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15/02/2024 | FRANCE | N°22MA00564

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 15 février 2024, 22MA00564


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 août 2018 par lequel le maire de Cap d'Ail a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison individuelle d'une surface de 389 m² avec garage et piscine sur un terrain cadastré section AH n° 204 et 209 situé au 57 avenue du 3 septembre, sur le territoire de la commune.



Par un jugement n° 1804151 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa

demande.



M. B... a également demandé au tribunal administratif de Nice de condamner la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 août 2018 par lequel le maire de Cap d'Ail a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison individuelle d'une surface de 389 m² avec garage et piscine sur un terrain cadastré section AH n° 204 et 209 situé au 57 avenue du 3 septembre, sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1804151 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

M. B... a également demandé au tribunal administratif de Nice de condamner la commune de Cap d'Ail à lui verser la somme de 504 000 euros en réparation des préjudices de jouissance subis suite aux refus illégaux de permis de construire, ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1805434 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

I., Par une requête enregistrée le 16 février 2022, sous le n° 22MA00564, M. B..., représenté par Me Szepetowski, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 31 décembre 2021 ;

2°) de condamner la commune de Cap d'Ail à lui verser la somme de 1 008 000 euros en réparation des préjudices de jouissance subis suite aux refus illégaux de permis de construire, somme arrêtée au 1er décembre 2021 qui sera à parfaire jusqu'à la date à laquelle le permis de construire lui sera délivré ainsi que la somme de 50 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cap d'Ail la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité de la commune de Cap d'Ail est engagée du fait de l'illégalité fautive du refus de lui délivrer un permis de construire le 25 février 2016 ;

- le préjudice de jouissance doit être réparé à hauteur de 1 008 000 euros à la date du 1er décembre 2021 ;

- les troubles dans les conditions d'existence et de son préjudice moral justifient l'allocation d'une indemnité de 50 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2022, la commune de Cap d'Ail, représentée par Me Kattineh-Borgnat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

II. Par une requête enregistrée sous le n° 22MA00565 et des mémoires enregistrés les 16 février et 19 avril 2022 et le 23 juin 2023, M. B..., représenté par Me Szepetowski, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 31 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Cap d'Ail du 14 août 2018 ;

3°) d'enjoindre au maire de Cap d'Ail de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Cap d'Ail la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme font obstacle à ce que le maire puisse se fonder sur les dispositions d'urbanisme en vigueur à la date de son arrêté ;

- en tout état de cause, le motif tiré de l'atteinte à un espace vert protégé manque en fait ;

- ce classement est constitutif d'un détournement de pouvoir qui entache le PLU d'illégalité.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 avril 2022, la commune de Cap d'Ail, représentée par Me Kattineh-Borgnat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2003-1169 du 2 décembre 2003 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- et les conclusions de M. Quenette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 février 2016, le maire de Cap d'Ail a refusé de délivrer à M. B... un permis de construire une maison individuelle d'une surface de 389 m² avec garage et piscine sur un terrain cadastré section AH n° 204 et 209, situé au 57 avenue du 3 septembre. Par un jugement du 19 avril 2018, le tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté et enjoint à la commune de statuer de nouveau sur la demande de permis de construire déposée le 4 décembre 2015 dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement. Par un arrêté du 14 août 2018, le maire de Cap d'Ail a refusé à nouveau de délivrer à M. B... le permis de construire sollicité. Par la requête enregistrée sous le n° 22MA00564, ce dernier relève appel du jugement du 31 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Cap d'Ail à lui verser la somme de 504 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'illégalité des arrêtés du 25 février 2016 et du 14 août 2018. Par la requête enregistrée sous le n° 22MA00565, il relève appel du jugement rendu le même jour par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 14 août 2018.

2. Les requêtes n° 22MA00564 et n° 22MA00565, présentées par M. B... présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 14 août 2018 :

3. Aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ou l'opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation ou la déclaration confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire ".

