Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 mai 2019 par lequel le ministre de l'intérieur a révoqué ses agréments en qualité de membre du comité de direction et de directeur responsable du casino Palm Beach devenu casino 3.14 à Cannes.
Par un jugement n° 1903391 du 5 avril 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 mai 2022, M. B... A..., représenté par Me Donat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 5 avril 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 mai 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige doit être qualifié de sanction et non de mesure de police administrative ;
- l'arrêté en litige a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l'homme, le principe du contradictoire et le principe du secret de l'enquête et de l'instruction ont été méconnus ;
- les motifs sur lesquels il se fonde ne sont pas établis ;
- la sanction qu'il prononce est disproportionnée ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire, enregistré le 6 février 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- l'arrêté ministériel du 14 mai 2007 modifié relatif à la réglementation des jeux dans les casinos ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rigaud ;
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Donat, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 5 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 14 mai 2019 par lequel le ministre de l'intérieur a révoqué les agréments qui lui étaient accordés en qualité de membre du comité de direction et de directeur responsable du casino Palm Beach devenu le casino 3.14 à Cannes.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Il résulte des dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code de la sécurité intérieure, issues de la loi du 15 juin 1907, réglementant le jeu dans les cercles et casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, que la police de cette activité est assurée par le ministre de l'intérieur. Le ministre peut, dans le cadre de ses pouvoirs, retirer au directeur l'agrément requis pour l'exercice de son activité par l'article L. 321-4 du code de la sécurité intérieure. Une décision de retrait d'agrément peut, compte tenu du but qu'elle poursuit avoir, selon le cas, le caractère d'une mesure de police ou celui d'une sanction.
3. Pour retirer, par l'arrêté en litige du 14 mai 2019, les deux agréments de M. A... obtenus respectivement en qualité de membre du comité de direction le 2 novembre 2015 et de directeur responsable le 26 janvier 2016, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur les motifs tirés, notamment, des manquements à la règlementation des jeux de l'intéressé dans ses fonctions de directeur, à savoir l'emploi de personnel non agréé en salle de jeux, l'absence de contrôle systématique aux entrées, l'existence d'irrégularités dans le fonctionnement des jeux dans les salons privés de l'établissement et le fait d'avoir accordé des facilités de paiement et crédits aux joueurs, pour en déduire, dans cet arrêté, que la nature des faits reprochés s'avérait incompatible avec les missions confiées à un directeur responsable mais également à un membre de comité de direction et qu'elle nécessitait qu'une mesure de police administrative soit prise à son encontre. Il résulte des termes mêmes de cet arrêté que le ministre, en décidant de retirer les deux agréments précités, a poursuivi l'objectif de préservation du bon ordre d'un établissement de jeux. Dès lors, les décisions prononcées par l'arrêté en litige du 14 mai 2019 portant retrait d'agrément, qui poursuivent l'objectif de préservation du bon ordre de l'établissement de jeux, revêtent, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, le caractère de mesures de police administrative.
4. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. / L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique. ". Aux termes de l'article L. 122-2 du même code : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ". Aux termes de l'article L. 211-2 du même code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ".
