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30/10/2023 | FRANCE | N°22MA01065

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 30 octobre 2023, 22MA01065


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Entreprise Rénovation Génie civil (ERGC) a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de La Croix-Valmer à lui payer la somme de 82 494 euros en règlement du solde du décompte général d'un marché public qui lui avait été attribué.

Par un jugement n° 1901901 du 17 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à cette demande, et rejeté les demandes présentées par la commune à titre reconventionnel.

Procé

dure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2022, et quatre mémoires en défen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée Entreprise Rénovation Génie civil (ERGC) a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de La Croix-Valmer à lui payer la somme de 82 494 euros en règlement du solde du décompte général d'un marché public qui lui avait été attribué.

Par un jugement n° 1901901 du 17 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à cette demande, et rejeté les demandes présentées par la commune à titre reconventionnel.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2022, et quatre mémoires en défense enregistrés le 20 août 2022, le 14 mars 2023, le 19 mars 2023 et le 31 mars 2023, la commune de La Croix-Valmer, représentée par Me Linditch, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la société ERGC à lui verser une indemnité de 272 720,37 euros, à parfaire ;

3°) de mettre à la charge de la société une somme de 5 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la résiliation aux torts du groupement était régulière et justifiée, pour le seul des motifs ayant fait l'objet de la mise en demeure ;

- la facture en date du 28 janvier 2019 n'est pas un projet de décompte ;

- elle a droit à être indemnisée du préjudice occasionné par les manquements contractuels de la société ERGC, mandataire solidaire ;

- le groupement n'a droit à aucune somme au titre des prestations de conception réalisées, qui se sont révélées inutiles ;

- elle doit être indemnisée des différentes dépenses exposées par elle en lien avec la réalisation du marché ;

- les moyens présentés par la société ERGC à l'appui de ses propres demandes sont infondés.

Par trois mémoires en défense, enregistrés le 14 juin 2022, le 8 mars 2023 et le 24 mars 2023, la société ERGC, représentée par Me Jacquemin, demande à la Cour :

1°) à titre principal :

- de rejeter la requête de la commune ;

- de juger que la résiliation du marché est irrégulière et illégale ;

- de condamner la commune à lui payer la somme de 82 494 euros au titre du solde du marché ;

- de mettre à sa charge la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) à titre subsidiaire :

- de condamner les sociétés AetD Conception, AetD Architecture, MGI, Studere, Construction Métallique Auer, Métallerie Chevalier, Instinct Nature et ERG Etudes et Recherches Géotechniques à la relever et garantir de toutes condamnations, à tout le moins à hauteur des sommes perçues au titre de leurs prestations ;

- de fixer au passif de la société MGI son éventuelle créance.

Elle soutient que :

- la résiliation repose sur des griefs qui n'ont fait l'objet d'aucune mise en demeure ;

- le maire n'était pas compétent pour décider la résiliation du marché ;

- la procédure de constat contradictoire des ouvrages exécutés n'a pas été suivie ;

- la résiliation est injustifiée ;

- la commune souhaitait abandonner le projet ;

- sa responsabilité ne peut être recherchée à la place de celle de ses cotitulaires ;

- la résiliation n'a pas été prononcée à ses frais et risques ;

- la commune ne peut se faire rembourser des dépenses correspondant à des prestations qui lui restent acquises ;

- elle ne justifie pas des montants invoqués par la production de simple devis ;

- en cas de condamnation, elle doit être relevée et garantie par ses cotitulaires.

Par une lettre en date du 20 février 2023, la Cour a informé les parties qu'il était envisagé d'inscrire l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu d'ici le 31 décembre 2023, et que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance à compter du 15 mars 2023.

Par ordonnance du 7 avril 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Renaud Thielé, rapporteur,

- les conclusions de M. François Point, rapporteur public,

- et les observations de Me Linditch, pour la commune de La Croix-Valmer, et de Me Jacquemin, pour la société ERGC.

