Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 avril 2023 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.
Par un jugement n° 2305248 du 29 septembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2023, M. B..., représenté Me Leonhardt, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, subsidiairement de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté litigieux porte retrait de son admission antérieure au séjour par décision créatrice de droit du 13 février 2023 ; ce retrait n'est pas intervenu dans les conditions fixées par l'article L. 432-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il est de ce fait illégal ;
- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée eu égard à l'avis du service de la main d'œuvre étrangère ;
- il n'a pas procédé à un examen complet et sérieux de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;
- la décision portant refus de séjour est entachée d'erreur de fait dès lors que son salaire respecte bien le salaire minimal conventionnel ; on ne peut présumer que le préfet aurait pris la même décision s'il n'avait pas commis cette erreur ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, notamment quant aux conséquences de celle-ci, dès lors qu'il est présent en France depuis huit ans, qu'il justifie d'une ancienneté sérieuse dans son activité salariée et que le comportement de l'administration avait fait naître chez lui une espérance légitime ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de droit au séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences.
La procédure a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Poullain,
- et les observations de Me Leonhardt, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, né en 1983, relève appel du jugement du 29 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2023 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa demande.
2. S'il n'y était pas tenu, il est constant que le préfet a consulté la " plateforme main d'œuvre étrangère " afin d'obtenir un avis technique quant à la demande d'admission exceptionnelle au séjour dont il était saisi. Ainsi, qu'il le relève dans l'arrêté litigieux, ce service a émis, le 10 mars 2023, un avis défavorable à la demande de M. B... parce que le salaire mentionné sur le formulaire de demande d'autorisation de travail rempli par son employeur, de 1 524 euros bruts par mois, était inférieur au salaire minimum conventionnel fixé depuis le 1er juin 2021 à 1 554,58 euros bruts par mois. Toutefois, le requérant justifie, notamment par la production de ses bulletins de salaire, que son employeur avait à cet égard reporté, non pas son salaire à la date d'établissement du formulaire, lequel respectait largement le minima conventionnel par suite de revalorisations successives, mais son salaire tel que mentionné sur son contrat de travail, signé durant le mois de novembre 2020. Il suit de là que cet avis, et la décision subséquente, sont entachés d'une erreur de fait dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait été sans incidence sur le sens de la décision attaquée. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation. Il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler ledit jugement ainsi que l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 25 avril 2023.
3. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que soit délivré à M. B... le titre de séjour sollicité mais implique, en revanche, que le préfet des Bouches-du-Rhône procède à un réexamen de sa situation au regard des changements survenus depuis sa dernière demande. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de procéder à un tel réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de délivrer à M. B..., dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 septembre 2023 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 25 avril 2023 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2024, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Marchessaux, première conseillère,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 mars 2024.
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N° 23MA02554
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