5. Aux termes de l'article 11 du code de procédure pénale : " Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète. / Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. / Toutefois, afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public, le procureur de la République peut, d'office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause. ". Aux termes de l'article 11-1 du même code : " Sur autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction selon les cas, peuvent être communiqués à des autorités ou organismes habilités à cette fin par arrêté du ministre de la justice, pris le cas échéant après avis du ou des ministres intéressés, des éléments des procédures judiciaires en cours permettant de réaliser des recherches ou enquêtes scientifiques ou techniques, destinées notamment à prévenir la commission d'accidents, ou de faciliter l'indemnisation des victimes ou la prise en charge de la réparation de leur préjudice. Les agents de ces autorités ou organismes sont alors tenus au secret professionnel en ce qui concerne ces informations, dans les conditions et sous les peines des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ". Aux termes de l'article 11-2 du même code : " I.- Le ministère public peut informer par écrit l'administration des décisions suivantes rendues contre une personne qu'elle emploie, y compris à titre bénévole, lorsqu'elles concernent un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement : / 1° La condamnation, même non définitive ; / 2° La saisine d'une juridiction de jugement par le procureur de la République ou par le juge d'instruction ; / 3° La mise en examen. / Le ministère public ne peut procéder à cette information que s'il estime cette transmission nécessaire, en raison de la nature des faits ou des circonstances de leur commission, pour mettre fin ou prévenir un trouble à l'ordre public ou pour assurer la sécurité des personnes ou des biens. / Le ministère public peut informer, dans les mêmes conditions, les personnes publiques, les personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public ou les ordres professionnels des décisions mentionnées aux 1° à 3° du présent I prises à l'égard d'une personne dont l'activité professionnelle ou sociale est placée sous leur contrôle ou leur autorité. (...) ".
6. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, les retraits d'agrément de membre du comité de direction et de directeur responsable décidés par l'arrêté du 14 mai 2019 en litige ne revêtent pas, en l'espèce, le caractère d'une sanction. Par suite, M. A... ne peut utilement soutenir que cet arrêté contesté serait irrégulier compte tenu du refus de communication de son dossier administratif qui lui a été opposé par les services du bureau des établissements de jeux, cette procédure étant prévue par les dispositions de l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration applicable uniquement en matière de sanction. Pour les mêmes motifs, à supposer même que le requérant puisse être regardé comme s'en prévalant, le principe général des droits de la défense n'est pas applicable à une mesure de police, pas davantage que les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 ou de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, par courrier en date du 5 mars 2019, le bureau des établissements de jeux a informé M. A... de ce qu'il était envisagé de lui retirer ses agréments en qualité de directeur responsable et membre du comité de direction, a mentionné l'ensemble des faits susceptibles de fonder ces mesures, et a invité ce dernier à faire valoir ses observations dans le délai de quinze jours et, le cas échéant, de lui faire savoir s'il sollicitait un entretien pour présenter des observations orales. Par courriers des 19 mars et 24 avril 2019, M. A... a formulé ses observations écrites et, le 24 avril 2019, il a fait valoir ses observations orales au cours d'un entretien à l'occasion duquel il était assisté par son avocat et auquel étaient présents la cheffe du bureau des établissements de jeux au ministère de l'intérieur, son adjointe, une rédactrice de ces services et le chef de la section contrôle du service central des courses et jeux (SCCJ). Enfin, M. A... ne peut utilement invoquer à l'encontre de la procédure suivie par le ministre pour l'édiction de l'arrêté en litige une prétendue violation du secret de l'instruction pénale. En tout état de cause, il ressort également des pièces du dossier que le procureur de la République en charge de l'enquête judiciaire visant le casino 3.14 à Cannes a transmis au directeur des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur, en application de l'article 11-2 du code de procédure pénale précité, certaines pièces de l'enquête judiciaire, en particulier les avis de procédure concernant M. A..., les rapports de synthèse intermédiaires et les rapports de synthèse établis par la SCCJ en charge de l'enquête judiciaire, ainsi que les auditions de MM. A... et Lamberti, afin de permettre au ministre de l'intérieur de faire usage de son pouvoir de police administrative. C'est donc sans méconnaître le secret de l'enquête et de l'instruction, comme l'a retenu à bon droit le tribunal administratif de Nice, que le ministre de l'intérieur s'est fondé sur les faits en cause pour édicter les mesures de retrait d'agréments contestés. La circonstance qu'un non-lieu général ait été prononcé par le juge d'instruction en charge de l'enquête visant le casino 3.14 pour les faits de détournements de fonds au préjudice de l'établissement de jeux, de perte de revenus fiscaux pour l'État, d'intéressement personnel à l'organisation et fonctionnement des parties, des délits de participation en bande organisée à la tenue d'une maison de jeux de hasard et blanchiment en bande organisée, est sans incidence sur la régularité de la procédure poursuivie pour l'édiction de l'arrêté du 14 mai 2019 en litige. Dès lors, le moyen tiré du défaut de respect du principe du contradictoire doit être écarté.
