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12/04/2024 | FRANCE | N°22MA02064

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 12 avril 2024, 22MA02064


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Propriano à lui verser la somme de 101 863,75 euros en réparation du préjudice subi suite à sa chute sur la voie publique le 29 mars 2017.



Par un jugement n° 2001345 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bastia a, par son article 1er, condamné la commune de Propriano à payer à M. A... la somme de 47 504,74 euros, par son article 2, condamné la commune de Proprian

o à payer à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Corse la somme de 7 629,04...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de Propriano à lui verser la somme de 101 863,75 euros en réparation du préjudice subi suite à sa chute sur la voie publique le 29 mars 2017.

Par un jugement n° 2001345 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bastia a, par son article 1er, condamné la commune de Propriano à payer à M. A... la somme de 47 504,74 euros, par son article 2, condamné la commune de Propriano à payer à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Corse la somme de 7 629,04 euros au titre des débours et celle de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, par son article 3, mis à la charge de la commune de Propriano les frais et honoraires de l'expertise d'un montant de 1 500 euros, par son article 4, mis à la charge de la commune la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, par son article 5, rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juillet 2022 et 9 mars 2023 sous le numéro 22MA02064, la commune de Propriano, représentée par Me Muscatelli, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia, de rejeter la requête de M. A... et la demande de la caisse primaire d'assurance de la Haute-Corse et de mettre à la charge de M. A... les dépens et la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) à titre subsidiaire, de réduire les indemnités susceptibles d'être mises à sa charge en réparation des préjudices subis par M. A... et les dépenses exposées par la CPAM de la Haute-Corse à des sommes qui ne sauraient respectivement excéder 5 188,40 euros et 1 144,35 euros et de rejeter le surplus de leurs conclusions.

Elle soutient que :

- sa responsabilité sur le fondement du défaut d'entretien normal de la voie publique ne saurait être engagée ; le lien de causalité entre le chevron présent sur la voie publique et la chute de la victime n'est pas établi ;

- aucun élément n'est de nature à démontrer le défaut d'entretien et de signalisation ;

- la victime a commis une faute d'imprudence de nature à l'exonérer intégralement de sa responsabilité ; à défaut, la responsabilité de la commune ne saurait excéder 10 % ;

- le montant de l'indemnisation demandé au titre des préjudices subis par M. A... et des débours exposés par la CPAM, doit être réduit, compte tenu de la part de responsabilité imputable à l'usager.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 25 septembre 2022 et 2 juin 2023, M. A..., représenté par Me Maricourt-Balisoni, demande à la cour :

1°) de rejeter la demande de la commune de Propriano ;

2°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a retenu une faute de la victime comme cause exonératoire à hauteur d'un tiers ;

3°) de condamner la commune de Propriano à lui payer la somme globale de 101 863,75 euros ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Propriano la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par la commune de Propriano sur l'engagement de sa responsabilité et l'absence d'un lien de causalité entre le matériel de travaux entreposé sur la voie publique et sa chute ne sont pas fondés ;

- aucune faute d'imprudence ne peut lui être imputée ;

- il est fondé à demander l'indemnisation de ses préjudices à hauteur de la somme totale de 101 863,75 euros.

Par un mémoire, enregistré le 29 septembre 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif pour porter la somme que la commune Propriano a été condamnée à lui verser à celle de 11 899,18 euros au titre de ses débours ;

2°) de condamner la commune de Propriano à lui payer la somme de 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

II. Par une lettre enregistrée le 17 octobre 2022, complétée par un courrier enregistré le 31 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Maricourt-Balisoni, a saisi la cour d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 2001345 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia.

Par une ordonnance du 19 décembre 2023, la présidente de la cour a, en application de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, procédé à l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, sous le numéro 23MA03096, en vue de prescrire les mesures d'exécution du jugement du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia.