4. Il résulte des dispositions mentionnées au point 2 que, lorsqu'un refus de permis de construire ou une décision d'opposition à une déclaration préalable a été annulé par un jugement ou un arrêt et que le pétitionnaire a confirmé sa demande ou sa déclaration dans le délai de six mois suivant la notification de cette décision juridictionnelle d'annulation, l'autorité administrative compétente ne peut rejeter la demande de permis, opposer un sursis à statuer, s'opposer à la déclaration préalable dont elle se trouve ainsi ressaisie ou assortir sa décision de prescriptions spéciales en se fondant sur des dispositions d'urbanisme postérieures à la date du refus ou de l'opposition annulé. Lorsqu'une juridiction, à la suite de l'annulation d'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol, fait droit à des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer cette demande, ces conclusions aux fins d'injonction du requérant doivent être regardées comme confirmant sa demande initiale. Par suite, la condition posée par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme imposant que la demande ou déclaration soit confirmée dans les 6 mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire doit être regardée comme remplie lorsque la juridiction enjoint à l'autorité administrative de réexaminer la demande présentée par le requérant.

5. Toutefois, le pétitionnaire ne peut bénéficier de façon définitive du mécanisme institué par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme que si l'annulation juridictionnelle de la décision de refus ou d'opposition est elle-même devenue définitive, c'est-à-dire, au sens et pour l'application de ces dispositions, si la décision juridictionnelle prononçant cette annulation est devenue irrévocable. Par suite, dans le cas où l'autorité administrative a délivré le permis sollicité ou pris une décision de non-opposition sur le fondement de ces dispositions, elle peut retirer cette autorisation si le jugement ou l'arrêt prononçant l'annulation du refus ou de l'opposition fait l'objet d'un sursis à exécution ou est annulé, sous réserve que les motifs de la nouvelle décision juridictionnelle ne fassent pas par eux-mêmes obstacle à un autre refus, dans le délai de trois mois à compter de la notification à l'administration de cette nouvelle décision juridictionnelle.

6. Par ailleurs, lorsque le juge annule un refus d'autorisation d'urbanisme, y compris une décision de sursis à statuer, ou une opposition à une déclaration, après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui, eu égard aux dispositions de l'article L 600-2 du code de l'urbanisme demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle. Lorsque le juge a prononcé une telle annulation dans les mêmes conditions mais qu'il s'est borné à enjoindre à l'autorité compétente de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire, il appartient à celle-ci de délivrer l'autorisation sous les mêmes réserves.

7. Pour refuser, par son arrêté du 25 février 2016 annulé par le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 avril 2018, de délivrer à M. B... le permis de construire demandé, le maire de Cap d'Ail s'était fondé sur les circonstances que l'avis émis par le service assainissement et pluvial de la métropole Nice Côte d'azur ne s'était pas prononcé sur le rejet des eaux pluviales du projet vers la voie publique, que le rapport géotechnique joint au dossier soulignait le caractère irréaliste du phasage des travaux, que le projet méconnaissait les dispositions des articles R. 111-5 et R. 111-27 du code de l'urbanisme et celles de l'article UD13 du règlement du plan local d'urbanisme. L'arrêté attaqué du 14 août 2018 est motivé, d'une part, par le fait que le projet prévoit l'excavation d'un volume de terres de 3 000 m3 dans une zone identifiée partie comme un secteur urbanisé sensible et partie comme une coulée verte par la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes, qu'il porte atteinte au principe de coupure d'urbanisation prévue par cette directive et qu'il a pour conséquence de supprimer un élément de type jardin en restanques dont la directive prévoit le maintien et la protection, d'autre part, par l'identification de la partie sud du terrain d'assiette en jardin à protéger au titre de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme par le plan local d'urbanisme dont la modification a été approuvée le 12 juillet 2016.