8. Aux termes de l'article 92 de l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la règlementation des jeux dans les casinos : " Registre spécial d'observations. / Dans chaque établissement, il est tenu un registre spécial d'observations (modèle n° 20) coté, paraphé et visé par le chef du service de la direction centrale de la police judiciaire territorialement compétent. / Les agents du ministère de l'intérieur chargés d'exercer une surveillance demandent communication de ce registre spécial toutes les fois qu'ils se rendent au siège de cet établissement pour y effectuer une opération de vérification quelconque. Ils y indiquent le jour et l'heure de leur visite ainsi que la nature des opérations effectuées, et consignent, s'il y a lieu, les observations, instructions ou injonctions qu'ils ont formulées. Le directeur responsable doit, dans le délai de huit jours, mentionner, en regard desdites observations, la suite qu'il y a été réservée. ".
9. La circonstance, alléguée par M. A..., que les faits retenus par le ministre pour fonder le retrait de ses agréments ne figureraient pas dans le registre spécial d'observations du casino prévu par les dispositions précitées de l'article 92 de l'arrêté du 14 mai 2017, est sans incidence sur le caractère contradictoire de la procédure suivie.
10. Aux termes de l'article 12 de l'arrêté du 14 mai 2007, dans sa version alors applicable : " Directeur responsable et membres du comité de direction. / I. - Le comité de direction de tout casino autorisé à pratiquer les jeux se compose de quatre membres au moins, y compris le directeur responsable. (...) / IV. - (...) Le directeur responsable du casino conserve, lorsqu'il en est ainsi, la pleine responsabilité du fonctionnement de l'établissement. (...) V. (...) / L'agrément du directeur responsable est national. En cas de changement d'établissement, il en informe préalablement le ministre de l'intérieur. Le titulaire ne peut quitter son poste tant qu'un nouveau directeur responsable agréé, ou qu'un directeur responsable par intérim choisi obligatoirement parmi les membres du comité de direction du même casino détenant un mandat social, n'a pas été désigné. Dans ce dernier cas, la proposition d'un titulaire doit intervenir dans les trois mois. / L'agrément des membres du comité de direction est national. Lors de l'agrément initial, chaque membre du comité de direction doit faire connaître au ministère de l'intérieur le ou les casinos où il souhaite être agréé en cette qualité et préciser l'établissement où il exercera réellement ses fonctions. S'il souhaite compléter ou modifier ces données, il devra en informer préalablement le ministère de l'intérieur pour pouvoir, le cas échéant, exercer ses fonctions dans un nouvel établissement. / Le ministre de l'intérieur peut donner un avertissement, suspendre ou révoquer le directeur responsable ou les membres du comité de direction, soit en cas d'inobservation du cahier des charges ou des prescriptions des arrêtés ministériels, soit pour des motifs d'ordre public. / La suspension ou la révocation impliquent, pour les intéressés, incapacité d'accomplir aucun acte de leur fonction. La révocation peut être assortie d'une interdiction de pénétrer dans les salles de jeux. (...). ". Aux termes de l'article 13 de cet arrêté, dans sa version alors applicable : " Obligations du directeur responsable et des membres du comité de direction. / Le directeur et les membres du comité de direction sont tenus de se conformer tant aux clauses du cahier des charges qu'à toutes les prescriptions de la loi du 15 juin 1907 modifiée, de l'arrêté d'autorisation, du décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 modifié et du présent arrêté. (...) ".