Connaissance prise de la note en délibéré, présentée pour la société ERGC et enregistrée au greffe le 18 octobre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par contrat conclu le 20 mars 2018, la commune de La Croix-Valmer (Var) a confié à un groupement constitué de la société ERGC, des sociétés AetD Architecture et AetD Conception, de la société MGI, de la société Studere, de la société Construction Métallique Auer, de la société Métallerie Chevalier, de la société Instinct Nature et de la société ERG, un marché public ayant pour objet la conception et la réalisation d'un parc de stationnement aérien. Le 21 mars 2019, le maire de la commune a décidé la résiliation pour faute de ce marché. La société ERGC, mandataire du groupement, a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui payer la somme de 82 494 euros correspondant au solde du projet de décompte final présenté par la société ERGC et correspondant aux prestations réalisées. Par le jugement attaqué, dont la commune relève appel, le tribunal administratif a, en premier lieu, estimé que la résiliation du contrat aux torts du groupement était irrégulière. Il a, en deuxième lieu, fait droit à la demande pécuniaire présentée par la société ERGC, et correspondant au montant des travaux réalisés par le groupement. Il a, en troisième lieu, rejeté les demandes reconventionnelles présentées par la commune au titre de la responsabilité contractuelle, au motif qu'il ne résultait pas de l'instruction que les retards et surcoûts ayant affecté le chantier seraient imputables à la société ERGC.

1. Sur la validité de la mesure de résiliation :

1.1. En ce qui concerne le cadre juridique :

2. Aux termes de l'article 45 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, qui est au nombre des documents contractuels en vertu de l'article 2.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Le représentant du pouvoir adjudicateur peut mettre fin à l'exécution des prestations faisant l'objet du marché avant l'achèvement de celles-ci (...) pour faute du titulaire dans les conditions prévues à l'article 46.3. (...) ". Aux termes de l'article 46 de ce cahier : " 46. 3. 1. Le représentant du pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : (...) c) Le titulaire, dans les conditions prévues à l'article 48, ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels, après que le manquement a fait l'objet d'une constatation contradictoire et d'un avis du maître d'œuvre, et si le titulaire n'a pas été autorisé par ordre de service à reprendre l'exécution des travaux (...) ".

3. La circonstance que le contrat ne prévoit la résiliation pour faute du contrat qu'en cas de retard dans la réalisation des travaux, et après avis du maître d'œuvre, et non en cas de retard dans la réalisation des études de conception, ne saurait priver la commune du droit de procéder à la résiliation du contrat en pareille hypothèse, après avoir invité le cocontractant à s'acquitter de ses obligations contractuelles, comme le prévoient les stipulations de l'article 48 du cahier des clauses administratives générales. Dans ce cas toutefois, seule, une faute d'une gravité suffisante est de nature à justifier la résiliation du contrat au tort exclusif de son titulaire.

1.2. En ce qui concerne la régularité de la mesure de résiliation :

1.2.1. S'agissant de la compétence du signataire :

4. Aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. (...) ". Aux termes de l'article L. 2122-22 du même code : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget (...) ".

5. Par une délibération du 15 février 2018, le conseil municipal de La Croix-Valmer a délégué à son maire le soin " (...) 4/ De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés (...) ".

6. Cette délégation habilitait le maire de la commune à décider la résiliation d'un marché public, qui constitue une mesure concernant l'exécution d'un marché au sens des dispositions précitées de l'article L. 2122-22.

1.2.2. S'agissant du constat contradictoire :

7. Aux termes de l'article 47.1.1 du cahier des clauses administratives générales : " 47.1.1. En cas de résiliation, il est procédé, le titulaire ou ses ayants droit, tuteur, administrateur ou liquidateur, dûment convoqués dans les conditions prévues par les documents particuliers du marché, aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier. Il est dressé procès-verbal de ces opérations dans les conditions prévues à l'article 12. Ce procès-verbal comporte l'avis du maître d'œuvre sur la conformité aux dispositions du marché des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés. / Ce procès-verbal est signé par le maître de l'ouvrage. Il emporte réception des ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, avec effet de la date d'effet de la résiliation, tant pour le point de départ du délai de garantie défini à l'article 44 que pour le point de départ du délai prévu pour le règlement final du marché à l'article 13.3.2. ".