8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : / 1° Dans les communes littorales définies à l'article L. 321-2 du code de l'environnement (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-3 du même code : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, aménagements, installations et travaux divers, la création de lotissements, l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais et les installations classées pour la protection de l'environnement. " L'article L. 172-1 de ce code prévoit que : " Les directives territoriales d'aménagement approuvées avant le 13 juillet 2010 restent en vigueur. Elles sont soumises aux dispositions des articles L. 172-2 à L. 172-5. ". Aux termes de l'article L. 172-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Les directives territoriales d'aménagement conservent les effets suivants : / 1° Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec les directives territoriales d'aménagement ou, en l'absence de ces documents, avec les dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres Ier et II du titre II du présent livre. Il en va de même, en l'absence de schéma de cohérence territoriale, pour les plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu et les cartes communales ; / 2° Les dispositions des directives territoriales d'aménagement qui précisent les modalités d'application des dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres Ier et II du titre II du présent livre s'appliquent aux personnes et opérations qui y sont mentionnées ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si les auteurs des plans locaux d'urbanisme doivent s'assurer que les partis d'urbanisme présidant à l'élaboration des documents d'urbanisme mentionnés au 1° de l'article L. 172-2 sont compatibles, lorsqu'elles existent, avec les directives territoriales d'aménagement, seules les dispositions de ces directives qui ont pour objet de préciser les modalités d'application des dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne sont opposables aux demandes d'autorisation d'urbanisme portant sur des projets situés dans des territoires couverts par ces directives, sous réserve que ces prescriptions soient suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions.

9. Aux termes de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme, reprenant les dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 146-6 de ce code : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. ". Il résulte des dispositions de l'article L. 113-2 du même code que le classement en espaces boisés au titre de l'article L. 113-1 interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements.

10. La directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes, approuvée par décret du 2 décembre 2003, comporte une troisième partie relative aux orientations et aux modalités d'application des lois littoral et montagne, incluant un chapitre III-123 qui définit " les orientations et les modalités d'application de la loi littoral en matière de protection ". Le point III-123-2 relatif aux modalités d'application de la loi littoral distingue, parmi les catégories de protection prévues, les parcs et ensembles boisés les plus significatifs, qui sont situés essentiellement dans certains espaces identifiés sur la carte hors texte n° II "le Littoral", notamment les " parcs et jardins caractéristiques " et qui doivent être délimités et classés dans les documents d'urbanisme en tant qu'espaces boisés au titre de l'article L 130-1 du code de l'urbanisme. Il distingue aussi parmi ces catégories de protections les coupures d'urbanisation au titre de l'article L 146-2 du code de l'urbanisme, devenu l'article L. 121-22. Au point III-123-3, relatif aux " objectifs de protection des espaces naturels et agricoles ", la directive énonce que " les parcs et les jardins, publics ou privés, riches d'une végétation exotique et variée, sont des éléments caractéristiques du paysage de la Côte d'Azur qu'il convient de maintenir et de protéger. / Dans ces espaces, ne sont autorisés que l'adaptation, la réfection et l'extension mesurée des constructions existantes ainsi que les aménagements nécessaires à l'entretien et à la gestion de ces parcs et de ces jardins, dont les principaux boisements seront inscrits en espace boisé classé au titre de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme en application de l'article L. 146-6-4ème alinéa du code de l'urbanisme ". Ces dispositions doivent dans leur ensemble, eu égard à leur objet et quel que soit l'intitulé de leur emplacement respectif au sein de la troisième partie de cette directive, être regardées comme précisant les modalités d'application des dispositions particulières au littoral au sens du 2° de l'article L. 172-2 du code de l'urbanisme. A la date du 25 février 2016 à laquelle le maire de Cap d'Ail avait refusé la délivrance du permis de construire annulé par le jugement du 19 avril 2018, ces prescriptions, suffisamment précises et compatibles avec les dispositions particulières au littoral prévues par le code de l'urbanisme, étaient opposables à cette demande.