11. Aux termes de l'article R. 321-31 du code de la sécurité intérieure, dans sa version applicable au litige : " Le directeur responsable du casino engage, rémunère et licencie directement, en dehors de toute ingérence étrangère, toutes les personnes employées à un titre quelconque dans les salles de jeux. Préalablement à leur entrée en fonctions, les employés de jeux et les agents de vidéoprotection doivent être agréés par le ministre de l'intérieur. (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 321-27 du même code, dans sa version applicable au litige : " Toute personne désirant accéder aux salles de jeux est tenue de justifier de son identité. A cette fin, chaque établissement met en place un dispositif de contrôle systématique à l'entrée des salles de jeux. Ce contrôle est exercé dans tous les cas, que l'accès aux salles soit payant ou non. (...) ". Aux termes de l'article 25 de l'arrêté du 14 mai 2007 : " Admission dans les salles de jeux : / L'accès aux salles où fonctionnent les jeux d'argent et de hasard est subordonné à un contrôle systématique permettant d'identifier et de refuser l'admission des mineurs et des personnes interdites de jeux en application de l'article R. 321-28 du code de la sécurité intérieure. (...) ". Aux termes de l'article 26 de cet arrêté : " Les pièces permettant de justifier l'identité sont : Pour les nationaux, la carte nationale d'identité ou, à défaut, une autre pièce délivrée par l'autorité administrative, comportant une photographie, l'état civil et la signature du titulaire. / Une pièce nominative émise par le casino sur présentation desdits documents peut également être présentée, dans la mesure où la reconnaissance de l'intéressé est systématiquement opérée à chaque entrée. (...) ". En outre, aux termes de l'article R. 321-16 du même code, dans sa version applicable au litige : " Les jeux ne peuvent être pratiqués qu'argent comptant. Tout enjeu sur parole est interdit. / Les sommes sont représentées : / 1° Par des billets de banque et des pièces de monnaie ayant cours en France ; / 2° Par des jetons ou plaques fournis par l'établissement à ses risques et périls ; / 3° Par le moyen de tickets, de cartes de paiement précréditées ou de tout autre système monétique, d'un modèle préalablement agréé par le ministre de l'intérieur. (...) ".
12. Aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 14 mai 2007, dans sa version applicable au litige : " Personnel des jeux. / Préalablement à leur entrée en fonction, les employés de jeux, les personnes en charge du contrôle aux entrées, le contrôleur chargé de sécurité et les opérateurs de vidéoprotection doivent avoir été agréés. / L'agrément est accordé par le ministre de l'intérieur au vu d'un dossier transmis par le casino (...) ". Aux termes de l'article 55-10 du même arrêté : " Fonctionnement de la roulette anglaise : / (...) Un bloc de sept compartiments transparents, nettement séparés les uns des autres, et destinés à recevoir un jeton de couleur sans valeur déterminée sur lequel est placé le marqueur indiquant la valeur donnée aux jetons de cette couleur par le joueur est fixé en position surélevée à hauteur du rebord du cylindre. (...) L'employé chargé de la manœuvre de l'appareil doit obligatoirement actionner chaque fois le plateau mobile dans un sens opposé au précédent et lancer la bille dans le sens inverse. Dans le cas où un jeton vient à tomber dans le cylindre pendant le mouvement de rotation, le croupier doit arrêter le jeu, puis reprendre la bille et la lancer de nouveau. Tant que la force centrifuge retient la bille dans la galerie, les joueurs peuvent continuer à miser, mais dès que le mouvement de la bille se ralentit et que celle-ci est sur le point de tomber sur le cylindre, le croupier annonce "rien ne va plus". Dès lors, aucun enjeu ne peut plus être placé sur le tableau. A chaque coup, il doit, lorsqu'il n'est pas assisté par un employé, reconstituer les piles de jetons de couleur avant de lancer la bille. / Quand la bille est définitivement arrêtée dans l'une des trente-sept cases, le croupier annonce à haute voix le numéro et les chances simples gagnantes et le désigne ostensiblement au public. / (...) / Seules sont considérées comme ayant participé au jeu les mises effectivement placées sur le tableau au moment du "rien ne va plus". Exceptionnellement, un enjeu peut être représenté par des plaques et jetons de valeur si le change en jetons de couleur n'a pu se faire avant le "rien ne va plus". (...) "
13. Il ressort des pièces du dossier, qui ne sont pas utilement contredites, que M. A... a conclu, le 27 juin 2016, un contrat avec la société " NS VISION ", dirigée par M. C..., en vue d'assurer la maintenance des systèmes électriques et le renforcement du dispositif de sécurité du casino pour la période estivale de l'année 2016. Toutefois, M. C..., qui ne détenait pas de contrat de travail à son nom avec l'établissement de jeux ou d'autorisation d'agrément ministériel, est intervenu à plusieurs reprises en salle de jeux lors de divers incidents de sécurité les 25 juillet et 10 août 2016. Si M. A... soutient que ces faits ont été commis en 2016, le ministre de l'intérieur a pu légitimement fonder le premier motif sur lequel repose l'arrêté en litige en retenant ces faits comme établis.