Par un courrier, enregistré le 20 février 2024, la commune de Propriano, représentée par Me Muscatelli, a indiqué à la cour qu'elle avait sollicité le sursis à exécution du jugement du 7 juin 2022 sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative.

La procédure a été communiquée à la CPAM de la Haute-Corse qui n'a pas produit d'observations.

III. Par une requête, enregistrée le 20 février 2024 sous le numéro 24MA00396, la commune de Propriano, représentée par Me Muscatelli, demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 2001345 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia.

Elle soutient qu'il existe un risque de non-recouvrement des fonds qui seraient versés en exécution du jugement attaqué.

La procédure a été communiquée à M. A... et à la CPAM de la Haute-Corse qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le décret n° 2024-2 du 2 janvier 2024 ;

- l'arrêté du 18 décembre 2023 relatif aux montants minimal et maximal de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale pour l'année 2024 ;

- l'arrêté du 30 décembre 2021 relatif au tarif minimal mentionné au I de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles et fixant son montant pour 2022 ;

-l'arrêté du 30 décembre 2022 fixant le montant du tarif minimal mentionné au I de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles pour 2023 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la cour a désigné Mme Rigaud, présidente assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Danveau,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Goubet, représentant la commune de Propriano.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 6 juin 1941, a été victime d'une chute le 29 mars 2017 alors qu'il marchait le long de la rue Jean Moulin à Propriano, qu'il impute à la présence d'un chevron entreposé au sol. Par un jugement du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bastia a condamné la commune de Propriano à payer la somme de 47 504,74 euros en réparation des préjudices subis par M. A..., reconnu responsable à hauteur d'un tiers des conséquences dommageables de l'accident. Il a également condamné la commune à verser à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Corse la somme de 7 629,04 euros, ainsi que celle de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. La commune de Propriano relève appel de ce jugement par sa requête n° 22MA02064 et demande, par sa requête n° 24MA00396, d'en ordonner le sursis à exécution sur le fondement de l'article R. 811-16 du code de justice administrative. Par la voie de l'appel incident, M. A..., qui sollicite en outre, par une demande enregistrée sous le numéro 23MA03096, l'exécution du jugement du tribunal rendu le 7 juin 2022 par le tribunal administratif de Bastia, demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a retenu une faute de la victime exonérant la commune de sa responsabilité à hauteur d'un tiers et a limité le montant de son indemnisation. La CPAM de la Haute-Corse demande que la responsabilité de la commune soit intégralement reconnue et que le montant des débours que la commune a été condamnée à lui rembourser soit porté en conséquence à la somme de 11 899,18 euros.

2. Les requêtes n° 22MA02064 et n° 24MA00396, présentées par la commune de Propriano, et la requête n° 23MA03096, présentée par M. A..., sont relatives au même jugement du tribunal administratif de Bastia. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n° 22MA02064 :

En ce qui concerne la responsabilité :

3. Il appartient à l'usager d'un ouvrage public qui demande réparation d'un préjudice qu'il estime imputable à cet ouvrage de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre celui-ci et le préjudice invoqué. Le maître de l'ouvrage ne peut être exonéré de l'obligation d'indemniser la victime qu'en rapportant, à son tour, la preuve soit que cet ouvrage faisait l'objet d'un entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

