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01/02/2024 | FRANCE | N°23MA02571

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 01 février 2024, 23MA02571


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :





M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 août 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2205596 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.





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Par une requête enregistrée le 27 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Almairac, demande à la Cour :



1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 août 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2205596 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Almairac, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 31 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 24 août 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut de motivation et d'examen sérieux de sa situation ;

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de fait ;

- le préfet a méconnu les dispositions des articles L. 423-22, L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La procédure a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 29 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. d'Izarn de Villefort a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen, a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 24 août 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il relève appel du jugement du 31 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française. ".

3. Lorsqu'elle examine une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de ces dispositions, l'autorité préfectorale vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, elle ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., né le 25 février 2003, a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance des Alpes-Maritimes par une ordonnance du 2 janvier 2019, soit avant le jour de ses seize ans. Il ne conteste pas les mentions figurant dans l'arrêté attaqué selon lesquelles il a été donné mainlevée de son placement à la suite d'une fugue, ce placement ayant été rétabli à la suite d'une ordonnance du 25 janvier 2020. S'il a été inscrit à deux stages de mise en situation en milieu professionnel du 17 au 29 juin 2019 et en novembre 2020, il ne conteste pas davantage qu'il n'a effectué que l'un des deux, par suite de l'expiration de son attestation CMU. Inscrit à la mission locale pour l'emploi de Nice depuis le 20 octobre 2020, il ne justifie d'aucune participation à un stage ou une formation quelconque, en dépit du souhait exprimé auprès de la mission locale le 19 juillet 2022 de préparer un certificat d'aptitude professionnelle " employé de commerce multispécialités (ECM) ". Il ne peut utilement se prévaloir de la proposition d'embauche au sein d'un atelier d'adaptation à la vie active qui lui a été proposée par la Fondation de Nice le 28 novembre 2022, postérieurement à l'arrêté attaqué. S'il produit une attestation de l'association PAJE selon laquelle il n'a jamais manifesté un comportement violent ou agressif lors de sa prise en charge dans les différentes structures gérées par cette association, le préfet a fait référence dans son arrêté au rapport social du 12 janvier 2021 établi par la Fondation de Nice, en qualité de structure d'accueil faisant état notamment d'excès de colères constatés dans les précédentes structures et de la persistance d'une réticence à respecter les règles liées à l'institution et d'absences du logement. En outre, il est constant que ses parents et sa sœur vivent dans son pays d'origine. Dans ces conditions, bien que le handicap résultant de la malformation d'une main soit de nature à restreindre l'accès de l'intéressé à certaines formations, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

6. Si le préfet a refusé à M. A... la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute de répondre aux conditions fixées par cet article, il résulte de ces dispositions que seuls les étrangers qui n'entrent pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 peuvent s'en prévaloir. Tel n'est pas le cas de l'intéressé qui entre dans la catégorie prévue à l'article L. 423-22. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. A..., est entré irrégulièrement en France le 25 octobre 2018. Il ne se prévaut de la présence en France d'aucun membre de sa famille et n'établit pas davantage être dépourvu de toutes attaches en Guinée. Lui-même est célibataire. Il n'a pas été scolarisé en France et n'a pas suivi de formation professionnelle. Eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, en dépit de l'activité de bénévolat dont il fait état, la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire contesté ne peuvent être regardés comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, de même que, pour le même motif, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa situation personnelle.

7. En troisième lieu, le préfet des Alpes-Maritimes a mentionné dans son arrêté que M. A... est connu défavorablement des services de police pour " escroquerie faite au préjudice d'un organisme de protection sociale pour l'obtention d'une allocation ou prestation indue ", les faits ayant été commis à Toulouse le 12 septembre 2019. Il en a déduit que le requérant ne remplissait pas les conditions d'insertion et d'attachement aux valeurs et aux règles de la république française visées aux articles L. 435-3 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 30 juin 2022 devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a annulé un premier arrêté du 8 octobre 2021 statuant sur la demande de titre de séjour de M. A... et l'obligeant à quitter le territoire français pour défaut d'examen sérieux, eu égard au cumul de deux erreurs de fait tenant à la date de son entrée en France et à la mention des faits précités. M. A... soutient sans être contredit, le préfet n'ayant pas présenté de mémoire en défense, qu'il ne s'est jamais rendu à Toulouse. Il résulte cependant de l'instruction que le préfet aurait également refusé de délivrer un titre de séjour au requérant s'il s'était fondé seulement sur les autres motifs.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

9. Au vu des circonstances énoncées au point 6, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant au requérant la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Almairac et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Angéniol, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2024.

N° 23MA02571 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02571
Date de la décision : 01/02/2024

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : ALMAIRAC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;23ma02571 ?
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