14. Il ressort également des pièces du dossier que deux hommes de nationalité qatarie sont entrés en salle de jeux le 27 juillet 2016 sans que leur identité ait été préalablement contrôlée. De même, le 18 janvier 2018, un joueur interdit de jeux a pu s'inscrire pour participer à une table de poker. La circonstance que ce joueur n'a finalement pas pris part à la partie est sans incidence sur le manquement constaté à l'obligation de contrôler systématiquement l'identité des joueurs avant leur entrée en salle de jeux, comme l'imposent les dispositions précitées de l'article R. 321-27 du code de la sécurité intérieure et des articles 25 et 26 de l'arrêté du 14 mai 2017. Les deuxième et septième motifs retenus pour fonder l'arrêté en litige reposent donc sur des faits dont M. A... ne contredit pas utilement la réalité en se bornant à faire valoir, sans toutefois l'établir, qu'il était absent pour raisons familiales le 18 janvier 2018 et alors que l'article 13 de l'arrêté du 14 mai 2017 lui impose d'être présent dans l'établissement pendant les heures où se déroulent des jeux.
15. Il ressort des pièces du dossier que plusieurs manquements ont été constatés, en 2016 et en 2017, dans les salons privés de l'établissement relatifs à l'absence d'annonce ou d'annonce tardive du " rien ne va plus ", à l'acceptation d'enjeux sur parole et à l'acceptation de jetons de valeur sur les tableaux de la roulette anglaise, conduisant les croupiers à commettre des erreurs pouvant aller jusqu'au paiement indu de gains. Ces dysfonctionnements, qui fondent le troisième motif retenu par l'arrêté en litige, sont contraires aux dispositions précitées de l'article 55-10 de l'arrêté du 14 mai 2017 et ne sont pas utilement contredits par M. A....
16. Il ressort également des pièces du dossier, sans que cela soit utilement contesté par le requérant, que ce dernier a fait intervenir, au cours de la période estivale de l'année 2017, une masseuse dans les salles de jeux qui ne bénéficiait pas d'un agrément et qui était rémunérée en jetons de valeurs destinés aux mises. Le quatrième motif retenu par l'arrêté en litige apparaît donc fondé.
17. Compte tenu des faits ainsi retenus, dont la matérialité est établie par les pièces du dossier, étant donné leur nombre et leur gravité, et de la qualité et des fonctions de M. A..., le ministre de l'intérieur a pu légalement décider de prononcer le retrait des agréments accordés à ce dernier en qualité de membre du comité de direction et de directeur responsable du casino 3.14 à Cannes dans un objectif de préservation du bon ordre de l'établissement de jeux. Par suite, le ministre de l'intérieur n'a commis aucune erreur d'appréciation en décidant de révoquer les agréments de M. A....
18. Il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur le motif, dont la matérialité n'est pas établie, tiré de ce que la concession d'une partie de l'activité ludique à un prestataire extérieur constituait un affermage de fait, motif dont la matérialité n'est pas établie.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Cécile Fedi, présidente de chambre,
- Mme Lison Rigaud, présidente-assesseure,
- M. Nicolas Danveau, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2024.
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N° 22MA01546