4. Il résulte de l'instruction que M. A... a chuté le 29 mars 2017 vers 16h30, alors qu'il circulait à pied le long de la rue Jean Moulin à Propriano, à proximité immédiate du chantier de construction d'un gymnase. Il impute sa chute à la présence de matériaux de chantier disposés sur les emplacements de stationnement et en particulier d'un chevron, qui lui a causé une fracture de l'épaule droite et la pose d'une prothèse au vu des pièces médicales produites. Si la commune de Propriano entend contester la matérialité des faits et le lien de causalité entre l'accident de M. A... et ce matériau posé sur la voie publique communale par la société en charge des travaux de charpente sur le gymnase, il résulte cependant de l'instruction, notamment du procès-verbal d'investigation de la gendarmerie nationale intervenue sur les lieux, que M. A..., allongé au sol jusqu'à sa prise en charge par les sapeurs-pompiers, a indiqué immédiatement aux gendarmes avoir trébuché sur une poutre en bois appartenant au chantier en cours d'exécution. Ces derniers, qui ont recueilli l'audition d'un témoin lui ayant porté secours, ont constaté que du matériel était entreposé sur les places de stationnement et en dehors du périmètre du chantier. Ces éléments sont également repris et confirmés par le témoignage, précis et circonstancié, de la victime, qui a déposé plainte, dans le procès-verbal d'audition de gendarmerie du 15 avril 2017. Il suit de là que la matérialité des faits et le lien de causalité entre l'accident de M. A... et le chevron en cause sont établis.

5. Il résulte par ailleurs du procès-verbal d'investigation précité que l'installation du matériel sur les places publiques de stationnement en dehors du chantier était dépourvue de signalisation et de protection pour les usagers de la voie publique, la seule barrière de chantier présente étant située à une dizaine de mètres derrière le matériel entreposé. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que la commune n'aurait pas disposé du temps nécessaire pour prendre des mesures correctives ou à tout le moins, signaler l'état anormal de la voie publique, alors qu'il ressort du courrier de l'entreprise Roch Leandri BTP, titulaire du marché de construction du gymnase municipal, que la commune, maître d'ouvrage, était informée, depuis le 9 mars 2017, du déplacement des installations de chantier sollicité par la société responsable des travaux de charpente, et que les clôtures du chantier étaient ouvertes le jour de l'accident. Il suit de là que la commune de Propriano n'apporte ainsi pas la preuve, qui lui incombe, de l'entretien normal de l'ouvrage public.

6. En se bornant à exposer, sans le démontrer, que M. A... aurait dû emprunter un autre itinéraire et notamment le trottoir situé de l'autre côté de la voie publique, la commune de Propriano n'établit pas que l'endroit où a chuté M. A..., qui présentait des difficultés pour se déplacer, ne pouvait être utilisé par les piétons afin de circuler en longeant le chantier, aucun élément n'étant notamment apporté sur l'existence d'un cheminement assurant la sécurité des piétons au cours du chantier. En revanche, il est constant que l'accident a eu lieu en plein jour et sur un trajet que la victime connaissait, dès lors que l'intéressé a reconnu, au cours de son audition par les gendarmes, qu'il l'empruntait " au moins une fois par jour ", tout en précisant cependant que c'était la première fois que la barrière de protection n'était pas à son emplacement. Il sera ainsi fait une juste appréciation de la faute de la victime en laissant à sa charge la moitié des conséquences dommageables de son accident.

7. Il découle de ce qui précède que la commune de Propriano est responsable à hauteur de la moitié des préjudices invoqués par M. A... et que le jugement du tribunal administratif de Bastia doit, par voie de conséquence, être réformé sur ce point.

En ce qui concerne les préjudices :

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux :

8. Le tribunal a retenu un déficit fonctionnel temporaire total durant 32 jours, soit du 29 mars 2017 au 29 avril 2017, et de 30 % durant 1 006 jours à compter du 30 avril 2017 jusqu'au 30 janvier 2020, date de consolidation de son état de santé. Il sera fait une juste évaluation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 5 500 euros, avant partage de responsabilité.

9. Les souffrances endurées par M. A... ont été évaluées à hauteur de 3,5 sur 7 par l'expert, eu égard aux conséquences de sa chute et à la fracture de l'épaule droite qu'il a subie. Par suite, il sera fait une juste évaluation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 5 500 euros, avant partage de responsabilité.