8. Ce procès-verbal contradictoire a pour seul objet de constater les ouvrages et parties d'ouvrages exécutés. La résiliation étant intervenue alors que le marché était encore dans la phase de conception, cette formalité ne pouvait trouver à s'appliquer. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut donc être utilement invoqué à l'encontre de la mesure de résiliation.

1.2.3. S'agissant de la mise en demeure préalable :

9. Aux termes de l'article 48 du cahier des clauses administratives générales : " 48.1. A l'exception des cas prévus aux articles 15.2.2, 15.4 et 47.2, lorsque le titulaire ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, le représentant du pouvoir adjudicateur le met en demeure d'y satisfaire, dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. / Ce délai, sauf pour les marchés intéressant la défense ou en cas d'urgence, n'est pas inférieur à quinze jours à compter de la date de notification de la mise en demeure. / 48.2. Si le titulaire n'a pas déféré à la mise en demeure, la poursuite des travaux peut être ordonnée, à ses frais et risques, ou la résiliation du marché peut être décidée. (...) ".

10. La mise en demeure adressée au groupement le 13 février 2019 porte seulement sur la communication du calendrier détaillé prévu par l'article 4.2 du cahier des clauses administratives particulières du marché. La société est donc fondée à soutenir que les autres griefs énoncés dans la décision de résiliation ne pouvaient régulièrement l'être.

1.3. En ce qui concerne le bien-fondé de la résiliation :

11. Aux termes de l'article 4.2 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Calendrier prévisionnel d'exécution / Par dérogation à l'article 28.2 du cahier des clauses administratives générales, le titulaire doit établir pendant l'Avant-Projet et au plus tard dans le mois qui suit la notification du premier ordre de service de démarrage un calendrier détaillé qui s'inscrit dans le délai global. Une fois approuvé par le Maître d'ouvrage, ce calendrier sera notifié au groupement pour devenir contractuel. Ce calendrier fera apparaître le chemin critique et les dates clés (pour chaque phase technique, fin des travaux d'infrastructure et de superstructure par sous-groupes d'ouvrages, hors d'eau, hors d'air, début des [opérations préalables à la réception], fin des travaux, mise à disposition anticipée de parties d'ouvrages, etc.) dont le nom respect pourra entraîner l'application de pénalités de retard. / Le calendrier détaillé devra donner les dates et détails de réalisation des différentes prestations qui correspondent à la décomposition des pris. Il devra faire apparaître également les dates de remise des documents nécessaires à leur exécution ".

12. En vertu de l'article 5 de l'acte d'engagement, conclu le 20 mars 2018, la société ERGC, agissant en qualité de mandataire du groupement solidaire de conception-réalisation, s'est engagée à livrer le parking aérien, objet du marché, " pour septembre 2019 ". En vertu de l'article 4.2 du cahier des clauses administratives particulières du marché, le titulaire devait établir, pendant la phase d'avant-projet, ou au plus tard dans le mois suivant la notification du premier ordre de service de démarrage, un calendrier détaillé s'inscrivant dans ce délai global et ayant portée contractuelle.

13. Si rien n'indique que la commune a adressé au groupement un ordre de service de démarrage, il résulte de l'instruction que la phase de réalisation de l'avant-projet a pris fin, au plus tard, à la date du 6 juin 2018, à laquelle la demande de permis de construire a été présentée.

14. En application des stipulations précitées, la société ERGC a alors dressé un planning prévisionnel le 16 mai 2018. Toutefois, la société ERGC a indiqué dans son courrier du 15 février 2019 que ce planning était devenu " caduc " compte tenu du retard pris au cours de l'année 2018. La commune, de son côté, a renoncé à infliger des pénalités à raison de la méconnaissance des différents délais fixés par ce planning, se bornant à solliciter de la société qu'elle établît un nouveau calendrier prévisionnel. Les parties doivent être regardées comme ayant renoncé, d'un commun accord, à ce premier calendrier. Le groupement conservait toutefois l'obligation d'établir un nouveau calendrier s'inscrivant dans le planning global imposant l'achèvement des travaux " pour le mois de septembre 2019 " comme le prévoyait l'acte d'engagement.

