article 32 du contrat d'affermage, modifié par l'article 5 du l'avenant n°2, est modifié comme suit : (...) / Le paragraphe 1-4 " Au titre effluents collectés auprès des communes limitrophes " est supprimé et remplacé par le texte suivant : " Pour les communes raccordées listées à l'article 15 du contrat, non membre de la Communauté Urbaine Marseille Provence (CU MPM) dont la définition figure dans les convention annexées au présent contrat (annexe 9) le tarif suivant sera appliqué aux assiettes de volumes annuels prévues par ces convention ; ". Selon l'article 10 du même avenant : " (...) L'annexe 9 relative " aux conventions de déversements des communes limitrophes " sera modifiée comme suit : " Les conventions de déversement relatives aux communes d'Aubagne, de la Penne sur Huveaune, des Pennes Mirabeau, de Roquevaire et au SIBAM seront adaptées pour tenir compte des nouveaux ouvrages biologiques de la station d'épuration de Marseille. / Les nouvelles conventions entre ses communes et MPM se substitueront aux anciennes dès leur prise d'effet ". ".

8 Aux termes de l'article 8 " REMUNERATION DU FERMIER " de l'avenant n°5 du 18 juin 2010 : " L'article 32 du contrat d'affermage, modifié par l'article 5 du l'avenant n°2 et par l'article 5 du l'avenant n°3, est modifié comme suit : (...) /8.2 : Le paragraphe 1-4 " Au titre effluents collectés auprès des communes limitrophes est complété par le texte suivant : / Le même complément de rémunération du Fermier sera appliqué : / - à la rémunération Cro appliquée aux assiettes de volumes annuels prévues par les conventions des communes membres de la CU raccordées liées à l'article 15 du contrat initial ainsi qu'à la commune du Rove ; / - et à la rémunération Cro appliquée aux assiettes des volumes annuels prévues par les conventions des communes non membres de la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole (CU MPM) listées à l'article 15 du contrat initial. Ce complément de rémunération A0 s'entend en valeur de base à la date du 1er janvier 2001 ".

En ce qui concerne la responsabilité de la métropole Aix-Marseille-Provence en tant qu'elle vient aux droits de la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, venant elle-même aux droits de la commune d'Aubagne :

9. En premier lieu, la société appelante soutient que dès lors que la commune d'Aubagne a transféré sa compétence assainissement à la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, cette dernière est redevable des factures qu'elle a émises en tant qu'autorité délégataire au titre du transport et du traitement des effluents produits par les usagers d'Aubagne, considérée comme commune limitrophe entre septembre 2010 et janvier 2014. Or, il ne résulte d'aucune des stipulations précitées une quelconque obligation de la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, venant aux droits de la commune d'Aubagne, en faveur de la société Service d'assainissement de Marseille Métropole alors qu'au demeurant, la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile n'est pas partie au contrat d'affermage conclu entre la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, venant aux droits de la commune de Marseille, autorité délégante et la société Service d'assainissement de Marseille Métropole, en tant que fermier.

10. En deuxième lieu, l'appelante soutient que la convention de délégation de service public qui la lie à l'autorité délégante renvoyant à la convention signée entre l'autorité délégante et la commune d'Aubagne en date du 13 octobre 1973, complétée par un avenant du 25 janvier 1988 et reprenant ainsi les obligations contenues dans cette convention, elle s'est substituée à l'autorité délégante dans ses droits et obligations vis-à-vis de la commune d'Aubagne et peut de ce fait revendiquer le bénéfice des obligations pesant sur la commune d'Aubagne et notamment le versement d'une participation financière au coût de l'exploitation des ouvrages de traitement. Il résulte de l'instruction qu'en application de l'article 8.1 modifié de la convention du 13 octobre 1973, la commune d'Aubagne s'est engagée en dernier lieu à participer aux dépenses d'exploitation par l'application d'une formule mathématique précisée à l'article 8.2 de l'avenant du 25 janvier 1988. Quand bien-même la société Service d'assainissement de Marseille Métropole, autorité délégataire, serait regardée comme bénéficiaire de cette obligation pesant sur la commune d'Aubagne, la convention de délégation de service public que la société a signée le 30 octobre 2000 avec la commune de Marseille, à laquelle a succédé la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, a fixé des conditions de calcul de la rémunération au titre des eaux usées due par les communes limitrophes non membres de la communauté urbaine qui diffèrent de celles fixées par la convention de déversement initialement conclue entre la commune de Marseille et la commune d'Aubagne, de sorte que ces modalités de calcul ne pouvaient être opposables à la commune d'Aubagne, tiers à la convention de délégation de service public initialement conclue entre la commune de Marseille et la société Service d'assainissement de Marseille Métropole. Il s'en déduit que la société appelante ne pouvait réclamer une quelconque somme à la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, venant aux droits de la commune d'Aubagne sur le fondement de ce nouveau tarif.

