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07/11/2023 | FRANCE | N°21MA04823

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 07 novembre 2023, 21MA04823


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, la commune de Linguizzetta et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler, d'une part, la délibération n° 2019-20 du 25 juin 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte administratif de l'année 2018 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente, d'autre part, la délibération n° 2019-19 du 25 juin 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente

a approuvé le compte de gestion de l'année 2018 de l'office de tourisme in...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par trois requêtes distinctes, la commune de Linguizzetta et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler, d'une part, la délibération n° 2019-20 du 25 juin 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte administratif de l'année 2018 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente, d'autre part, la délibération n° 2019-19 du 25 juin 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte de gestion de l'année 2018 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente, et, enfin, la délibération n° 2019-21 du 25 juin 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le budget primitif 2019 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente.

Par un jugement n° 1901154, 1901155 et 1901156 du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Bastia a rejeté les demandes de la commune de Linguizzetta et de M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 décembre 2021 et 16 mai 2023, la commune de Linguizzetta et M. A..., représentés par Me Muscatelli, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901154, 1901155 et 1901156 du 19 octobre 2021 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) d'annuler les délibérations du 25 juin 2019 par lesquelles le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte administratif de l'année 2018, le compte de gestion de l'année 2018, et le budget primitif 2019 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes de l'Oriente la somme de 3 000 euros à verser à la commune de Linguizzetta en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les délibérations attaquées sont entachées d'un défaut d'information de l'assemblée délibérante en raison de l'absence de présentation du budget primitif, du compte de gestion et du compte administratif aux élus ;

- elles sont intervenues en méconnaissance de l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales en l'absence d'indication du sens du vote des élus ;

- ils sont recevables et fondés à soulever l'exception d'illégalité de la délibération du 23 décembre 2010 portant création de l'office de tourisme ; cette délibération est illégale, d'une part en ce qu'elle fixe une assise institutionnelle incertaine pour l'office et méconnaît l'article L. 133-2 du code de tourisme, d'autre part en ce qu'elle le qualifie à tort d'établissement public industriel et commercial, et que c'est en raison de cette qualification erronée que les délibérations attaquées ont trait à la taxe de séjour ;

- les délibérations sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent les dispositions de l'article L. 2224-1 du code général des collectivités territoriales dès lors que le budget est en suréquilibre en investissement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 juillet 2022 et 13 juin 2023, la communauté de communes de l'Oriente, représentée par Me Chaussade, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens tirés de l'exception d'illégalité de la délibération du 23 décembre 2010 et de la violation de l'article L. 2224-1 du code général des collectivités territoriales sont irrecevables ;

- les autres moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 juin 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 juillet 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire, enregistré le 11 juillet 2023, présenté pour la commune de Linguizzetta et M. A... par Me Muscatelli, n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de tourisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- les observations de Me de Casalta-Bravo, substituant Me Muscatelli, représentant les requérants,

- et les observations de Me Robbe, substituant Me Chaussade, représentant la communauté de communes de l'Oriente.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Linguizzetta et M. A... relèvent appel du jugement n° 1901154, 1901155 et 1901156 du 19 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de trois délibérations du 25 juin 2019 par lesquelles le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte administratif de l'année 2018, le compte de gestion de l'année 2018, et le budget primitif 2019 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente.

2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales, rendues applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale par l'article L. 5211-1 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération. ". En application de ces dispositions, le président d'un établissement public de coopération intercommunale est tenu de communiquer aux membres du conseil communautaire les documents nécessaires pour qu'ils puissent se prononcer utilement sur les affaires soumises à leur délibération.

3. D'une part, la circonstance que le budget primitif, le compte de gestion et le compte administratif transmis par les services du contrôle de légalité n'ont pas été signés par les membres du conseil communautaire n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer qu'ils n'ont pas été présentés aux élus le 25 juin 2019. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que les conseillers communautaires ont été informés, par une convocation adressée par courriel du 18 juin 2019, de l'ordre du jour de la séance du conseil du 25 juin 2019 au cours de laquelle ont été débattues les délibérations contestées. Par ce même courriel, leur étaient transmises plusieurs pièces parmi lesquelles les trois projets de délibérations en litige ainsi que le compte administratif 2018 et le budget primitif de 2019 de l'office de tourisme. S'il est exact qu'il ne ressort pas clairement de ce courriel que le compte de gestion de l'année 2018 aurait été communiqué en intégralité avant la séance du 25 juin 2019, ni même les " résultats des activités commerciales " de l'office de tourisme, la délibération approuvant le compte de gestion, sur laquelle est apposée la signature de l'ensemble des conseillers ayant siégé à cette séance, comporte la présentation de ce compte en faisant apparaitre les recettes, les dépenses et le résultat de l'exercice. Il ne ressort par ailleurs d'aucune des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas même allégué, qu'un ou plusieurs conseillers, s'estimant insuffisamment informé, aurait vainement demandé la communication de documents supplémentaires au président de l'établissement public de coopération intercommunale avant la réunion du conseil communautaire au cours duquel les délibérations en litige ont été adoptées.

