Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Bes Systèmes Ecologiques Biomasse a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2016 et 2017 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 2008015 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mars 2022, la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, représentée par Me Ferrandi-Acquaviva, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 février 2022 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige.
Elle soutient que :
- les frais relatifs à la location de la maison située à Mallemort et la taxe sur la valeur ajoutée correspondante étaient déductibles, dès lors que les locaux étaient utilisés à des fins professionnelles ;
- c'est à tort que l'administration a estimé qu'elle a doublement comptabilisé les loyers de la maison située à Mallemort au titre de l'exercice clos en 2017, dès lors que les sommes déduites de son résultat correspondent à des honoraires versés au titre de dépenses d'études et de recherches en vue de la conception d'un véhicule innovant de boulangerie mobile ;
- c'est à tort que l'administration a remis en cause le remboursement de frais kilométriques ;
- l'administration n'était pas fondée à faire application des majorations pour manquement délibéré.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet la requête.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable, en l'absence de tout élément relatif à l'information du liquidateur judiciaire de la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse ;
- les moyens soulevés par la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, qui exerçait une activité de vente de fours professionnels fonctionnant avec des granulés de bois, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée jusqu'au 31 décembre 2018. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a notamment remis en cause la déduction de frais de location refacturés et de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante, ainsi que de remboursements de frais kilométriques. La SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse relève appel du jugement du 24 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a ainsi été assujettie au titre des exercices clos en 2016 et 2017, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018, et des pénalités correspondantes.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
2. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, (...) s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ". Si la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse affirme avoir adressé des observations en réponse à la proposition de rectification datée du 24 juin 2019, dont il est constant qu'elle lui a été régulièrement notifiée, elle ne produit aucun élément de nature à démontrer que la lettre datée du 10 juillet 2019 qu'elle verse aux débats aurait été effectivement adressée à l'administration, alors que cette dernière indique ne pas avoir reçu ces observations. Par suite, la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse, qui doit être regardée comme ayant tacitement accepté les rectifications, supporte, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, la charge de démontrer le caractère exagéré des impositions supplémentaires.
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :
3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".
4. En premier lieu, la déduction par la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse de frais de location refacturés par la société Solutions Professionnelles Biomasse (SPB), qui est un de ses associés, au titre d'une maison située à Mallemort (Bouches-du-Rhône) a été remise en cause par l'administration, au motif que ces dépenses sont étrangères à l'activité de la société. Si la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse produit notamment un plan des locaux et le détail de ses stocks à la clôture des exercices 2016 et 2017, établis par ses soins, ainsi que des photographies d'une pièce de stockage, d'un bureau et d'une chambre dont il n'est pas démontré qu'elles auraient été prises dans la maison en cause, ces seuls documents sont insuffisants pour démontrer que la maison prise en location aurait été utilisée, même partiellement, à des fins professionnelles, alors qu'il ressort du bail conclu entre la société requérante et la société SPB, d'une part, et le propriétaire de la maison, d'autre part, qu'il est relatif à une maison à usage d'habitation meublée comportant seulement, sur trois niveaux, des pièces à usage d'habitation, dont quatre chambres avec salle d'eau ou salle de bains, un garage et une piscine, et que le logement loué est destiné exclusivement à l'habitation, le locataire ne pouvant y exercer aucune activité professionnelle. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction des frais de location de la maison située à Mallemort.
5. En deuxième lieu, la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse a déduit de son résultat de l'exercice clos en 2017 des honoraires, pour des montants mensuels correspondant au loyer relatif à la maison située à Mallemort. La déduction de ces charges a été remise en cause par l'administration, au motif que les loyers avaient fait l'objet d'une double comptabilisation. Si la société requérante soutient que ces honoraires ont été versés à la société SPB au titre de dépenses d'études et de recherches en vue de la conception d'un véhicule innovant de boulangerie mobile, elle a produit pour la première fois devant le tribunal administratif, en décembre 2021, une convention conclue avec la société SPB, datée du 17 mai 2016, selon laquelle sont confiés à cette société " l'étude de faisabilité technique, l'étude sur le four à charger dans le camion, la négociation des coûts de construction [et] le suivi de la construction avec les modifications d'un camion boulangerie avec four aux granulés de bois - PL 6,5 tonnes, pour un montant forfaitaire ne pouvant excéder 24'000 € HT ", des factures d'honoraires mensuelles émises par la société SPB, des échanges de courriels entre cette société et la société Hedimag, relatifs au projet, ainsi qu'une facture émise le 10 juillet 2018 par la société Hedimag, relative au véhicule. En outre, alors que la convention conclue avec la société SPB n'a pas date certaine, ces documents ne permettent pas de justifier la réalité des prestations qui auraient été réalisées par la société SPB, les échanges de courriels versés aux débats permettant d'ailleurs de constater que le projet a été conçu par la société Hedimag. Dans ces conditions, l'administration a pu à bon droit remettre en cause la déduction des charges correspondant aux honoraires comptabilisés par la société Bes Systèmes Ecologiques Biomasse au titre de l'exercice clos en 2017.
6. En troisième lieu, la société requérante a déduit des résultats des exercices clos en 2016 et 2017 des sommes de 48 406 euros et 41 728 euros correspondant à des frais kilométriques de sa gérante, calculés forfaitairement sur les bases de 75 659 km en 2016 et 105 114 km en 2017. La société requérante ne démontre pas l'intérêt pour l'exploitation de ces dépenses en se bornant à produire des tableaux récapitulatifs de déplacements établis par ses soins ainsi que des documents relatifs aux différents véhicules appartenant à sa gérante et à l'époux de cette dernière, alors qu'il n'est pas contesté qu'elle a comptabilisé des frais de location et de crédit-bail au titre de véhicules. Par suite, c'est à bon droit que le service vérificateur a remis en cause la déduction de ces frais kilométriques pour la détermination des résultats de la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse.
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
7. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) ".
8. Si la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse conteste les rappels de la taxe sur la valeur ajoutée relative aux frais de location de la maison située à Mallemort, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les dépenses correspondantes n'ont pas été engagées dans l'intérêt direct de son exploitation. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces dépenses.
Sur les pénalités :
9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
10. En relevant la répétition des minorations de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée au cours de l'ensemble de la période vérifiée, qui procèdent de l'absence de justification de la taxe déductible, et la déduction de ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés de charges non justifiées au cours des deux exercices en cause, l'administration établit le caractère délibéré des manquements de la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse. Dans ces conditions, l'administration justifie du bien-fondé de l'application à la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse de la majoration pour manquement délibéré prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner ni la fin de non-recevoir opposée par le ministre, ni la recevabilité des conclusions à fin de décharge des intérêts de retard, que la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Bes Systèmes Ecologiques Biomasse est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à la responsabilité limitée Bes Systèmes Ecologiques Biomasse et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 février 2024.
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N° 22MA00889