11. En dernier lieu, la société appelante ne saurait utilement se prévaloir de ce que la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile perçoit auprès de ses abonnés du service public de l'eau une " contribution coopération décentralisée " au titre de la collecte des eaux usées pour en réclamer le reversement alors qu'il est logique de penser qu'une telle contribution permet à la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Etoile notamment d'assurer le financement de la participation aux dépenses d'investissement mise à sa charge par la convention citée au point 5.

En ce qui concerne la responsabilité de la métropole Aix-Marseille-Provence en tant qu'elle vient aux droits de la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole venant elle-même aux droits de la commune de Marseille :

S'agissant du manquement allégué en l'absence de renégociation des conventions avec les communes limitrophes :

12. L'avenant n° 3 à la convention de délégation de service public stipule dans son préambule : " S'agissant des collectivités raccordées hors du périmètre de MPM, dont les effluents sont traités par la station d'épuration de Marseille, les conventions d'origine, qui figurent en annexe au contrat d'affermage, font l'objet de discussions entre la communauté urbaine et les communes concernées afin de répercuter les surcoûts d'exploitation du nouvel ouvrage. ". Aux termes de l'article 10 du même avenant :" (...) / L'annexe 9 relative " aux conventions de déversements des communes limitrophes " sera modifiée comme suit : / " les conventions de déversement relatives aux communes d'Aubagne, de la Penne sur Huveaume, des Pennes Mirabeau, de Roquevaire et au SIBAM seront adaptées pour tenir compte des nouveaux ouvrages biologiques de la station d'épuration de Marseille. / Les nouvelles conventions entre ses communes et MPM se substitueront aux anciennes dès leur prise d'effet. ".

13. La société appelante soutient que la métropole Aix-Marseille-Provence a commis une faute en s'étant abstenue de renégocier les conventions de déversement avant l'échéance du contrat de délégation qui les liait. Toutefois, les stipulations précitées ne sauraient avoir pour objet d'imposer une quelconque obligation de résultat à l'autorité délégante. Au demeurant, ces stipulations mentionnaient la nécessité d'adaptation des conventions initiales conclues avec des communes limitrophes, en cas de nouvel ouvrage. Or, l'extension de la station d'épuration qui fonde l'émission des factures en litige par la société Service d'assainissement de Marseille Métropole ne saurait être regardée comme un nouvel ouvrage biologique au sens de ces stipulations. Il en résulte qu'aucune faute n'est imputable à la métropole Aix-Marseille-Provence sur le fondement de l'absence de renégociation des conventions avec les communes limitrophes. Au surplus, cette absence de renégociation ne pouvait avoir pour effet, tout au plus que de priver la société appelante de la différence entre le tarif initial auquel la commune d'Aubagne s'était engagée et le tarif prévu par les avenants successifs entre la société Service d'assainissement de Marseille Métropole et l'autorité délégante.

S'agissant du manquement allégué en raison de l'imparfaite rédaction de la clause tarifaire en ce qui concerne les communes limitrophes :

14. La société Service d'assainissement de Marseille Métropole soutient que l'autorité délégante a commis un manquement en stipulant un complément de rémunération à percevoir par le délégataire auprès des collectivités limitrophes sans assurer la perfection juridique du système. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le principe du paiement de la rémunération à la société Service d'assainissement de Marseille Métropole à raison du déversement des communes limitrophes était conditionné à une modification des conventions de déversement. En outre, la société délégataire ne saurait reprocher à l'autorité délégante une faute dans la rédaction de la convention de délégation de service public à laquelle elle a elle-même participé. Par suite, la faute alléguée tenant à l'imparfaite rédaction de la clause tarifaire n'est pas établie.

15. Il résulte de ce qui précède que la société Service d'assainissement de Marseille Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Service d'assainissement de Marseille Métropole dirigées contre la métropole Aix-Marseille-Provence qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Service d'assainissement de Marseille Métropole une somme de 2 000 euros à verser à la métropole Aix-Marseille-Provence en application de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Service d'assainissement de Marseille Métropole est rejetée.

Article 2 : La société Service d'assainissement de Marseille Métropole versera à la métropole Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Service d'assainissement de Marseille Métropole (SERAMM) et à la métropole Aix-Marseille-Provence.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2024, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président de chambre,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juin 2024.

2

No 22MA03131


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA03131
Date de la décision : 03/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-01-03-03 Marchés et contrats administratifs. - Notion de contrat administratif. - Diverses sortes de contrats. - Délégations de service public.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Isabelle RUIZ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : DE METZ-PAZZIS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-03;22ma03131 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award