Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C..., Mme D... A... épouse C... et la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) ont demandé au tribunal administratif de Toulon, en premier lieu, d'annuler la décision implicite par laquelle le président de la métropole Toulon-Provence-Méditerranée (TPM) a rejeté leur demande présentée le 28 mars 2019 tendant à ce que cette métropole réalise les travaux de confortement du mur soutenant la rue Victor-Gelu-prolongée, située au Sud-Est de leur propriété, et les indemnise des préjudices qu'ils estiment avoir subis, en deuxième lieu, d'enjoindre à la métropole TPM de réaliser ces travaux, en troisième lieu, de la condamner à verser, d'une part, aux consorts C..., la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice moral qu'ils estiment avoir subi et celle de 8 904 euros au titre de la restitution de la haie végétale qui borde ce mur, et, d'autre part, à la MAIF, la somme de 4 625,47 euros au titre des frais d'expertise engagés et, en quatrième et dernier lieu, de mettre à la charge de la métropole TPM la somme 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1903290 du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Toulon a, d'une part, et après avoir annulé cette décision implicite, enjoint à la métropole TPM de réaliser ces travaux dans un délai de six mois à compter de la notification de ce jugement, d'autre part, condamné cette métropole à verser à la MAIF la somme de 4 625,47 euros et, enfin, mis à la charge de ladite métropole la somme totale de 2 000 euros à verser à M. et Mme C..., et à la MAIF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, avant de rejeter le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 mai 2022 et 7 mars 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Bauducco, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 14 avril 2022 en tant qu'il rejette leurs conclusions indemnitaires afférentes à l'abattage, au dessouchage et à la replantation de leur haie qui borde le mur en cause ;
2°) à titre principal, et dans l'hypothèse où cet abattage, ce dessouchage et cette replantation s'avèreraient nécessaires à la réalisation des travaux de confortement de ce mur, d'enjoindre à la métropole TPM de procéder à cet abattage et ce dessouchage, à ses frais, et de remettre en état cette haie par la plantation d'arbres similaires ou, à titre subsidiaire, de condamner cette même métropole à leur verser la somme de 8 904 euros, à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir, correspondant au montant de ces travaux d'abattage, de dessouchage et de replantation ;
3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de la métropole TPM la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les condamner à prendre à leur charge la destruction d'une partie de leur propriété et sa remise en état ultérieure, pour permettre à la personne publique d'accéder à un ouvrage dont elle a négligé l'entretien, n'est admissible ni intellectuellement, ni financièrement ; l'équité mettra à la charge de la métropole TPM les travaux d'arrachage des végétaux ou le remboursement de cette intervention, de même que l'indemnisation permettant la restitution du jardin dans son état d'origine ;
- la loi du 29 décembre 1892 prévoit l'indemnisation de tous les préjudices qui pourraient être causés à la propriété privée dans le cadre de la réalisation de travaux publics ;
- les arbres et les arbustes dont il est demandé l'arrachage étant déjà présents sur le terrain en 1958 alors que la voie en cause n'était pas classée dans le domaine public communal : ces circonstances emportent prescription de leur implantation pendant trente ans ;
- un homme de l'art a évalué ces travaux à la somme de 8 904 euros.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 23 février et 17 mars 2023, la métropole Toulon-Provence-Méditerranée (TPM), représentée par Me Phelip, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. et de Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal :
. le jugement attaqué du tribunal administratif de Toulon devra être confirmé dès lors que la haie en cause est irrégulièrement implantée, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 116-2 du code de la voirie routière ;
. M. et Mme C... ne justifient pas pouvoir se prévaloir d'une prescription trentenaire ; à supposer que les plantations soient antérieures au classement de la rue limitrophe dans le domaine public, elles auraient été implantées en méconnaissance des dispositions de l'article 671 du code civil ;
. en tout état de cause, dès lors que cette haie constitue une entrave à l'exercice du droit qu'elle détient sur le mur de soutènement de la voie publique, elle est fondée à demander à M. et à Mme C... de procéder à son enlèvement ;
- à titre subsidiaire, les sommes réclamées sont excessives et le préjudice ne saurait dépasser le remplacement de dix lauriers, pour un montant total de 700 euros et un coût de main d'œuvre de 250 euros.
La procédure a été communiquée à la MAIF qui n'a pas présenté de mémoire.