10. L'expert a estimé que M. A... a subi un préjudice esthétique temporaire évalué à 2 sur 7 compte tenu de l'invalidité de son épaule droite et du port d'une attelle suite à l'intervention chirurgicale. Toutefois, et en l'absence de tout autre élément, le requérant n'établit pas qu'il aurait subi temporairement une altération majeure de son apparence physique. Par suite, la demande faite au titre de l'indemnisation de ce chef de préjudice doit être rejetée.

11. Il résulte du rapport d'expertise que M. A... souffre, depuis la consolidation de son état de santé, d'un déficit fonctionnel permanent évalué à 25 % et caractérisé notamment par une amyotrophie et des raideurs articulaires avec limitation des mouvements d'antépulsion, de rétropulsion, d'abduction, de rotations interne et externe. Ainsi, et compte tenu de l'âge de l'intéressé à la date de la consolidation de son état de santé, il sera fait une juste évaluation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 30 000 euros, avant partage de responsabilité.

12. Pour demander une indemnité de 6 000 euros au titre du préjudice d'agrément, M. A... se borne à se prévaloir, comme en première instance, de ce qu'il ne peut plus reprendre la natation, la pêche et la chasse, la pratique de ces activités de loisir avant son accident n'étant pas établie par les attestations de son fils et d'un ami. Dès lors, le préjudice d'agrément qu'il invoque n'est pas justifié et il n'est pas fondé à en demander l'indemnisation.

13. L'expert a indiqué que M. A... souffre d'un préjudice esthétique permanent évalué également à 2 sur 7 compte tenu de l'impotence fonctionnelle du membre supérieur droit et de la limitation des amplitudes articulaires de celui-ci. Par suite, il sera fait une juste évaluation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 2 000 euros, avant partage de responsabilité.

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

Quant aux frais d'assistance à expertise :

14. Ainsi que l'a jugé le tribunal sans être contesté par les parties en appel sur ce point, M. A... a exposé la somme de 600 euros pour se faire assister lors des opérations d'expertise. Il n'y a pas lieu de faire application du partage de responsabilité défini au point 6 sur cette somme, laquelle est exposée utilement par l'intéressé pour donner une solution au litige. M. A... a dès lors droit à être indemnisé à hauteur de la somme de 600 euros au titre de ce chef de préjudice.

Quant aux frais d'assistance à tierce personne :

15. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'état de santé de M. A... a nécessité, en raison des douleurs et de l'impotence de son membre supérieur droit, l'aide d'une tierce personne pour les gestes de la vie courante, à raison d'une heure par jour allant du 30 avril 2017 au 30 janvier 2020, date de consolidation de son état de santé. Il ne résulte pas de l'instruction que M. A... aurait perçu, au cours de cette période, l'allocation personnalisée d'autonomie, la prestation de compensation de handicap ni même le crédit d'impôt prévu à l'article 199 sexdecies du code général des impôts. En revanche, l'intéressé ne démontre pas que le coût horaire de l'aide par une tierce personne devrait être fixé à 25 euros ainsi qu'il le demande. Sur la base d'un taux horaire moyen évalué à partir du salaire minimum interprofessionnel de croissance augmenté des charges sociales, qui s'établissait alors à 13 euros, en ce qui concerne la période comprise entre le 30 avril 2017 et le 31 décembre 2017 et à 14 euros en ce qui concerne la période comprise entre le 1er janvier 2018 et le 30 janvier 2020, et d'une année de 412 jours comprenant les congés payés et jours fériés, les frais au titre de l'aide d'une tierce personne sur cette période s'élèvent ainsi à la somme de 15 620 euros, avant partage de responsabilité.