15. Invitée par la commune à établir un nouveau planning détaillé, la société a dressé, le 17 janvier 2019, un planning faisant état de délais mais sans mentionner les dates correspondantes. En dépit d'une mise en demeure du 13 février 2019, le groupement n'a pas établi le nouveau calendrier détaillé, mais s'est borné, dans son courrier du 15 février 2019, à indiquer à la commune que " le point de démarrage [de ce] planning est (...) la validation de la nouvelle [décomposition du prix global et forfaitaire intégrant l'ensemble des problématiques non anticipables déjà évoquées] ". Ce planning, qui indiquait des délais mais sans mentionner de date, ne répondait pas aux stipulations contractuelles.

16. Si la société ERGC fait état de difficultés, énumérées dans son courrier du 28 novembre 2018, et notamment d'inexactitudes dans le plan des réseaux fournis et de problèmes liés à l'application des règles de sécurité incendie, elle n'établit pas, ni même n'allègue sérieusement que ces difficultés, fréquentes dans les marchés de ce type, auraient le caractère d'un cas de force majeure rendant impossible l'exécution de ses obligations contractuelles, ou même qu'elles mettaient le groupement de conception-réalisation dans l'impossibilité de respecter le délai global contractuellement stipulé. Si elle se réfère aux écritures de la société ERGC, géotechnicienne, laquelle fait état d'un retard dans la réalisation de l'étude géotechnique de projet qu'elle impute à la transmission tardive des descentes de charges attendues en tête des fondations, cette transmission tardive était nécessairement imputable aux membres du groupement chargés de la conception du projet.

17. Il ressort de ces divers éléments que l'absence d'établissement du calendrier détaillé, requis par les stipulations contractuelles, et qui conditionnait la poursuite de la bonne exécution du marché, s'explique par la volonté de la société ERGC de faire pression sur la commune pour qu'elle accepte la demande de rémunération complémentaire sollicitée par le groupement, qui souhaitait porter le prix global et forfaitaire du marché de 2 275 004,40 euros à 3 734 388,27 euros toutes taxes comprises, soit une augmentation de 64,1 %. La faute ainsi relevée était d'une gravité qui justifiait, à elle seule et indépendamment des autres griefs mentionnés dans la décision du 21 mars 2019, la résiliation du contrat aux torts exclusifs du groupement.

2. Sur le solde du marché :

2.1. En ce qui concerne l'étendue de la responsabilité de la société ERGC :

18. Il ressort de l'acte d'engagement du marché, en son article 2, que le groupement titulaire du marché est un groupement solidaire. La responsabilité de la société ERGC peut donc être engagée à raison de l'ensemble des conséquences préjudiciables des fautes contractuelles commises par les différents membres du groupement. Compte tenu de l'effet relatif des contrats, la convention de groupement, qui est un contrat de droit privé par lequel les membres du groupement fixent la répartition des tâches entre eux, est sans influence sur la solidarité ainsi souscrite.

2.2. En ce qui concerne la rémunération des prestations réalisées par le groupement :

19. Les prestations réalisées en exécution d'un contrat avant sa résiliation doivent normalement être rémunérées sur la base des prix du marché. Toutefois, dans le cas où certaines prestations, et notamment des prestations d'étude, sont privées d'utilité en raison de la résiliation du contrat, et que cette résiliation est prononcée aux torts exclusifs du titulaire, ce dernier n'a pas droit à être rémunéré des prestations en cause, qui ont été rendues inutiles par sa seule faute.

