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07/05/2024 | FRANCE | N°23MA02700

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 07 mai 2024, 23MA02700


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2301804 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requêt

e, enregistrée le 10 novembre 2023, et des pièces enregistrées le 28 mars 2024, Mme D..., représentée par Me Colas, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2022 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2301804 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 novembre 2023, et des pièces enregistrées le 28 mars 2024, Mme D..., représentée par Me Colas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 11 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 28 juillet 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros hors taxes à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, son conseil s'engageant dans ce cas à renoncer à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- elle reprend l'entier bénéfice de ses écritures en première instance ;

- le jugement attaqué a omis de statuer sur des moyens soulevés en première instance ;

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnait l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Mme D... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2023.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.

La procédure a été communiquée à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui, en sa qualité d'observateur, a produit, le 27 novembre 2023, le dossier médical de Mme D... et des observations enregistrées le 27 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rigaud ;

- et les observations de Me Atger, substituant Me Colas, représentant Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante nigériane née en 1997, demande l'annulation du jugement du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 28 juillet 2022 rejetant sa demande d'admission au séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Si Mme D... soutient que le jugement attaqué a omis de statuer sur les moyens tirés de l'indisponibilité effective de son traitement pour stabiliser son diabète, de l'impossibilité de transposer la prise en charge thérapeutique dont elle bénéficie dans le cadre de sa pathologie psychiatrique et de l'indisponibilité des soins appropriés à cette pathologie, il ressort de ses écritures de première instance qu'elle n'a présenté ces éléments qu'en qualité d'arguments au soutien d'un moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auquel le jugement a répondu en son point 9, ainsi d'ailleurs qu'auxdits arguments alors même qu'il n'était pas tenu de le faire. La requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur certains moyens soulevés en première instance.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. "

5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser l'admission au séjour sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

6. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme D... pour raisons médicales, le préfet des Bouches-du-Rhône a estimé, au vu de l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII le 14 juin 2022, que si l'état de santé de Mme D... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait cependant bénéficier d'un traitement approprié au Nigéria et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers ce pays. Il ressort des pièces du dossier que la requérante souffre d'un diabète de type 1 insulinodépendant, mal équilibré compte tenu de l'observance insuffisante du traitement prescrit à Mme D..., constitué par la prise d'insulines Novorapid Flexpen, Tresiba Flextouch, Trulicity et Metformine. Son état nécessite en outre un suivi en endocrinologie tous les six mois avec bilan biologique ainsi qu'en ophtalmologie tous les ans. Le certificat médical produit par la requérante, établi par le docteur C... le 25 janvier 2022, et ceux établis par le docteur B... le 3 octobre 2022 et le 26 mars 2024, énoncent qu'il existe un risque que la prise en charge médicale de Mme D... ne puisse effectivement être assurée au Nigéria. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des fiches MedCOI datant de 2020 à 2023, produites par l'OFII à l'appui de ses observations devant la cour, que le suivi en endocrinologie et en ophtalmologie est effectivement assuré dans certains établissements au Nigéria de même que le suivi biologique du diabète (bilan HbA1c et glycémies), que l'insuline rapide et l'insuline lente y sont également disponibles de même que l'insuline glargine et l'insuline Deglutec et le Metformine. Ainsi, s'il est constant que le Dulaglutide n'est pas disponible au Nigéria, la requérante ne conteste pas utilement la subsituabilité de son traitement actuel par les autres médicaments disponibles au Nigéria, dont le Semaglutide et le Liraglutide, qui appartiennent à la même classe pharmacologique que ce dernier. Par ailleurs, si la requérante soutient que la prise en charge de sa pathologie psychiatrique, un syndrome post traumatique associé à un état dépressif chronique, n'est pas effectivement disponible au Nigéria, de même que le Seroplex qui serait associé à ce suivi, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'à la date de l'avis du collège des médecins de l'OFII comme à celle de l'arrêté attaqué, la requérante suivait un tel traitement médicamenteux et qu'elle aurait bénéficié d'une prise en charge psychiatrique ou psychologique. Mme D... ne remet ainsi pas utilement en cause l'avis du collège des médecins de l'OFII sur la disponibilité des soins et la possibilité d'effectuer le suivi médical nécessaire au Nigéria. En outre, les pièces produites par Mme D... ne remettent pas en cause ce même avis sur sa capacité à voyager sans risque vers ce pays. Dans ces conditions, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans l'examen de sa situation.

En ce qui concerne les autres moyens invoqués :

7. En se bornant à déclarer qu'elle reprend l'entier bénéfice de ses écritures de première instance, sans les intégrer à la requête et sans produire ses écritures de première instance, Mme D... n'émet aucune critique à l'encontre du jugement attaqué et ne met pas la cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal aurait pu commettre en écartant ces moyens.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 28 juillet 2022. Ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1 : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., à Me Colas, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,

- Mme Lison Rigaud, présidente-assesseure,

- M. Nicolas Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2024.

N° 23MA027002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02700
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: Mme Lison RIGAUD
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : COLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;23ma02700 ?
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