16. S'agissant de la période comprise entre le 31 janvier 2020, et le 12 avril 2024, date de lecture du présent arrêt, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que, postérieurement à la date de consolidation de son état de santé, M. A... a besoin de l'assistance d'une tierce personne pour la toilette, l'habillage, le repas et les déplacements. Le coût de l'assistance par une tierce personne à hauteur d'une heure par jour pour la période du 31 janvier 2020 au 12 avril 2024 doit être calculé à partir d'un taux horaire de 14 euros en ce qui concerne la période comprise entre le 31 janvier 2020 et le 31 décembre 2020 et de 15 euros en ce qui concerne la période comprise entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2021, sur la base du salaire minimum interprofessionnel de croissance horaire brut augmenté des charges sociales applicables, et d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés. A partir du 1er janvier 2022 jusqu'au 31 décembre 2022, il doit être appliqué, pour une aide non spécialisée, le taux horaire de 22 euros fixé par l'arrêté du 30 décembre 2021 pris pour l'application de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles, sur la base de 365 jours dès lors que cette moyenne horaire est réputée intégrer l'ensemble des charges sociales ainsi que les droits à congés payés des salariés. Les taux horaires de 23 euros et de 23,50 euros doivent être appliqués respectivement pour la période du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2023 et du 1er janvier 2024 au 12 avril 2024, conformément à l'arrêté du 30 décembre 2022 et au décret du 2 janvier 2024 relatif au montant minimal mentionné au 1° du I de l'article L. 314-2-1 du code de l'action sociale et des familles. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que M. A... aurait perçu, au cours de la période, l'allocation personnalisée d'autonomie, la prestation de compensation de handicap ni même le crédit d'impôt prévu à l'article 199 sexdecies du code général des impôts. Il suit de là que les frais d'assistance à tierce personne s'élèvent, sur la période du 31 janvier 2020 à la date de lecture du présent arrêt, à la somme globale de 30 336 euros, avant application du partage de responsabilité.

17. S'agissant des frais d'assistance par tierce personne qu'exposera M. A... à compter du présent arrêt, ceux-ci doivent être arrêtés sur la base des mêmes besoins que ceux fixés au point précédent, pour un tarif horaire de 23,50 euros, sur une durée annuelle de 365 jours. Ainsi, compte tenu de ce tarif, il convient de retenir une rente trimestrielle de 2 144,37 euros, soit 1 072,19 euros après application du partage de responsabilité défini au point 6. Cette rente sera revalorisée par la suite en application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. La rente sera versée à chaque trimestre échu, sous déduction, le cas échéant, des sommes versées à M. A... au titre des aides financières à la tierce personne, y compris le crédit d'impôt prévu à l'article 199 sexdecies du code général des impôts, pour éviter que le montant cumulé de l'indemnisation et des prestations perçues excède le montant total des frais d'assistance par une tierce personne. Il appartiendra en conséquence à M. A... de fournir à la commune de Propriano les justificatifs établissant le montant des prestations qu'il est susceptible de percevoir à ce titre. La rente pourra ainsi, le cas échéant, être minorée ou suspendue sous le contrôle du juge de l'exécution de la décision fixant l'indemnisation.

18. Il résulte de tout ce qui précède que la somme due par la commune de Propriano à M. A... doit être ramenée, après application du partage de responsabilité défini au point 6, à la somme totale de 45 078 euros. Les frais d'assistance par une tierce personne pour l'avenir seront réparés sous la forme du versement d'une rente selon les modalités décrites au point 17, pour un montant de 1 072,19 euros. Il y a lieu de réformer en ce sens le jugement attaqué.

En ce qui concerne les droits de la CPAM de la Haute-Corse :

S'agissant des débours :

19. Il ressort de l'état des débours fourni par la CPAM de la Haute-Corse que celle-ci a exposé des dépenses pour le compte de M. A... correspondant à des frais médicaux et pharmaceutiques, des frais d'hospitalisation et de transport pour un montant total de 11 899,18 euros. Il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application du droit de préférence pour la victime, en particulier en ce qui concerne les frais de transport de 455,62 euros exposés par la caisse au titre de la période du 30 mars 2017 au 11 avril 2017, lesquels se distinguent des frais d'assistance par une tierce personne réclamés par le requérant au titre de la période, avant consolidation de son état de santé, du 30 avril 2017 au 30 janvier 2020. Il suit de là que somme due par la commune de Propriano à la CPAM de la Haute-Corse au titre des débours doit être ramenée, après application du partage de responsabilité défini au point 6, à la somme de 5 949,59 euros.

