La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/02/2024 | FRANCE | N°22MA00906

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 08 février 2024, 22MA00906


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... épouse D... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2007924 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 23 mars 2022, M. et Mme D..., représentés par Me Ferr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse D... et M. B... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2007924 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2022, M. et Mme D..., représentés par Me Ferrandi-Acquaviva, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 février 2022 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige.

Ils soutiennent que :

- les frais relatifs à la location par la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse de la maison située à Mallemort étaient déductibles, dès lors que les locaux étaient utilisés à des fins professionnelles ;

- c'est à tort que l'administration a estimé que la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse avait doublement comptabilisé les loyers de la maison située à Mallemort au titre de l'exercice clos en 2017, dès lors que les sommes déduites de son résultat correspondent à des honoraires versés au titre de dépenses d'études et de recherches en vue de la conception d'un véhicule innovant de boulangerie mobile ;

- c'est à tort que l'administration a remis en cause le remboursement par la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse de frais kilométriques ;

- l'administration n'était pas fondée à faire application des majorations pour manquement délibéré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mastrantuono,

- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... épouse D... était gérante et associée de la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, qui exerçait une activité de vente de fours professionnels fonctionnant avec des granulés de bois. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, tandis que M. et Mme D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces de leurs déclarations au titre des années 2016 et 2017. A l'issue de ces contrôles, des frais de location d'une maison d'habitation ainsi que des remboursements de frais kilométriques exposés par la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse ont été regardés par l'administration fiscale comme des revenus distribués au profit de Mme C... épouse D.... M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 24 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont ainsi été assujettis au titre des années 2016 et 2017, et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, (...) s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ". Si M. et Mme D... affirment avoir adressé des observations en réponse à la proposition de rectification datée du 27 juin 2019, dont il est constant qu'elle leur a été régulièrement notifiée, ils ne produisent aucun élément de nature à démontrer que la lettre datée du 10 juillet 2019 qu'ils versent aux débats aurait été effectivement adressée à l'administration, alors que cette dernière indique ne pas avoir reçu ces observations. Par suite, M. et Mme D..., qui doivent être regardés comme ayant tacitement accepté les rectifications, supportent, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge de démontrer le caractère exagéré des impositions supplémentaires.

En ce qui concerne les revenus distribués par la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse :

3. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " 1. Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

4. En premier lieu, à l'issue de la vérification de comptabilité de la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, l'administration fiscale a constaté la comptabilisation de frais de location refacturés par la société Solutions Professionnelles Biomasse (SPB), qui est un de ses associés, au titre d'une maison située à Mallemort (Bouches-du-Rhône). Estimant que ces dépenses, étrangères à l'activité de la société, avaient été exposées dans l'intérêt de sa gérante, l'administration a regardé les sommes correspondantes comme des revenus distribués au bénéfice de l'intéressée sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. Si M. et Mme D... produisent notamment un plan des locaux et le détail des stocks de la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse à la clôture des exercices 2016 et 2017, établis par leurs soins, ainsi que des photographies d'une pièce de stockage, d'un bureau et d'une chambre dont il n'est pas démontré qu'elles auraient été prises dans la maison en cause, ces seuls documents sont insuffisants pour démontrer que la maison prise en location aurait été utilisée même partiellement à des fins professionnelles, alors qu'il ressort du bail conclu entre la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse et la société SPB, d'une part, et le propriétaire de la maison, d'autre part, qu'il est relatif à une maison à usage d'habitation meublée comportant seulement, sur trois niveaux, des pièces à usage d'habitation, dont quatre chambres avec salle d'eau ou salle de bains, un garage et une piscine, et que le logement loué est destiné exclusivement à l'habitation, le locataire ne pouvant y exercer aucune activité professionnelle.

5. En deuxième lieu, l'administration, ayant constaté que la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse a déduit de son résultat de l'exercice clos en 2017 des honoraires, pour des montants mensuels correspondant au loyer relatif à la maison située à Mallemort, a regardé ces sommes, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, comme des revenus distribués au bénéfice de Mme C... épouse D... sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. Si les requérants soutiennent que ces honoraires ont été versés à la société SPB au titre de dépenses d'études et de recherches en vue de la conception d'un véhicule innovant de boulangerie mobile, ils ont produit pour la première fois devant la Cour une convention conclue entre la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse et la société SPB, datée du 17 mai 2016, selon laquelle sont confiés à la société SPB " l'étude de faisabilité technique, l'étude sur le four à charger dans le camion, la négociation des coûts de construction [et] le suivi de la construction avec les modifications d'un camion boulangerie avec four aux granulés de bois - PL 6,5 tonnes, pour un montant forfaitaire ne pouvant excéder 24'000 € HT ", des factures d'honoraires mensuelles émises par la société SPB, des échanges de courriels entre cette société et la société Hedimag, relatifs au projet, ainsi qu'une facture émise le 10 juillet 2018 par la société Hedimag, relative au véhicule. En outre, alors que la convention conclue entre la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse et la société SPB n'a pas date certaine, ces documents ne permettent pas de justifier la réalité des prestations qui auraient été réalisées par la société SPB, les échanges de courriels versés aux débats permettant d'ailleurs de constater que le projet a été conçu par la société Hedimag.

6. En troisième lieu, la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse a déduit des résultats des exercices clos en 2016 et 2017 des sommes de 48 406 euros et 41 728 euros correspondant à des frais kilométriques de sa gérante, calculés forfaitairement sur les bases de 75 659 km en 2016 et 105 114 km en 2017. Les requérants ne démontrent pas l'intérêt pour l'exploitation de ces dépenses en se bornant à produire des tableaux récapitulatifs de déplacements établis par leurs soins ainsi que des documents relatifs aux différents véhicules leur appartenant, alors qu'il n'est pas contesté que la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse a comptabilisé des frais de location et de crédit-bail au titre de véhicules.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... qui ne démontrent pas l'absence d'appréhension par Mme D..., gérante et associée de la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, des avantages occultes correspondant aux réintégrations opérées par l'administration fiscale dans les résultats de la société, n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré des impositions mises à leur charge sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

9. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme D... ont été assujettis, l'administration a notamment relevé que Mme C... épouse D..., qui détenait avec son époux, directement ou indirectement, la totalité du capital de la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, n'était soumise à aucun contrôle en ce qui concerne l'engagement des dépenses sociales, et notamment des dépenses afférentes à la mise à disposition d'une maison d'habitation et au remboursement de frais kilométriques dont elle ne pouvait ignorer le caractère non professionnel. Elle a également relevé le caractère répétitif de ces infractions. Dans ces conditions, l'administration établit la volonté de Mme C... épouse D... d'éluder l'impôt, justifiant l'application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse D... et M. B... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024.

2

N° 22MA00906


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00906
Date de la décision : 08/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : FERRANDI-ACQUAVIVA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-08;22ma00906 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award