Par une ordonnance du 8 mars 2023, la clôture de l'instruction, initialement fixée au 15 mars 2023, a été reportée au 31 mars 2023, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lombart,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lhotellier, substituant Me Bauducco, représentant M. et Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... sont les propriétaires de la parcelle cadastrée section BI n° 10, sise 97 impasse Victor-Gelu, sur le territoire de la commune de Toulon, et sur laquelle est implantée leur maison d'habitation. Au cours de l'année 2011, ils ont constaté que le mur situé en bordure de la partie Sud-Est de leur propriété, le long de la rue Victor-Gélu-prolongée, présentait des signes de fragilité. Après que l'expert de justice désigné par une ordonnance n° 1202245 du juge des référés du tribunal administratif de Toulon du 10 mars 2013, afin de rechercher tous éléments relatifs aux causes et conséquences de ces désordres, a rendu son rapport le 20 février 2015, et que, statuant au fond, cette même juridiction a, par un jugement n° 1603135 du 7 mars 2019, rejeté leur première demande en indemnisation, M. et Mme C... ont, par une lettre du 28 mars 2019, demandé au maire de Toulon de réaliser les travaux de confortement du mur litigieux et présenté une nouvelle réclamation indemnitaire préalable. Sans réponse de la part du président de la métropole Toulon-Provence-Méditerranée (TPM), à laquelle la commune de Toulon avait transféré sa compétence en matière de voirie, M. et Mme C... ont de nouveau saisi le tribunal administratif de Toulon, qui, par son jugement susvisé du 14 avril 2022, a relevé que ce mur, qui est destiné à soutenir la voie publique passant en surplomb de leur terrain, constituait l'accessoire de cette voie et présentait le caractère d'un ouvrage public dont la métropole TPM était la gardienne. Après avoir jugé que la responsabilité de cette métropole était à ce titre engagée, ledit tribunal a, par ce même jugement, annulé la décision implicite née du silence gardé par le président de la métropole TPM sur leur demande du 28 mars 2019 et a enjoint à cet établissement public de coopération intercommunale de réaliser les travaux destinés à conforter ce mur. Le tribunal administratif de Toulon a toutefois rejeté les conclusions présentées par M. et Mme C... tendant à ce qu'ils soient indemnisés du préjudice résultant des travaux nécessaires à l'abattage et au dessouchage de la haie bordant ce mur, puis à sa replantation. Dans la présente instance, M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement dans cette seule mesure.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il rejette les conclusions présentées par M. et Mme C... tendant à ce qu'ils soient indemnisés du préjudice résultant des travaux nécessaires à l'abattage, au dessouchage et au replantation de leur haie :
2. Dans son rapport déposé le 20 février 2015, l'expert de justice désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a, conformément à la mission qui lui avait alors été confiée, décrit les travaux nécessaires à la remise en état du mur de soutènement de la rue Victor-Gélu-prolongée, situé en bordure de la propriété de M. et Mme C..., et en a chiffré le coût et la durée. A ce titre, il a estimé que la solution appropriée consisterait à démolir puis à reconstruire ce mur tout en soulignant qu'il s'agirait de travaux lourds et coûteux, et avant de proposer, " avec l'accord de M. et de Mme C... ", " une solution confortative ", par le biais de l'implantation de huit contreforts avec une saillie assez réduite et une poutre horizontale dénommée " lierne ". Par leur jugement attaqué du 14 avril 2022, les premiers juges ont ainsi seulement enjoint à la métropole TPM, comme au demeurant le demandaient expressément les consorts C..., notamment dans leur lettre du 28 mars 2019, de réaliser ces travaux de confortement. Or, s'il résulte de l'instruction, et en particulier de ce même rapport d'expertise, que des travaux complets de démolition et de reconstruction de ce mur ne pourraient être réalisés sans que la haie bordant cet ouvrage ne soit détruite, il n'en résulte pas qu'il en soit de même s'agissant de ces simples travaux de confortement. Par conséquent, M. et Mme C... n'établissent pas davantage devant la Cour qu'en première instance le caractère certain du préjudice afférent à l'abattage, au dessouchage et à la replantation de la haie bordant le mur de soutènement en cause. Leurs conclusions afférentes ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
3. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs conclusions tendant à ce qu'ils soient indemnisés du préjudice résultant des travaux nécessaires à l'abattage, au dessouchage et au replantation de leur haie.
Sur les frais liés au litige :
4. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
5. D'une part, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la métropole TPM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
6. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions par la métropole TPM.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la métropole TPM tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Mme D... A... épouse C..., à la métropole Toulon-Provence-Méditerranée et à la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF).
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Lombart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.
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No 22MA01449
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