4. D'autre part, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 5 du jugement attaqué, le moyen tiré de ce que les annexes obligatoires constitués de l'état de la dette, de l'équilibre des opérations financières et de l'état du personnel, n'ont pas été joints, que les appelants réitèrent en cause d'appel sans apporter d'éléments nouveaux, ni critique utile de ce jugement.

5. Enfin, la circonstance que l'annexe concernant la taxe de séjour ne serait pas conforme à la maquette budgétaire demeure, par elle-même et en l'absence de toute autre précision, sans incidence sur la légalité des délibérations attaquées dès lors que les appelants n'indiquent pas en quoi, à la supposer même établie, cette circonstance aurait été constitutive, dans les circonstances de l'espèce, d'une méconnaissance du droit à l'information des conseillers communautaires.

6. Par suite, le moyen tiré du défaut d'information des élus doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales, dans sa version applicable au litige et également rendues applicables au fonctionnement de l'organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale par l'article L. 5211-1 du même code : " (...) Le registre des délibérations comporte le nom des votants et l'indication du sens de leur vote. (...) ".

8. Ainsi que l'on jugé à bon droit les premiers juges, les irrégularités entachant, le cas échéant, la transcription sur le registre des délibérations est sans incidence sur la légalité de la délibération. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent de l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales est inopérant et ne peut qu'être écarté.

9. En troisième lieu, pour écarter le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la délibération du 23 décembre 2010 par laquelle le conseil communautaire de l'Oriente a créé l'office de tourisme sous la forme d'un établissement public de coopération intercommunale, le tribunal administratif de Bastia a jugé que ce moyen était inopérant, les délibérations attaquées ne constituant pas des actes pris pour l'application de la délibération du 23 décembre 2010, laquelle ne constitue pas davantage leur base légale. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la seule circonstance qu'aucun acte de gestion, budget primitif ou compte administratif ne saurait valablement être pris en l'absence d'une délibération ayant créé l'établissement public ne saurait, par elle-même, être de nature à regarder cette dernière comme constituant la base légale des délibérations approuvant le budget primitif, le compte administratif et le compte de gestion de l'établissement. Une telle circonstance n'est pas davantage de nature à regarder ces mêmes délibérations comme étant des mesures d'application de la délibération ayant créé l'établissement public dont il s'agit. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité, inopérant, doit être écarté, et ce sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense.

10. En quatrième lieu, les délibérations attaquées n'ont eu ni pour objet, ni pour effet d'instaurer la taxe de séjour sur le territoire de la communauté de communes. Par suite, à supposer que les appelants aient entendu soulever, à l'encontre des trois délibérations du 25 juin 2019 attaquées par voie d'action dans la présente instance, le moyen tiré de l'illégalité de la taxe de séjour instaurée au bénéfice de l'office de tourisme de l'Oriente, un tel moyen, inopérant, ne peut qu'être écarté.

11. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 2224-1 du code général des collectivités territoriales : " Les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés par les communes, doivent être équilibrés en recettes et en dépenses. ". Aux termes de l'article L. 133-7 du code de tourisme : " Le budget de l'office comprend en recettes le produit notamment : (...) / 4° De la taxe de séjour ou de la taxe de séjour forfaitaire (...) ". Enfin, l'article L. 133-8 de ce même code dispose que " Le budget et les comptes de l'office, délibérés par le comité de direction, sont soumis à l'approbation du conseil municipal. ".

12. La circonstance que le budget primitif 2019 de l'office de tourisme de l'Oriente dégage un excédent en fonctionnement, qui résulte de l'inscription d'une recettes d'un montant de 483 875,20 euros correspondant à des titres émis à l'encontre de la commune de Linguizzetta en vue de recouvrir le produit de la taxe de séjour pour les années 2015 à 2018, ne saurait, par elle-même, révéler que la délibération procédant à son approbation serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, l'instruction budgétaire et comptable M4, applicable aux services publics industriels et commerciaux dont les requérants entendent se prévaloir, précisant au demeurant, en son titre III relatif au cadre budgétaire, qu'il n'est pas en soi illégal que le budget d'un service public industriel et commercial dégage un excédent. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, un tel moyen doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leurs demandes d'annulation des délibérations du 25 juin 2019 par lesquelles le conseil communautaire de la communauté de communes de l'Oriente a approuvé le compte administratif de l'année 2018, le compte de gestion de l'année 2018, et le budget primitif 2019 de l'office de tourisme intercommunal de l'Oriente. Par suite, leurs conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge solidaire des appelants une somme de 2 000 euros à verser à la communauté de communes de l'Oriente au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Linguizzetta et de M. A... est rejetée.

Article 2 : La commune de Linguizzetta et M. A... verseront solidairement une somme de 2 000 euros à la communauté de communes de l'Oriente en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Linguizzetta, à M. B... A... et à la communauté de communes de l'Oriente.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 novembre 2023.

N° 21MA04823 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA04823
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Coopération - Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales - Communautés de communes.

Collectivités territoriales - Coopération - Finances des organismes de coopération - Dispositions communes.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Tourisme - Offices de tourisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : CABINET MUSCATELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-11-07;21ma04823 ?
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