20. La commune de La Croix-Valmer soutient, sans être sérieusement contredite, que les différentes études réalisées par le groupement titulaire du marché, qui n'avaient pas commencé la réalisation des travaux, n'ont pu lui être d'aucune utilité. Elle est donc fondée à solliciter la restitution des quatre acomptes qu'elle avait versés au groupement, pour des montants respectifs, toutes taxes comprises, de 62 728,50 euros, 45 030 euros, 19 642,20 euros et 45 950,55 euros, soit un total de 173 351,25 euros, et non 182 475 euros comme elle le soutient. Pour les mêmes raisons, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge la somme de 82 494 euros correspondant au reliquat des prestations, énumérées par la facture établie le 28 janvier 2019.

2.3. En ce qui concerne les autres dépenses supportées par la commune :

21. Alors même que la résiliation a le caractère d'une résiliation pour faute et non de la résiliation aux frais et risques prévue par l'article 48.4 du cahier des clauses administratives générales, cette circonstance, si elle interdit à l'administration de mettre à la charge de la société les conséquences onéreuses du marché de substitution, ne fait pas obstacle à l'indemnisation des autres préjudices qui sont directement en lien avec la faute ayant justifié la résiliation.

22. La commune de La Croix-Valmer a droit à être indemnisée des différentes dépenses supportées et dont elle démontre qu'elles correspondent à des prestations qui ont été privées de toute utilité du fait de la résiliation.

23. La commune fait valoir, sans être contredite sur ce point, qu'elle s'est adjoint les services d'un assistant à maîtrise d'ouvrage pour l'accompagner dans la direction du marché de conception réalisation. Cette dépense, d'un montant non sérieusement contesté de 16 963,20 euros, a été exposée en pure perte en raison de la résiliation du marché. La commune a donc droit à en être indemnisée.

24. En revanche, la commune de La Croix-Valmer n'établit, ni même ne soutient que les autres dépenses exposées, dans le cadre de la réalisation du projet, correspondraient à des prestations rendues inutiles du fait de la résiliation du marché.

25. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de La Croix-Valmer est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a fait droit à la demande de la société ERGC et a rejeté ses demandes reconventionnelles, qu'il y a lieu d'accueillir à hauteur de la somme de 190 314,45 euros (173 351,25 euros + 16 963,20 euros).

3. Sur les appels en garantie :

26. En se bornant à faire état de la " responsabilité " de ses cotitulaires, sans justifier ni même caractériser la moindre faute de leur part, la société ERGC n'établit aucun droit à être relevée et garantie des condamnations prononcées.

4. Sur les frais liés au litige :

27. L'article L. 761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce qu'une somme quelconque soit laissée à la charge de la commune de La Croix-Valmer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société ERGC une somme de 2 500 euros à verser à la commune en remboursement des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1901901 du 17 février 2022 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : La demande à laquelle cet article fait droit est rejetée.

Article 3 : La société ERGC est condamnée à verser à la commune de La Croix-Valmer une somme de 190 314,45 euros au titre du solde du décompte de liquidation du marché public attribué au groupement dont elle était mandataire.

Article 4 : L'article 2 du jugement du 17 février 2022 est annulé en tant qu'il rejette cette demande.

Article 5 : La société ERGC versera à la commune de La Croix-Valmer une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Croix-Valmer et à la société Entreprise Rénovation Génie Civil (ERGC).

Copie en sera adressée à la société AetD Architecture, à la société AetD Conception, à Me Lefort, mandataire judiciaire de la société MGI, à la société Studere, à la société Construction Métallique Auer, à la société Métallerie Chevalier, à la société Instinct Nature et à la société ERG Etudes et Recherches Géotechniques.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2023, où siégeaient :

- M. Alexandre Badie, président,

- M. Renaud Thielé, président assesseur,

- Mme Isabelle Gougot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 octobre 2023.

N° 22MA01065 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01065
Date de la décision : 30/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Résiliation.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés - Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: M. Renaud THIELÉ
Rapporteur public ?: M. POINT
Avocat(s) : LINDITCH

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-30;22ma01065 ?
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