S'agissant de l'indemnité forfaitaire de gestion :

20. Dès lors que ses conclusions tendant à la majoration des sommes qui lui sont dues au titre des prestations versées ont été rejetées, il n'y a pas lieu de majorer le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion qui lui a été allouée en première instance à hauteur de 1 114 euros.

Sur les frais liés au litige :

21. Il y a lieu de mettre les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros par une ordonnance du président du tribunal administratif de Bastia du 11 mars 2020, à la charge définitive de la commune de Propriano.

22. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la requête n° 24MA00396 à fin de sursis à exécution du jugement :

23. La cour s'étant prononcée sur l'appel de la commune de Propriano contre le jugement du 7 juin 2022, il n'y a pas lieu pour elle de statuer sur les conclusions de son recours tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur la requête n° 23MA03096 à fin d'exécution du jugement :

24. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. ". Lorsque l'exécution d'un arrêt implique normalement, eu égard à ses motifs, une décision dans un sens déterminé, il appartient au juge, saisi sur le fondement des dispositions précitées, de statuer sur ces conclusions, en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision. Si, au vu de cette situation de droit et de fait, il apparaît toujours que l'exécution de l'arrêt implique nécessairement une mesure d'exécution, il incombe au juge de la prescrire à l'autorité compétente.

25. La commune de Propriano était tenue d'exécuter le jugement n° 2001345 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia dès sa notification. Il est constant qu'aucune mesure d'exécution n'a été prise par la commune de Propriano. Dans ces conditions, et à défaut de justifier du paiement de sommes dues en exécution du jugement tel que réformé par la cour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la commune de Propriano sera condamnée à s'acquitter de 150 euros d'astreinte par jour de retard.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la commune de Propriano aux fins de sursis à exécution du jugement n° 2001345 rendu le 7 juin 2022 par le tribunal administratif de Bastia.

Article 2 : La somme de 47 504,74 euros que la commune de Propriano a été condamnée à verser à M. A... par l'article 1er du jugement du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia est ramenée à la somme de 45 078 euros.

Article 3 : La commune de Propriano versera à M. A..., par trimestre échu, une rente au titre des frais futurs d'assistance par une tierce personne d'un montant trimestriel de 1 072,19 euros, selon les modalités fixées au point 17 du présent arrêt.

Article 4 : La somme de 7 629,04 euros que la commune de Propriano a été condamnée à verser au titre des débours à la CPAM de la Haute-Corse par l'article 2 du jugement du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia est ramenée à la somme de 5 949,59 euros.

Article 5 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 500 euros par une ordonnance du président du tribunal administratif de Bastia du 11 mars 2020, sont mis à la charge définitive de la commune de Propriano.

Article 6 : Le jugement du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : A défaut de s'acquitter du paiement des sommes qu'elle a été condamnée à payer à M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la commune de Propriano sera condamnée à payer une astreinte de 150 euros par jour de retard.

Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Propriano, à M. B... A... et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Rigaud, présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- M. Mahmouti, premier conseiller ;

- M. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 avril 2024.

N° 22MA02064, 23MA03096, 24MA00396


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02064
Date de la décision : 12/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Juridictions administratives et judiciaires - Exécution des jugements.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Causes d'exonération - Faute de la victime.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages sur les voies publiques terrestres - Défaut d'entretien normal.


Composition du Tribunal
Président : Mme RIGAUD
Rapporteur ?: M. Nicolas DANVEAU
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : MARICOURT-BALISONI;MARICOURT-BALISONI;CABINET MUSCATELLI;CABINET MUSCATELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-12;22ma02064 ?
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