11. Il résulte de l'examen de la carte hors texte n° II annexée à la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes que le terrain d'assiette du projet litigieux ne s'inscrit pas dans l' " espace urbanisé sensible " représenté plus à l'est sur cette carte et ne constitue pas l'une des coupures d'urbanisation qu'elle indique. Néanmoins, en tenant compte de l'échelle de cette carte et de son degré de précision, il y est identifié, dans son intégralité, comme un " parc et jardin caractéristiques " au sens du point III-123-3 à la pointe sud-ouest d'un vaste espace délimité comme tel. Le plan local d'urbanisme de Cap d'Ail dans sa rédaction en vigueur à cette même date, classait déjà la parcelle cadastrée section AH n° 204, représentant la partie nord du terrain d'assiette, en espace boisé au titre de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme, ainsi que le prévoient la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes et l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme. Si la notice annexée à la demande de permis de construire indique que les travaux de terrassement entraînent l'évacuation d'un volume de 3 000 m3 de déblais, il résulte du plan de masse et des plans de coupe que ces travaux ne portent que sur l'emprise de la villa projetée, qui est située en partie sud du terrain d'assiette correspondant à la parcelle cadastrée section AH n° 209. Cette parcelle n'était pas classée en espace boisé au plan local d'urbanisme au titre de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme et il ne ressort pas des pièces du dossier que les travaux de terrassement et de construction du projet seraient de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements présents sur la parcelle cadastrée section AH n° 204 qui est couverte par cette protection. Cependant, le projet même porte sur la construction d'une maison individuelle d'une surface de 389 m² alors que la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes ne permet dans les parcs et jardins qu'elle identifie, que l'adaptation, la réfection et l'extension mesurée des constructions existantes ainsi que les aménagements nécessaires à l'entretien et à la gestion de ces parcs et jardins. Par suite, le maire de Cap d'Ail a pu légalement refuser d'accueillir la demande de permis de construire en se fondant sur les dispositions de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes citées au point 9 en vigueur à la date de l'arrêté du 25 février 2016 annulé, lesquelles faisaient obstacle à la délivrance du permis sollicité.

12. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de l'instance portée devant le tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2016, M. B... a présenté des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer la demande de permis de construire déposée le 4 décembre 2015 auxquelles le tribunal a fait droit par son jugement du 19 avril 2018. Le requérant doit donc être regardé comme ayant confirmé sa demande initiale. Dans ces conditions, alors même que l'annulation de l'arrêté du 25 février 2016 n'est devenue définitive qu'à la date de notification de l'ordonnance du 19 septembre 2018 par laquelle le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel de la commune à l'encontre de ce jugement, le maire de Cap d'Ail ne pouvait à nouveau rejeter la demande de permis en se fondant sur des dispositions d'urbanisme postérieures à la date du refus du 25 février 2016. Par suite, le maire n'a pu légalement se fonder, pour refuser la demande de permis de construire sur le classement, résultant du plan local d'urbanisme modifié le 12 juillet 2016, de la partie sud du terrain d'assiette en jardin à protéger au titre de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme, qui ne révèle pas une évolution des circonstances de fait. Les autres circonstances également mentionnées dans l'arrêté attaqué du 14 août 2018 que la modification du plan local d'urbanisme de la commune, engagée par délibération du 9 juillet 2015, était en cours à la date du 25 février 2016 et que le requérant ne s'est manifesté ni au moment de l'enquête publique commencée en janvier 2016, ni après l'approbation de cette modification sont sans incidence sur l'application des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme. Il résulte néanmoins de l'instruction que le maire de Cap d'Ail aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur le motif tiré de ce que les dispositions de la directive territoriale d'aménagement des Alpes-Maritimes faisaient obstacle à la délivrance du permis de construire.

Sur les conclusions indemnitaires :

13. L'illégalité de l'arrêté du 25 février 2016 statuant sur la demande de permis de construire déposée par M. B... le 4 décembre 2015 constitue une faute commise par la commune de Cap d'Ail. En revanche, l'illégalité fautive de cet arrêté ne peut être regardée comme étant à l'origine des préjudices subis par le requérant dès lors que le maire de Cap d'Ail aurait pu légalement refuser de délivrer le permis de construire en cause, comme il l'a d'ailleurs fait par l'arrêté du 14 août 2018, ainsi qu'il résulte des motifs énoncés aux points 3 à 12. Ainsi, cette circonstance est de nature à écarter l'engagement de la responsabilité de la commune de Cap d'Ail., dès lors que l'illégalité fautive de l'arrêté du 25 février 2016 ne peut être regardée comme étant à l'origine des préjudices subis par M. B....

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 août 2018 et à la condamnation de la commune de Cap d'Ail à réparer les préjudices résultant de l'illégalité alléguée des arrêtés du 25 février 2016 et du 14 août 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction présentées dans la requête n° 22MA00565 doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cap d'Ail, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, les sommes demandées par M. B..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la commune de Cap d'Ail.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 22MA00264 et n° 22MA00265 de M. B... sont rejetées.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Cap d'Ail une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Cap d'Ail.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Angéniol, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

Nos 22MA00564, 22MA00565 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00564
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Effets des annulations.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : SZEPETOWSKI;SZEPETOWSKI;SZEPETOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22ma00564 ?
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